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Urteil Kantonsgericht (VD)

Zusammenfassung des Urteils 2020/914: Kantonsgericht

Die Chambre des recours pénale hat am 20. November 2020 über einen Rekurs von Y.________ gegen die Anordnung zur Erstellung eines DNA-Profils entschieden. Der Rekurs richtete sich auch gegen die Ablehnung eines Staatsanwalts wegen Befangenheit. Es ging um einen Fall von physischer Gewalt gegen Y.________'s Sohn. Der Rekurs wurde teilweise gutgeheissen, die Kosten wurden dem Anwalt auferlegt. Der Rekurs wurde als zulässig erachtet, aber die Anwaltskapazität wurde in Frage gestellt. Der Rekurs wurde abgelehnt, und die Kosten wurden dem Anwalt auferlegt.

Urteilsdetails des Kantongerichts 2020/914

Kanton:VD
Fallnummer:2020/914
Instanz:Kantonsgericht
Abteilung:Chambre des recours pénale
Kantonsgericht Entscheid 2020/914 vom 20.11.2020 (VD)
Datum:20.11.2020
Rechtskraft:-
Leitsatz/Stichwort:-
Schlagwörter : Avocat; énale; Procureur; écision; écusation; érêts; éposé; ésente; Ministère; évenu; Intérêts; épend; Chambre; élai; éfense; Autre; étude; éjà; évention; éter; Avait; Autorité; égal; édéral; ésident
Rechtsnorm:Art. 110 StPo;Art. 12 VVG;Art. 127 StPo;Art. 255 StPo;Art. 260 StPo;Art. 379 StPo;Art. 382 StPo;Art. 385 StPo;Art. 396 StPo;Art. 417 StPo;Art. 5 StPo;Art. 58 StPo;Art. 59 StPo;
Referenz BGE:-
Kommentar:
-

Entscheid des Kantongerichts 2020/914

CHAMBRE DES RECOURS PENALE

__

Arrêt du 20 novembre 2020

__

Composition : M. P E R R O T, président

M. Krieger et Mme Byrde, juges

Greffier : M. Ritter

*****

Art. 56 al. 1 let. a, 58, 314 al. 1 let. b CPP; 12 let. a, b et c, 13 LLCA

Statuant sur le recours interjeté le 28 septembre 2020 par Y.__ contre l’ordonnance d’établissement d’un profil ADN rendue le 18 septembre 2020 par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois, d’une part, et sur la demande de récusation déposée contre le Procureur [...] dans ce même acte de recours, d’autre part, dans la cause n°PE20.015827-GMT, la Chambre des recours pénale considère :

En fait :

A. a) Le 17 septembre 2020, le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois (ci-après: le Ministère public) a ouvert une instruction pénale contre Y.__ «pour avoir pris à partie physiquement son fils [...]» (PV des op., ad 17 septembre 2020), les faits incriminés étant réputés survenus entre le 11 et le 13 septembre 2020. Inscrite au rôle sous la référence PE20.015827, la cause avait été confiée le jour précédent au Procureur [...], alors de permanence (PV des op., ad 16 septembre 2020).

b) Y.__ avait consulté l’étude de l’avocat [...] avant l’ouverture d’enquête déjà, soit le 28 mai 2020 selon le mandataire, en relation avec une autre instruction pénale dirigée contre lui.Inscrite au rôle sous la référence PE20.011513, cette cause, toujours pendante, a, de fait, été reprise par le Procureur Christian Maire le 29 juillet 2020 après avoir été attribuée au Procureur [...]. Le 26 juillet 2020, toujours d’après le mandataire, Y.__ a signé une procuration en faveur des avocats de l’étude de Me [...]. Le mandant a également été en contact avec un autre avocat de l’étude, à savoir Me [...] (cf. les échanges de correspondance sous P. 5/2/3).

Le dessaisissement du Procureur [...] avait été requis le 27 juillet 2020 par le prévenu, agissant sous la plume de l’avocat [...], motif pris d’apparences de prévention réputées «connues» du magistrat saisi (P. 5/2/3).

c) Un prélèvement d’un échantillon d’ADN n° [...] a été effectué sur le prévenu dans la cause PE20.015827.

B. Par ordonnance du 18 septembre 2020, rendue dans la cause PE20.015827, le Ministère public, procédant sous la signature du Procureur [...], a ordonné l’établissement du profil ADN à partir du prélèvement n° [...] (I) et dit que les frais suivaient le sort de la cause (II).

C. Le 25 septembre 2020, l’avocat [...] a déposé une demande de levée du secret professionnel devant la Cour administrative du Tribunal cantonal (ci-après: la Cour administrative). Il a exposé avoir été mandaté ce même jour par le prévenu, en ajoutant qu’il se proposait, à l’appui du recours qui serait interjeté contre la décision du 18 septembre 2020, de demander, «au nom et pour le compte de M. Y.__ », la récusation du Procureur [...] en raison de son apparence de prévention, inhérente au fait que son étude représentait la partie adverse dans une procédure civile pendante, à laquelle était partie ce magistrat. Or, toujours selon l’avocat, il lui serait, «[d]ans cette mesure ( ) nécessaire d’évoquer des faits couverts par le secret professionnel». Il requérait dès lors d’être libéré du secret professionnel afin qu’il «puisse faire valoir les droits correspondants de M. Y.__ » (P. 5/2/4).

D. Par acte du 28 septembre 2020, Y.__, agissant par son défenseur de choix, a recouru contre l’ordonnance du 18 septembre 2020, en prenant, avec suite de frais et dépens, les conclusions suivantes:

«( ).

III. La demande de récusation déposée à l’encontre du Procureur [...] est admise, le dossier de la cause étant transmis à un autre procureur et les actes accomplis par le Procureur [...] étant annulés et, le cas échéant, répétés par le nouveau magistrat désigné.

IV. La décision rendue le 18 septembre 2020 par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois dans la cause [...] est annulée.

V. Les échantillons prélevés sur Y.__ seront détruits dans un délai de 10 (dix) jours à compter de la notification de l’arrêt à intervenir. ( ).»

Le recourant a requis l’effet suspensif et la suspension de la procédure de recours jusqu’à droit connu sur la demande de levée du secret professionnel déposée le 25 septembre 2020 par l’avocat [...] devant la Cour administrative du Tribunal cantonal.

Le 8 octobre 2020, le Président de la Chambre des recours pénale a imparti au recourant un délai de cinq jours dès réception de la décision rendue par la Cour administrative du Tribunal cantonal pour compléter les motifs de sa requête de récusation, étant ajouté que, par la suite, le Procureur [...] serait invité à prendre position sur la demande de récusation et que la Chambre des recours pénale statuerait alors sur celle-ci.

Dans ses déterminations du 13 octobre 2020, le Ministère public, agissant sous la plume du Procureur [...], a conclu implicitement au rejet de la demande de récusation, tout en s’en remettant à justice quant au recours dirigé contre la décision du 18 septembre 2020. Le Ministère public a précisé que la cause serait confiée au magistrat en charge de la première affaire ouverte contre le recourant, à savoir au Procureur Christian Maire, par la voie d’une ordonnance de jonction.

Le recourant a déposé des déterminations spontanées le 16 octobre 2020.

E. Sur demande du Président de la Chambre des recours pénale, la Cour administrative du Tribunal cantonal a produit copie de sa décision rendue le 26 octobre 2020 sur la demande de levée du secret professionnel dont l’avait saisie l’avocat [...] le 25 septembre 2020. La Cour administrative a d’abord constaté dans les faits que Y.__ avait consulté cet avocat le 25 septembre 2020 afin qu’il le représente dans le cadre de l’enquête PE20.015827, que, par courriel du même jour à une cliente, cet avocat l’avait informée que «l’un des collaborateurs de son Etude» intervenait dans le cadre d’une affaire pénale dirigée par [...] dont il entendait demander la récusation, raison pour laquelle il sollicitait qu’elle le délie du secret professionnel afin qu’il «puisse exposer les motifs pour lesquels [[...]] n’est pas autorisé à intervenir dans le cadre de l’affaire pénale», et que, par courriel du même jour, cette cliente avait répondu qu’elle refusait de le délier du secret professionnel. La Cour administrative en a déduit que, lorsque l’avocat [...] avait été consulté par Y.__, le Procureur [...] était déjà direction de la procédure en charge du dossier, et qu’il avait du reste rendu une décision. Elle a considéré qu’il appartenait à l’avocat requérant, consulté a posteriori, s’il estimait qu’un éventuel conflit d’intérêts pouvait se présenter, d’en informer son client et, cas échéant, de refuser le mandat qu’il souhaitait lui confier (TF 1B_191/2020 du 26 août 2020 consid. 4.2), et non pas au procureur de se dessaisir du dossier au motif que ledit avocat souhaitait obtenir un nouveau mandat. Elle a dès lors rejeté la demande de levée du secret professionnel.

L’avocat [...] a déposé des déterminations complémentaires le 5 novembre 2020. Il a indiqué «persister dans [s]a demande de levée du secret professionnel afin de pouvoir motiver dûment la demande de récusation présentée». Il a conclu à ce qu’il soit sursis à statuer sur le recours déposé le 28 septembre 2020, ce jusqu’à droit connu sur le recours qu’il déposait ce jour devant la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal contre la décision rendue le 26 octobre 2020 par la Cour administrative.

Le Ministère public, agissant toujours sous la plume du Procureur [...], a déposé des déterminations complémentaires le 6 novembre 2020. L’avocat [...] en a fait de même le 10 novembre 2020.

En droit :

1.

1.1 La décision du Ministère public ordonnant l’établissement d’un profil ADN selon l’art. 255 CPP (Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007; RS 312.0) est susceptible d’un recours au sens des art. 393 ss CPP (Moreillon/Parein-Reymond, Commentaire du Code de procédure pénale, 2eéd., Bâle 2016, n. 18 ad art. 260 CPP et n. 12 ad art.393 CPP; CREP 14février 2019/119). Le recours doit être adressé par écrit dans un délai de dix jours dès la notification de la décision attaquée (cf. art. 384 let. b CPP) à l’autorité de recours (art. 396 al. 1 CPP) qui est, dans le canton de Vaud, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal (art.13 LVCPP [Loi vaudoise d'introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009; BLV 312.01]; art. 80 LOJV [Loi vaudoise d'organisation judiciaire du 12 décembre 1979; BLV 173.01]).

1.2 En l’espèce, interjeté en temps utile auprès de l’autorité compétente par le prévenu qui a la qualité pour recourir (art. 382 CPP) et dans les formes prescrites (art. 385 al. 1 CPP), le recours est recevable, sous réserve de l’éventuelle invalidité de l’acte faute de pouvoirs de représentation de son signataire. Les pièces nouvelles produites sont également recevables (art. 390 al. 4 in fine CPP; CREP 9 juillet 2012/427 consid. 1b et les réf. citées).

1.3 Le recours est assorti d’une demande de récusation. Egalement déposée en temps utile, soit sans délai (cf. l’art. 58 al. 1 CPP), la requête est dirigée contre le Procureur qui a rendu la décision contestée. Le recourant et requérant ne demande pas qu’il soit statué sur un objet litigieux avant l’autre. Peu importe toutefois, pour les motifs qui suivent.


2.

2.1

2.1.1 Un magistrat est récusable, selon l'art. 56 let. f CPP, "lorsque d'autres motifs, notamment un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil, sont de nature à le rendre suspect de prévention". Cette disposition a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus aux lettres précédentes. Elle correspond à la garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du magistrat est établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée. Il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Seules les circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération. Les impressions purement individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 143 IV 69 consid. 3.2 p. 74 et les réf. cit.; TF 1B_191/2020 du 26 août 2020 consid. 4.1.1).

2.1.2 L'autorité en charge de la procédure statue d'office et en tout temps sur la capacité de postuler d'un mandataire professionnel (ATF 141 IV 257 consid. 2.2 p. 261). En effet, l'interdiction de postuler dans un cas concret - à distinguer d'une suspension provisoire ou définitive - ne relève en principe pas du droit disciplinaire, mais du contrôle du pouvoir de postuler de l'avocat (ATF 138 II 162 consid. 2.5.1 p. 168; TF 1B_191/2020 du 26 août 2020 consid. 4.1.2; TF 1B_226/2016 du 15 septembre 2016 consid. 2).

Dans les règles relatives aux conseils juridiques, l'art. 127 al. 4 CPP réserve la législation sur les avocats. L'art. 12 LLCA (Loi fédérale sur la libre circulation des avocats; RS 935.61) énonce les règles professionnelles auxquelles l'avocat est soumis. Selon l'art. 12 let. a LLCA, il doit exercer sa profession avec soin et diligence. Cette disposition constitue une clause générale qui permet d'exiger de l'avocat qu'il se comporte correctement dans l'exercice de sa profession. Sa portée n'est pas limitée aux rapports professionnels de l'avocat avec ses clients, mais comprend aussi les relations avec les confrères et les autorités (ATF 144 II 473 consid. 4.1 p. 476 et les réf. cit.). L'art. 12 let. b LLCA prévoit notamment que l'avocat exerce son activité professionnelle en toute indépendance. L'indépendance est un principe essentiel de la profession d'avocat et doit être garantie tant à l'égard du juge et des parties, que du client (cf. ATF 145 II 229 consid. 6.1 p. 237; TF 2C_889/2008 du 21 juillet 2009 consid. 3.1.2; TF 2A.293/2003 du 9 mars 2004 consid. 2). Celui qui s'adresse à un avocat doit pouvoir admettre que celui-ci est libre de tout lien, de quelque nature que ce soit et à l'égard de qui que soit, qui pourrait restreindre sa capacité de défendre les intérêts de son client, dans l'accomplissement du mandat que ce dernier lui a confié (TF 2C_889/2008 du 21 juillet 2009 consid. 3.1.2; TF 2A.293/2003 du 9 mars 2004 consid. 2). Quant à l'art. 12 let. c LLCA, il prescrit à l'avocat d'éviter tout conflit entre les intérêts de son client et ceux des personnes avec lesquelles il est en relation sur le plan professionnel ou privé. Même si cela ne ressort pas explicitement du texte légal, l'art. 12 let. c LLCA impose aussi d'éviter les conflits entre les propres intérêts de l'avocat et ceux de ses clients (TF 1B_149/2013 du 5 septembre 2013 consid. 2.4.2; TF 2C_889/2008 du 21 juillet 2009 consid. 3.1.3). Un avocat ne doit donc pas accepter un mandat, respectivement s'en dessaisir, quand les intérêts du client entrent en collision avec ses propres intérêts (cf. Fellmann, Anwaltsrecht, 2e éd., Berne 2017, n. 361 p. 158 s.; Valticos, in: Commentaire romand, Loi sur les avocats, Valticos/Reiser/Chappuis [éd.], Bâle 2010, n. 179 ad art. 12 LLCA). Ainsi, selon la doctrine, en cas de conflit personnel d'une certaine importance avec un confrère qu'il sait assister la partie adverse, un avocat ne doit pas accepter le mandat, dès lors qu'il sait qu'il ne pourra pas le remplir en toute indépendance et sans conflit d'intérêts (cf. Fellmann, op. cit., n. 363 p. 160; cf. TF 2A.168/2005 du 6 septembre 2005 consid. 2.2.3). L'interdiction de plaider en cas de conflit d'intérêts se trouve en lien avec la clause générale de l'art. 12 let. a LLCA précité, selon laquelle l'avocat exerce sa profession avec soin et diligence, de même qu'avec l'obligation d'indépendance rappelée à l'art. 12 let. b LLCA (ATF 145 IV 218 consid. 2.1 p. 222 et les réf. cit.; TF 1B_191/2020 du 26 août 2020 consid. 4.1.2).

Les règles susmentionnées visent avant tout à protéger les intérêts des clients de l'avocat, en leur garantissant une défense exempte de conflit d'intérêts. Elles tendent également à garantir la bonne marche du procès, en particulier en s'assurant qu'aucun avocat ne soit restreint dans sa capacité de défendre l'un de ses clients (ATF 145 IV 218 consid. 2.1; 141 IV 257 consid. 2.1; TF 1B_209/2019 du 19 septembre 2019 consid. 4.4.1).

Il faut éviter toute situation potentiellement susceptible d'entraîner des conflits d'intérêts. Un risque purement abstrait ou théorique ne suffit pas; le risque doit être concret. Il n'est toutefois pas nécessaire que le danger concret se soit réalisé et que l'avocat ait déjà exécuté son mandat de façon critiquable ou en défaveur de son client (ATF 145 IV 218 consid. 2.1 p. 223; TF 1B_59/2018 du 31 mai 2018 consid. 2.4; TF 1B_20/2017 du 23 février 2017 consid. 3.1). Dès que le conflit d'intérêts survient, l'avocat doit mettre fin à la représentation (ATF 145 IV 218 consid. 2.1 p. 223 et les réf. cit.). Celui qui, en violation des obligations énoncées à l'art. 12 LLCA, accepte ou poursuit la défense alors qu'il existe un tel risque de conflit doit se voir dénier par l'autorité la capacité de postuler. L'interdiction de plaider est, en effet, la conséquence logique du constat de l'existence d'un tel conflit (ATF 138 II 162 consid. 2.5.1 p. 166 s.; TF 1B_191/2020 du 26 août 2020 consid. 4.1.2).

2.2

2.2.1 En l’espèce, le prévenu demande, à titre préalable, qu’il soit sursis à statuer sur la présente cause jusqu’à droit connu sur le recours déposé devant la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal contre la décision de la Cour administrative.

2.2.2 Aux termes de l’art. 314 al. 1 let. b CPP, applicable à la procédure de recours par renvoi de l’art. 379 CPP, le Ministère public peut suspendre une instruction lorsque l’issue de la procédure pénale dépend d’un autre procès dont il paraît indiqué d’attendre la fin.

La suspension de la procédure pénale au motif qu'un autre procès est pendant ne se justifie toutefois que si le résultat de l'autre procédure peut véritablement jouer un rôle pour le résultat de la procédure pénale suspendue et que s'il simplifiera de manière significative l'administration des preuves dans cette même procédure (TF 1B_421/2012 du 19 juin 2013 consid. 2.1). Le principe de la célérité qui découle de l'art. 29 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999; RS 101) et, en matière pénale, de l'art. 5 CPP, pose des limites à la suspension d'une procédure. Ce principe est notamment violé lorsque l'autorité ordonne la suspension d'une procédure sans motifs objectifs. Pareille mesure dépend d'une pesée des intérêts en présence et ne doit être admise qu'avec retenue, en particulier s'il convient d'attendre le prononcé d'une autre autorité compétente qui permettrait de trancher une question décisive (TF 1B_563/2019 et 1B_565/2019 du 9 juin 2020 consid. 4.1.2 et les réf. citées). Dans les cas limites ou douteux, le principe de célérité prime (ATF 130 V 90 consid. 5 p. 95; TF 1B_329/2017 du 11 septembre 2017 consid. 3).

2.2.3 La suspension constituant ainsi l’exception, l’impératif de célérité de la procédure consacré à l’art. 5 al. 1 CPP interdit de suspendre en l’espèce la présente cause conformément à l’art. 314 al. 1 let. b CPP jusqu’à droit connu sur le recours à déposer devant la Cour de droit administratif et public contre la décision de la Cour administrative par le conseil du prévenu. Cela vaut d’autant plus que, tant que la décision sur récusation n’a pas été rendue, la personne concernée continue à exercer ses fonctions (art. 59 al. 3 CPP).

Enfin et surtout, le fait matériel à l’origine du conflit d’intérêts éventuel, soit la représentation, par l’étude du défenseur du prévenu, d’une partie opposée au Procureur [...] dans un procès civil, est expressément admis par le mandataire. L’issue du recours annoncé, qui ne concerne que le mandataire et non le prévenu, n’est dès lors pas de nature à affecter ce conflit d’intérêts. Bien plutôt, il s’agit de permettre que l’instruction se poursuive, ce d’autant que les intérêts d’un mineur (né en 2009) paraissent en cause dans un cas de violation du devoir d’assistance ou d’éducation. Du reste, dans l’hypothèse d’une éventuelle admission du recours interjeté devant la Cour de droit administratif et public, la Cour administrative devrait tout au plus être contrainte de lever le secret professionnel de Me [...]. Mais une telle levée n’impliquerait encore pas que ce dernier ait la capacité de postuler. Pour tous ces motifs, le recourant échoue à démontrer que les conditions posées par l’art. 314 al. 1 let. b CPP sont réunies.

2.3 La demande de récusation repose sur un moyen que le requérant, soit son mandataire, ne peut pas articuler précisément puisque celui-ci relève de faits soumis au secret professionnel dont le défenseur n’a pas été délié en l’état de la procédure portant sur cet objet. En effet, le seul élément connu est que le moyen en question se rapporte à la personne de l’avocat, dès lors que Me [...] invoque être le mandataire d’une cliente opposée au Procureur [...] dans un litige civil.

Pour les motifs exposés par la Cour administrative dans sa décision du 26 octobre 2020, il faut considérer qu’il existe un conflit d’intérêts au regard de l'art. 12 let. a, b et c LLCA, respectivement 13 LLCA, entre Me [...], d’une part, et son client Y.__, d’autre part, le motif de ce conflit résidant dans la personne de l’avocat. Les circonstances invoquées par ce dernier à l’appui de la demande de récusation devaient non seulement le conduire à en informer son client, lorsque celui-ci l’avait consulté le 25 septembre 2020, mais également à refuser le mandat ou à résilier celui-ci s’il l’avait accepté. Dans ces conditions, au vu de l’existence de ce conflit, la capacité de postuler doit être déniée à Me [...].

Certes, Me [...] soutient, dans son courrier du 5 novembre 2020, avoir été consulté par le prévenu avant la présente procédure, ouverte le 17 septembre 2020. Le fait allégué est exact. Le défenseur omet cependant de préciser que ce mandat portait sur une procédure antérieure, inscrite au rôle sous la référence PE20.011513 et confiée initialement au Procureur [...] avant d’être attribuée à un autre magistrat (cf. les échanges de correspondances sous P. 5/2/3, déjà citée). C’est du reste suite à l’affirmation du prévenu, non documentée, selon laquelle il avait consulté son mandataire avant le début de la première enquête déjà que ce magistrat, initialement saisi, a été remplacé par un collègue. Relatif à une autre procédure que celle ici en cause, le moyen est donc sans pertinence.

2.4 Au vu de ce qui précède, la demande de récusation est manifestement mal fondée, puisqu’elle repose sur un motif qui n’existerait pas si l’avocat [...] n’avait pas poursuivi un mandat en violation de l’art. 12 let. a à c LLCA, et qui n’existe plus dès lors que la capacité de postuler lui est déniée.

3. Pour ce qui est du recours dirigé contre la décision du 18 septembre 2020 ordonnant l’établissement d’un profil ADN, force est de constater qu’il est touché par l’incapacité de postuler du mandataire professionnel dans la présente procédure pénale et que cet acte émane donc d’un représentant sans pouvoirs. A défaut de ratification (cf. le principe posé par l’art. 38 al. 1 CO [Code des obligations; RS 220]), l’acte de recours est donc affecté d’un vice.

Un délai de dix jours dès la notification de la présente décision sera dès lors imparti à Y.__ pour ratifier l’acte déposé en son nom le 28 septembre 2020 s’il entend le maintenir. Dans l’affirmative, il lui sera loisible tant de le contresigner lui-même que de désigner un nouveau mandataire professionnel qui le contresignera (art. 110 al. 4 CPP, par analogie, et par renvoi de l’art. 379 CPP). A défaut, Y.__ est avisé qu’il ne sera pas entré en matière sur ledit recours.

4. Les frais de la procédure de récusation, par 1'210 fr. (art. 20 al. 1 TFIP [tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; BLV312.03.1]), seront mis à la charge de Me [...], qui les a occasionnés (art. 417 CPP[cf. TF 1B_45/219 du 20 février 2019 consid. 5; ATF 129 IV 206 consid. 2], respectivement art. 59 al. 4, seconde phrase, CPP).

Par ces motifs,

la Chambre des recours pénale

prononce:

I. Il est interdit à l’avocat [...] d’assister ou de représenter le prévenu Y.__ dans la présente cause pénale.

II. Un délai de dix jours dès la notification de la présente décision est imparti à Y.__ pour ratifier l’acte déposé en son nom le 28 septembre 2020 s’il entend le maintenir.

III. La demande de récusation présentée le 28 septembre 2020 à l’encontre du Procureur [...] est rejetée.

IV. Les frais de la procédure de récusation, par 1'210 fr. (mille deux cent dix francs), sont mis à la charge de Me [...].

V. La décision est exécutoire.

Le président : Le greffier :


Du

La présente décision, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifiée, par l'envoi d'une copie complète, à:

- Me [...],

- M. Y.__,

- Ministère public central,

et communiquée à:

M. le Procureur de l’arrondissement du Nord vaudois,

par l’envoi de photocopies.

La présente décision peut faire l'objet d'un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral au sens des art. 78 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral; RS 173.110). Ce recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète (art.100 al. 1 LTF).

Le greffier :

Quelle: https://www.findinfo-tc.vd.ch/justice/findinfo-pub/internet/SimpleSearch.action

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