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Urteil Kantonsgericht (VD)

Zusammenfassung des Urteils HC/2012/408: Kantonsgericht

Die Cour d'appel civile du Tribunal cantonal a rejeté l'appel interjeté par G.________ contre le jugement rendu par le Président du Tribunal civil de l'arrondissement de l'Est vaudois. Le jugement initial avait partiellement admis l'action des demandeurs A.C.________ et B.C.________ concernant une servitude de passage à pied. G.________ avait formé un appel en demandant la radiation de la servitude. La Cour d'appel a confirmé le jugement initial, rejetant l'appel de G.________. Les frais de justice de deuxième instance sont à la charge de G.________. Le genre de la personne perdante est masculin.

Urteilsdetails des Kantongerichts HC/2012/408

Kanton:VD
Fallnummer:HC/2012/408
Instanz:Kantonsgericht
Abteilung:Cour d'appel civile
Kantonsgericht Entscheid HC/2012/408 vom 12.06.2012 (VD)
Datum:12.06.2012
Rechtskraft:-
Leitsatz/Stichwort:-
Schlagwörter : Appel; Appelant; Ancien; Ancienne; érêt; éfendeur; Expert; Accès; Bull; Lappel; Registre; étaire; écis; étant; éder; érie; épens; également; Intérêt; ésident; Lappelant; émentaire; Inspection
Rechtsnorm:Art. 100 BGG;Art. 106 ZPO;Art. 236 ZPO;Art. 308 ZPO;Art. 310 ZPO;Art. 311 ZPO;Art. 312 ZPO;Art. 316 ZPO;Art. 317 ZPO;Art. 405 ZPO;Art. 57 ZPO;Art. 661 ZGB;Art. 694 ZGB;Art. 732 ZGB;Art. 736 ZGB;Art. 74 BGG;Art. 8 ZGB;Art. 912 ZGB;Art. 929 ZGB;
Referenz BGE:-
Kommentar:
Schweizer, Heini, Basler Kommentar Schweizerische Strafprozessordnung, Art. 319 StPO, 2011

Entscheid des Kantongerichts HC/2012/408

TRIBUNAL CANTONAL

PP07.013225-120195

272



cour d’appel CIVILE

___

Arrêt du 12 juin 2012

__

Présidence de M. COLOMBINI, président

Juges : M. Giroud et M. Piotet, juge suppléant

Greffier : M. Bregnard

*****

Art. 736 al. 1 et 2, 929 CC et 243 al. 2 CO

Statuant à huis clos sur l'appel interjeté par G.__, à Lutry, défendeur, contre le jugement rendu le 21 avril 2011 par le Président du Tribunal civil de l'arrondissement de l'Est vaudois dans la cause divisant l'appelant d’avec A.C.__, et B.C.__, tous deux à Lutry, demandeurs, la Cour d’appel civile du Tribunal cantonal voit :


En fait :

A. Par jugement du 21 avril 2011, le Président du Tribunal civil de l'arrondissement de l'Est vaudois a admis partiellement l'action des demandeurs (I), A.C.__ et B.C.__, en ce sens que le défendeur, G.__, est tenu de rendre libre et accessible toute l'assiette de la servitude n° [...] grevant la parcelle n° [...] RF de Lutry et d'y tolérer le passage à pied des personnes qui se rendent sur la parcelle voisine (ancienne n° [...]) pour l'exploitation de la vigne (III). Le Président du Tribunal civil de l'arrondissement de l'Est vaudois a en outre rejeté les conclusions reconventionnelles du défendeur (II), arrêté les frais de justice (IV) et rejeté toutes autres ou plus amples conclusions (V):

En droit, le premier juge a considéré que la servitude, sous forme de droit de passage à pied, était toujours conforme à l'usage prévu initialement et que les demandeurs avaient un intérêt à son maintien. Les charges imposées au fonds servant n'étaient au surplus pas disproportionnées par rapport à l'utilité de la servitude de sorte que la conclusion reconventionnelle du défendeur tendant à la radiation de la servitude devait être rejetée.

B. Par acte du 26 janvier 2012, G.__ a formé appel contre le jugement précité en prenant, sous suite de frais et dépens, les conclusions suivantes:

"Principalement:

I. L’appel est admis;

Il. Le jugement rendu le 21 avril 2011 par le Tribunal civil de l’arrondissement de l’Est vaudois est réformé de la manière suivante:

a. Le chiffre I du dispositif de ce jugement est réformé en ce sens que l'action des demandeurs A.C.__ et B.C.__ est rejetée.

b. Le chiffre Il du dispositif de ce jugement est modifié de la manière suivante:

La conclusion reconventionnelle d’G.__ tendant à la radiation de la servitude [...] grevant sa parcelle [...] en faveur de l’ancienne parcelle [...] est admise, ordre étant donné aux conservateurs du Registre foncier de Lavaux de procéder à sa radiation du Registre foncier.

Subsidiairement, la conclusion reconventionnelle subsidiaire d’G.__ tendant à la radiation de la servitude [...] grevant sa parcelle [...] en faveur de l’ancienne parcelle [...] est admise, moyennant le paiement d’une indemnité de Fr. 1'500.aux demandeurs, ordre étant donné au conservateur du Registre foncier de Lavaux de procéder à sa radiation dès que la somme de Fr. 1’500.aura été payée.

c. Le chiffre no III du dispositif du jugement attaqué est supprimé.

d. Le chiffre V du dispositif du jugement du 21 avril 2011 est réformé en ce sens que les frais de justice et les dépens de première instance sont entièrement mis à la charge des demandeurs A.C.__ et B.C.__; subsidiairement, l’indemnité due par G.__ aux demandeurs est réduite de Fr. 5'000.pour être ainsi ramenée à Fr. 894.-

Subsidiairement:

I. L’appel est admis;

Il. Le jugement rendu le 21 avril 2011 par le Président du Tribunal civil de l’arrondissement de l’Est vaudois est annulé et le dossier est renvoyé à l’autorité inférieure pour nouveau jugement dans le sens des considérants. "

L'appelant a sollicité, dans l'hypothèse où la cour de céans n'admettrait pas son appel sur la base du dossier, des mesures d'instruction, soit l'organisation de débats, l'organisation d'une inspection locale, l'audition de l'expert [...] et, en fonction des réponses que ce celui-ci serait en mesure de donner, une expertise complémentaire à lui confier, ainsi que l'audition des témoins [...] et [...]. L'appelant a joint à son acte un bordereau de 8 pièces.

Les intimés ont déposé leur mémoire de réponse le 12 avril 2012 en concluant, sous suite de frais et dépens, au rejet de l'appel.


C. La Cour d'appel civile retient les faits suivants, sur la base du jugement complété par les pièces du dossier :

1. a) B.C.__ est propriétaire de la parcelle n° [...] du Registre foncier de Lavaux sise sur la Commune de Lutry. Cette parcelle jouxte la parcelle n° [...], ainsi que le domaine public, soit l’avenue [...].

Il est copropriétaire, avec A.C.__, de la parcelle n° [...], voisine au sud de la parcelle n° [...] et au sud-est de la parcelle n° [...]. La parcelle n° [...] est le résultat de la division et du regroupement de divers biens-fonds, notamment du regroupement des anciennes parcelles n° [...], [...] et [...]. Les demandeurs sont titulaires d’une servitude de passage à pied RF n° [...] qui grève la parcelle n° [...] à l’est.

La parcelle n° [...], d’une superficie de 13’612 m2, descend jusqu’au bas du chemin de [...], où elle est reliée au domaine public, au bénéfice de la servitude de passage à pied et pour tous véhicules RF n° [...] grevant la parcelle n° [...].

Les demandeurs, A.C.__ et B.C.__, sont également copropriétaires de la parcelle n° [...] qui jouxte la parcelle n° [...] et le domaine public, soit le chemin de [...].

Les parcelles de vigne exploitées par les demandeurs sont réparties sur la Commune de Lutry. A la suite des constructions réalisées ces dernières années, les surfaces dédiées à la vigne ont été réduites et se trouvent disposées dans divers recoins de propriété, dont l'accès est parfois difficile.

b) Le défendeur, G.__, est propriétaire de la parcelle n° [...] du Registre foncier de Lavaux.

2. Le 29 avril 1993, une servitude de passage à pied et pour tous véhicules RF n° [...] a été créée à la charge de la parcelle n° [...], en faveur de la parcelle n° [...], propriété de [...], - devenue n° [...] ainsi que des parcelles n° [...] et [...].

3. Le 11 juin 1993, une servitude de passage à pied RF n° [...] a été constituée à la charge de la parcelle n° [...], en faveur de la parcelle désignée à l’époque sous le n° [...]. Cette servitude d’une largeur d’un mètre longe la limite ouest et la limite sud de la parcelle grevée.

Le propriétaire de la parcelle n° [...], soit le fonds dominant, était à l’époque [...]. Les vignes faisaient l’objet d’un bail à ferme en faveur des demandeurs. Le propriétaire de la parcelle n° [...], soit le fonds servant, était alors [...].

A l’époque de la constitution de la servitude, les anciennes parcelles n° [...], [...] et [...], devenues ensuite la parcelle n° [...], ainsi que la parcelle n° [...] et la parcelle n° [...] du défendeur étaient en nature de vigne. La parcelle n° [...] était entourée de vignes. La servitude n° [...], constituée en 1993 par [...] et [...], l’a été pour permettre d’accéder à la vigne plantée sur la parcelle n° [...] et de lui apporter les soins nécessaires.

4. Le 16 novembre 1993, le défendeur a acquis la parcelle n° [...] sur laquelle il a construit son habitation en 1994.

5. a) Dans les années 1996-1997, le vignoble situé à proximité de l’ancienne parcelle n°[...], devenue n°[...], était important, les parcelles n°[...] et [...] n'étant pas encore construites. Depuis les années 1997 – 1998, divers projets de construction ont été mis à l’enquête sur les parcelles situées en aval de l’ancien bien-fonds n°[...], soit la parcelle n°[...], propriété des demandeurs et les terrains situés à l’ouest.

b) A la fin de l’année 2004, un projet de construction de deux immeubles a été mis à l’enquête sur les anciennes parcelles n°[...], [...] et [...], le long du chemin de[...]. Ces immeubles sont aujourd'hui construits.

Une servitude a été constituée pour permettre l’utilisation par les propriétaires de l’ancienne parcelle n°[...], devenue n°[...], de l’accès routier réalisé sur la parcelle n°[...].

c) Aujourd’hui, la parcelle n°[...], concernée par la servitude litigieuse, est reliée au domaine public par une seule desserte routière, à savoir celle réalisée à partir du chemin de [...] sur la parcelle n°[...] pour rejoindre la parcelle n° [...].

Lorsque les employés des demandeurs viennent entretenir les vignes, ils peuvent accéder à la parcelle n°[...] soit par la desserte créée à partir du [...] sur la parcelle n°[...], soit par le chemin descendant sur la parcelle du défendeur à partir de l’avenue [...].

6. Par courrier du 28 octobre 2006 adressé au défendeur, les demandeurs ont fixé à celui-ci un délai pour effectuer différents aménagements sur sa parcelle s’agissant des plantations en limite de propriété. Ils ont également relevé que, l’assiette de la servitude RF n°[...] n’étant pas complètement libre, son exercice ne pouvait pas être assuré.

7. a) Par demande du 2 mai 2007, adressée au Président du Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois, les demandeurs ont pris, avec suite de frais et dépens, les conclusions suivantes:

“I. Ordre est donné à l’intimé de libérer complètement le passage défini par la servitude [...] en faveur de la nouvelle parcelle [...] des requérants, notamment en enlevant la végétation se trouvant sur le passage et en supprimant tout blocage par portails.

Il. Menace est faite à l’intimé des peines d’amendes prévues par l’article 292 CP en cas d’insoumission à l’ordre qui précède. "

b) Dans sa réponse du 27 septembre 2007, le défendeur a conclu, avec suite de frais et dépens:

"Principalement:

Au rejet pur et simple de la demande;

Reconventionnellement:

À la radiation au sens de l’art. 736 CC (Code civil du 10 décembre 1907 ; RS 210) de la servitude no[...] grevant sa parcelle no [...] en faveur de la partie de la parcelle no [...] constituant l’ancienne parcelle no [...], ordre étant donné au Conservateur du Registre foncier de Lavaux de procéder à cette radiation au Registre foncier".

c) Par réplique du 21 décembre 2007, les demandeurs ont conclu, avec suite de dépens, au rejet des conclusions reconventionnelles du défendeur et ont maintenu leurs conclusions.

d) Le 12 février 2008, le défendeur a déposé des déterminations sans toutefois modifier ses conclusions.

8. Une première audience a été tenue le 4 juin 2008. Il a alors été procédé à une première inspection locale et à l’audition de cinq témoins.

a) Avec l’accord des demandeurs, le défendeur s’est réformé séance tenante en complétant sa conclusion reconventionnelle comme il suit:

"A la radiation au sens de l’art. 736 CC de la servitude n°[...] grevant sa parcelle n°[...] en faveur de la partie de la parcelle n°[...] constituant l’ancienne parcelle n°[...], éventuellement uniquement sur le tronçon séparant la parcelle n°[...] (jardin G.__) et l’ancienne parcelle n°[...], ordre étant donné au Conservateur du Registre foncier de Lavaux de procéder à cette radiation au Registre foncier.¨ "

Le défendeur a également pris une nouvelle conclusion subsidiaire dont la teneur est la suivante:

“A la radiation de la servitude n°[...], éventuellement uniquement sur le tronçon séparant la parcelle n°[...] (G.__) et l’ancienne parcelle n°[...], moyennant le paiement d’une indemnité qui sera fixée à dire de justice (art. 736 al. 2 CC), la radiation au Registre foncier étant subordonnée au paiement préalable de dite indemnité."

Les demandeurs ont conclu séance tenante au rejet, avec suite de dépens, de cette conclusion.

b) Une procédure incidente au sujet de l’étendue de la réforme a eu lieu, les demandeurs s’opposant à la mise en oeuvre d’une expertise concernant l’indemnité prévue à l’art. 736 al. 2 CC.

9. Le 5 septembre 2008, les parties ont signé une convention de procédure, par laquelle les demandeurs ont retiré leur opposition à la mise en œuvre d'une expertise. Ces derniers ont par ailleurs complété leur détermination en prenant la conclusion subsidiaire suivante :

"Au versement d’un indemnité, fixée à dire de justice, si par extraordinaire, la servitude devait être radiée ou partiellement réduite en application de I’art. 736 al. 2 CC."

10. a) Le 11 août 2009, [...], ingénieur géomètre officiel à [...], désigné en qualité d’expert avec mission de déterminer les critères de fixation de l’indemnité prévue à l’art. 736 al. 2 CC, a rendu son rapport d’expertise. On en extrait ce qui suit:

"1. Utilité et justification de la servitude n° [...] de passage à pied

• En fonction des constructions dans le quartier, la surface plantée en vigne a été réduite très fortement et d’autres cheminements ont été utilisés par les demandeurs pour exploiter la vigne située sur l’ancienne parcelle n° [...] (...). La diminution de la vigne se voit spécialement bien pour l’ancienne parcelle n° [...], dont une grande partie est occupée actuellement par un bâtiment d’habitation.

• Selon les dires de M. B.C.__, le passage à pied n’est pas utilisé à cause des difficultés d’accès (portails et arborisation).

• L’accès le plus pratique à l’ancienne parcelle n° [...] avec des véhicules à moteur est la liaison entre le parking du bâtiment n° [...] et le [...], en passant sur la parcelle n° [...] (servitude n° [...] en faveur de la parcelle n° [...]).

• Un autre accès est utilisé par les demandeurs, soit le chemin d’accès à l’ancienne parcelle n° [...], par la servitude n° [...]. Toutefois, cette utilisation est abusive, car la partie bénéficiaire est l’ancienne parcelle n° [...] et non l’ancienne parcelle n° [...].

• L’inutilisation manifeste de la servitude litigieuse et les différentes variantes d’accès à l’ancienne parcelle n° [...] trouvées par les demandeurs ne sont pas des éléments propres à valoriser la servitude. La demande de radiation semble logique.

2. Valeur de la servitude n° [...]

• Il est intéressant de constater que la servitude a été concédée gratuitement à M. [...] par M. [...] et que les frais de constitution ont été pris en charge par ce dernier. Les parties ont manifestement considéré que le prix de réservation de la servitude, soit sa valeur objective, était nul. La servitude n’engendre pour chaque fonds ni augmentation ni diminution de valeur. Il semblerait normal que la radiation de la servitude soit aussi concédée gratuitement.

• L’allégué 21 admis par les deux parties indique que le but de la servitude était de permettre l’accès et l’entretien de la vigne plantée sur l’ancienne parcelle n° [...]. Toute autre utilisation, soit par exemple la liaison entre l’Avenue [...] et le Chemin de [...], n’était pas prévue et pas possible pour le fonds dominant. Le terrain du fonds dominant n’a donc pas perdu de valeur, la servitude n’ayant pas été utilisée et son but limité, il n’est pas non plus possible de "pouvoir librement circuler entre les divers lieux de travail" (...), l’exercice de la servitude ne le permettant pas. Il n’y a ainsi pas de dépréciation du terrain du fonds dominant du fait de la radiation éventuelle de la servitude.

• S’il fallait malgré tout donner une valeur à la servitude, l’expert a calculé la valeur du terrain constructible sur la base du règlement communal sur les constructions et est arrivé à environ CHF 600.par mètre carré. Si la servitude avait été "achetée", le prix à payer aurait été négocié, selon l'expérience de l’expert, entre 50% et 75% de la valeur du terrain. Dans le cas précis, la servitude concédée n’empêche aucune réalisation sur la parcelle grevée, car elle se situe dans la zone inconstructible de la parcelle. En outre, la surface étant maintenue dans la parcelle, elle compte dans le calcul du coefficient d’utilisation du sol (CUS). De plus, la surface vraiment gênante au Sud est faible (25 m2) et sa largeur limitée (1 mètre). Le prix à payer est donc très proche de la valeur du terrain avoisinant. En cas de radiation payante, c’est le montant complémentaire qui devrait s’appliquer.

Exemple: prix du terrain à CHF 600.le m2; prix de la servitude: CHF 600.— x 90% = CHF 540.-/m2. La valeur de rachat serait de CHF 600.- - CHF 540.-, soit CHF 60.-/m2. Pour la surface en cause, cela fait CHF 1’500.-. La partie de servitude située à l’Ouest est dans l’emprise d’une autre servitude et l’expert estime qu’elle n’entre pas en compte pour un éventuel rachat. "

b) Le 14 juin 2010, l’expert a rendu un rapport complémentaire d’expertise. On en extrait ce qui suit:

" Servitude N° [...]

(. ..)

• La servitude a été concédée gratuitement à titre de relations de bon voisinage.

• Le propriétaire du fonds dominant, soit M. [...], devait prendre les frais de construction des canalisations, objet de la servitude.

• Le propriétaire des fonds dominants et servants, soit M. [...] pouvait raccorder ses parcelles; aucune éventualité de rachat de canalisations n’a été indiquée dans la réquisition.

• Les frais d’inscription, y compris ceux du nouveau tracé, ont été pris en charge par M. [...].

Servitude N° [...]

(...)

Modification [...] ensuite de division de la parcelle [...], la servitude est à reporter en faveur et à la charge des parcelles [...] et [...] sans modification de la surface bénéficiaire. Cully, le 4 septembre 2009.

(...)

• La servitude a été concédée gratuitement.

• Rien n’est mis concernant les frais de construction du passage.

• Les frais d’inscription ont été pris en charge par M. [...].

(…)

La lecture et l’analyse des 2 réquisitions ne montrent nulle part que les servitudes ont été échangées et ont servi de contre-affaires.

(...) pour la servitude de passage à pied, dont l’utilisation pour l’entretien des vignes n’est pas contesté (voir allégué 21), rien n’indique une contre-affaire.

(…)

6. VALEUR DU FONDS DOMINANT

Le spécialiste associé [...] a effectué les recherches requises au Registre foncier de Lavaux-Oron pour connaître des prix de terrain à Lutry.

Questions posées:

Volet I: il ne s’agit pas que d’envisager le travail de la vigne, mais également et surtout l’intérêt général que présente la servitude de passage à pied pour le fonds dominant Cet intérêt est double, car d’une part, il y a un immeuble comprenant plusieurs appartements avec plusieurs familles et d’autre part, toute la partie Est (corrigé sur place en parlant de la partie Ouest) de la parcelle, actuellement en vignes, pourrait un jour servir à la construction d’une villa. Il est par conséquent évident qu’il y a un intérêt au passage pour piétons reliant directement l’immeuble et la future éventuelle villa à l’avenue [...] et aux transports publics (CFF et bus TL).

Volet 2: l’expert voudra dès lors bien examiner, en recourant aux services d’un spécialiste du marché de Lutry (...) quelle est la valeur de la parcelle fonds dominant avec possibilité d’un accès piétons à l’Est (corrigé à l’Ouest) direction avenue [...], d’une part et sans cet accès piétons, d’autre part.

Volet 3: le courtier qui devra être mandaté voudra bien dire si l’on apprécie la valeur d’une servitude en fonction de ce qu’elle apporte ou si l’on se fonde sur un pur calcul basé sur le mètre carré (...)

nous prenons position comme suit:

Volet I

Nous ne préjugerons pas de la légalisation vers une densification supérieure à la zone telle qu’elle se présente aujourd’hui.

Force est de constater que le potentiel de cette parcelle est épuisé, tout comme la parcelle voisine qui fait d’ailleurs l’objet d’une mention LATC.

C’est donc bien pour l’intérêt général des habitants résidant sur les parcelles intéressées à la servitude pour le moment et, jusqu’à preuve du contraire, pas pour une future villa à construire sur l’espace libre.

(…)

Volet2a

Estimation de la valeur de la parcelle fonds dominant avec possibilité d’un accès piétons à "l'Ouest" en direction de l’avenue [...].

Cette servitude de passage profite uniquement à l’immeuble bâti sur la parcelle N° [...] et non à celui de la parcelle inférieure N° [...]. (...) La parcelle n° [...] est fonds dominant mais elle est séparée de la parcelle fonds servant N° [...] par la parcelle N°[...] qui est uniquement fonds dominant et pas fonds servant.

Vu le périmètre du droit, on peut estimer l’emprise de l’assiette bénéficiaire de la servitude, grosso modo, à 90% de l’immeuble bâti sur la nouvelle parcelle N° [...], mais sans doute tous les appartements.

Volet2b

L’estimation de la valeur de la servitude dépend si l’on est fonds dominant ou fonds servant.

L’usage pour le fonds dominant (non limité à la seule exploitation de la vigne) peut être évalué s’il a une incidence sur le revenu locatif. Admettons au vu de la surface brute de plancher obtenue auprès de la Commune que l’immeuble [...] abrite 5 appartements qui pourraient en moyenne être loués légèrement plus cher s’il existait un cheminement piétonnier, vu la sécurité apportée par ce cheminement à l’écart du trafic et la proximité de l’école.

(…)

On peut admettre que sans cette servitude, le terrain vaut fr. 80’000.- de moins que sa valeur telle qu’inscrite aujourd’hui. Ceci sans tenir compte de la tranquillité supplémentaire pour le fonds qui serait dégrevé ni de la pleine utilisation (jouissance) de l’assiette de la servitude (env. 25 m2).

D’autres hypothèses sont possibles.

Volet 3

A notre avis la valeur de la servitude est basée sur la qualité qu’elle apporte à un site et non pas sur le prix du m2 (...).

En revanche, il paraît pour le moins difficile d’apprécier la valeur d’une servitude sachant que d’autres accès sont possibles, quoique sur des itinéraires parfois plus exposés à la circulation, notamment le chemin de [...] ou l’avenue [...] ellemême.

(…)."

11. L’audience de jugement a eu lieu le 22 mars 2011. Il a été procédé à une nouvelle inspection locale. Outre les parties, cinq témoins et l'expert [...] ont été entendus.

a) Au cours de l'inspection locale, le Président a notamment constaté ce qui suit:

- Le portail d’accès sis au sud-ouest, normalement cadenassé, est ouvert pour permettre l’inspection locale.

- Une haie en lierre, rosiers, ronces, mûriers et sapins, haute d’environ trois mètres, sépare complètement le jardin G.__ de l’assiette de la servitude. Sauf par un ou deux trous, qui laissent apercevoir une plate-bande, on ne voit pas le jardin G.__ à travers la haie vive.

- Au total, le passage a une largeur de 1 mètre.

- L’accès à la parcelle [...] (anc. [...]) est fermé par une clôture. Le passage est encore entravé par diverses plantations.

- Plusieurs pieds de vigne sont plantés au sud-ouest de la parcelle [...], propriété du demandeur B.C.__, sur environ un tiers de la surface.

- Il est possible de traverser la parcelle [...] par un chemin en direction de la parcelle [...], puis de parcourir cette dernière parcelle en passant au nord de la parcelle [...], avant de remonter le long de la limite ouest de la parcelle [...] jusqu'à la cour de la parcelle [...].

- Un immeuble a été récemment construit sur chacune des parcelles [...], [...], [...]. La cour de la parcelle [...] a un accès routier. La cour précitée se trouve entre un bâtiment qui fait office de garage, ainsi que de dépôt de meubles et d'outils de jardin, et l'entrée principale d'un immeuble d'habitation.

- En empruntant le chemin passant par la parcelle [...] qui conduit à l'angle sud-est de l'ancienne parcelle [...], il existe une place goudronnée tout comme le chemin d’accès avec des places de parc dont certaines sont réservées aux visiteurs.

- Des vignes, exploitées par les demandeurs, sont plantées tant au sud de l’ancienne parcelle n°[...], notamment entre les parcelles n°[...] et [...], qu’au nord-est de l’ancienne parcelle n°[...] sur la partie amont de l’ancienne parcelle n°[...].

b) Il ressort des auditions des témoins ce qui suit:

[...], ancien employé des demandeurs, a déclaré, s’agissant de la servitude litigieuse, que celle-ci était pratique pour pouvoir accéder librement à la vigne.

[...], employé des demandeurs, a expliqué qu’aux mois de mai et juin, quinze ouvriers environ travaillent dans les vignes. Selon lui, le passage par la servitude faciliterait le travail, notamment celui qui ne nécessite pas de machines. Dès lors que la servitude n’est pas praticable, il passe avec ses ouvriers par la cour de la parcelle n°[...].

[...], épouse du défendeur, a confirmé le fait que la servitude n’est pas accessible et que les ouvriers passent par la cour qui se trouve au bas de la servitude. Elle a déclaré que, si la servitude était utilisée, les usagers ne seraient pas visibles du fait de la présence d’arbres, mais que leur présence serait perceptible.

c) L’expert [...] a expliqué que l’existence de la servitude a une influence sur la valeur de l’immeuble dominant, viticole ou non, pour autant que la servitude ait une utilité. Selon lui, si le défendeur vend son bien immobilier, celui-ci n’aura pas de plus-value s’il n’y a pas de servitude.

d) Le conseil des demandeurs a dicté ce qui suit au procès-verbal:

"L’allégué 66 est précisé en ce sens qu’il est nécessaire de pouvoir accéder librement aux différentes vignes, étant cependant clair que le demandeur ne requiert pas de pouvoir utiliser la servitude pour traverser la parcelle ex [...] afin d’accéder à une autre vigne, mais demande simplement à pouvoir utiliser la servitude conformément à son but, soit accéder à la parcelle ex [...] par la parcelle [...] et retourner par la parcelle [...]. Il s’agit plus que d’une précision, d’une déclaration et d’une appréciation juridique”.

Le conseil du défendeur s’est opposé à ce qu'il soit tenu compte de cette précision.

En droit :

1. a) La décision attaquée a été rendue le 21 avril 2011, de sorte que les voies de droit sont régies par les dispositions du CPC (Code de procédure civile du 19 décembre 2008; RS 272), entré en vigueur le 1er janvier 2011 (art. 405 al. 1 CPC).

b) L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC) au sens de l'art. 236 CPC, dans les causes patrimoniales dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité précédente est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

aa) Selon une jurisprudence constante, la valeur litigieuse peut se déterminer, en matière de droits réels, selon l'intérêt du demandeur à l'admission de ses conclusions voire, s'il est plus élevé, selon l'intérêt du défendeur au rejet des conclusions de la demande (ATF 116 II 431 c. 1; 95 II 14 c. 1, JT 1969 I 576; ATF 92 II 62 c. 3, JT 1966 I 37; TF 5A_791/2008 du 10 juin 2009, c. 1). Lorsque la contestation porte en particulier sur l'existence d'une servitude, la valeur litigieuse peut se déterminer en retenant l'augmentation de valeur que la servitude procurerait au fonds dominant ou, si elle est plus élevée, la diminution de valeur du fonds servant (ATF 136 III 60 c. 1.1.1 ; ATF 113 II 151 c. 1 ; ATF 95 II 14 c. 1, JT 1969 I 576; TF 5A_23/2008 du 3 octobre 2008 c. 1.1 et les réf. citées ; TF 5A_32/2008 du 29 janvier 2009 c. 1.2).

En l'espèce, l'appelant estime que les conséquences de la perte du procès, soit le passage des propriétaires du fonds dominant et de leurs auxiliaires sur la servitude en cause, provoqueraient une moins-value supérieure à 10'000 fr. sur sa propriété. Ce point de vue n'est par ailleurs pas contesté par les intimés. Il y a donc lieu de considérer que la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr.

bb) Formé en temps utile (art. 311 al. 1 CPC) par une partie qui y a intérêt (art. 59 al. 2 let. a CPC), l’appel est recevable à la forme.

2. a) L'appel peut être formé pour violation du droit ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 CPC). L'autorité d'appel peut revoir l'ensemble du droit applicable, y compris les questions d'opportunité ou d'appréciation laissées par la loi à la décision du juge, et doit le cas échéant appliquer le droit d'office conformément au principe général de l'art. 57 CPC. Elle peut revoir librement l'appréciation des faits sur la base des preuves administrées en première instance.

b) Les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont pris en compte que s'ils sont invoqués ou produits sans retard et ne pouvaient être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise, ces deux conditions étant cumulatives (art. 317 al. 1 CPC; Tappy, op. cit., JT 2010 III 136-137). Il appartient à l'appelant de démontrer si ces conditions sont réalisées, de sorte que l'appel doit indiquer spécialement de tels faits et preuves nouveaux et motiver spécialement les raisons qui les rendent admissibles selon lui (Tappy, op. cit., JT 2010 III 136-137; JT 2011 III 43 c. 2).

En l'espèce, l'appelant a produit quatre nouvelles pièces (4a; 4b; 4c; 5). En ce qui concerne les pièces 4a à 4c, il en ressort que le fonds dominant, la parcelle n° [...], a été divisée en deux, la nouvelle parcelle ainsi créée portant le n° [...]. Cette division est mentionnée dans le rapport d'expertise complémentaire du 14 juin 2010. Ces pièces auraient donc pu être produites à l'audience de jugement du 22 mars 2011 et sont ainsi irrecevables. Au demeurant, la division ressort du jugement attaqué dans lequel le rapport d'expertise complémentaire est retranscrit sur ce point. De plus, selon l'appelant lui-même, cette modification n'a pas d'incidence sur l'issue du litige.

En ce qui concerne la pièce 5, soit des données du Registre foncier en lien avec la parcelle n° [...], l'appelant n'expose pas pour quel motif cette pièce n'a pas pu être produite en première instance, les données du Registre foncier pouvant être consultées en tout temps. Ainsi, cette pièce est également irrecevable.

c) L'instance d'appel peut administrer les preuves (art. 316 al. 3 CPC), notamment lorsqu'elle estime opportun de renouveler l'administration d'une preuve ou d'administrer une preuve alors que l'instance inférieure s'y était refusée, de procéder à l'administration d'une preuve nouvelle ou d'instruire à raison de conclusions ou de faits nouveaux (Jeandin, CPC commenté, n. 5 ad art. 316 CPC). L'art. 316 al. 3 CPC ne confère pas à l'appelant un droit à la réouverture de la procédure probatoire et à l'administration des preuves. L'instance d'appel peut rejeter la requête de réouverture de la procédure probatoire et d'administration d'un moyen de preuve déterminé si l'appelant n'a pas suffisamment motivé sa critique de la constatation de fait retenue par la décision attaquée. Elle peut également refuser une mesure probatoire en procédant à une appréciation anticipée des preuves, lorsqu'elle estime que le moyen de preuve requis ne pourrait pas fournir la preuve attendue ou ne pourrait en aucun cas prévaloir sur les autres moyens de preuve déjà administrés par le tribunal de première instance, à savoir lorsqu'il ne serait pas de nature à modifier le résultat des preuves qu'elle tient pour acquis (cf. ATF 131 III 222 c. 4.3; ATF 129 III 18 c. 2.6).

En l'espèce l'appelant requiert, dans l'hypothèse où son appel ne serait pas admis sur la base du dossier, la tenue de débats devant l'autorité d'appel, une nouvelle inspection locale, l'audition des témoins [...] et [...], ainsi que de l'expert [...].

S'agissant de l'inspection locale, l'autorité de première instance y a déjà procédé en présence des parties. L'appelant n'expose pas en quoi une nouvelle inspection locale pourrait se révéler utile.

Il en va de même en ce qui concerne l'audition des témoins [...] et [...], déjà entendus par le premier juge, auxquels l'appelant a eu l'occasion de soumettre toutes ses questions. La modification de l'allégué n° 66 par les demandeurs, postérieure à l'audition des témoins, ne justifie pas une nouvelle audition sur cet allégué (cf. infra c. 5).

En ce qui concerne l'expert [...], celui-ci n'a pas été entendu par le premier juge, contrairement au spécialiste associé [...]. Il ne ressort cependant pas du dossier que l'appelant aurait requis son audition en première instance.

Enfin, la tenue de nouveaux débats ne se justifie pas, les parties ayant déjà été entendues à plusieurs reprises durant la procédure de première instance.

Dès lors, les requêtes de l'appelant doivent être rejetés.

3. L'appelant se livre à une série de critiques liées à l'appréciation des faits par le premier juge , en partie en lien avec les mesures d'instruction opérées en première instance, dont l'inspection locale, et en partie avec des déductions d'ordre logique pour l'appréciation en droit des faits.

a) L'appelant reproche tout d'abord au premier juge de ne pas avoir tenu compte de plusieurs photographies (pièce 113) qui démontreraient que les employés des intimés rejoignent leur lieu de travail avec des véhicules et travaillent avec des machines.

Le fait que les ouvriers de l'entreprise viticole des intimés travaillent sur la parcelle du fonds dominant en y arrivant et en utilisant un véhicule fourgonnette n'enlève rien à l'utilisation possible de la servitude. Ce fait n'est donc pas décisif comme tel.

b) L'appelant se plaint également du fait que le jugement ne retient pas que la servitude n'a jamais été utilisée par les intimés, ceux-ci n'ayant jamais contacté l'appelant pour lui demander de libérer le passage.

La durée ou l'absence de demande formelle de libération des obstacles à l'exercice de la servitude n'est pas non plus un élément de fait décisif. Ce que la cour doit retenir est bien le résultat de l'inspection locale où les obstacles sont décrits. L'absence pendant longtemps d'une demande de libération n'est au demeurant pas décisive en droit (cf. infra 5).

c) L'appelant estime que l'inspection locale aurait permis de constater que certaines vignes exploitées par les intimés auraient un accès difficile, ce qui, selon lui, n'est pas le cas.

Le critique des constatations de faits de l'inspection locale qui met en cause la réalité de la difficulté de l'exploitation de certaines vignes ne peut non plus être retenue, faute de tout élément au dossier permettant de mettre en doute la preuve administrée de l'inspection locale, qui n'a pas à être répétée de ce fait.

d) Enfin, l'appelant met en cause l'attitude des intimés peu avant l'audience de jugement, qui selon lui, auraient entièrement changé leur position en procédure par rapport au but contraignant de la servitude. Cela ne constitue pas une critique des faits, mais une appréciation juridique (cf. infra 5).

4. a) Il s'agit en premier lieu d'examiner dans quelles circonstances la servitude a été créée afin de déterminer si elle a été valablement constituée.

b) Selon l'art 243 al. 2 CO (Code des obligations du 30 mars 1911, RS 220), la donation d'un droit réel limité est soumise à la forme authentique (ATF 117 II 26; TF du 13 mai 2008 in Droit de la construction [DC] 2008 n. 331, pp. 173-174 et in Revue suisse du notariat et du registre foncier [RNRF] 2009, n. 16 p. 174; CREC 10 mars 2008 n° 120/l.; D. Piotet, Traité de droit privé Suisse [TDPS], Bâle 2012, n. 157 ss., p. 62s.; Tuor/Schnyder/Schmid/Rumo Jungo, Das Schweizerische Zivilgesetzbuch, Zürich 2009, n. 4 p. 1034; Petitpierre, Basler Kommentar, Bâle 2011, n.5 ad. art. 732 CC; Baddeley, in Commentaire romand CO I, Bâle 2003, n. 12 ad art. 243 CO; Simonius/Sutter, Schweizerisches Immobiliarsachenrecht, 2ème éd., Bâle 1990, vol. I/41, p. 46; P.Piotet, TDPS, V/3, Fribourg 1978, p. 45; contra Steinauer, Les droits réels, Propriété foncière, Propriété mobilière, généralités sur les droits réels limités Servitudes foncières, Berne 2002, p. 367s; Liver, Zürcher Kommentar, Zürich 1980, n. 108 ss. ad art. 732 CC).

c) En l’espèce, l'acte de réquisition, comme l'expertise, confirment l'absence de toute contreprestation.

Si la servitude était viciée en la forme, l'usucapion serait exclue selon l'art. 661 CC (731 al. 3 CC) en faveur des intimés faute d'exercice factuel pendant 10 ans (art. 912 al. 2 CC).

Il faut toutefois admettre en l'occurrence que l'existence d'une donation au sens de l'art 239 al. 1 CO n'est pas établie. L'absence de contreprestation peut s'expliquer en effet par d'autres considérations que l'animus donandi, notamment par le fait que, comme le retient en l'espèce l'expert judiciaire, la servitude ne valait "rien" dans l'esprit de celui qui l'a concédée. Il faut admettre ainsi que si l'animus donandi n'est pas établie, un vice de forme ne peut l'être en l'occurrence (Tribunal supérieur de Soleure, in RNRF 1984 n. 20 p. 151, c. 2), car c'est à celui qui invoque un vice de forme d'en démontrer la cause factuelle (D.Piotet, in Commentaire romand CC I, Bâle 2010, n. 31 ad art. 8 CC).

d) Ainsi, la servitude a été constituée valablement sans contreprestation.

5. a) Dans un premier moyen, l'appelant se prévaut de l'art. 736 al. 1 CC et reproche au premier juge de ne pas avoir considéré que les intimés n'avaient plus d'intérêt à l'exercice de la servitude et que, conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, la servitude aurait dû être radiée.

b) Valablement constituée, la servitude s'éteint, selon l'art. 736 al, 1 CC, par le seul effet de la loi et même avant la survenance de toute écriture, par la perte de tout intérêt de son bénéficiaire à l'exercer, actuellement, ou à court et encore moyen terme (ATF 89 II 370, JT 1964 I 529; ATF 130 III 393, JT 2004 I 175; TF du 27 octobre 2009, in RNRF 2011, n. 25 p. 196).

Dans ce domaine, la preuve de la perte de toute utilité est une preuve négative à la charge du recourant, à la contre-preuve de laquelle les intimés doivent participer (TF du 2 août 2007, in Revue suisse de procédure civile [RSPC] 2008, n. 547 p. 23, SJ 2008 I 125; TF du 27 octobre 2009, in RNRF 2011 précité).

L'intérêt déterminant de l'art. 736 al. 1 CC est celui qui a justifié la constitution de la servitude (ATF 91 II 190, JT 1966 I 255; ATF 121 III 52, JT 1998 I 159; ATF 107 II 331, JT 1982 I 118).

Selon la jurisprudence, le fait de disposer d'une nouvelle voie d'accès commode ne permet pas de conclure à l'extinction d'un accès de servitude supplémentaire préexistant (ATF 130 II 554, JT 2004 I 245). Une extinction du droit de passage n'est possible que lorsque la servitude avait un caractère de droit de passage nécessaire au sens de l'art. 694 al. 1 CC (TF du 27 octobre 2009, in RNRF 2011 précité). Conformément à cette dernière disposition le droit de passage nécessaire est créé moyennant une pleine indemnité.

Lorsqu’il ne s’agit pas d’une servitude constituée sur la base de l’art. 694 al. 1 CC, il y a lieu d’examiner dans chaque cas si la route publique réalise entièrement l’objectif que visait l’ancien droit de passage ou en d’autres termes si l’ancien accès privé n’est pas plus avantageux que le nouvel accès public. Le point décisif est alors de savoir si la servitude a perdu toute utilité pour le fonds dominant dans le cas concret, respectivement si le propriétaire qui en est l’ayant droit a encore un intérêt raisonnable à la servitude (ATF 130 III 554 c. 3.3, JT 2004 I 245). Le sort de la procédure ne dépend pas du seul fait que les biens-fonds sont reliés au réseau des voies publiques, mais du point de savoir si le titulaire de la servitude a perdu de ce fait un intérêt raisonnable à l’exercice du droit de passage comme il a été convenu concrètement (ATF 130 III 554 c. 3.3, JT 2004 I 245). La radiation ne doit dès lors être ordonnée que si le propriétaire du fonds dominant n’a plus d’intérêt raisonnable au maintien de la servitude.

c) Dans le cas d’espèce, la servitude n'est pas inscrite en tant que droit de passage nécessaire au Registre foncier. La servitude a été créée, selon l’expert, dans le but de permettre l'accès et l'entretien de la vigne plantée sur l'ancienne parcelle n° [...] dont est issue l'actuelle parcelle n° [...] sans qu’aucune indemnité ne soit versée en contrepartie (cf. supra c. 4). L'appelant n'a pas démontré, comme il lui incombait (art. 8 CC), l'existence d'un passage nécessaire.

Selon le premier juge, l'intérêt à l'exploitation de la vigne sur le fonds dominant est constant depuis 1994 à aujourd'hui.

Cette constatation ne prête pas le flanc à la critique. En effet, même si les intimés peuvent avoir un accès entre la voie publique et les vignes de l’ancienne parcelle [...] par la servitude de passage nouvellement créée sur la parcelle [...] et même si cet accès est motorisé, il n’est pas établi en fait et notamment au vu des témoignages et de l’inspection locale que la servitude de passage litigieuse aurait perdu tout intérêt raisonnable. Il a été retenu, sans que cela ne soit critiquable, que les intimés et leurs employés se serviraient régulièrement du droit de passage pour se rendre aux vignes si l’accès n’était pas bloqué par le défendeur et qu’il existe un besoin avéré pour la gestion rationnelle de la vigne (jugement attaqué, p. 68), la question d'un transit "entre les différents lieux de travail" n'étant pas en cause. Ceci ressort également des constatations de l'expert selon lequel l'utilisation par les auxiliaires des bénéficiaires de l'accès de l'ancienne parcelle [...] est abusif, ce qui doit les amener à utiliser un droit existant réellement en faveur des intimés (cf. supra let. C 12/a).

Le fait que les véhicules n'accèdent pas à proximité immédiate des vignes n'est pas de nature à modifier cet intérêt actuel. Il n'en va pas différemment de l'inutilisation jusqu'à ce jour du passage (même passé dix ans, le non-usage n'entraîne en soi pas de conséquence sur le droit [TF du 20 novembre 2007, in RNRF 2009, n. 7 p. 52; D. Piotet, TDPS, op. cit, n. 271, p. 91]), cela d'autant plus qu'il est à mettre en partie en lien avec des obstacles physiques dont l'enlèvement appartient au propriétaire grevé qui se prévaut précisément du non-usage.

d) Dès lors, le moyen tiré de l’action constatatoire de l'art. 736 al. 1 CC doit être rejeté.

6. a) Dans un second moyen, l'appelant se prévaut de l'art. 736 al. 2 CC en invoquant des changements fondamentaux dans le quartier, en particulier, la construction de sa maison d'habitation sur le fonds grevé et la gêne qui résulte de l'exercice de la servitude à côté de cette habitation, inexistante en 1994.

b) La disproportion de la charge de la servitude avec l'intérêt du bénéficiaire doit, aux termes de l'art 736 al. 2 CC, apparaître au fil du temps. Lorsque face à un intérêt constant, c'est la charge que représente la servitude qui augmente avec le temps, l'art. 736 al. 2 CC n'est applicable qu'à la double condition que le fonds grevé ne puisse plus faire l'objet d'aucune utilisation rationnelle, et que les faits créant l'aggravation ne doivent pas être imputables au propriétaire grevé (ATF 91 II 190, JT 1966 I 255; ATF 107 II 331, JT 1982 I 118; D.Piotet, op. cit. n. 289 s. p. 94 s. et réf. citées).

c) En l'espèce, l'intérêt du bénéficiaire est constant (jugement attaqué p. 68 et supra c. 5). Or, la double condition requise pour l'application de l'art. 736 al. 2 CC dans un tel cas n'est pas remplie par l'appelant. D’une part il peut disposer librement de sa maison d’habitation et peut l’habiter raisonnablement même avec le passage dû à la servitude. D'ailleurs son épouse a déclaré que les auxiliaires des intimés ne seraient pas visibles depuis leur habitation. D’autre part, l’appelant a réalisé lui-même la construction de son habitation sur son terrain grevé par la servitude. Il ne peut dès lors se plaindre d’une situation qu’il a lui-même créée.

d) Ainsi, ce moyen doit être également rejeté.

7. a) Dans un troisième moyen, l'appelant estime qu'en ce qui concerne la recevabilité de l'action possessoire au regard de l'art. 929 CC, le délai pour ouvrir action était échu lorsque les intimés ont saisi le juge en date du 2 mai 2007, ceux-ci n'ayant jamais utilisé la servitude constituée en 1993.

b) Selon l’art. 929 CC, le possesseur est déchu de son action, s’il ne réclame pas la restitution de la chose ou la cessation du trouble aussitôt après avoir connu le fait et l’auteur de l’atteinte portée à son droit (al. 1). Son action se prescrit par un an; ce délai court dès le jour de l’usurpation ou du trouble, même si le possesseur n’a connu que plus tard l’atteinte subie et l’auteur de celle-ci (al. 2).

Il s’agit d’une disposition applicable en cas de trouble de la possession. Or, l’action possessoire doit être distinguée de l’action pétitoire (action fondée sur le droit sur ou à la chose [TF 5P.101/2003 du 4 juin 2003 c. 3.2.1]).

c) Dans le cas d’espèce, l'injonction faite à l'appelant de rendre libre et accessible l'assiette de la servitude en cause (ch. II du dispositif du jugement attaqué) est justifiée sur le plan pétitoire (art. 737 al. 1 et 3 CC). Il n'y a dès lors pas lieu de fonder cette injonction sur le seul plan possessoire, ce qui rend sans objet la question de délai de l'art. 929 CC.

d) Mal fondé, ce moyen doit être rejeté.

8. a) Enfin l'appelant reproche à sa partie adverse d'avoir sollicité la mise en œuvre d'une expertise complémentaire uniquement pour mettre en évidence la valeur de la servitude litigieuse en tant qu'accès piétons pour les habitants de l'immeuble que les demandeurs ont construit sur leur parcelle n°[...], alors que la servitude a une vocation viticole et que le principe de l'identité des servitudes prohibe un but différent. Les frais qui en découlent devraient selon l'appelant être mis à la charge des intimés qui les ont provoqués inutilement.

b) Dans la mesure où l'appelant invoquait l'art. 736 al. 2 CC, la fixation du prix de la servitude avait une incidence juridique si cette disposition pouvait s'appliquer, de sorte que l'on ne peut pas rétrospectivement, en se plaçant avant les délibérations, juger inutile une expertise complémentaire.

c) Dès lors, ce moyen doit également être rejeté.

9. En définitive, l'appel doit être rejeté et le jugement confirmé.

Les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 1'400 fr. (art. 62 al. 1 TFJC [Tarif du 28 septembre 2010 des frais judiciaires civils, RSV 270.11.5]), sont mis à la charge de l’appelant qui succombe (art. 106 al. 1 CPC).

Vu le sort de l'appel, les intimés ont droit à des dépens de deuxième instance, lesquels doivent être arrêtés à 2'000 fr. (art. 7 TDC [Tarif des dépens en matière civile du 23 novembre 2010, RSV 270.11.6]), à charge de l’appelant.

Par ces motifs,

la Cour d’appel civile du Tribunal cantonal,

statuant à huis clos,

en application de l'art. 312 al. 1 CPC,

prononce :

I. L’appel est rejeté.

II. Le jugement est confirmé.

III. Les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 1'400 fr. (mille quatre cents francs), sont mis à la charge de l'appelant.

IV. L'appelant G.__ doit verser aux intimés A.C.__ et B.C.__, créanciers solidaires, la somme de 2'000 fr. (deux mille francs) à titre de dépens de deuxième instance.

V. L'arrêt motivé est exécutoire.

Le président : Le greffier :

Du 14 juin 2012

Le dispositif de l'arrêt qui précède est communiqué par écrit aux intéressés.

Le greffier :

Du

L'arrêt qui précède, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié en expédition complète, par l'envoi de photocopies, à :

Me Jean- Claude Perroud (pour G.__),

Me Daniel Pache (pour A.C.__ et B.C.__).

La Cour d’appel civile considère que la valeur litigieuse est supérieure à 30'000 francs.

Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral au sens des art. 72 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral – RS 173.110), cas échéant d'un recours constitutionnel subsidiaire au sens des art. 113 ss LTF. Dans les affaires pécuniaires, le recours en matière civile n'est recevable que si la valeur litigieuse s'élève au moins à 15'000 fr. en matière de droit du travail et de droit du bail à loyer, à 30'000 fr. dans les autres cas, à moins que la contestation ne soulève une question juridique de principe (art. 74 LTF). Ces recours doivent être déposés devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la présente notification (art. 100 al. 1 LTF).

Cet arrêt est communiqué, par l'envoi de photocopies, à :

M. le Président du Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois.

Le greffier :

Quelle: https://www.findinfo-tc.vd.ch/justice/findinfo-pub/internet/SimpleSearch.action

Bitte beachten Sie, dass keinen Anspruch auf Aktualität/Richtigkeit/Formatierung und/oder Vollständigkeit besteht und somit jegliche Gewährleistung entfällt. Die Original-Entscheide können Sie unter dem jeweiligen Gericht bestellen oder entnehmen.

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