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Urteil Kantonsgericht (VD)

Zusammenfassung des Urteils HC/2021/533: Kantonsgericht

Die Chambre des recours civile des Tribunal cantonal hat entschieden, dass der Beklagte Q.________ der Klägerin S.________ die Summe von 3'000 CHF ohne Zinsen zahlen muss. Die Gerichtskosten wurden auf 750 CHF festgelegt und dem Beklagten auferlegt. Der Vertrag zwischen den Parteien über die Erstellung einer Website war aufgrund der mangelnden Geschäftsfähigkeit der Klägerin ungültig. Q.________ hat gegen dieses Urteil Berufung eingelegt, die jedoch abgewiesen wurde. Die Klägerin war unter Vormundschaft gestellt und hatte den Vertrag nicht ratifiziert. Der Richter M. Pellet leitete das Verfahren.

Urteilsdetails des Kantongerichts HC/2021/533

Kanton:VD
Fallnummer:HC/2021/533
Instanz:Kantonsgericht
Abteilung:
Kantonsgericht Entscheid HC/2021/533 vom 28.06.2021 (VD)
Datum:28.06.2021
Rechtskraft:
Leitsatz/Stichwort:
Schlagwörter : été; ’il; ’intimée; était; ’elle; Internet; écision; éfendeur; écembre; égal; ’est; ’avait; éposé; Engage; énéral; érêt; êté; édure; énérale; état; éter; Engager; édé; Chambre; éalisation
Rechtsnorm:Art. 100 BGG;Art. 111 ZPO;Art. 123 ZPO;Art. 19 ZGB;Art. 19b ZGB;Art. 308 ZPO;Art. 319 ZPO;Art. 320 ZPO;Art. 321 ZPO;Art. 398 ZGB;Art. 452 ZGB;Art. 74 BGG;Art. 95 ZPO;Art. 97 BGG;
Referenz BGE:-
Kommentar:
Spühler, Schweizer, Basler Schweizerische Zivilprozessordnung, Art. 320; Art. 319 ZPO, 2017

Entscheid des Kantongerichts HC/2021/533

TRIBUNAL CANTONAL

JJ20.004260-210815

184



CHAMBRE DES RECOURS CIVILE

_____________________

Arrêt du 28 juin 2021

__________

Composition : M. Pellet, président

M. Sauterel et Mme Crittin Dayen, juges

Greffière : Mme Robyr

*****

Art. 19, 19b al. 1, 452 al. 3 CC ; 18 al. 1, 42 al. 2 CO ; 319 let. a CPC

Statuant à huis clos sur le recours interjeté par Q.____, à [...], défendeur, contre la décision finale rendue le 10 décembre 2020 par la Juge de paix du district de Nyon dans la cause divisant le recourant d’avec S.____, à [...], demanderesse, la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal considère :


En fait :

A. Par décision finale du 10 décembre 2020, dont les motifs ont été envoyés aux parties pour notification le 20 avril 2021, la Juge de paix du district de Nyon a dit que le défendeur Q.____ devait verser à la demanderesse S.____ la somme de 3'000 fr. sans intérêt (I), a arrêté les frais judiciaires à 750 fr. (II) et les a mis à la charge du défendeur (III), a dit que ce dernier rembourserait à la demanderesse ses frais liés à la procédure de conciliation, par 300 fr. (IV) et a rejeté toutes autres ou plus amples conclusions (V).

En droit, le premier juge a constaté que la demanderesse était sous curatelle de portée générale lorsqu’elle avait conclu, le 15 juin 2018, un contrat avec Q.____ ayant pour objet la réalisation d’un site Internet. Privée de l’exercice des droits civils, elle ne pouvait s’engager seule et le contrat était donc imparfait et devait être ratifié par son représentant légal, ce qui n’avait pas été fait. Partant, le défendeur lui devait le remboursement du montant de 3'000 fr. qu’elle lui avait versé, en application de l’art. 19b al. 1 CC.

B. Par acte du 19 mai 2021, Q.____ a recouru contre cette décision en concluant, avec suite de frais, à sa réforme en ce sens qu’il ne doive aucun montant à S.____.

Par réponse du 21 juin 2021, le Service des curatelles et tutelles professionnelles (ci-après : SCTP), par délégation de F.____, curatrice de S.____, a conclu au rejet du recours, avec suite de frais.

C. La Chambre des recours civile fait sien dans son entier l'état de fait de la décision, complété par les pièces du dossier, dont il ressort notamment ce qui suit :

1. S.____ est sous curatelle de portée générale (art. 398 CC) depuis le 5 mai 2017. La Justice de paix du district de Lausanne a nommé [...], assistant social auprès du SCTP, en qualité que curateur.

2. A une date indéterminée, Q.____ et S.____ sont entrés en pourparlers afin que le premier réalise en faveur de la deuxième un site Internet destiné à ses activités de voyance. Les parties ont notamment échangé des courriels en ce sens le 12 juin 2018.

Le 15 juin 2018, Q.____ et S.____ ont signé un document intitulé « acompte de payement pour réalisation de site Internet » dont la teneur est la suivante :

« J’ai reçu de Mme S.____, la somme de CHF 3'000.comme acompte pour la réalisation de son site Internet.

Il demeure une facture ouverte d’une valeur de CHF 500.payable à la livraison du site Internet. »

Q.____ n’a pas été informé de la curatelle de portée générale de S.____, ni préalablement au contrat, ni au moment de sa conclusion, ni pendant l’exécution du contrat.

Le curateur de S.____ n’a pas ratifié ce contrat.

3. Le 29 janvier 2019, S.____ a déposé plainte pénale contre Q.____. Elle a notamment produit à l’appui de sa plainte une copie des très nombreux échanges WhatsApp qu’elle a eus avec Q.____ entre novembre 2018 et janvier 2019 concernant le site Internet, ainsi que des courriels échangés les 12 juin et 22 décembre 2018.

Par décision du 14 mars 2019, le Procureur du Ministère public de l’arrondissement de Lausanne a rendu une ordonnance de non-entrée en matière, considérant que les faits allégués par la plaignante relevaient d’un litige purement civil.

4. Le 15 avril 2019, S.____ a déposé personnellement, sans mention de sa représentante légale, une requête de conciliation auprès de la Justice de paix du district de Nyon. Elle a conclu à ce que Q.____ lui fournisse un site Internet en fonction ou lui rembourse son paiement avec intérêts, soit 6'000 francs. Elle a expliqué ce qui suit sous la mention « objet du litige » :

« Ce Monsieur devait me faire un site Internet pouvant me permettre d’engager du personnel, permettant aux clients de payer en prépaie et élargir ma clientèle au niveau international.

Il devait me fournir mon site en 1 mois.

Au mois de décembre 2018, le site ne fonctionnait toujours pas. Je voulais mon remboursement CHF 3'000.- du jour au lendemain 12 décembre 2018 le site fonctionnait (sic).

Au mois de janvier, je me suis fâchée, il est parti en supprimant les 3 sites et il m’a volé mes 3'000.-

J’ai une perte financière de 6'000.plus la perte de chiffre d’affaire conséquente.

Je veux soit mon site, soit mon remboursement. »

Une audience de conciliation a été fixée au 6 juin 2019 par la Juge de paix du district de Nyon, à laquelle ont été cités à comparaître S.____ et Q.____.

Lors de l’audience de conciliation, la juge de paix a appris que S.____ était sous curatelle de portée générale, de sorte qu’il n’a pu être donné suite à la requête de conciliation.

5. En août 2019, F.____ a été désignée curatrice de S.____ en remplacement d’[...]. Par décision du 26 août 2019, la Juge de paix du district de Lausanne a autorisé la curatrice à mandater un avocat, ainsi qu’à plaider et transiger dans le cadre de la procédure en affaire pécuniaire opposant S.____ à Q.____.

Par courrier du 3 décembre 2019, la curatrice de S.____, par le SCTP, a précisé les conclusions de la requête de conciliation du 15 avril 2019 en ce sens que Q.____ soit condamné à verser à S.____ la somme de 3’000 fr. plus intérêt à 5% l’an dès le 15 avril 2019.

Q.____ a déposé des déterminations le 19 décembre 2019. Il a fait valoir qu’il n’avait appris que bien après la conclusion du contrat que S.____ était sous curatelle et qu’il avait exécuté correctement son travail mais que celui-ci avait été modifié à plusieurs reprises sur demande de celle-ci ou suite à ses modifications et pertes d’informations. Il a conclu au rejet des conclusions de la requérante.

Une audience de conciliation s’est déroulée le 10 janvier 2020. Ensuite de l’échec de la tentative de conciliation, la Justice de paix du district de Nyon a délivré, le 16 janvier 2020, une autorisation de procéder à la demanderesse.

6. Le 29 janvier 2020, S.____, représentée par sa curatrice, a déposé auprès de la Justice de paix du district de Nyon une action en paiement à l’encontre de Q.____. Elle a repris les conclusions de sa requête de conciliation.

Par réponse du 6 mars 2020, Q.____ a conclu au rejet de la demande. Il a fait valoir que la demanderesse dirigeait une « PME d’appels téléphoniques surtaxés » et que la curatrice et le juriste du SCTP avaient connaissance de cette activité. Il a allégué que la somme de 3'000 fr. était le fruit du travail d’indépendante de la demanderesse en tant que « voyante » et n’était pas issue de son revenu social. Il a soutenu également que le contrat conclu était destiné à augmenter les revenus de la demanderesse et qu’il avait travaillé de bonne foi à l’élaboration du site Internet.

Des déterminations ont été déposées le 11 mars 2020 par [...], juriste du SCTP, pour la demanderesse.

Lors de l’audience du 29 juin 2020, [...] a souligné que le contrat entre les parties était boiteux, qu’il n’avait pas été valablement conclu et qu’il n’avait pas été ratifié par la curatrice. Q.____ a réaffirmé qu’il était de bonne foi et qu’il avait effectué un travail qui n’avait été rémunéré que partiellement. Il a expliqué avoir eu des frais de serveur. Il a requis l’édition des décomptes d’exploitation du numéro de téléphone utilisé par la demanderesse. La juge de paix a rejeté dite requête au motif que la demanderesse n’était pas titulaire du numéro de téléphone.


En droit :

1.

1.1 Le recours est recevable contre les décisions finales de première instance qui ne peuvent pas faire l’objet d’un appel (art. 319 let. a CPC), soit notamment dans les affaires patrimoniales dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions, est inférieure à 10'000 fr. (cf. art. 308 al. 2 CPC).

Le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l’instance de recours, soit en l'occurrence la Chambre des recours civile (art. 73 al. 1 LOJV [loi vaudoise d'organisation judiciaire du 12 décembre 1979 ; BLV 173.01]), dans les 30 jours à compter de la notification de la décision motivée ou de la notification postérieure de la motivation (art. 321 al. 1 CPC).

1.2 En l’espèce, formé en temps utile par une partie qui a un intérêt digne de protection (art. 59 al. 2 let. a CPC), dans une cause dont la valeur litigieuse est inférieure à 10'000 fr., le recours est recevable.

2. Le recours est recevable pour violation du droit et constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). S'agissant de la violation du droit, l'autorité de recours dispose d'un plein pouvoir d'examen (Spühler, Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 3e éd., Bâle 2017, n. 26 ad art. 319 CPC). Elle revoit librement les questions de droit soulevées par le recourant et peut substituer ses propres motifs à ceux de l'autorité précédente ou du recourant (Hohl, Procédure civile, tome II, 2e éd., Berne 2010, n. 2508). Comme pour l’art. 97 al. 1 LTF (Loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 ; RS 173.110), le grief de la constatation manifestement inexacte des faits ne permet que de corriger une erreur évidente, la notion se recoupant en définitive avec l’appréciation arbitraire des preuves (Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2e éd., 2019, [CR-CPC] n. 5 et 6 ad art. 320 CPC ; Corboz, Commentaire de la LTF, 2e éd., Berne 2014, n. 27 ad art. 97 LTF).


3.

3.1

3.1.1 Dans un premier moyen, le recourant soutient que le contrat aurait été conclu entre lui d’une part, l’intimée et son ami et associé dans l’exploitation d’un centre d’appels surtaxés destinés à la voyance d’autre part. Il fait valoir en outre que le montant de 3'000 fr. aurait été versé par l’associé de l’intimée et non par cette dernière. En conséquence, le défaut de ratification du contrat par la curatrice de l’intimée n’entraînerait pas la mise à néant du contrat

L’intimée expose que la provenance des fonds investis n’est pas importante dès lors que seule la validité du contrat importe.

3.1.2 Le contrat de développement d’un site Internet relève du contrat d’entreprise compte tenu de la prestation principale – livraison du site – qui caractérise le contrat (Killias, Contrats relatifs aux sites Internet et les contrats de type ASP, in Quelques facettes du droit de l’Internet, volume 5, Neuchâtel 2004, p. 25).

Aux termes de l'art. 363 CO, le contrat d'entreprise est un contrat par lequel une des parties (l'entrepreneur) s'oblige à exécuter un ouvrage, moyennant un prix que l'autre partie (le maître) s'engage à lui payer. En l'absence d'une disposition spéciale, la conclusion d’un tel contrat n'est soumise au respect d’aucune forme particulière (art. 11 al. 1 CO), de sorte que la manifestation de volonté des parties peut être expresse ou tacite (art. 1 al. 3 CO ; Chaix, Commentaire romand, Code des obligations I, 2e éd., Bâle 2012 [CR-CO I], n. 14 ad art. 363 CO).

Aux termes de l'art. 1 al. 1 CO, le contrat est parfait lorsque les parties ont, réciproquement et d'une manière concordante, manifesté leur volonté.

En présence d’un litige sur l’interprétation d’un contrat, le juge doit tout d'abord s'efforcer de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté – écrites ou orales –, mais aussi le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse des déclarations antérieures à la conclusion du contrat, des projets de contrat, de la correspondance échangée ou encore de l'attitude des parties après la conclusion du contrat (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 ; TF 4A_487/2020 du 14 octobre 2020 consid. 4 ; Winiger, CR-CO I, nn. 15 ss, spéc. nn. 25 et 32-34 ad art. 18 CO). Cette interprétation subjective des indices concrets ressortit à l'appréciation des preuves (ATF 142 Ill 239 consid. 5.2.1 ; TF 4A_307/2018 du 10 octobre 2018 consid. 4.2).

Si la volonté réelle des parties ne peut pas être établie ou si les volontés intimes divergent, le juge doit alors interpréter les déclarations et comportements selon le principe de la confiance, en recherchant comment ceux-ci pouvaient être compris de bonne foi en fonction de l'ensemble des circonstances (interprétation objective ; ATF 144 III 93 consid. 5.2.3). L'interprétation objective, qui relève du droit, s'effectue non seulement d'après le texte et le contexte des déclarations, mais également sur le vu des circonstances qui les ont précédées et accompagnées, à l'exclusion des événements postérieurs (ATF 133 III 61 consid. 2.2.1 ; ATF 132 III 626 consid. 3.1 in fine ; également pour le tout : TF 4A_307/2018 du 10 octobre 2018 consid. 4.2). La volonté interne de s'engager du déclarant n'est pas seule déterminante ; une obligation à sa charge peut découler de son comportement, dont l'autre partie pouvait, de bonne foi, déduire une volonté de s'engager. Le principe de la confiance permet ainsi d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 ; ATF 130 III 417 consid. 3.2 et les réf. citées).

3.1.3 En l’espèce, il est vraisemblable que l’intimée a collaboré avec un tiers pour exploiter son activité de voyance par téléphone, la juge de paix ayant refusé à l’audience du 29 juin 2020 d’ordonner la production des décomptes d’exploitation du numéro de téléphone concerné pour le motif que ce numéro n’était pas attribué à l’intimée. Toutefois, le document signé le 15 juin 2018 – relatif à l’encaissement d’un acompte de 3'000 fr. sur le prix de 3'500 fr. pour la réalisation d’un site Internet – mentionne uniquement le recourant et l’intimée comme parties, lesquelles ont seules signé le document. Le recourant n’allègue d’ailleurs pas que l’intimée aurait invoqué agir pour une société ou pour une tierce personne, ni qu’il aurait rencontré l’ami et associé de l’intimée avant, pendant ou après la conclusion du contrat. Au demeurant, des courriels et messages WhatsApp ont été échangés entre les parties uniquement et seule S.____ a procédé pénalement et civilement contre Q.____.

On doit ainsi admettre que seuls le recourant et l’intimée étaient parties au contrat et, partant, que sa non-ratification par le représentant légal de l’intimée a entraîné sa mise à néant ex tunc et la répétition des prestations fournies (art. 19b al. 1 CC). Ce premier moyen s’avère donc inopérant.

3.2

3.2.1 Dans un deuxième moyen, le recourant fait valoir que l’intimée s’est faussement donnée pour capable de sorte qu’elle doit supporter le dommage qui en est découlé, soit la fourniture de prestations valant 3'000 francs. Il explique qu’il a agi de bonne foi et qu’il ne pouvait se douter que l’intimée était sous curatelle de portée générale. Le recourant relève encore que l’intimée exploite avec son associé un centre d’appels surtaxés de voyance et que la curatrice est au courant de cette activité lucrative.

L’intimée reproche au recourant de n’avoir pris aucune mesure pour savoir si elle pouvait s’engager seule.

3.2.2 En vertu de l’art. 19 CC, les personnes capables de discernement mais privées de l’exercice des droits civils ne peuvent contracter une obligation ou renoncer à un droit qu’avec le consentement de leur représentant légal (al. 1). Elles n’ont pas besoin de ce consentement pour acquérir à titre purement gratuit ni pour régler les affaires mineures se rapportant à leur vie quotidienne (al. 2). Elles sont responsables du dommage causé par leurs actes illicites (al. 3).

A teneur de l’art. 19b al. 1 CC, si l’acte n’est pas ratifié par le représentant légal, chaque partie peut réclamer les prestations qu’elle a fournies. La personne privée de l’exercice des droits civils ne répond toutefois que jusqu’à concurrence des sommes dont elle a tiré profit, dont elle se trouve enrichie au moment de la répétition ou dont elle s’est dessaisie de mauvaise foi.

La personne privée de l’exercice des droits civils – et celle faisant l’objet d’une mesure de protection de l’adulte – qui s’est faussement donnée pour capable répond envers les tiers du dommage qu’elle leur a causé (art. 19b al. 2 et 452 al. 3 CC). Il s’agit d’un cas de responsabilité en raison du dommage causé par un acte illicite au sens de l’art. 19 al. 3 CC. Cette responsabilité n’existe que si le comportement de la personne incapable est fautif. Tel est le cas lorsque, par un comportement actif, elle a induit le cocontractant en erreur ou lorsqu’on peut attendre d’elle qu’elle attire l’attention du cocontractant sur son incapacité. En revanche, la responsabilité de la personne incapable n’est pas engagée lorsque l’incapacité est patente. Le dommage de la partie capable correspond à la perte qu’elle a subie en raison de la conclusion d’un contrat devenu caduc (dommage négatif), non au bénéfice dont le contractant espérait profiter (dommage positif) (Steinauer/Fountoulakis, Droit des personnes physiques et de la protection de l'adulte, Berne 2014, n. 244). Le cocontractant doit être placé dans la situation qui aurait été la sienne si le contrat n’avait pas été conclu (Frankhauser, in Geiser/Fountoulakis [édit.], Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, 6e éd., Basel 2018, n. 9 ad art. 19b CC). Ce dommage comprend toutes les pertes que le créancier a éprouvées (voire les gains qu’il a manqués) en raison de la négociation et de la conclusion du contrat envisagé ; sa situation doit correspondre, si l’indemnisation est totale, à celle qui eût été la sienne si les parties n’avaient jamais conclu le contrat (Tercier/Pichonnaz, le Droit des obligations, 5e éd., Bâle 2012, n. 1213).

3.2.3 En l’espèce, alors qu’elle a pris l’initiative de la conclusion du contrat, ce qui relève d’un comportement actif (Geiser, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I précité, n. 33 ad art. 452 CC), l’intimée n’a pas du tout informé le recourant du fait qu’elle était sous curatelle de portée générale. De même, elle n’a pas révélé aux autorités saisies dans la première phase du litige – Juge de paix du district de Nyon et Ministère public – qu’elle était sous curatelle. Elle a personnellement déposé une requête de conciliation le 15 avril 2018 dont le contenu, qui évoque son activité commerciale et ses rapports contractuels avec le recourant, ne permet pas au lecteur de suspecter un manque de discernement. Il en va de même des courriels et messages échangés avec le recourant, qu’elle a produits au Ministère public dans le cadre de sa plainte, et des pièces produites dans la présente cause.

L’incapacité de l’intimée n’était pas patente et tant dans la conclusion du contrat que par la suite dans le cadre son exécution, celle-ci s’est présentée comme une commerçante ayant implicitement l’exercice des droits civils : le site Internet commandé avait pour but – comme elle l’a elle-même indiqué – de développer son activité, soit de lui permettre d’engager du personnel, de faciliter la rémunération par prépaiement et d’élargir sa clientèle sur le plan international. Il en résulte qu’elle doit répondre du dommage qu’elle a ainsi causé (art. 19b al. 2 et 452 al. 3 CC).

Le recourant a déclaré en première instance qu’il avait eu des frais de serveur, qu’il n’a toutefois pas chiffrés. Les pièces produites relatives au site et les nombreux échanges établissent néanmoins qu’il a consacré passablement de temps à la réalisation de ce projet, temps de travail qu’il n’a ainsi pu affecter à d’autres activités lucratives.

Lorsque le montant exact du dommage ne peut être établi, le juge le détermine équitablement en considération du cours ordinaire des choses et des mesures prises par la partie lésée (art. 42 al. 2 CO). En l’espèce, il se justifie de faire application de cette disposition. Selon le cours ordinaire des choses, la marge bénéficiaire peut raisonnablement être arrêtée à 50% du prix payé, si bien que le dommage négatif du recourant doit être équitablement fixé à 1'500 fr., montant correspondant aux frais qu’il n’aurait pas engagés et aux gains qu’il aurait réalisés ailleurs s’il n’avait pas conclu le contrat litigieux. Ayant déjà reçu le paiement de 3'000 fr., il doit dès lors restituer 1'500 fr. à S.____.

4.

4.1 Au vu de ce qui précède, le recours doit être partiellement admis et la décision réformée en ce sens que Q.____ devra verser à S.____ la somme de 1’500 fr. sans intérêt.

Les frais, qui comprennent les frais judiciaires et les dépens (art. 95 al. 1 CPC), sont mis à la charge de la partie succombante et, lorsqu’aucune des parties n’obtient entièrement gain de cause, les frais sont répartis selon le sort de la cause (art. 106 al. 1 et 2 CPC).

En l’espèce, les frais judiciaires de première instance ont été arrêtés à 750 francs. Ils seront mis à la charge de la demanderesse par 375 fr. et laissés provisoirement à la charge de l’Etat, la demanderesse bénéficiant de l’assistance judiciaire (art. 122 al. 1 let. b CPC), et à la charge du défendeur par 375 francs.

Le défendeur remboursera à la demanderesse la somme de 150 fr. à titre de participation aux frais de la procédure de conciliation (art. 111 al. 2 CPC).

4.2 Les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 200 fr. (art. 69 al. 1 TFJC [tarif des frais judiciaires en matière civile du 28 septembre 2010 ; BLV 270.11.5]), seront mis à la charge de chaque partie par moitié.

L’intimée versera au recourant la somme de 100 fr. à titre de remboursement partiel des frais de deuxième instance.

Par ces motifs,

la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal,

prononce :

I. Le recours est partiellement admis.

II. La décision finale est réformée comme il suit :

I. Le défendeur Q.____ doit verser à la demanderesse S.____ la somme de 1'500 fr. (mille cinq cents francs) sans intérêt.

II. Les frais judiciaires sont arrêtés à 750 fr. (sept cent cinquante francs).

III. Les frais sont laissés provisoirement à la charge de l’Etat par 375 fr. (trois cent septante-cinq francs) pour la demanderesse S.____ et mis par 375 fr. (trois cent septante-cinq francs) à la charge du défendeur Q.____.

IIIbis. La bénéficiaire de l’assistance judiciaire est, dans la mesure de l’art. 123 CPC, tenue au remboursement des frais judiciaires mis à la charge de l’Etat.

IV. Le défendeur Q.____ remboursera à la demanderesse S.____ la somme de 150 fr. (cent cinquante francs) à titre de participation aux frais de la procédure de conciliation.

V. Toutes autres ou plus amples conclusions sont rejetées.

III. Les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 200 fr. (deux cents francs), sont mis à la charge du recourant Q.____ par 100 fr. (cent francs) et à la charge de l’intimée S.____ par 100 fr. (cent francs).

IV. L’intimée S.____ versera au recourant Q.____ la somme de 100 fr. (cent francs) à titre de remboursement partiel des frais de deuxième instance.

V. L’arrêt est exécutoire.

Le président : La greffière :

Du

L'arrêt qui précède, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié à :

M. Q.____,

Mme F.____ (pour S.____).

La Chambre des recours civile considère que la valeur litigieuse est inférieure à 30’000 francs.

Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral au sens des art. 72 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral – RS 173.110), cas échéant d'un recours constitutionnel subsidiaire au sens des art. 113 ss LTF. Dans les affaires pécuniaires, le recours en matière civile n'est recevable que si la valeur litigieuse s'élève au moins à 15'000 fr. en matière de droit du travail et de droit du bail à loyer, à 30'000 fr. dans les autres cas, à moins que la contestation ne soulève une question juridique de principe (art. 74 LTF). Ces recours doivent être déposés devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la présente notification (art. 100 al. 1 LTF).

Cet arrêt est communiqué, par l'envoi de photocopies, à :

Mme la Juge de paix du district de Nyon.

La greffière :

Bitte beachten Sie, dass keinen Anspruch auf Aktualität/Richtigkeit/Formatierung und/oder Vollständigkeit besteht und somit jegliche Gewährleistung entfällt. Die Original-Entscheide können Sie unter dem jeweiligen Gericht bestellen oder entnehmen.

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