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Urteil Kantonsgericht (VD)

Kopfdaten
Kanton:VD
Fallnummer:2024/136
Instanz:Kantonsgericht
Abteilung:
Kantonsgericht Entscheid 2024/136 vom 26.09.2024 (VD)
Datum:26.09.2024
Rechtskraft:
Leitsatz/Stichwort:
Zusammenfassung : Zusammenfassung: Eine Arbeitnehmerin hatte einen Arbeitsunfall, bei dem sie sich am 22. August 2019 den rechten Knöchel brach. Trotz mehrerer Operationen und Therapien entwickelte sie chronische Schmerzen und psychische Probleme. Die Versicherung lehnte eine Invalidenrente ab, da sie der Meinung war, die Frau könne in angepassten Tätigkeiten arbeiten. Die Frau legte Einspruch ein und forderte eine volle Invalidenrente sowie eine Entschädigung für die erlittenen Schäden. Das Gericht entschied schliesslich, dass die Frau ab dem 1. September 2022 Anspruch auf eine Invalidenrente von 11% hat, lehnte jedoch eine Entschädigung für die Schäden ab.
Schlagwörter : Accident; Assuré; ’assuré; était; ’assurée; ’accident; édical; égrité; Intégrité; édecin; érieur; ’intégrité; égional; Assurance; écialiste; évaluation; Accidents; ’est; ’assurance; écision; édicale; ’évaluation; éolaire; équat
Rechtsnorm:Art. 1 UVG; Art. 100 BGG; Art. 16 SchKG; Art. 18 UVG; Art. 19 UVG; Art. 24 UVG; Art. 6 UVG; Art. 60 SchKG; Art. 7 SchKG; Art. 8 SchKG;
Referenz BGE:-
Kommentar:
Entscheid

TRIBUNAL CANTONAL

AA 13/23 - 103/2024

ZA23.005071



COUR DES ASSURANCES SOCIALES

_______________________

Arrêt du 26 septembre 2024

__________

Composition : Mme Durussel, présidente

M. Wiedler et Mme Livet, juges

Greffier : M. Germond

*****

Cause pendante entre :

T.____, à [...], recourante, représentée par Me Jean-Michel Duc, avocat à Lausanne,

et

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, à Lucerne, intimée, représentée par Me Didier Elsig, avocat à Lausanne.

_________

Art. 61 let. c LPGA ; 6 al. 1, 18 al. 1 et 24 al. 1 LAA ; 36 al. 1 - 2 OLAA


E n f a i t :

A. Le 22 août 2019, T.____ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née en [...], ouvrière trieuse auprès de la société W.____ SA depuis août 2018, a été victime d’un accident professionnel dans la halle de tri ; en s’encoublant sur un morceau de cellophane qui était par terre, son pied droit est resté coincé et quand elle a voulu le retirer sa cheville droite s’est tordue. Elle a séjourné à l’Hôpital de [...] du 22 au 26 août 2019.

La Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (ci-après : la CNA ou l’intimée) a pris le cas en charge.

Dans un rapport du 31 octobre 2019, la Dre A.______, médecin praticien, ayant prodigué les premiers soins le 22 août 2019, a indiqué que l’assurée lui avait déclaré avoir chuté en glissant sur une feuille plastique avec une torsion de sa cheville droite. Le diagnostic posé était celui de fracture-luxation tri-malléolaire de la cheville droite traitée en une réduction et une ostéosynthèse ouverte réalisées le 23 août 2019.

Aux termes d’un rapport du 31 janvier 2020, le Dr Z.____, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a indiqué que l’assurée avait été victime d’une fracture tri-malléolaire de la cheville droite, opérée à [...] en date du 22 (recte : 23) août 2019. L’intervention avait été marquée par des douleurs importantes immédiates et persistantes à six mois de l’intervention. L’assurée marchait avec une boiterie importante à droite. Le bilan radiologique récent montrait néanmoins une consolidation de cette fracture tri-malléolaire avec un matériel bien en place ainsi qu’une ostéopénie déjà relativement marquée au niveau des cheville et calcanéum droits. L’assurée présentait tous les stigmates, clinique et anamnestique, d’une algoneurodystrophie sévère au niveau de cette cheville droite. Elle avait été adressée à la Dre S.____, spécialiste en anesthésiologie et médecine intensive.

Dans un rapport du 12 février 2020, la Dre G.____, médecin praticien, a mentionné une bonne évolution de la fracture de la cheville droite mais lente moyennant un traitement alliant la physiothérapie et l’ergothérapie, sous antalgie. Il n’y avait pas encore de date prévue pour la reprise du travail.

Le 2 mars 2020, le Dr J.____, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, médecin-conseil de la CNA, a proposé un séjour de l’assurée auprès de la Clinique romande de réadaptation (CRR) de Sion afin de traiter cette algodystrophie floride.

Par rapport du 6 mars 2020, la Dre S.____ a indiqué que l’assurée présentait un problème d’algoneurodystrophie déjà sévère au niveau de la cheville droite. Elle suggérait la poursuite de la prise en charge par physiothérapie et ergothérapie ainsi que la réalisation d’une infiltration épidurale d’anesthésiques locaux et de Clonidine® afin d’évaluer une éventuelle prise en charge par neurostimulation. Cette infiltration avait été réalisée le 9 mars 2020 à l’Hôpital de [...] mais sans permettre la disparition des douleurs (notices téléphoniques des 10 et 20 mars 2020 de la CNA).

Le 17 mai 2020, l’assurée s’est annoncée auprès de l’Office de l’assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après : l’OAI).

Le 28 mai 2020, l’employeur a résilié les rapports de travail le liant à l’assurée au 31 juillet 2020.

Au terme d’un séjour de l’assurée à la CRR du 29 avril au 29 mai 2020, la situation n’était pas encore stabilisée du point de vue médical et des limitations fonctionnelles provisoires ont été retenues (rapport du 8 juin 2020 des Drs R.____, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, et E._____, médecin-assistant). Dans un rapport d’ergothérapie du 2 juin 2020, les médecins de la CRR ont indiqué qu’en raison de la persistance des douleurs durant le séjour, il n’avait pas vraiment été possible de mettre en place un programme de réadaptation.

Dans un rapport du 18 septembre 2020, la Dre I.____, médecin praticien, a diagnostiqué un syndrome douloureux régional chronique de la cheville droite. Le pronostic était défavorable en raison d’une probable composante fonctionnelle associée au syndrome douloureux régional complexe.

Dans un rapport du 9 novembre 2020, la Dre I.____ a fait part de l’absence d’amélioration depuis le séjour à la CRR. La situation devait être rediscutée lors de la prochaine consultation au mois de janvier 2021.

Selon une note médicale du 16 novembre 2020, la Dre V.____, médecin praticien, médecin-conseil de la CNA, a fait part d’une impasse thérapeutique chez l’assurée dont les plaintes ne s’expliquaient pas en totalité des suites de l’événement du 22 août 2019, ni par le syndrome douloureux régional complexe (CRPS) retenu à la CRR. L’assurée était suivie par un psychiatre et par un psychologue ; il était demandé un rapport médical, puis de faire évaluer le dossier par le psychiatre-conseil de la CNA.

Dans un rapport du 24 novembre 2020 consécutif à une consultation de l’assurée le jour précédent, le Dr Z.____ a indiqué que la situation était difficile chez sa patiente, marquée par une présence importante de douleurs qui semblaient être apparues dans les suites immédiates de l’opération et qui persistaient actuellement. Il n’avait pas de proposition thérapeutique.

Par rapport du 10 décembre 2020, le Dr H.____, spécialiste en psychiatrie et en psychothérapie, a diagnostiqué un épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques. A son avis, les troubles constatés étaient consécutifs au développement du syndrome de Sudeck. L’évolution était plutôt défavorable et l’assurée devait être revue par le Dr C.____ après l’arrêt d’activité du Dr H.____.

Par rapport du 11 février 2021, la Dre I.____ a confirmé ses précédents diagnostics en y ajoutant celui d’état dépressif et d’incertitude quant à l’avenir. L’évolution n’était pas favorable malgré de multiples tentatives de prise en charge par le Centre d’antalgie de l’Hôpital de [...]. Un suivi psychologique avait débuté mais en raison de multiples changements de thérapeutes, l’assurée avait choisi de ne pas le poursuivre pour le moment. Elle bénéficiait toutefois d’un suivi de soutien régulier auprès de la Dre I.____.

Dans un rapport du 24 février 2021, le Dr C.____, spécialiste en psychiatrie et en psychothérapie, a diagnostiqué un trouble dépressif récurrent, épisode actuel sévère sans symptômes psychotiques (F33.2) existant depuis 2020 dans le cadre de complications post opératoires d’un accident du travail. Le traitement était en cours d’adaptation avec l’introduction prochaine d’un somnifère. Le pronostic était défavorable et un retour au travail n'était pas envisageable.

Selon une note médicale du 1er mars 2021, le Dr D.____, spécialiste en psychiatrie et en psychothérapie, médecin-conseil de la CNA, a indiqué que l’évaluation psychosomatique de la CRR ne figurait pas au dossier et qu’il se prononcerait une fois la situation stabilisée du point de vue somatique et évaluerait la nécessité d’un examen psychiatrique.

Le 15 mars 2021, la CNA a reçu un résumé d’évolution, du 29 avril au 3 juin 2020, du Dr F.____, spécialiste en psychiatrie et en psychothérapie, médecin auprès du Service de psychosomatique de la CRR qui conclut à de probables troubles neurologiques fonctionnels chez une patiente ayant présenté un syndrome douloureux régional complexe.

Dans un rapport du 15 mars 2021, la Dre S.____ a indiqué que l’assurée avait débuté un nouveau suivi d’ergothérapie et qu’elle devait la recontacter en cas d’échec.

Par courriel du 4 avril 2021, la Dre I.____ a fait part à la gestionnaire en charge du cas à la CNA de l’absence d’évolution. Elle a joint un rapport du 17 mars 2021 de la Dre Y.____, spécialiste en neurologie.

Dans un rapport du 23 avril 2021, le Dr Z.____ s’est dit favorable à une prise en charge spécialisée en antalgie et a demandé à la CNA de refaire le point de situation.

Du 21 au 23 juin 2021, l’assurée a séjourné à la CRR. Dans leur rapport d’évaluation interdisciplinaire du 28 juin 2021, les Drs O._____, spécialiste en neurologie, et U.____, spécialiste en médecine interne, ont retenu les diagnostics de syndrome douloureux somatoforme persistant (F45.4) avec exclusion fonctionnelle du MID [membre inférieur droit], de syndrome douloureux régional complexe (SDRC) chronique de la cheville droite, forme froide (M89.07), de status post-entorse de la cheville droite avec fracture trimalléolaire après luxation de la cheville le 22 août 2019 et de migraines (épisodes sans aura ; G43.0). Sur la base de leur examen clinique, comprenant un examen neurologique dirigé et de la radiologie standard de contrôle, ils ont conclu à une consolidation acquise de la fracture tri-malléolaire de la cheville droite à bientôt deux ans de l’accident, avec un matériel d’ostéosynthèse en place, sans complication. L’évolution post-fracture était compliquée par un syndrome douloureux régional complexe (SDRC) chronique de la cheville droite, forme froide, avec au premier plan des douleurs de caractère neuropathique, sans lésion neurologique périphérique et une allodynie qui gagnait en territoire en dépit de l’important arsenal thérapeutique déployé. L’implication de l’assurée à l’évaluation des capacités fonctionnelles s’était réduite à la réalisation d’une performance minimale , si bien que les limitations douloureuses avaient diminué l’ensemble de l’évaluation. Dès lors qu’un trouble neurologique fonctionnel associé au syndrome douloureux régional complexe était avancé lors du précédent séjour à la CRR, les Drs O._____ et U.____ étaient d’avis que c’était essentiellement l’évaluation psychiatrique réalisée par le Dr F.____, spécialiste en psychiatrie, qui avait une valeur prépondérante. La situation médicale était désormais stabilisée. Les limitations fonctionnelles restaient superposables à celles mises en évidence lors du précédent séjour à la CRR, à savoir : « marche prolongée, sur terrain irrégulier, position accroupie et agenouillée sur le membre inférieur droit, utilisation de marches/escaliers, et port de charges ». En dépit des attentes de l’assurée de trouver un traitement efficace, l’expérience thérapeutique avait montré l’inaccessibilité de celle-ci à tout traitement depuis deux ans.

Dans un rapport du 26 novembre 2021, le Dr M.____, spécialiste en anesthésiologie, a confirmé son évaluation d’une forme froide d’un très probable syndrome douloureux régional complexe à la suite d’une fracture de la cheville. Le premier bloc sympathique lombaire droit du 26 novembre 2021 avait permis une augmentation de 5 degrés de la température du pied, si bien que ce bloc positif était ressenti comme agréable.

Dans un rapport du 29 juillet 2022 à la Dre I.____, le Dr M.____ a confirmé l’arrêt du traitement de l’assurée par le Centre d’antalgie du CHUV, laquelle avait l’impression d’être un cobaye.

Le 3 août 2022, la Dre V.____ a fait un rapport d’examen final. Elle a posé les diagnostics de douleurs du MID [membre inférieur droit] (dans les suites d’une entorse de la cheville droite avec fracture trimalléolaire après luxation de la cheville le 22 août 2019 ayant nécessité une réduction ouverte et ostéosynthèse trimalléolaire de la cheville droite le 23 août 2019 et des infiltrations épidurales d’anesthésique local et de Clonidine en traitement antalgique et d’une éventuelle pose d’un neurostimulateur en mars 2020) et de syndrome douloureux régional complexe chronique de la cheville droite forme froide. Les diagnostics secondaires étaient un syndrome douloureux somatoforme persistant avec exclusion fonctionnelle, des migraines avec épisodes sans aura, des céphalées/migraines sur abus médicamenteux, un état dépressif selon le psychiatre traitant, un asthme allergique et un tabagisme actif. La Dre V.____ a relevé que la situation était stabilisée et que l’assurée ne souhaitait pas essayer de traitement antalgique. Les limitations fonctionnelles retenues étaient pas de marche répétée ou prolongée, pas de marche en terrains irréguliers, pas de position accroupie ou à genoux, pas de position statique debout, pas de montée/descente d’échelles et de ports de charges. L’exclusion du membre inférieur droit et le syndrome douloureux somatoforme retenus lors de l’évaluation interdisciplinaire en juin 2021 ne pouvaient pas être pris en compte dans l’appréciation des limitations fonctionnelles. Pour les seules suites de l’événement du 22 août 2019, la capacité de travail était totale dans une activité adaptée respectant strictement les limitations fonctionnelles décrites en lien avec la fracture trimalléolaire de la cheville droite. L’activité habituelle d’employée dans une usine de tri de papier n’était plus exigible de la part de l’assurée. Par ailleurs, ni le substrat lésionnel initial, ni le syndrome douloureux régional complexe n’expliquaient le tableau douloureux chronique qui s’étendait et s’aggravait au fil du temps. Pour les seules suites de l’événement du 22 août 2019 et uniquement sur la base des atteintes objectivables, l’assurée ne présentait aucune séquelle correspondant à un taux d’indemnité pour atteinte à l’intégrité selon les tables d’indemnisation pour atteintes à l’intégrité selon l’assurance-accidents, les séquelles du syndrome douloureux régional complexe n’y figurant pas.

Le 4 août 2022, la CNA a écrit à l’assurée que la situation médicale était stabilisée et qu’elle mettrait fin à la prise en charge du traitement et aux indemnités journalières au 31 août 2022. Elle statuerait ultérieurement sur le droit de l’intéressée à d’autres prestations.

Par décision du 19 août 2022 notifiée à l’avocat Me Jean-Michel Duc, la CNA a refusé le droit à une rente d’invalidité de l’assurance-accidents. Concernant les suites de son accident, l’assurée était en mesure d’exercer une activité dans différents secteurs de l’industrie à la condition de ne pas faire de marche répétée ou prolongée, de ne pas réaliser de marche en terrains irréguliers, d’éviter la position accroupie ou à genoux ainsi que la position statique debout, de ne pas effectuer de montée/descente d’échelles et d’éviter le port des charges. Conformément à l’art. 16 LPGA (loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales ; RS 830.1), il résultait de la comparaison entre les revenus sans et avec invalidité exigibles, une perte de gain de 8 % non susceptible de lui ouvrir le droit à la rente. La CNA a également refusé d’allouer une indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) sur la base des constatations de l’examen final du 3 août 2022 retenant l’absence d’une atteinte importante à l’intégrité physique.

Dans son opposition formée le 16 septembre 2022, l’assurée, assistée de son conseil, a fait valoir qu’elle souffrait de douleurs totalement invalidantes, et particulièrement d'un syndrome douloureux régional complexe qui s'était aggravé en raison d'un traitement médical inadéquat et contraire aux règles de l'art mis en œuvre par la CRR alors que le suivi d’une physiothérapie intensive durant quatre semaines devait absolument être évité. Elle demandait l'octroi d'une rente d'invalidité de l’assurance-accidents et d'une indemnité pour atteinte à l'intégrité, tenant la CNA responsable de son invalidité totale, ainsi que la mise en œuvre d’une expertise médicale indépendante.

Par projet de décision du 20 décembre 2022, l’OAI a fait part à l’assurée de son intention de lui reconnaître le droit à une rente entière d’invalidité dès le 1er novembre 2020.

Par décision sur opposition du 6 janvier 2023, la CNA a partiellement admis l’opposition et réformé sa décision du 19 août 2022 en ce sens que l’assurée a droit à une rente d’invalidité de l’assurance-accidents de 11 % dès le 1er septembre 2022, la comparaison entre les revenus nouvellement calculés d'invalide et de valide de 48'965 fr. et de 55'201 fr. mettant en évidence une perte de gain de 11.30 %. Pour le reste, la CNA a confirmé son refus d’octroi d’une indemnité pour atteinte à l’intégrité. Elle a précisé que les thérapies mises en place par les spécialistes en réadaptation de la CRR reposaient sur des indications médicales en sorte que les accusations de l’assurée étaient injustifiées. Enfin, l'instruction médicale du cas diligentée par la CNA était suffisante sans nécessiter la mise en œuvre d’une expertise.

B. Par acte du 6 février 2023, T.____, représentée par Me Jean-Michel Duc, a déféré cette décision sur opposition devant la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal, concluant à sa réforme en ce sens que la CNA est condamnée à lui allouer de plus amples prestations de l’assurance-accidents. Subsidiairement, elle a conclu à son annulation et au renvoi de la cause à la CNA pour complément d’instruction et nouvelle décision. En substance, elle a reproché à la CNA d’avoir mal instruit son cas sur le plan médical, contestant la valeur probante de l’examen final du 3 août 2022 réalisé par la Dre V.____ en lui opposant les avis des Drs I.____, O._____ et U.____ de la CRR, du médecin-conseil du SMR, du Dr Z.____ et du Dr C.____. Elle a nié bénéficier d’une capacité de travail entière dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles, étant d’avis qu’à défaut de retenir une incapacité totale de travail en toute activité, la réalisation d’une expertise médicale bidisciplinaire (orthopédie et psychiatrie) se justifiait. Sur le plan médical, elle alléguait par ailleurs que le lien de causalité entre l’accident du 22 août 2019 et ses atteintes à la santé persistantes était établi. S’agissant du calcul de son degré d’invalidité déterminant le droit à une rente d’invalidité de l’assurance-accidents, la recourante invoquait la prise en compte d’un abattement de 20 % au moins, et non 10 %, pour le calcul du revenu d’invalide. Selon ses propres chiffres, elle prétendait à l’octroi d’une rente entière d’invalidité, subsidiairement à une rente partielle de 21,15 %. Enfin, rappelant qu’elle présentait un syndrome douloureux régional complexe d’une étendue hors du commun selon les constatations de la CRR, elle estimait avoir le droit à une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 70 %, à savoir 50 % en lien avec la perte fonctionnelle totale de son membre inférieur droit et 20 % pour les troubles psychiques y relatifs. A titre de mesures d’instruction, elle a requis la production par la CRR de son dossier ainsi que de celui en mains de l’OAI, la mise en œuvre d’une expertise bidisciplinaire (orthopédie et psychiatrie) ainsi que la tenue de débats publics conformément à l’art. 6 § 1 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; RS 0.101).

Dans sa réponse du 19 avril 2023, la CNA, représentée par Me Didier Elsig, a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision sur opposition attaquée. L’intimée a produit son dossier.

Dans sa réplique du 30 mai 2023, la recourante a maintenu ses précédentes conclusions et offres de preuves. Elle a produit, le 27 juillet 2023, un rapport du 18 juillet 2023 établi par le Dr Z.____ qui, se référant à la table 2 établie par la Division médicale de la CNA, évaluait le taux d’atteinte à l’intégrité de 15 à 30 %. Il a ajouté que, sur la base de la table 4, l’indemnisation était de 35 %. En présence d’une articulation de la cheville bloquée, extrêmement douloureuse avec une gêne fonctionnelle et des douleurs importantes, ce médecin évaluait pour sa part le taux d’atteinte à l’intégrité à 30 %.

Dans sa duplique du 15 août 2023, la CNA a confirmé les conclusions prises à l’appui de son mémoire-réponse. Elle observait en particulier qu’en présence de l’accident insignifiant survenu le 22 août 2019, l’existence d’un lien de causalité adéquate entre l’accident assuré et les troubles psychiques devait être niée. En l’absence de lien de causalité entre l’accident et les troubles psychogènes dont le syndrome douloureux somatoforme persistant avec exclusion du membre inférieur droit faisait partie et qui ne pouvait pas être pris en compte pour l’évaluation du taux de l’atteinte à l’intégrité, l’intimée a confirmé son refus du droit à une indemnité pour atteinte à l’intégrité compte tenu de la fracture tri-malléolaire de la cheville droite qui était consolidée, comme en attestait le Dr Z.____.

Par courrier du 6 novembre 2023, la juge instructrice a refusé la demande de production de l’intégralité du dossier de l’assurance-invalidité et a invité la recourante à produire les pièces utiles du dossier AI. La recourante a fait savoir, le 10 novembre 2023, qu’elle n’avait pas de pièces supplémentaires à produire et qu’elle maintenait sa demande de débats publics.

Une audience de débats publics a eu lieu le 26 septembre 2024, lors de laquelle la recourante a eu la possibilité d’être entendue. Lors de l’audience, son avocat a produit un extrait de la Revue valaisanne de jurisprudence (RVJ / ZWR 2024 p. 93 s.), un certificat du 6 août 2024 du Dr B.____, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie d'enfants et d'adolescents, attestant du suivi par la recourante d’un traitement psychiatrique régulier depuis le 27 novembre 2023 en raison d’un épisode dépressif moyen avec syndrome somatique, ainsi qu’un rapport du 15 août 2024 de la Dre N._______, spécialiste en rhumatologie, consécutif aux consultations de l’intéressée des 31 mai, 11 juin et 26 juillet 2024 et qui n’avait pas prévu de la revoir mais qui se tenait à disposition pour réévaluer la situation le cas échéant. Son avocat a ensuite plaidé pour la recourante.

E n d r o i t :

1. a) La LPGA (loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales ; RS 830.1) est, sauf dérogation expresse, applicable en matière d’assurance-accidents (art. 1 al. 1 LAA [loi fédérale du 20 mars 1981 sur l’assurance-accidents ; RS 832.20]). Les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l’opposition n’est pas ouverte peuvent faire l’objet d’un recours auprès du tribunal des assurances compétent (art. 56 et 58 LPGA), dans les trente jours suivant leur notification (art. 60 al. 1 LPGA).

b) En l’occurrence, déposé en temps utile auprès du tribunal compétent (art. 93 let. a LPA-VD [loi cantonale vaudoise du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative ; BLV 173.36]) et respectant les autres conditions formelles prévues par la loi (art. 61 let. b LPGA notamment), le recours est recevable.

2. Le litige porte sur le lien de causalité entre les atteintes à la santé et l’accident, le degré d’invalidité et le droit à une indemnité pour atteinte à l’intégrité.

3. a) Aux termes de l’art. 6 al. 1 LAA, si la loi n’en dispose pas autrement, les prestations d’assurance sont allouées en cas d’accident professionnel, d’accident non professionnel et de maladie professionnelle. Parmi ces prestations figurent notamment le versement d’une rente d’invalidité (art. 18 al. 1 LAA) et une indemnité pour atteinte à l’intégrité (art. 24 al. 1 LAA).

b) Le droit à des prestations découlant d’un accident assuré suppose un lien de causalité naturelle entre l’événement dommageable de caractère accidentel et l’atteinte à la santé. Cette exigence est remplie lorsqu’il y a lieu d’admettre que le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu’il ne serait pas survenu de la même manière sans l’événement accidentel. Il n’est pas nécessaire, en revanche, que l’accident soit la cause unique ou immédiate de l’atteinte à la santé ; il faut et il suffit que l’événement dommageable, associé éventuellement à d’autres facteurs, ait provoqué l’atteinte à la santé physique, mentale ou psychique de la personne assurée, c’est-à-dire qu’il se présente comme la condition sine qua non de celle-ci (ATF 148 V 138 consid. 5.1.1 ; 142 V 435 consid. 1 et les références ; TF 8C_559/2023 du 19 février 2024 consid. 3.1). Savoir si l’événement assuré et l’atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait que l’administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d’ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l’appréciation des preuves dans le droit des assurances sociales (ATF 142 V 435 consid. 1 et les références). Il ne suffit pas que l’existence d’un rapport de cause à effet soit simplement possible ; elle doit pouvoir être qualifiée de probable dans le cas particulier (ATF 129 V 177 consid. 3.1).

c) Le droit à des prestations de l’assurance-accidents suppose en outre l’existence d’un lien de causalité adéquate entre l’accident et l’atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s’est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 148 V 138 consid. 5.1.1 et les références).

En matière de troubles physiques, la causalité adéquate se confond pratiquement avec la causalité naturelle (ATF 140 V 356 consid. 3.2 et la référence ; TF 8C_404/2020 du 11 juin 2021 consid. 6.2.1).

d) Le syndrome douloureux régional complexe (SDRC) appartient aux maladies neurologiques, orthopédiques et traumatologiques et constitue ainsi une atteinte à la santé physique, respectivement corporelle (cf. TF 8C_188/2015 du 2 décembre 2015 consid. 4.2.3). Pour admettre un lien de causalité entre l’accident et un syndrome douloureux régional complexe, le Tribunal fédéral a considéré que trois critères cumulatifs doivent être remplis, à savoir (TF 8C_416/2019 du 15 juillet 2020 consid. 5.2.1 ; 8C_730/2017 du 14 août 2018 consid. 4.2 et les références) :

a) la preuve d’une lésion physique après un accident (p. ex. un hématome ou une enflure) ou l’apparition d’une algodystrophie à la suite d’une opération nécessitée par l’accident;

b) l’absence d’un autre facteur causal de nature non traumatique (p. ex. état après infarctus du myocarde, après une apoplexie, etc.);

c) une courte période de latence entre l’accident et l’apparition de l’algodystrophie, soit au maximum six à huit semaines.

4. a) Dans le domaine des assurances sociales, le juge fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d’un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l’exactitude d’une allégation, sans que d’autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n’entrent raisonnablement en considération (ATF 144 V 427 consid. 3.2 ; 139 V 176 consid. 5.3 et les références citées).

b) Il découle de l’art. 61 let. c LPGA que le juge apprécie librement les preuves médicales, en procédant à une appréciation complète et rigoureuse, sans être lié par des règles formelles. Le juge doit examiner objectivement tous les documents à disposition, quelle que soit leur provenance, puis décider s’ils permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. S’il existe des avis contradictoires, il ne peut trancher l’affaire sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion plutôt qu’une autre.

c) En ce qui concerne la valeur probante d’un rapport médical, il est déterminant que les points litigieux aient fait l’objet d’une étude circonstanciée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées par la personne examinée, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description du contexte médical et l’appréciation de la situation médicale soient claires et enfin que les conclusions soient bien motivées. Au demeurant, l’élément déterminant pour la valeur probante, n’est ni l’origine du moyen de preuve, ni sa désignation comme rapport ou comme expertise, mais bel et bien son contenu (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 125 V 351 consid. 3a ; TF 8C_510/2020 du 15 avril 2021 consid. 2.4).

d) Selon la jurisprudence constante, les médecins d'arrondissement ainsi que les spécialistes du centre de compétence de la médecine des assurances de la CNA sont considérés, de par leur fonction et leur position professionnelle, comme étant des spécialistes en matière de traumatologie, indépendamment de leur spécialisation médicale (TF 8C_ 626/2021 du 19 janvier 2022 ; 8C_108/2020 du 22 décembre 2020 consid. 4.4.2 ; 8C_59/2020 du 14 avril 2020 consid. 5.2; 8C_316/2019 du 24 octobre 2019 consid. 5.4 et les références citées).

5. a) En l’espèce, il y a lieu de constater en premier lieu que la recourante ne conteste pas l’appréciation de l’intimée, fondée notamment sur les conclusions de la Dre V.____ du 3 août 2022 selon laquelle, il existe un lien de causalité naturelle et adéquate entre l’accident du 22 août 2019 et les atteintes à la santé physique. Dans un rapport du 31 janvier 2020 consécutif à une consultation du 28 janvier 2020, le DrZ.____ a indiqué que l’assurée avait été victime d’une fracture tri-malléolaire de la cheville droite, opérée à [...] en date du 22 (recte : 23) août 2019. L’intervention avait été marquée par des douleurs importantes en post-opératoire immédiat et qui persistaient à six mois de l’opération. Selon le Dr Z.____, l’assurée présentait tous les stigmates, clinique et anamnestique, d’une algoneurodystrophie sévère, au niveau de cette cheville droite. Le 2 mars 2020, le médecin-conseil de la CNA (le Dr J.____) a proposé un séjour de l’assurée auprès de la CRR afin de traiter l’algodystrophie floride apparue dans les suites de l’accident d’août 2019 en l’absence d’un autre facteur extérieur d’origine non traumatique. Lors de sa consultation d’antalgie le 3 mars 2020 (rapport du 6 mars 2020), la Dre S.____ a indiqué que l’assurée présentait très clairement un problème d’algoneurodystrophie déjà sévère au niveau de la cheville droite. Le 8 juin 2020, les Drs R.____ et E._____ ont diagnostiqué une torsion de la cheville droite au travail le 22 août 2019 avec fracture tri-malléolaire et luxation de la cheville ainsi qu’un SDRC (syndrome douloureux régional complexe) de la cheville droite, avec probables troubles neurologiques fonctionnels associés. Sur le plan orthopédique, le syndrome douloureux régional complexe était confirmé compte tenu des critères de Budapest remplis en l’espèce. Dans ces conditions, il convient de confirmer l’existence d’un lien de causalité entre le syndrome douloureux régional complexe chronique de la cheville droite forme froide et l’accident du 22 août 2019, selon la jurisprudence rappelée ci-avant (cf. consid. 3d supra), les critères étant remplis dans le cas d’espèce.

b) Pour le reste, la fracture tri-malléolaire après luxation de la cheville le 22 août 2019 est également en lien de causalité naturelle et adéquate avec l’accident assuré.

6. a) La recourante fait valoir que l’intimée n’a, à tort, pas admis l’existence d’un lien de causalité adéquate entre l’accident d’août 2019 et ses atteintes à la santé psychique, et invoque une violation crasse de son devoir d’instruire le cas.

b) En vue de juger du caractère adéquat du lien de causalité entre un accident et une affection psychique additionnelle à une atteinte à la santé physique, il faut d’abord classer les accidents en trois catégories, en fonction de leur déroulement : les accidents insignifiants ou de peu de gravité, les accidents de gravité moyenne et les accidents graves. Pour procéder à cette classification, il convient non pas de s’attacher à la manière dont l’assuré a ressenti et assumé le choc traumatique, mais bien plutôt de se fonder, d’un point de vue objectif, sur l’événement accidentel lui-même (ATF 115 V 133 consid. 6 ; 403 consid. 5). Le Tribunal fédéral a encore précisé que ce qui est déterminant à cet égard, ce sont les forces générées par l’accident et non pas les conséquences qui en résultent (ATF 148 V 301 consid. 4.3.1). La gravité des lésions subies – qui constitue l’un des critères objectifs définis pas la jurisprudence pour juger du caractère adéquat du lien de causalité – ne doit être prise en considération à ce stade de l’examen que dans la mesure où elle donne une indication sur les forces en jeu lors de l’accident (TF 8C_816/2021 du 2 mai 2022 consid. 5.2.1). Le caractère adéquat du lien de causalité ne peut être admis que si l’accident revêt une importance déterminante dans le déclenchement de l’affection psychique. Ainsi, lorsque l’événement accidentel est insignifiant, l’existence du lien en question peut d’emblée être niée, tandis qu’il y a lieu de le considérer comme établi, lorsque l’assuré est victime d’un accident grave. S’agissant d’un accident de gravité moyenne, il convient encore d’évaluer si d’autres circonstances objectives lui sont directement liées ou apparaissent comme des conséquences directes ou indirectes de celui-ci. De telles circonstances sont en effet elles-mêmes susceptibles, selon le cours ordinaire des choses et l’expérience générale de la vie, d’entraîner ou d’aggraver une incapacité de gain d’origine psychique en relation avec l’accident (ATF 115 V 133 consid. 6c/aa). Ainsi, la jurisprudence a dégagé un certain nombre de critères objectifs à prendre en considération pour l’examen du caractère adéquat du lien de causalité, dont les plus importants sont les suivants (ATF 129 V 402 consid. 4.4.1 et les références) :

les circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou le caractère particulièrement impressionnant de l’accident;

la gravité ou la nature particulière des lésions physiques, compte tenu notamment du fait qu’elles sont propres, selon l’expérience, à entraîner des troubles psychiques;

la durée anormalement longue du traitement médical;

les douleurs physiques persistantes;

les erreurs dans le traitement médical entraînant une aggravation notable des séquelles de l’accident;

les difficultés apparues au cours de la guérison et des complications importantes;

le degré et la durée de l’incapacité de travail due aux lésions physiques.

c) En l’espèce, il convient de préciser en premier lieu que, lors du séjour interdisciplinaire du 21 au 23 juin 2021 à la CRR, il a été constaté que l’assurée était envahie par ses douleurs qui avaient tendance à s’étendre proximalement sur le membre inférieur droit, étaient constantes et occasionnaient des céphalées lors de crises. Face à ces douleurs chroniques ubiquitaires amenant une certaine détresse, ayant un impact majeur sur le fonctionnement global, avec une exclusion complète du membre inférieur droit, le psychiatre de la CRR a diagnostiqué un syndrome douloureux somatoforme persistant (F45.4) avec exclusion fonctionnelle du membre inférieur droit. Cette appréciation divergeait de celle du psychiatre traitant retenant un épisode dépressif sévère sans symptôme psychotique ou trouble dépressif récurrent ; le Dr F.____ considérait que les quelques symptômes dépressifs relevaient d’un trouble de l’humeur qui étaient à inclure dans le syndrome douloureux somatoforme.

Concernant l’examen d’un lien de causalité adéquate entre les atteintes sur le plan psychique et l’accident, il ressort de la déclaration de sinistre complétée le 22 août 2019 que l’intéressée a chuté de sa propre hauteur dans la halle de tri de l’entreprise en s’encoublant sur un morceau de cellophane qui était par terre, que son pied droit est resté coincé et que sa cheville s’est tordue quand elle a voulu retirer son pied. En l’espèce, il s’agit d’un accident banal qui doit ainsi être qualifié de peu de gravité (voir par analogie TF 8C_510/2008 du 24 avril 2009 où le Tribunal fédéral a qualifié une chute banale ayant entraîné une entorse à la cheville d’accident insignifiant ou de peu de gravité). Dans ce contexte, on précisera que les exemples d’accidents qualifiés de gravité moyenne par le Tribunal fédéral cités par la recourante ne sont en aucune mesure comparables à l’entorse subie en l’espèce lors de la chute banale de sa propre hauteur après s’être encoublée sur un morceau de cellophane au sol.

Or, selon la jurisprudence, ce n'est qu'à titre exceptionnel qu'un accident de peu de gravité peut constituer la cause adéquate d'une incapacité de travail et de gain d'origine psychique. Il faut alors que les conséquences immédiates de l'accident soient susceptibles d'avoir entraîné les troubles psychiques et que les critères applicables en cas d'accident de gravité moyenne se cumulent ou revêtent une intensité particulière (TF 8C_510/2008 du 24 avril 2009 consid. 5.2 ; RAMA 1998 no U 297 p. 243, U 16/97, consid. 3b, et 1992 no U 154 p. 246, U 101/91, consid. 2c).

Tel n’est pas le cas en l’occurrence. Il n’existe aucune circonstance dramatique ou impressionnante concomitante à l’événement du 22 août 2019 (une chute banale occasionnant une entorse de la cheville droite). La lésion qui en est résulté (une fracture tri-malléolaire ayant nécessité une réduction ouverte et ostéosynthèse le 23 août 2019) ne peut être qualifiée de grave et n’a entraîné une incapacité de travail que d’une durée limitée dans le temps. En effet, si depuis l’accident l’assurée n'a plus été en mesure de reprendre son activité d’ouvrière dans une usine de tri de papier, elle est en revanche en mesure de reprendre le travail dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles compte tenu de la consolidation acquise de la fracture tri-malléolaire de la cheville droite avec un matériel d’ostéosynthèse en place, sans complication. Le caractère adéquat du lien de causalité doit en effet être examiné en excluant les aspects psychiques. La durée du traitement médical ne peut être qualifiée d’anormalement longue. Et il n’existe pas de douleurs physiques persistantes objectivées et revêtant l’intensité exceptionnelle requise en cas d’accident de gravité insignifiante.

Quant aux prétendues erreurs dans le traitement et aux complications importantes invoquées par la recourante, il convient de rappeler que de simples allégations d’une partie à la procédure ne suffisent pas à établir les faits en l’occurrence pas établis. Les conclusions qu’elle tire des tests effectués à l’entrée et à la sortie de la CRR quant à l’existence de difficultés ou complications importantes apparues au cours de la guérison ne sauraient être suivies. Les résultats des tests reposant sur des données subjectives, ils ne sont à l’évidence pas constitutifs de la preuve d’une erreur de traitement. Du reste, dans le rapport d’ergothérapie du 2 juin 2020 annexé à celui de sortie du 8 juin 2020, les médecins de la CRR ont bien indiqué qu’en raison de la persistance des douleurs durant le séjour de la recourante, il n’avait pas vraiment été possible de mettre en place un programme de réadaptation.

d) Aussi, faute de présenter un lien de causalité adéquate avec l’accident assuré, les troubles d’ordre psychique de la recourante n’ouvrent pas le droit à des prestations de l’assurance-accidents et il doit en être fait abstraction en l’espèce ainsi que l’intimée l’a retenu à juste titre dans sa décision.

7. a) En ce qui concerne le droit à la rente d’invalidité, la recourante conteste le point de vue de l’intimée, en tant qu’elle se fonde sur l’évaluation médicale de la Dre V.____ du 3 août 2022 attestant une capacité de travail totale dans une activité adaptée. La recourante fait valoir pour sa part que son handicap et les douleurs persistantes entravent la reprise d’une activité lucrative, même dans une profession adaptée, depuis l’accident d’août 2019.

b) Si l’assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10 % au moins par suite d’un accident, il a droit à une rente d’invalidité (art. 18 al. 1 LAA). Le droit à la rente prend naissance dès qu'il n'y a plus à attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de l'assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l'assurance-invalidité ont été menées à terme, le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cessant dès la naissance du droit à la rente (art. 19 al. 1 LAA).

Conformément à l'art. 8 al. 1 LPGA, est réputée invalidité l’incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée. Selon l'art. 7 al. 1 LPGA, toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur un marché du travail équilibré dans son domaine d’activité est réputée incapacité de gain, si cette diminution résulte d’une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles. L'art. 7 al. 2 LPGA précise que seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain et qu'en outre, il y a incapacité de gain uniquement si celle-ci n’est pas objectivement surmontable. Pour établir si on peut raisonnablement exiger de l'assuré qu'il surmonte par ses propres efforts les répercussions négatives de ses problèmes de santé et exerce une activité lucrative et, partant, réalise un revenu, il faut se placer d'un point de vue objectif. L'élément déterminant n'est donc pas la perception subjective de l'intéressé, mais de savoir si on peut objectivement attendre de lui qu'il surmonte ses limitations et exerce une activité lucrative en dépit de ses problèmes de santé (ATF 135 V 215 consid. 7.2 et les références citées).

c) Sur le plan médical, les examens de la Dre V.____ sont complets, circonstanciés et ses conclusions dûment motivées. En effet, l’assurée a été examinée le 3 août 2022 par la médecin-conseil de la CNA. Dans son rapport d'examen final du même jour, la Dre V.____ a posé les diagnostics de douleurs du membre inférieur droit dans les suites d’une entorse de la cheville droite (avec fracture trimalléolaire après luxation de la cheville le 22 août 2019 ayant nécessité une réduction ouverte et ostéosynthèse trimalléolaire de la cheville droite le 23 août 2019 et des infiltrations épidurales d’anesthésique local et de clonidine en traitement antalgique et d’une éventuelle pose d’un neurostimulateur en mars 2020) et de syndrome douloureux régional complexe chronique de la cheville droite forme froide. Les diagnostics secondaires étaient un syndrome douloureux somatoforme persistant avec exclusion fonctionnelle, des migraines avec épisodes sans aura, des céphalées/migraines sur abus médicamenteux, un état dépressif selon le psychiatre traitant, un asthme allergique et un tabagisme actif. La Dre V.____ a indiqué que, subjectivement, l’assurée mentionnait des douleurs au repos de son membre inférieur droit de 4-6 sur 10 avec à la marche des douleurs qui montaient très rapidement à 10 sur 10 après quelques minutes, avec des douleurs à la fois au niveau de la cheville et au niveau de l’hémicrâne droits. Elle peinait à marcher sans cannes et expliquait avoir recours à des cannes à l’extérieur mais sur de petits trajets car elle ne supportait pas les déplacements de plus de 5 à 10 minutes. Elle utilisait également ses cannes pour maintenir son équilibre. Elle avait acheté une chaise roulante afin de pouvoir se changer un peu les idées le weekend. Elle ne manipulait pas ladite chaise roulante, poussée soit par sa sœur, soit par sa fille. Les jours où cela allait moins bien, elle faisait usage des cannes au domicile avec la précision qu’elle ne faisait rien à la maison passant du lit au canapé et inversement. Elle prenait du paracétamol, de la codéine ou de la caféine à des dosages dépassant ceux recommandés ainsi que du Saroten® (matin et soir) et de l’Irfen trois fois par jour ainsi que des médicaments pour la protection gastrique. Les médicaments apportaient un certain soulagement mais sans toutefois faire disparaître les douleurs. Objectivement, la Dre V.____ a observé une assurée qui marchait de manière très précautionneuse et très lentement dans la salle d’attente à la salle d’examen posant le pied droit par terre alors que, lors de l’examen clinique, elle utilisait les cannes et sautait sur le membre inférieur gauche. Couchée sur le dos, le membre inférieur droit apparaissait légèrement plus rosé que le gauche et tuméfié avec des températures semblables sauf au niveau de la cheville, où la température était plus froide à 32° contre 35.9°, et au niveau des orteils où la température était très chaude. L’assurée ne voulait pas être touchée ; elle ne pouvait même pas se toucher pour se laver, montrant le mauvais état de ses pieds. En ce qui concernait la cheville droite, la situation était stabilisée et l’intéressée n’était plus demandeuse d’un traitement antalgique.

Sur la base de ses propres constatations cliniques et pour les seules suites de l’événement du 22 août 2019, la médecin-conseil de la CNA a retenu des limitations fonctionnelles (pas de marche répétée ou prolongée, pas de marche en terrains irréguliers, pas de position accroupie ou à genoux, pas de position statique debout, pas de montée/descente d’échelles et pas de port de charges). Si la poursuite de l’activité usuelle d’employée dans une usine de tri de papier était compromise depuis l’accident, la capacité de travail de l’assurée était entière, sans diminution de rendement, dans une activité adaptée respectant strictement les limitations fonctionnelles décrites en lien avec la fracture tri-malléolaire de la cheville droite. Enfin, la Dre V.____ a précisé que l’exclusion du membre inférieur droit et le syndrome douloureux somatoforme retenus lors de l’évaluation interdisciplinaire de juin 2021 à la CRR ne pouvaient pas être pris en compte dans cette appréciation et que, d’autre part, l’évaluation psychiatrique avait mis en évidence une atteinte psychiatrique prépondérante qui expliquait le comportement d’invalide de l’assurée.

A l’instar de ses confrères de la CRR, la médecin-conseil de la CNA était d’avis que ni le substrat lésionnel initial, ni le syndrome douloureux régional complexe n’étaient en mesure d’expliquer le tableau douloureux chronique qui s’étendait et s’aggravait au fil du temps.

d) On ne voit en l’occurrence aucune raison de s’écarter des conclusions de la Dre V.____ dont le rapport d’examen final du 3 août 2022 remplit les réquisits jurisprudentiels pour se voir accorder pleine valeur probante (cf. consid. 4c-d supra). Il est en effet le fruit d’une analyse approfondie du cas, se fonde sur des examens complets et fait état des plaintes exprimées par la recourante. Reposant sur des investigations complètes, ce rapport a été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse). La description des interférences médicales est claire et, enfin, il aboutit à des conclusions médicales motivées et exemptes de contradictions. Celles-ci peuvent donc être suivies.

e) Rien au dossier ne permet de remettre en cause ce point de vue. On constate en effet que l’appréciation de la Dre V.____ du 3 août 2022 rejoint l’évaluation interdisciplinaire du 28 juin 2021 des médecins spécialistes de la CRR. Ces derniers retiennent en particulier que, sur le plan neurologique, l’ensemble du tableau clinique ne saurait s’expliquer par le seul diagnostic de syndrome douloureux régional complexe. Au plan psychiatrique, ils sont toutefois d’avis que l’état de santé est diminué par un syndrome douloureux somatoforme persistant avec exclusion fonctionnelle du membre inférieur droit.

La Dre V.____ tient compte uniquement des limitations fonctionnelles objectivables découlant des atteintes physiques (y compris du syndrome douloureux régional complexe), à l’exclusion des facteurs extra-médicaux et psychiatriques relevés. Ainsi, l’évaluation de la médecin-conseil de la CNA écarte à juste titre le syndrome douloureux somatoforme avec exclusion du membre inférieur droit mis en évidence lors de l’évaluation interdisciplinaire en juin 2021 à la CRR dès lors que l’intensité de certaines limitations fonctionnelles relève de l’atteinte psychique, laquelle n’est pas en lien de causalité avec l’accident (cf. consid. 6d supra), et donc pas couverte par l’assurance-accidents, ou n’est pas objectivable.

En effet, au cours du second séjour à la CRR à l’été 2021, le handicap semblait encore plus sévère depuis un an. L’assurée utilisait constamment des cannes anglaises, ne posait plus son pied au sol, n’arrivait plus à faire les escaliers et était tributaire d’aide pour presque toutes les activités de la vie quotidienne. En comparaison avec la situation qui prévalait au printemps 2020, son implication à l’évaluation des capacités fonctionnelles s’était réduite à la réalisation d’une performance minimale (score extrêmement bas à l’auto-questionnaire PACT [auto appréciation des propres capacités fonctionnelles]) qui laissait penser que seules des activités exigeant un niveau d’effort inférieur à sédentaire ou essentiellement assis restaient possibles. Le niveau des performances considéré comme minimal n’était que partiellement atteint au cours des différents tests effectués : la force de préhension maximale au Jamar, le 2e cran, avec 16 kg du côté dominant était atteint (normal 10 kg) ; le maintien des bras tendus à l’horizontale devant soi en position debout atteignait 58’ pour une normale de 1 minute ; à la marche rapide sur 3 minutes, elle arrivait à parcourir 20 mètres pour une normale à 125 ; le lever horizontal (5 kg pour les femmes) n’était pas réalisé. Pour les médecins de la CRR, les limitations douloureuses avaient dominé l’ensemble de l’évaluation. En présence d’un trouble neurologique fonctionnel associé au syndrome douloureux régional complexe avancé lors du premier séjour à la CRR, c’était essentiellement l’évaluation psychiatrique qui avait ici une valeur prépondérante (rapport du 28 juin 2021 des Drs O._____ et U.____).

Quoi qu’en dise la recourante, l’estimation de sa capacité de travail résiduelle par les médecins traitants n’opère quant à elle pas la distinction entre l’incidence des atteintes physiques et celles des atteintes psychiques, si bien qu’elle ne s’avère pas pertinente.

Quant au certificat du 6 août 2024 du Dr B.____ attestant du suivi par la recourante d’un traitement psychiatrique régulier depuis le 27 novembre 2023 en raison d’un épisode dépressif moyen avec syndrome somatique et du rapport du 15 août 2024 de la Dre N._______, spécialiste en rhumatologie, qui après des consultations de l’intéressée les 31 mai, 11 juin et 26 juillet 2024 n’avait pas prévu de la revoir mais qui se tenait à disposition pour réévaluer la situation, il apparaît clairement que la situation médicale et factuelle décrite par ces médecins dans le cadre de la présente procédure est postérieure à la décision sur opposition attaquée. Partant, il n’y a pas lieu de tenir compte de ces éléments avec pour corollaire qu’il ne saurait être établi qu’ils ont eu une incidence sur la capacité de travail de la recourante jusqu’à la date déterminante du 6 janvier 2023 (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 dans lequel le Tribunal fédéral rappelle que le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées d’après l’état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue et que les faits survenus postérieurement et ayant modifié cette situation doivent faire l’objet d’une nouvelle décision administrative).

f) Pour le reste, c'est à juste titre que l'intimée a procédé à une comparaison des revenus (au sens de l'art. 16 LPGA). En l’absence de griefs soulevés par la recourante sur les revenus avec (48'965 fr.) et sans invalidité (55'201 fr.) retenus dans la décision sur opposition attaquée, il n'y a pas lieu de s'en écarter étant entendu que l'abattement de 10 % retenu sur celui d'invalide pour tenir compte des limitations fonctionnelles est conforme à la jurisprudence (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb ; TF 8C_196/2022 du 20 octobre 2022 consid. 5.2 et les références) ; l’état psychique n’étant pas en lien de causalité avec l’accident, il n’y a pas lieu d’en tenir compte. Au regard des nombreuses activités que recouvrent les secteurs de la production (ESS 2020, tableau TA1_skill_level, niveau de compétence 1), un nombre suffisant d’entre elles correspondent à des travaux respectant les limitations fonctionnelles de la recourante. Une déduction supplémentaire sur le salaire statistique ne se justifie donc pas pour tenir compte des circonstances liées au handicap physique. En effet, un abattement n’entre en considération que si, sur un marché du travail équilibré, il n’y a plus un éventail suffisamment large d’activités accessibles à l’assuré (TF 8C_659/2021 du 17 février 2022 consid. 4.3.1 et la référence), ce qui n’est pas le cas en l’occurrence.

In casu, la comparaison des revenus effectuée par l’intimée laisse apparaître une perte de gain de 11.30 % ouvrant le droit à une rente d'invalidité de l'assurance-accidents de 11 % (cf. art. 18 al. 1 LAA) en faveur de la recourante dès le 1er septembre 2022.

g) Sur le vu de ce qui précède, il y a lieu de constater que l'évaluation de la capacité de travail et du degré d'invalidité de la recourante effectuée par l'intimée dans sa décision sur opposition est conforme au droit et peut être confirmée.

8. a) La recourante reproche également à l'intimée de lui avoir refusé le droit à l’indemnité pour atteinte à l’intégrité. Elle prétend à une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 70 %, à savoir de 50 % en lien avec la perte fonctionnelle totale de son membre inférieur droit et de 20 % pour les troubles psychiques y relatifs.

b) Selon l’art. 24 al. 1 LAA, l’assuré qui, par suite de l’accident, souffre d’une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique, a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l’intégrité.

Conformément à l’art. 36 al. 1 OLAA (ordonnance du 20 décembre 1982 sur l’assurance-accidents ; RS 832.202), une atteinte à l’intégrité est réputée durable lorsqu’il est prévisible qu’elle subsistera avec au moins la même gravité pendant toute la vie. Elle est réputée importante lorsque l’intégrité physique, mentale ou psychique subit, indépendamment de la diminution de la capacité de gain, une altération évidente ou grave. Cette disposition de l’ordonnance a été jugée conforme à la loi en tant qu’elle définit le caractère durable de l’atteinte (ATF 133 V 224 consid. 2.2). L’indemnité est fixée en même temps que la rente d’invalidité ou, si l’assuré ne peut prétendre à une rente, lorsque le traitement médical est terminé (art. 24 al. 2 LAA).

L’indemnité pour atteinte à l’intégrité est calculée selon les directives figurant à l’annexe 3 de l’OLAA (art. 36 al. 2 OLAA). Cette annexe comporte un barème des atteintes à l’intégrité en pour cent du montant maximum du gain assuré. Ce barème – reconnu conforme à la loi – ne constitue pas une énumération exhaustive (ATF 124 V 29 consid. 1b, 113 V 218 consid. 2a). Il représente une « règle générale » (ch. 1, première phrase, de l’annexe). Pour les atteintes qui sont spéciales ou qui ne figurent pas dans la liste, il y a lieu d’appliquer le barème par analogie, en tenant compte de la gravité de l’atteinte (ch. 1, deuxième phrase, de l’annexe). Le ch. 2 de l’annexe dispose au surplus qu’en cas de perte partielle d’un organe ou de son usage, l’indemnité pour atteinte à l’intégrité est réduite en conséquence, aucune indemnité n’étant toutefois versée dans les cas pour lesquels un taux inférieur à 5 % du montant maximum du gain assuré serait appliqué. A cette fin, la Division médicale de la CNA a établi plusieurs tables d’indemnisation des atteintes à l’intégrité selon la LAA. Sans lier le juge, ces tables sont néanmoins compatibles avec l’annexe 3 OLAA (ATF 124 V 209 consid. 4a/cc ; TF 8C_198/2020 du 28 septembre 2020 consid. 3.1) et permettent de procéder à une appréciation plus nuancée, lorsque l’atteinte d’un organe n’est que partielle.

c) En l’occurrence, à la suite de l’examen final réalisé le 3 août 2022, la Dre V.____ a retenu pour les seules suites de l’accident du 22 août 2019 et uniquement sur la base des atteintes objectivables à l’exclusion des troubles psychiques que la recourante ne présente pas de séquelles qui correspondent à un taux d’indemnité pour atteinte à l’intégrité en application des tables d’indemnisation pour atteintes à l’intégrité selon la LAA où ne figurent pas les séquelles du syndrome douloureux régional complexe.

Dans un rapport du 18 juillet 2023, le Z.____ fait part de sa propre évaluation de la situation. Se référant successivement aux tables 2 (atteinte à l'intégrité résultant de troubles fonctionnels des membres inférieurs) et 4 (atteinte à l’intégrité résultant de la perte d’un ou plusieurs segments des membres inférieurs) établies par la Division médicale de la CNA et constatant une articulation de la cheville totalement bloquée extrêmement douloureuse avec une gêne fonctionnelle et douleurs importantes, ce médecin évalue le taux d’atteinte à l’intégrité résultant des troubles fonctionnels de la cheville droite de la recourante à 30 %. Cet avis paraît procéder d’une simple appréciation divergente d’un état de fait clairement posé sur le plan médical en août 2022 lors de l’examen clinique de la Dre V.____. En outre, il convient de rappeler que les troubles à la santé psychique de la recourante, c’est-à-dire un syndrome douloureux somatoforme persistant avec exclusion fonctionnelle ne doivent pas être pris en considération pour l’évaluation du droit aux prestations de l’assurance-accidents, faute de l’existence d’un lien de causalité adéquate entre ces atteintes et l’accident du 22 août 2019 (cf. consid. 6 supra).

d) Aussi y a-t-il lieu de constater que l’intimée était légitimée à nier le droit de la recourante à une indemnité pour atteinte à l’intégrité pour les suites de l’accident.

9. Le dossier est complet, permettant ainsi à la Cour de statuer en connaissance de cause. Un complément d’instruction apparaît inutile et la requête formulée en ce sens par la recourante – à savoir, la mise en œuvre d’une expertise bidisciplinaire (orthopédie et psychiatrie) – doit dès lors être rejetée. En effet, la réalisation d’une expertise ne serait pas de nature à modifier les considérations qui précédent. Le juge peut en effet mettre fin à l’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de se forger une conviction et que, procédant d’une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la conviction qu’elles ne pourraient pas l’amener à modifier son avis (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 130 II 425 consid. 2.1).

10. a) Mal fondé, le recours doit en conséquence être rejeté, ce qui entraîne la confirmation de la décision attaquée.

b) Il n’y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (art. 61 let. fbis LPGA), ni d’allouer de dépens à la recourante, qui n’obtient pas gain de cause (art. 61 let. g LPGA).

Par ces motifs,

la Cour des assurances sociales

prononce :

I. Le recours est rejeté.

II. La décision sur opposition rendue le 6 janvier 2023 par la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents est confirmée.

III. Il n’est pas perçu de frais judiciaires, ni alloué de dépens.

La présidente : Le greffier :

Du

L'arrêt qui précède, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié à :

Me Jean-Michel Duc (pour T.____),

Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents,

- Office Fédéral de la Santé Publique (OFSP),

par l'envoi de photocopies.

Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière de droit public devant le Tribunal fédéral au sens des art. 82 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral ; RS 173.110), cas échéant d'un recours constitutionnel subsidiaire au sens des art. 113 ss LTF. Ces recours doivent être déposés devant le Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne) dans les trente jours qui suivent la présente notification (art. 100 al. 1 LTF).

Le greffier :

Bitte beachten Sie, dass keinen Anspruch auf Aktualität/Richtigkeit/Formatierung und/oder Vollständigkeit besteht und somit jegliche Gewährleistung entfällt. Die Original-Entscheide können Sie unter dem jeweiligen Gericht bestellen oder entnehmen.

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