Zusammenfassung des Urteils Entscheid/2016/829: Kantonsgericht
Die Chambre des recours pénale hat am 25. November 2016 über einen Rechtsbehelf entschieden, der von M.________ gegen die Anordnung des Ministeriums für öffentliche Angelegenheiten, Abteilung spezielle Angelegenheiten, eingereicht wurde, in der es um die Geheimhaltungspflicht in einem Strafverfahren ging. In dem Fall ging es um eine Beschwerde wegen Verleumdung, die von Z.________ gegen M.________ eingereicht wurde. Der Beschwerdeführer argumentierte, dass die Anordnung der Geheimhaltung nicht zeitlich begrenzt war und seine Meinungsfreiheit sowie das Informationsrecht verletzte. Die Chambre des recours pénale entschied, dass die Geheimhaltungspflicht nicht auf den Beschuldigten oder seinen Anwalt angewendet werden konnte und dass die Anordnung nicht klar definiert war. Der Rechtsbehelf wurde daher angenommen, die Anordnung aufgehoben und die Kosten dem Beschwerdegegner auferlegt.
Kanton: | VD |
Fallnummer: | Entscheid/2016/829 |
Instanz: | Kantonsgericht |
Abteilung: | Chambre des recours pénale |
Datum: | 25.11.2016 |
Rechtskraft: | - |
Leitsatz/Stichwort: | - |
Schlagwörter : | édure; Obligation; énale; évenu; Ministère; Procureur; écis; Ordonnance; ôture; Prozessordnung; éposé; évue; érêt; écision; éterminations; Saxer/Thurnheer; Schweizerische; Moreillon/Parein-Reymond; édéral; éciales; Chambre; Exercice; éviter; Autorité |
Rechtsnorm: | Art. 105 StPo;Art. 108 StPo;Art. 165 StPo;Art. 382 StPo;Art. 385 StPo;Art. 428 StPo;Art. 436 StPo;Art. 73 StPo; |
Referenz BGE: | - |
Kommentar: |
| TRIBUNAL CANTONAL | 806 PE16.015034-LML |
CHAMBRE DES RECOURS PENALE
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Arrêt du 25 novembre 2016
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Composition : M. Maillard, président
MM. Krieger et Perrot, juges
Greffier : M. Graa
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Art. 73 al. 2 CPP
Statuant sur le recours interjeté le 6 octobre 2016 par M.__ contre l’ordonnance d’obligation de garder le secret rendue le 16 septembre 2016 par le Ministère public central, division affaires spéciales, dans la cause n° PE16.015034-LML, la Chambre des recours pénale considère :
En fait :
A. Le 14 juillet 2016, le [...]Z.__ a déposé plainte pénale contre M.__, [...], pour diffamation. Il reprochait à ce dernier d’avoir signé, dans le journal " [...]" du 22 mai 2016, deux articles, l’un dans la version papier et le second dans la version électronique de ce quotidien, faisant état de sa mise en cause dans une instruction pénale, pour escroquerie et faux dans les titres dans l’exercice de fonctions publiques.
Ces articles relataient en substance que Z.__ aurait, en 2004, instrumenté le testament d’une veuve fortunée, W.__, dont le curateur était son associé. Ce dernier, prévenu d’escroquerie, de gestion déloyale, de faux dans les titres et d’instigation à faux dans les titres commis dans l’exercice de fonctions publiques, aurait ensuite confié l’argent de sa pupille à sa propre société, présidée par Z.__. La testatrice n’aurait quant à elle pas eu conscience de confier ses biens à la société dirigée par les deux intéressés. En outre, les deux témoins ayant assisté à la rédaction de l’acte auraient été les bénéficiaires du testament.
b) Le 25 août 2016, le Procureur du Ministère public central, division affaires spéciales, a demandé à Z.__ de lui fournir une copie du testament litigieux.
Le 7 septembre 2016, Z.__ a transmis au Procureur la copie demandée, en réclamant que des mesures soient prises afin d’éviter la diffusion ou la publication du testament. Il a en particulier requis que M.__ soit soumis à une obligation de garder le secret concernant ce document, sous menace de la peine prévue à l’art. 292 CP.
Le 9 septembre 2016, le Procureur a ouvert une instruction pénale contre M.__ concernant les faits dénoncés.
B. Par ordonnance du 16 septembre 2016, le Procureur a ordonné aux parties ainsi qu’à leurs conseils juridiques, sous commination de la peine prévue à l’art. 292 CP, de garder le silence jusqu’à la clôture de la procédure sur celle-ci et sur les personnes impliquées (I) et dit que les frais suivaient le sort de la cause (II).
Il a considéré qu’il existait un intérêt tant privé que public à éviter la médiatisation de l’affaire concernant Z.__.
C. Par acte du 6 octobre 2016, M.__ a interjeté recours contre cette ordonnance en concluant, sous suite de dépens, principalement à son annulation en tant que l’obligation de garder le secret le concerne ainsi que son conseil, subsidiairement au renvoi de la cause au Ministère public pour nouvelle décision.
Le 16 novembre 2016, le Procureur a déposé des déterminations et conclu au rejet du recours.
Par acte du 18 novembre 2016, M.__ a répliqué aux déterminations du Ministère public.
Le 21 novembre 2016, Z.__ a déposé ses déterminations concernant le recours et conclu au rejet de celui-ci.
En droit :
1. Aux termes de l’art. 393 al. 1 let. a CPP (Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 ; RS 312.0), le recours est recevable contre les décisions et actes de procédure du ministère public. Une décision par laquelle le ministère public, en qualité d’autorité investie de la direction de la procédure (cf. art. 61 let. a CPP), statue sur l'obligation de garder le silence de l'art. 73 al. 2 CPP est ainsi susceptible de recours selon les art. 393 ss CPP (CREP 16 avril 2013/232 ; CREP 28 décembre 2012/814 ; Saxer/Thurnheer, in : Niggli/Heer/Wiprächtiger [éd.], Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Jugendstrafprozessordnung, 2e éd., Bâle 2014, n. 19 ad art. 73 CPP). Le recours doit être adressé par écrit, dans un délai de dix jours dès la notification de la décision attaquée (cf. art. 384 let. b CPP), à l’autorité de recours (art. 20 al. 1 let. b et 396 al. 1 CPP) qui est, dans le canton de Vaud, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal (art. 13 LVCPP [loi d'introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009 ; RSV 312.01] ; art. 80 LOJV [loi d'organisation judiciaire du 12 décembre 1979 ; RSV 173.01]).
En l’espèce, interjeté en temps utile auprès de l’autorité compétente par le prévenu qui a qualité pour recourir (art. 382 al. 1 CPP) et satisfaisant aux conditions de forme posées par l’art. 385 al. 1 CPP, le recours est recevable.
2. Dans un premier moyen, le recourant soutient que l’obligation de garder le silence ne peut lui être imposée, en sa qualité de prévenu, pas plus qu’à son conseil.
Dans un deuxième moyen, il reproche au Ministère public d’avoir ordonné une obligation de garder le silence non limitée dans le temps.
Enfin, le recourant estime que l’ordre de garder le silence violerait sa liberté d’expression et contreviendrait par ailleurs à la liberté d’information ainsi qu’à l’interdiction de la censure.
2.1 Aux termes de l’art. 73 al. 2 CPP, la direction de la procédure peut obliger la partie plaignante, d'autres participants à la procédure ainsi que leurs conseils juridiques, sous commination de la peine prévue à l'art. 292 CP, à garder le silence sur la procédure et sur les personnes impliquées, lorsque le but de la procédure ou un intérêt privé l'exige. Cette obligation doit être limitée dans le temps.
2.1.1 Parmi les « autres participants à la procédure », énumérés à l'art. 105 al. 1 CPP, ne figure pas le prévenu. La doctrine majoritaire considère ainsi que l’obligation de garder le silence au sens de l’art. 73 al. 2 CPP ne peut être imposée au prévenu et à son conseil (dans ce sens : Saxer/Thurnheer, op. cit., n. 13 ad art. 73 CPP ; Pitteloud, Code de procédure pénale suisse, Commentaire à l'usage des praticiens, Zurich/St-Gall 2012, n. 154 ad art. 73 ss CPP ; Piquerez/Macaluso, Procédure pénale suisse, 3e éd., Berne 2011, n. 1687 ; Jeanneret/Kuhn, Précis de procédure pénale, Berne 2013, nn. 5004-5005 ; Schmid, Schweizerische Strafprozessordnung, Praxiskommentar, 2e éd., Zurich/St-Gall 2013, n. 6 ad art. 73 CPP ; Riklin, StPO Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung mit JStPO, StBOG und weiteren Erlassen, 2e éd., Zürich 2014, n. 2 ad art. 73 CPP ; Brüschweiler, in : Donatsch/Hansjakob/Lieber [éd.], Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2e éd., Zurich 2014, n. 6 ad art. 73 CPP). Seul Antenen relève l’existence d’une incertitude à cet égard et estime que cette obligation pourrait s’appliquer au prévenu dans un cas où plusieurs prévenus seraient concernés mais où seul l’un d’eux aurait été interpellé (in : Kuhn/Jeanneret [éd.], Code de procédure pénale suisse, Commentaire romand, Bâle 2011, n. 6 ad art. 73 CPP), tandis que Moreillon/Parein-Reymond vont dans le sens d’une obligation applicable au prévenu, au même titre qu’aux autres parties, afin d’éviter une inégalité entre les parties dans la communication (Petit commentaire, Code de procédure pénale, 2e éd., Bâle 2016, n. 17 ad art. 73 CPP).
Le prévenu peut néanmoins se voir imposer une obligation de garder le silence à titre de mesure de substitution à sa libération (Jeanneret/Kuhn, op. cit., n. 5005), ou une interdiction de contact au sens de l’art. 237 al. 2 let. g CPP (cf. Riklin, op. cit., n. 2 ad art. 73 CPP ; Schmid, op. cit., n. 6 ad art. 73 CPP).
2.1.2 L'obligation de garder le secret a été consacrée par le législateur notamment en vue de permettre à la direction de la procédure de prendre des mesures en amont, destinées par exemple à mieux préserver les droits de la personnalité et la présomption d'innocence (Saxer/Thurnheer, op. cit., n. 4 ad art. 73 CPP). Le texte de l'art. 73 al. 2 CPP n’indique pas la durée de l’obligation de garder le silence. Tout au plus précise-t-il que celle-ci doit être limitée dans le temps. Ce principe est fermement soutenu par la doctrine, qui considère que l'obligation peut être renouvelée en fonction des nécessités de la procédure (Antenen, op. cit., n. 11 ad art. 73 CPP ; Jeanneret/Kuhn, op. cit., n. 5004). Par ailleurs, l'obligation ne peut perdurer que tant et aussi longtemps que le but de la procédure ou l'intérêt privé qui en est à la base l'exige (Moreillon/Parein-Reymond, op. cit., n. 19 ad art. 73 CPP ; Brüschweiler, op. cit., n. 5 ad art. 73 CPP). Certains auteurs plaident pour une limite temporelle fixée par une date calendaire et non par l'accomplissement d'un acte procédural (Schmid, op. cit., n. 9 ad art. 73 CPP ; Saxer/Thurnheer, op. cit., n. 16 ad art. 73 CPP), tandis que Pitteloud estime qu'une limite relativement proche dans le temps et aisément déterminable devrait suffire (op. cit., n. 153 ad art. 73 ss CPP). Moreillon/Parein-Reymond considèrent quant à eux que, eu égard au principe de proportionnalité devant encadrer l'obligation de garder le silence, celle-ci ne peut être imposée tout au long de la procédure préliminaire (op. cit., n. 19 ad art. 73 CPP).
2.2 En l'espèce, il convient de constater, en suivant la doctrine largement majoritaire, qu'une obligation de garder le silence fondée sur l'art. 73 al. 2 CPP ne pouvait être imposée au recourant, qui revêt la qualité de prévenu dans la procédure en cause, ou à son conseil. On relèvera d'ailleurs que la présente affaire ne présente pas une configuration qui pourrait, selon une partie de la doctrine, justifier une application de cette disposition au prévenu. En conséquence, c'est à tort que le Procureur a imposé aux « parties », en y incluant M.__ et son conseil, l'obligation de garder le silence sous commination de la peine prévue à l'art. 292 CP.
Il découle de ce qui précède que le recours doit être admis sur ce point.
2.3 Par surabondance, on relèvera que l'ordonnance attaquée précise que l'obligation de garder le silence devra perdurer « jusqu'à la clôture de la procédure sur celle-ci et sur les personnes impliquées ». Une telle formulation s'avère en tout état de cause contraire à l'art. 73 al. 2, 2ème phrase CPP. En effet, la limite tracée par le Procureur ne correspond à aucun événement procédural prévisible à court terme ni à aucune date précise. En outre, la clôture de la procédure pourrait intervenir dans plusieurs mois, voire plusieurs années. Cas échéant, pendant tout ce temps, la proportionnalité de l'obligation de garder le silence et la justification de cette mesure ne seraient jamais réexaminées. On relèvera encore qu'au vu de la possibilité de renouveler ladite obligation en fonction des nécessités de la procédure, il ne se justifiait aucunement de fixer un terme si incertain.
La jurisprudence citée par le Procureur dans ses déterminations ne lui est d'aucun secours. En effet, l'arrêt en question (TF 1B_26/2014 du 12 décembre 2014) concerne l'injonction de garder le silence que peut adresser au témoin la direction de la procédure (art. 165 CPP). Or, les intérêts du témoin dans la procédure ne sont pas identiques à ceux du prévenu, et le bon déroulement de l'enquête peut justifier d'imposer au premier une obligation de garder le silence jusqu'à un stade procédural déterminé (Bähler, in : Niggli/Heer/Wiprächtiger [éd.], op. cit., n. 6 ad art. 165 CPP ; Dongois, in : Kuhn/Jeanneret [éd.], op. cit., n. 6 ad art. 165 CPP). En outre, dans l'arrêt en question, l'obligation avait été imposée jusqu'à la clôture de la « procédure préliminaire », ce qui constitue un terme notablement plus précis et proche dans le temps que la clôture de la « procédure », laquelle peut se prolonger jusqu'au jugement ou à l'épuisement des voies de recours.
En définitive, l'ordonnance du Ministère public contrevient aux exigences légales de l'art. 73 al. 2, 2ème phrase CPP, de sorte que le recours doit être également admis sur ce point.
2.4 Le recours devant déjà être admis pour les motifs exposés plus haut, la Cour de céans peut se dispenser d'examiner le troisième moyen du recourant, soit la conformité de l'obligation de garder le silence avec le droit supérieur, en particulier avec le droit à la liberté d'expression (art. 10 CEDH [Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; RS 0.101]), l'exigence d'une base légale pour la restriction des droits fondamentaux (art. 36 al. 1 Cst. [Constitution fédérale du 18 avril 1999 ; RS 101]) ou l'interdiction de la censure (art. 17 Cst.).
3. Il découle de ce qui précède que le recours doit être admis et l’ordonnance du 16 septembre 2016 annulée.
Il convient néanmoins de relever que le Ministère public dispose, pour autant que les conditions en soient remplies, de la possibilité de restreindre l'accès au dossier – ou à certaines pièces en particulier, comme le testament – aux parties, notamment au prévenu, pour une durée limitée (cf. art. 108 CPP).
4. Les frais de la procédure de recours, constitués en l'espèce de l'émolument d'arrêt, par 880 fr. (art. 20 al. 1 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; RSV 312.03.1]), seront mis à la charge de l’intimé, qui a conclu au rejet du recours et qui succombe (art. 428 al. 1 CPP).
Le recourant, qui a obtenu gain de cause et a procédé avec l'assistance de son défenseur de choix, a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits dans la procédure de recours (art. 429 al. 1 let. a CPP, applicable par renvoi de l’art. 436 al. 1 CPP). Trois heures d’activité seront retenues, sur la base d’un tarif horaire de 300 fr. (art. 26a al. 3 TFIP), soit un montant de 900 fr., plus un montant correspondant à la TVA, par 72 fr., soit un total de 972 fr., à la charge de l’intimé (art. 428 al. 1 CPP ; Moreillon/Parein-Reymond, op. cit., nn. 2-3 ad art. 436 CPP).
Par ces motifs,
la Chambre des recours pénale
prononce :
I. Le recours est admis.
II. L’ordonnance du 16 septembre 2016 est annulée.
III. Les frais du présent arrêt, par 880 fr. (huit cent huitante francs), sont mis à la charge de Z.__.
IV. Une indemnité de 972 fr. (neuf cent septante-deux francs) est allouée à M.__ pour la procédure de recours, à la charge de Z.__.
V. L’arrêt est exécutoire.
Le président : Le greffier :
Du
Le présent arrêt, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié, par l'envoi d'une copie complète, à :
- Me Nicolas Capt, avocat (pour M.__),
- Me Jacques Michod, avocat (pour Z.__),
- Ministère public central,
et communiqué à :
- M. le Procureur du Ministère public central, division affaires spéciales,
par l’envoi de photocopies.
Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral au sens des art. 78 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral – RS 173.110). Ce recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète (art. 100 al. 1 LTF).
Le greffier :
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