Kanton: | VD |
Fallnummer: | Entscheid/2023/250 |
Instanz: | Kantonsgericht |
Abteilung: |
Datum: | 13.02.2023 |
Rechtskraft: |
Leitsatz/Stichwort: | |
Zusammenfassung : | G.________ hat gegen die Entscheidung des Ministeriums vom 18. November 2022, ihr die Qualität als beschwerdeführende Partei in Bezug auf die Straftaten des Konkursbetrugs und des Betrugs bei der Beschlagnahme sowie der effektiven Vermögensminderung zum Nachteil der Gläubiger abzusprechen, Beschwerde eingelegt. Das Ministerium hatte argumentiert, dass sie seit dem 28. Juli 2022 nicht auf entsprechende Anfragen reagiert habe. Die Beschwerdeführerin argumentiert, dass sie als Gläubigerin der insolventen Firma N.________ betrachtet werden sollte, basierend auf verschiedenen Verträgen und Vereinbarungen mit ihrem Ex-Mann X.________. Das Gericht entschied, dass ihr eine letzte Frist hätte gewährt werden müssen, bevor ihr der Status als beschwerdeführende Partei verweigert wurde. Das Gericht entschied zugunsten von G.________ und hob die Entscheidung des Ministeriums auf. |
Schlagwörter : | été; élai; énal; énale; éanciers; édure; ’elle; écision; écembre; Ministère; était; ’il; Arrondissement; ’arrondissement; ésident; ’au; éjudice; Lausanne; également; édé; Actif; évrier; ’à; ’actif |
Rechtsnorm: | Art. 100 BGG; Art. 104 StPo; Art. 115 StPo; Art. 118 StPo; Art. 260 SchKG; Art. 385 StPo; Art. 396 StPo; Art. 422 StPo; Art. 428 StPo; Art. 433 StPo; Art. 436 StPo; Art. 5 StPo; Art. 92 StPo; Art. 94 StPo; Art. 95 StPo; |
Referenz BGE: | - |
Kommentar: |
TRIBUNAL CANTONAL | 112 PE19.024948-MYO |
CHAMBRE DES RECOURS PENALE
______________________
Arrêt du 13 février 2023
__________
Composition : Mme Byrde, présidente
Mme Fonjallaz et M. Krieger, juges
Greffière : Mme Iaccheo
*****
Art. 92, 115, 118 al. 1, 393 al. 1 let. a CPP
Statuant sur le recours interjeté le 2 décembre 2022 par G.____ contre la décision lui refusant la qualité de partie plaignante rendue le 18 novembre 2022 par le Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois dans la cause n° PE19.024948-MYO, la Chambre des recours pénale considère :
En fait :
A. a) Le 19 décembre 2019, G.____ a déposé une plainte pénale à l’encontre de son ex-mari X.____, au motif que, par jugement de divorce du 28 octobre 2014, celui-ci avait été condamné à payer des pensions à leurs quatre enfants (2'000 fr. jusqu’à 10 ans, 2'200 fr. jusqu’à 14 ans et 2'400 fr. jusqu’à la majorité), qu’il s’était régulièrement acquitté de ses obligations jusqu’en octobre 2018, que, le 15 novembre 2018, il avait quitté la Suisse pour se domicilier à l’Ile Maurice avec sa nouvelle épouse et que, depuis lors, il n’avait plus payé que 1'000 fr. par mois ; elle précisait qu’il avait, en parallèle, ouvert action en modification du jugement de divorce en invoquant que, pour sauver sa société, il avait dû quitter la Suisse, renoncer à son salaire et s’installer à l’Ile Maurice ; elle estimait qu’il n’en était rien et qu’en réalité, il avait organisé une « pseudo insolvabilité », et disposait de plusieurs sociétés (S.____, N.____, [...] et H.____), dont l’une au moins lui paierait des salaires (P. 4).
Le 24 décembre 2019, le Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois (ci-après : le Ministère public ou la Procureure) a ouvert une instruction pénale contre X.____ pour violation d’une obligation d’entretien.
b) Par courrier du 13 janvier 2021, G.____ a exposé que X.____ ne payait plus aucune pension alimentaire depuis plus d’une année. Elle a précisé que la faillite de la société N.____, en sursis concordataire pendant l’année 2020, avait été prononcée le 16 décembre 2020 par le Président du Tribunal de l’arrondissement de Lausanne, et que la structure H.____ se trouvant à l’Ile Maurice aurait reçu des fonds de la société N.____, dont un versement de 23'400 fr. en date du 10 septembre 2019. La recourante a également soutenu que les employés de la société N.____ auraient été repris par la société [...] à Lausanne contre rémunération, vidant ainsi la substance de la société N.____ avant qu’un sursis concordataire ne soit sollicité. En outre, elle a allégué que X.____ aurait perçu des revenus de la gestion des débiteurs de la société N.____ et que les frais privés de l’intéressé auraient été assumés par l’entreprise N.____ à hauteur de 25'000 fr. environ par trimestre (P. 11).
Par courrier du 8 mars 2022, G.____ a indiqué que le comportement de X.____ pendant la faillite de N.____ pourrait être constitutif de banqueroute frauduleuse et de fraude dans la saisie (art. 163 CP), voire de diminution effective de l’actif au préjudice des créanciers (art. 164 CP).
Par courrier du 28 juillet 2022, la procureure a demandé à G.____, par l’intermédiaire de Me Yves Hofstetter, de se déterminer sur sa qualité de partie plaignante s’agissant des infractions de banqueroute frauduleuse et fraude dans la saisie, ainsi que de diminution effective de l’actif au préjudice des créanciers.
Par courrier du 17 août 2022, Me Géraldine Chapus-Rapin a informé la procureure qu’elle reprenait la défense des intérêts dG.____ en raison du départ à la retraite de Me Yves Hofstetter. Elle a en outre sollicité une prolongation de délai d’un mois pour faire part des déterminations de sa cliente quant à sa qualité de partie plaignante concernant les infractions relatives à la faillite et la poursuite pour dettes.
Par avis du 19 août 2022, la procureure a prolongé le délai imparti à G.____ et lui a accordé un nouveau délai au 20 septembre 2022.
Par courrier du 20 septembre 2022, G.____ a indiqué qu’elle persévérait dans sa plainte concernant les infractions sanctionnées par les art. 163 et 164 CP.
Par courrier du 23 septembre 2022, la procureure a indiqué à G.____ que la question n’était pas de savoir si elle persistait dans sa plainte mais d’expliquer en quoi elle pouvait prétendre à revêtir la qualité de partie plaignante s’agissant des infractions sanctionnées par les art. 163 et 164 CP. Elle lui a imparti un délai de 20 jours pour se déterminer.
Par courrier du 14 octobre 2022, G.____ a requis une « ultime fois » une prolongation de délai, tout en précisant qu’elle revêtait la qualité de partie plaignante concernant les infractions sanctionnées par les art. 163 et 164 CP, d’une part, du fait de sa qualité de caution solidaire de certains actes qui auraient été signés par le prévenu et, d’autre part, en raison de son statut de mère des enfants de X.____ et d’ex-épouse n’ayant pas perçu les contributions d’entretien dues par celui-ci.
Par avis du 7 novembre 2022, la procureure a imparti à G.____ un nouveau délai au 18 novembre 2022. Elle a précisé qu’à défaut de réponse dans le délai imparti, elle considérerait qu’elle intervenait en qualité de dénonciatrice s’agissant des infractions sanctionnées par les art. 163 et 164 CP.
Par courrier du 17 novembre 2022, Me Géraldine Chapus-Rapin a requis une nouvelle prolongation de délai d’un mois en invoquant que le dossier pénal était volumineux et qu’elle n’avait pas encore été en mesure d’en prendre entièrement connaissance en raison d’une période chargée.
c) Il ressort des pièces au dossier les éléments suivants :
i. N.____ en liquidation, société sise à Lausanne, inscrite au Registre du commerce le 22 décembre 1998, avait notamment pour but le placement de personnel fixe et temporaire, le conseil aux entreprises spécialement en matière de rapport avec le personnel et la location de services en tous genres. Entre décembre 1998 et le 22 novembre 2018, X.____ était l’administrateur et le président avec signature individuelle de cette société.
ii. Par convention sur les effets accessoires du divorce signée le 4 mai 2014, G.____ et X.____ ont exprimé leur souhait de poursuivre leur collaboration au sein de la société N.____ (P. 5/4/2), selon les modalités fixées par une convention d'actionnaires signée le même jour. Cette convention prévoyait que le capital-actions de N.____ serait dorénavant détenu à raison de 250 actions par chacun des intéressés, qu’ils convoqueraient dans les meilleurs délais une assemblée générale de N.____ aux fins de désigner G.____ comme administratrice et directrice avec signature individuelle et de confirmer X.____ dans sa fonction d’administrateur et directeur avec signature individuelle. Ils ont également convenu que les bénéfices de l’entreprise seraient prioritairement affectés à l’amortissement des crédits accordés par UBS SA, de manière à ce que les engagements de caution solidaire donnés par G.____ et X.____ puissent être progressivement libérés et désengagés (P. 5/4/3).
Par jugement du 28 octobre 2014, la Présidente du Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois a notamment prononcé le divorce d’G.____ et X.____ et a ratifié la convention sur les effets accessoires du divorce susmentionnée (P. 31, p. 2).
iii. Par convention de prêt signée le 4 mai 2014, G.____ a prêté une somme de 100’000 fr. à X.____ avec intérêt à 3% l’an (P. 5/4/4).
iv. Par acte notarié de cautionnement solidaire du 16 mai 2014, G.____ et X.____ se sont constitués caution solidaire envers la R.____, jusqu’à concurrence d’un montant de 500'000 francs, en vue de garantir les engagements de N.____ auprès de l’Office cantonal de l’Emploi du canton de Vaud (P. 49/2).
v. Par courrier du 20 juin 2014, la R.____, a fourni un acte de cautionnement d’un montant de 1'000'000 fr. au Service de l’emploi du canton de Vaud pour garantir les activités de la société N.____ (P. 20).
vi. En date du 19 janvier 2017, G.____ et la société S.____, alors représentée par S.____, qui était administrateur au bénéfice de la signature individuelle, ont signé une convention de vente d'actions, par laquelle la première citée a vendu ses 250 actions de S.____ à S.____ pour le prix de 3'000'070 francs. Ce contrat prévoyait que le prix était payé à concurrence de 2'000'000 fr. par un versement de 1’785'000 fr. sur un compte ouvert au nom d’G.____ et et de 215'000 fr. sur le compte de la société N.____ auprès du [...], ce versement constituant une avance d’G.____ à cette société et faisant l'objet d'un contrat de prêt séparé, signé le même jour (P. 5/4/5 et P. 5/4/6). Le solde du prix de vente, par 1'070'000 fr., a également fait l'objet d'un contrat de prêt séparé, conclu le même jour entre G.____ et S.____ (P. 5/4/7).
vii. Le 22 novembre 2018, X.____ a été remplacé en qualité d’administrateur de N.____ et de S.____ par Z.____, qui est alors devenu unique administrateur de ces sociétés, avec un pouvoir de signature individuel.
viii. Dans son rapport du 27 août 2019 relatif à l’exercice de l’année 2018, l'organe de révision Q.____ a indiqué que la société N.____ était surendettée au sens de l'art. 725 al. 2 CO. Les comptes établis par Q.____ faisaient notamment état du fait que l'exercice 2017 s'était soldé par un bénéfice de 1'098 fr. 05 et l'exercice 2018 par une perte de 485'021 fr. 83 (P. 20/15).
ix. Par prononcé du 14 février 2020, le Président du Tribunal de l’arrondissement de Lausanne a accordé à N.____ un sursis concordataire de quatre mois. [...] a été désigné comme commissaire au sursis provisoire. Ce sursis a été prolongé de six mois.
x. Par courrier du 11 mars 2020, la R.____, société bénéficiaire du cautionnement solidaire, a informé G.____ qu’elle se réservait la possibilité de faire valoir ses droits issus de l’acte de cautionnement solidaire signé le 16 mai 2014 (P. 49/3).
xi. Par décision du 16 décembre 2020, le Président du Tribunal de l’arrondissement de Lausanne a révoqué le sursis concordataire accordé le 14 février 2020 à N.____ et a prononcé la faillite de cette société avec effet au 16 décembre 2020.
Par décision du 29 avril 2021, le Président du Tribunal de l’’arrondissement de Lausanne a prononcé la faillite de la société S.____.
xii. Par jugement en modification du jugement de divorce du 15 septembre 2021, la Présidente du Tribunal de l’arrondissement de l’Est vaudois a modifié les chiffres IV et V de la convention sur les effets accessoires du divorce, ratifiée par jugement du 28 octobre 2014, sur la base de la demande introduite par X.____ le 9 novembre 2018 (P. 31, pp. 21-22).
Dans le cadre de ce jugement, la présidente a considéré que X.____ avait perçu, par le biais de la société H.____, un montant de 20'000 fr. le 10 février 2020, ainsi qu'un montant total de 159'300 fr. durant l'année 2019, montants qu’il avait admis avoir touchés aux débats. A cet égard, il a notamment été retenu que l’intéressé avait formé un écran de fumée s'agissant de la situation de N.____ et de H.____ (P. 31, p. 10).
xiii. Par courrier du 11 juillet 2022, l’Office des faillites de l’arrondissement de Lausanne a informé G.____ que l’administration de la faillite avait renoncé à poursuivre elle-même le procès en responsabilité selon les art. 753 ss CO, qu’elle avait cédé les droits, selon l’art. 260 LP, aux créanciers qui en avaient fait la demande, en particulier à G.____ (P. 49/4).
B. Par décision du 18 novembre 2022, le Ministère public a dénié la qualité de partie plaignante à G.____ s’agissant des infractions de banqueroute frauduleuse et fraude dans la saisie, ainsi que de diminution effective de l’actif au préjudice des créanciers.
La procureure a retenu qu’elle avait demandé à G.____ de se déterminer sur cette question pour la première fois le 28 juillet 2022. Toutefois, ni Me Yves Hofstetter, ni Me Géraldine Chapus-Rapin, n’avait été en mesure de répondre « à cette simple question ». Par conséquent, la procureure a considéré quG.____ intervenait comme dénonciatrice s’agissant des infractions précitées.
C. Par acte du 2 décembre 2022, G.____ a recouru contre cette décision auprès de la Chambre des recours pénale, en concluant, avec suite de frais et dépens, à son annulation, ordre étant donné au Ministère public de lui reconnaître la qualité de partie plaignante en relation avec les art. 163 et 164 CP.
Par courrier du 8 février 2023, le Ministère public, se référant à sa décision, a déclaré renoncer à déposer des déterminations.
En droit :
1.
1.1 Aux termes de l’art. 393 al. 1 let. a CPP (Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 ; RS 312.0), le recours est recevable contre les décisions et actes de procédure du ministère public. Une décision par laquelle le ministère public refuse, d’une part, la qualité de partie plaignante et, d’autre part, statue sur une demande de prolongation de délai est ainsi susceptible de recours selon les art. 393 ss CPP (CREP 16 mars 2015/194 consid. 1 ; CREP 10 mars 2015/178 consid. 1.3). Ce recours s’exerce dans les dix jours devant l’autorité de recours (art. 396 al. 1 CPP ; cf. art. 20 al. 1 let. b CPP) qui est, dans le canton de Vaud, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal (art. 13 LVCPP [loi d'introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009 ; RSV 312.01]; art. 80 LOJV [loi d'organisation judiciaire du 12 décembre 1979 ; RSV 173.01]).
1.2 En l’espèce, le recours a été interjeté en temps utile devant l’autorité compétente et satisfait aux conditions de forme posées par l’art. 385 al. 1 CPP. Il est dès lors recevable.
2.
2.1 Dans un grief d’ordre formel, G.____ reproche au Ministère public de ne pas lui avoir imparti un ultime délai, même bref, avant de rendre la décision lui déniant la qualité de partie plaignante.
2.2 Selon l’art. 92 CPP, les autorités peuvent prolonger les délais ou ajourner les termes qu’elles ont fixés, d’office ou sur demande. La demande doit être présentée avant l’expiration des délais et être suffisamment motivée. Si elle n’est pas motivée, elle devra être déclarée irrecevable. Si elle est motivée, il appartiendra à l’autorité d’apprécier si les circonstances évoquées justifient une prolongation de délai ou un ajournement du terme. L’autorité dispose à cet égard d’un libre pouvoir d’appréciation, limité uniquement par l’arbitraire. Ainsi, l’art. 92 CPP ne confère pas à la partie un droit absolu à la prolongation du délai ou à l’ajournement d’un terme même s’il s’agit d’une première demande (Stoll, in : Jeanneret/Kuhn/Perrier Depeursinge [éd.], Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd., Bâle 2019, n. 6 ad art. 95 CPP). Les conditions pour obtenir une prolongation ou un ajournement sont cependant moins strictes que celles prévues pour obtenir la restitution d’un délai selon l’art. 94 CPP. Il n’est notamment pas nécessaire d’établir que la partie est empêchée d’agir dans le délai sans sa faute (Stoll, op. cit., n. 7 ad art. 92 CPP).
Pour prendre sa décision, l’autorité doit peser l’ensemble des intérêts en présence, une réserve particulière s’imposant lorsque le prévenu est placé en détention (cf. art. 5 al. 2 CPP) ou que l’on s’approche de la prescription de l’action pénale. En revanche, lorsque la procédure n’est pas particulièrement urgente, il suffira que le requérant fasse valoir, à l’appui d’une première demande de prolongation de délai, des motifs plausibles pour lesquels il n’est pas en mesure de respecter le délai (Riedo, in : Niggli/Heer/Wiprächtiger (éd.), Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Jugendstrafprozessordnung, 2e éd., Bâle 2014, n. 23 et 24 ad art. 92 CPP ; StolI, op. cit., n. 7 ad art. 92 CPP). Sont plausibles, selon la jurisprudence, les raisons qui, selon l’expérience générale de la vie, apparaissent propres à empêcher le déroulement de la procédure conformément aux délais prévus. Parmi celles-ci figurent la maladie, l’hospitalisation, le décès, le service militaire, l’emprisonnement, mais aussi la surcharge de travail et le séjour à l’étranger (TF 6B_229/2015 du 30 avril 2015 consid. 1.1 et les références citées ; Riedo, op. cit., n. 24 ad art. 92 CPP et les références citées; Stoll, op. cit., n. 7 ad art. 92 CPP).
En cas de demandes réitérées de prolongation de délai, il convient de se montrer plus strict que lors d’une première demande de prolongation. Ainsi, au regard du principe de célérité (art. 5 CPP), une nouvelle prolongation de délai ne pourra en règle générale pas être accordée pour le seul motif que le défenseur est surchargé (Riedo, op. cit., n. 25 ad art. 92 CPP). Cela étant, il apparaît souhaitable, pour des motifs de clarté, que l’autorité qui accorde une prolongation de délai indique qu’il s’agit d’une unique, respectivement de l’ultime prolongation. Dans ce cas, une nouvelle demande de prolongation ne sera acceptée qu’en cas d’urgence (Riedo, op. cit., n. 26 ad art. 92 CPP ; Stoll, op. cit., n. 7 ad art. 92 CPP; TF 5A_812/2010 du 3 août 2011, consid. 2.1 ; TF 6P.115/2006-6S.241/2006 du 17 août 2006, consid. 1). En principe, si l’autorité a indiqué clairement qu’il n’y aurait pas de prolongation (supplémentaire), compte tenu de l’urgence et des circonstances du cas d’espèce, la partie et son mandataire doivent veiller à agir dans le délai fixé. L'autorité veillera à écarter les demandes de prolongation dilatoires ou à caractère abusif (Moreillon/Parein-Reymond, Petit Commentaire du Code de procédure pénale, 2e éd., Bâle 2016, n. 4 ad art. 92 CPP et les références citées).
2.3 Le Ministère public a dénié la qualité de partie plaignante à G.____ en lien avec les infractions des art. 163 et 164 CP en retenant pour seule motivation qu’elle ne s’était pas déterminée sur cette question alors qu’elle avait été interpellée à ce sujet depuis le 28 juillet 2022.
En l’occurrence, la recourante a indiqué, le 8 mars 2022, par l’intermédiaire de son précédent conseil, Me Yves Hofstetter, que le prévenu pourrait s’être rendu coupable des infractions réprimées par les art. 163 et 164 CP. En raison du départ à la retraite de son avocat début juillet 2022, le mandat a été repris par Me Géraldine Chapus-Rapin. Le 28 juillet 2022, la procureure a demandé des explications quant à la qualité de partie plaignante d’G.____. Après plusieurs échanges de courriers et deux prolongations de délai, G.____ a sollicité une ultime prolongation de délai tout en exposant que sa qualité de partie plaignante tenait à son statut de caution solidaire de certains actes signés par X.____, ainsi qu’à sa qualité de mère des enfants du prévenu et ex-épouse qui n'avait pas perçu l'entier des pensions alimentaires dues. Par avis du 7 novembre 2022, la procureure a imparti un nouveau délai au 18 novembre 2022 à G.____. Elle a précisé qu’à défaut de réponse de sa part dans le délai imparti, elle la considérerait comme dénonciatrice. Le 17 novembre 2022, la recourante a encore sollicité une prolongation de délai invoquant une surcharge de travail.
Si l’on peut comprendre que les multiples prolongations de délai requises par la recourante, sur une longue durée, ont paru exagérées aux yeux de la procureure, celle-ci ne pouvait trancher la question de la qualité de partie sans avoir au préalable mentionné clairement qu'il n'y aurait plus de prolongation de délai. Elle devait offrir à G.____ une courte et ultime prolongation de délai en le faisant expressément savoir. Or, la procureure n'a pas donné cet avertissement.
Au vu de ce qui précède, une ultime prolongation de délai devait être accordée à G.____. Pour ce premier motif déjà, le recours doit être admis.
3.
3.1 La recourante soutient que ce serait à tort que la qualité de partie plaignante lui a été déniée, dès lors qu’il ressortirait du dossier pénal qu’elle serait créancière de la société N.____, en faillite, en raison notamment de la convention d'actionnaires signée entre elle et X.____ au mois de mars 2014 (recte mai 2014), de la convention de prêt signée le même mois, ainsi que de la convention de vente d'actions du mois de janvier 2019 (recte 2017) et du contrat de prêt y relatif. Elle expose que sa qualité de créancière découlerait également de la signature, en date du 16 mai 2014, d’un acte notarié de cautionnement solidaire en faveur de la société R.____, pour les éventuelles créances que la bénéficiaire de la caution pourrait avoir à l'encontre de la société N.____. G.____ a produit, à l’appui de son recours, un courrier daté du 11 mars 2020 de la R.____ lui signifiant qu’elle se réservait la possibilité de faire valoir ses droits relatifs à l’acte précité, ainsi qu’un courrier de l’Office des faillites de l’arrondissement de Lausanne du 11 juillet 2022.
3.2
3.2.1 Selon l'art. 104 al. 1 CPP, ont la qualité de partie le prévenu (let. a), la partie plaignante (let. b) et le Ministère public, lors des débats ou dans la procédure de recours (let. c).
On entend par partie plaignante le lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale comme demandeur au pénal ou au civil (art. 118 al. 1 CPP). La notion de lésé est quant à elle définie à l’art. 115 CPP. Il s’agit de toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction (ATF 145 IV 491 consid. 2.3, JdT 2020 IV 65 ; ATF 143 IV 77 consid. 2.2 ; ATF 141 IV 454 consid. 2.3.1 ; TF 1B_537/2021 du 13 janvier 2022 consid. 2.1 ; TF 6B_103/2021 du 26 avril 2021 consid. 1.1). En règle générale, seul peut se prévaloir d'une atteinte directe le titulaire du bien juridique protégé par la disposition pénale qui a été enfreinte (ATF 148 IV 256 consid. 3.1 ; ATF 141 IV 454 consid. 2.3.1). Les droits touchés sont les biens juridiques individuels tels que la vie et l'intégrité corporelle, la propriété, l'honneur, etc. (ATF 141 IV 1 consid. 3.1). Pour être directement touché, le lésé doit en outre subir une atteinte en rapport de causalité directe avec l'infraction poursuivie, ce qui exclut les dommages par ricochet (TF 6B_988/2021 du 2 février 2022 consid. 1.1; TF 6B_103/2021 du 26 avril 2021 consid. 1.1 ; TF 6B_608/2020 du 4 décembre 2020 consid. 3.1).
3.2.2 A teneur de l'art. 163 ch. 1 CP, le débiteur qui, de manière à causer un dommage à ses créanciers, aura diminué fictivement son actif, notamment en distrayant ou en dissimulant des valeurs patrimoniales, en invoquant des dettes supposées, en reconnaissant des créances fictives ou en incitant un tiers à les produire sera, s'il a été déclaré en faillite ou si un acte de défaut de biens a été dressé contre lui, puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
Pour que les éléments constitutifs de l'art. 163 CP soient réunis, il faut que le débiteur ait été déclaré en faillite ou qu'un acte de défaut de biens ait été dressé contre lui (Dupuis et al., Petit commentaire du Code pénal, 2e éd. 2017, n. 11 ad rem. prél. aux art. 163 à 171 CP). Il s'agit-là d'une condition objective de punissabilité (ATF 109 Ib 317 consid. 11c, JdT 1985 IV 32 ; Dupuis et al., op. cit., n. 7 ad rem. prél. aux art. 163 à 171 CP).
L'art. 164 CP réprime tout comportement qui a eu pour effet de diminuer l'actif destiné à désintéresser les créanciers. Le débiteur menacé d'insolvabilité ou de faillite a un devoir de sauvegarder pour ses créanciers le patrimoine qui subsiste (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3e éd., Berne 2010, n. 1 et 4 ad art. 163 CP). L'art. 164 CP implique une diminution effective de la valeur économique disponible pour désintéresser les créanciers. Cette disposition envisage en particulier une aliénation sans contrepartie correspondante (Corboz, op. cit., n. 4 et 13 ad art. 164 CP et les références citées). L'art. 164 CP, à l'instar de l'art. 163 CP, constitue une infraction de mise en danger concrète. Il n'est donc pas nécessaire qu'un dommage concret survienne, c'est-à-dire que les créanciers subissent en définitive des pertes (Corboz, op. cit., n. 1 et 6 ad art. 163 CP et les références citées). Un préjudice au détriment des créanciers peut déjà résulter des retards ou des difficultés apportées temporairement à l'exécution forcée (ATF 102 IV 172 consid. 3, JdT 1977 IV 136).
3.2.3 Les infractions de banqueroute frauduleuse et fraude dans la saisie et de diminution effective de l’actif au préjudice des créanciers, qui figurent parmi les infractions contre le patrimoine (art. 137 à 172ter CP), tendent à protéger le patrimoine des créanciers et la poursuite pour dettes elle-même, en tant que moyen d'assurer le respect des droits de ces derniers (TF 6B_551/2015 du 24 février 2016 consid. 1.2 et les référence citées ; Corboz, op. cit., n. 1 ad art. 163 CP; Hagenstein, in : Basler Kommentar, Strafrecht, 4e éd. 2019, n. 1 ad art. 163 CP ; cf. aussi Jeanneret/Hari, in : Commentaire romand, Code pénal II, 2017, n. 4 ss ad art. 163 et 164 CP). Les créanciers individuels directement touchés sont donc légitimés à se constituer partie plaignante dans la procédure pénale (TF 6B_1024/2016 du 17 novembre 2017 consid. 1.2 et les références citées).
Dans un arrêt non publié (TF 6B_1024/2016 du 17 novembre 2017), le Tribunal fédéral a reconnu la qualité de lésée et de partie plaignante à une personne titulaire d'une créance à l'encontre d’une société anonyme – découlant de leurs rapports contractuels –, créance qu’elle avait produite dans la faillite. La Haute Cour a considéré que la recourante était fondée à soutenir, en tant que créancière individuelle, qu’elle avait été directement atteinte dans ses droits patrimoniaux par les infractions de banqueroute frauduleuse et fraude dans la saisie et de diminution effective de l’actif au préjudice des créanciers qu'elle dénonçait (consid. 1.2).
3.3 En l'espèce, G.____ participe à la procédure en qualité de partie plaignante dans le cadre de l’instruction pénale ouverte contre X.____ pour violation d’une obligation d’entretien. Outre la plainte qu’elle a déposée pour les contributions d’entretien impayées, elle est également créancière de la société N.____, en faillite depuis le 16 décembre 2020, dont X.____ était l’un des actionnaires fondateur et administrateur jusqu’au 22 novembre 2018. Il ressort en particulier des pièces au dossier que la recourante a prêté un montant de 100’000 fr. au prévenu, selon contrat de prêt du 4 mai 2014 ; qu’ils se sont tous deux constitués caution solidaire, selon acte du 16 mai 2014, auprès de la R.____, en vue de garantir les engagements de N.____ à l’égard de cette assurance ; qu'elle a consenti un prêt de 215'000 fr. à cette même société selon contrat de prêt du 19 janvier 2017 et qu'elle a procédé à une convention de vente d'actions le même jour en faveur de la société S.____, alors représentée par le prévenu.
Ainsi, en ses qualités de créancière de N.____ et de X.____, ainsi que de caution solidaire, la recourante apparaît lésée par d'éventuels actes frauduleux commis par les responsables de la société dans le cadre de la faillite de N.____. En effet, s’il est établi que X.____ a distrait les avoirs de la société faillie en percevant des revenus et des montants par l’intermédiaire de la société N.____ qui auraient pu désintéresser des créanciers, dont G.____, ce comportement est susceptible d’avoir vidé N.____ de sa substance et causé un préjudice au patrimoine de la recourante.
Compte tenu de ce qui précède et conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral précitée, G.____ est fondée à soutenir, en tant que créancière individuelle, avoir été directement atteinte dans ses droits patrimoniaux par les infractions qu'elle dénonce. Elle a ainsi qualité de lésée au sens de l'art. 115 CPP et de partie plaignante au sens de l'art. 118 CPP.
C’est ainsi à tort que le Ministère public a dénié la qualité de partie plaignante à G.____ en relation avec les infractions sanctionnées par les art. 163 et 164 CP. Pour ce second motif, le recours doit également être admis.
4. Il résulte de ce qui précède que le recours doit être admis. Toutefois, par souci d’économie de procédure, il n’y a pas lieu d’annuler la décision entreprise et de renvoyer la cause au Ministère public. La décision du 18 novembre 2022 sera réformée en ce sens qu’G.____ est admise en qualité de partie plaignante dans le cadre de l’enquête dirigée contre X.____ également s’agissant des infractions de banqueroute frauduleuse et fraude dans la saisie et diminution effective de l’actif au préjudice des créanciers.
Les frais de la procédure de recours, constitués en l’espèce de l’émolument d'arrêt (art. 422 al. 1 CPP), par 1’650 fr. (art. 20 al. 1 TFIP [tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; BLV 312.03.1]), seront laissés à la charge de l’Etat (art. 428 al. 4 CPP).
La recourante, qui obtient gain de cause et qui a procédé avec l’assistance d’un mandataire professionnel, a droit à une indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure de recours (art. 433 al. 1 CPP, par renvoi de l’art. 436 al. 1 CPP). Au vu du mémoire produit, les honoraires doivent être fixés à 900 fr., pour trois heures d’activité nécessaire d’avocat au tarif horaire de 300 fr., auxquels il convient d’ajouter des débours forfaitaires à concurrence de 2 % (art. 19 al. 2 TDC [tarif des dépens en matière civile du 23 novembre 2010 ; BLV 270.11.6], applicable par renvoi de l’art. 26a al. 6 TFIP), par 18 fr., plus un montant correspondant à la TVA, par 70 fr. 69, ce qui correspond à une indemnité d’un montant total de 989 fr. en chiffres arrondis. A l’instar des frais, cette indemnité sera laissée à la charge de l’Etat.
Par ces motifs,
la Chambre des recours pénale
prononce :
I. Le recours est admis.
II. La décision du 18 novembre 2022 est réformée en ce sens qu’G.____ est admise en qualité de partie plaignante dans l’enquête dirigée contre X.____ également pour les infractions de banqueroute frauduleuse et fraude dans la saisie et diminution effective de l’actif au préjudice des créanciers.
III. Une indemnité de 989 fr. (neuf cent huitante-neuf francs) est allouée à la recourante G.____ pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure de recours, à la charge de l’Etat.
IV. Les frais de la procédure de recours, par 1’650 fr. (mille six cent cinquante francs), sont laissés à la charge de l’Etat.
V. L’arrêt est exécutoire.
La présidente : La greffière :
Du
Le présent arrêt, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié, par l'envoi d'une copie complète, à :
- Me Géraldine Chapus-Rapin, avocate (pour G.____),
- Ministère public central,
et communiqué à :
Mme la Procureure de l’arrondissement de l’Est vaudois,
par l’envoi de photocopies.
Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral au sens des art. 78 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral ; RS 173.110). Ce recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète (art. 100 al. 1 LTF).
La greffière :
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