Zusammenfassung des Urteils 2012/434: Kantonsgericht
Die Chambre des tutelles des Kantonsgerichts behandelt einen Berufungsfall, bei dem es um die Einsetzung einer gesetzlichen Beratungskuratelle für N.________ geht. N.________ leidet an einer paranoiden Schizophrenie und hat in der Vergangenheit mehrere psychiatrische Aufenthalte gehabt. Obwohl er in der Lage ist, seine täglichen Ausgaben zu verwalten, hat sich sein Vermögen in den letzten Jahren deutlich verringert. Die Experten empfehlen keine rechtliche Schutzmassnahme, da sie der Meinung sind, dass N.________ in der Lage ist, seine Angelegenheiten zu verwalten. Trotzdem wird eine Beratungskuratelle eingesetzt, um sein Vermögen zu schützen. Das Gericht bestätigt diese Entscheidung und weist die Gerichtskosten in Höhe von 6'600 CHF N.________ zu.
Kanton: | VD |
Fallnummer: | 2012/434 |
Instanz: | Kantonsgericht |
Abteilung: | Kammer für Vormundschaft |
Datum: | 06.02.2012 |
Rechtskraft: | - |
Leitsatz/Stichwort: | - |
Schlagwörter : | était; égal; Appel; écis; écision; élaire; Justice; Appelant; CPC-VD; état; écembre; Professeur; Expertise; érant; ôpital; éside; érer; Interdiction; Cheseaux-sur-Lausanne; Intéressé; Enquête; écompensation |
Rechtsnorm: | Art. 100 BGG;Art. 373 ZGB;Art. 374 ZGB;Art. 376 ZGB;Art. 379 ZPO;Art. 393 ZPO;Art. 395 ZGB;Art. 395 ZPO;Art. 492 ZPO; |
Referenz BGE: | - |
Kommentar: | - |
TRIBUNAL CANTONAL | IT11.046563-112390 117 |
CHAMBRE DES TUTELLES
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Arrêt du 6 juillet 2012
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Présidence de M. Giroud, président
Juges : MM. Krieger et Sauterel
Greffier : Mme Bourckholzer
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Art. 395 al. 2 CC; 174 CDPJ; 379 ss, 489 ss CPC-VD
La Chambre des tutelles du Tribunal cantonal prend séance pour s’occuper de l'appel interjeté par N.__, à Cheseaux-sur-Lausanne, contre la décision rendue le 22 septembre 2011 par la Justice de paix du district de Lausanne instituant une curatelle de conseil légal en faveur du prénommé.
Délibérant à huis clos, la cour voit :
En fait :
A. Né le [...] 1956, domicilié à Cheseaux-sur-Lausanne, N.__ souffre d'une maladie psychiatrique depuis plusieurs années. Au bénéfice d'une rente AI, il occupe un studio dans la maison parentale, laquelle, pour l'essentiel, est louée à des tiers. Cet immeuble appartient à l'hoirie qu'N.__ forme avec d'autres membres de sa famille, dont sa sœur L.__. L'entretien de cette maison familiale devenant de plus en plus coûteux, il a été décidé de la vendre.
Le 20 avril 2009, L.__ a fait part à la Justice de paix du cercle de Cheseaux-sur-Lausanne (actuellement : Justice de paix du district de Lausanne) de ses inquiétudes à propos du comportement de son frère. Celui-ci, entre autres actes, avait adressé des menaces à des tiers, s'était s'introduit dans les appartements des locataires à des heures incongrues, embrasait des buissons et des fleurs du jardin, coupait le chauffage et l'électricité et avait changé la serrure principale de la porte palière donnant accès à deux appartements. Estimant que cette situation n'était plus supportable, L.__ a demandé à la Justice de paix de prendre une décision afin de faire cesser les agissements de son frère. Elle a adressé une copie de sa lettre au Professeur J.__ de l'Hôpital psychiatrique [...] qui suivait depuis un certain temps N.__.
Le 22 avril 2009 (recte : 8 juin 2009), le Professeur J.__ de l'Hôpital psychiatrique [...] a informé l'autorité tutélaire qu'il connaissait N.__ depuis dix ans. Durant les dernières années, l'état du patient s'était bien stabilisé jusqu'au jour où il avait appris que la maison familiale allait être vendue. Cette perspective l'avait perturbé au point qu'il avait dû être réhospitalisé. Cependant, les nouvelles récentes que le Professeur J.__ avait reçues de l'intéressé semblaient indiquer que celui-ci allait mieux depuis qu'il avait trouvé un arrangement avec sa soeur.
Le 8 décembre 2009, le Juge de paix a procédé à l'audition de N.__, assisté de son conseil. N.__ a déclaré que la maison venait d'être vendue et qu'il habitait toujours dans le studio loué par l'hoirie. Celle-ci devait encore se partager trois parcelles forestières, une parcelle agricole et des objets mobiliers. Le conseil de N.__ a ajouté que son client était au bénéfice d'un bail d'une durée d'au moins dix ans, mentionné au Registre foncier. Par ailleurs, si l'état de santé de N.__ s'était effectivement dégradé lorsqu'il avait appris la vente prochaine de la maison, il semblait s'être à nouveau amélioré. L'intéressé n'avait jamais eu de problèmes de gestion et s'occupait seul de ses affaires administratives. Au bénéfice d'une rente AI de 1'555 fr. par mois, il s'acquittait mensuellement d'un loyer de 550 fr., sans les charges, et d'une prime d'assurance maladie de 400 francs. Titulaire d'un compte bancaire créditeur de 70'000 fr., N.__ comptait investir le montant de 362'000 fr. qui devait lui revenir de la vente de la maison dans l'achat du studio qu'il occupait. Sa dernière hospitalisation s'était bien passée; il ne consommait plus d'alcool depuis onze ans et s'était affilié à la Croix Bleue.
Estimant que la situation de N.__ n'était pas préoccupante, le Juge de paix n'a pas pris de mesures de protection à son égard.
Le 7 août 2010, la fille de N.__, X.__ a signalé au Juge de paix de nouveaux faits concernant son père. A la suite de nouvelles frictions, celui-ci avait dénoncé son bail et se trouvait sans logement. La relation qu'il entretenait avec [...] avait en outre mal tourné. Tenant des propos délirants, se prenant notamment pour le fils du Président [...], sans domicile et sans soutien, N.__ était susceptible de causer du tort à des tiers ainsi qu'à lui-même. X.__ estimait qu'il convenait de lui administrer sans tarder un traitement médical et de le mettre sous tutelle.
Le 30 novembre 2010, le Juge de paix a reçu la copie d'un rapport de la Police cantonale du même jour. Sollicités par le CET qui leur avait donné le signalement d'un individu criant dans un jardin à Cheseaux-sur-Lausanne, les gendarmes étaient intervenus sur les lieux et avaient trouvé N.__ à l'extérieur de son domicile, tenant notamment des propos incohérents. Sur ordre du Préfet, ils l'avaient conduit à l'Hôpital psychiatrique [...].
Le 1er février 2011, le Juge de paix a réentendu N.__ en présence de son conseil. Lors de son audition, N.__ a déclaré qu'il se sentait mieux depuis qu'il avait changé de médicaments. Il était sorti de l'hôpital et consultait tous les quinze jours le Professeur J.__. Il souhaitait retrouver un lieu de vie adéquat et affirmait faire des recherches pour trouver un appartement en périphérie lausannoise. A l'issue de l'audience, le Juge de paix a informé le comparant qu'au vu de l'évolution de la situation, il estimait devoir ouvrir une enquête en interdiction civile et en privation de liberté à des fins d'assistance à son sujet.
Le 8 février 2011, le Juge de paix a informé X.__ de l'ouverture de l'enquête civile à l'endroit de son père. Par courriers du même jour, il a demandé à la Municipalité de Lausanne de lui communiquer son préavis à propos de la mesure tutélaire envisagée et a confié l'expertise psychiatrique de N.__ au Centre d'expertises de l'Hôpital psychiatrique [...].
Le 13 juillet 2011, les experts mandatés, le Professeur Z.__ et le psychologue C.__ du Centre d'expertises précité, ont déposé leur rapport. Selon leurs constatations, N.__ souffre d'une schizophrénie paranoïde continue et durable qui se manifeste notamment par la présence d'idées persistantes et délirantes de persécution et plus récemment de filiation. Plusieurs décompensations de l'état mental du patient ont nécessité vingt-trois hospitalisations en milieu psychiatrique. La symptomatologie de la maladie qui affecte N.__ comporte une part d'hétéro-agressivité dont l'importance semble croître en fonction de l’intensité des délires et du biais interprétatif que le patient fait d’une menace potentielle. En revanche, les troubles dont souffre le pupille ne semblent pas l'affecter dans la gestion de ses affaires. Il réside dans un appartement protégé dépendant de l’EMS [...] à [...] et manifeste une certaine autonomie, effectuant ses tâches quotidiennes. Malgré un discours digressif et souvent incohérent, il a tenu des propos sensés concernant la gestion de ses affaires et a livré le détail de celles-ci aux experts, à travers un inventaire rigoureux (cf expertise p. 4). Pour le surplus, les experts ont notamment observé ce qui suit (cf. expertise, pp. 11-12) :
"(…)
D’après nos rencontres et les éléments médicaux et juridiques à notre disposition, nous interprétons les quatorze hospitalisations (sur un total de vingt-trois) en quatre ans, comme une conséquence de l’environnement stressant auquel Monsieur N.__ a dû faire face. En effet, le litige l’ayant opposé à sa sœur concernant la vente des biens familiaux, dont la demeure dans laquelle il a à notre connaissance toujours vécu, constitue un facteur de vulnérabilité majeur dans le déclenchement des crises ayant nécessité de nouvelles hospitalisations. Nous ignorons tout de la véritable relation entretenue par l’expertisé et sa sœur avant les négociations du partage successoral, mais l’hypothèse d’un signalement en vue d’une interdiction civile pour le priver de jouir de ses droits ne peut être exclue. Si le litige a eu pour effet de le faire décompenser à réitérées reprises, le signalement auquel s’est joint sa fille a permis de mettre en lumière les capacités dont dispose M. N.__ en matière de gestion de ses affaires. Ceci non seulement pour ce qui concerne le règlement de ses factures, il n’a aucune dette rappelons-le, mais aussi pour s’adjoindre les services d’un avocat dans la défense de ses droits. En dépit d’une maladie chronique qui est susceptible de modifier sa perception de la réalité sur certains aspects, il n’en reste pas moins que l’expertisé semble doté d’une autonomie qui lui permette d’affronter ses obligations civiques avec succès.
(…)"
Interpellé par le Juge de paix à propos du rapport des experts, le Médecin cantonal, à Lausanne, a déclaré n'avoir aucune observation à formuler. La Municipalité de Lausanne a indiqué, pour sa part, n'être pas en mesure de formuler un préavis pertinent à propos de la mesure envisagée pour [...], lequel était connu de ses services de police (art. 374 al. 2 CC et 380 CPC-VD).
Par décision du 22 septembre 2011, envoyée pour notification aux parties le 6 décembre 2011, la Justice de paix a clos l’enquête en interdiction civile et en privation de liberté à des fins d’assistance ouverte à l’endroit de N.__ (I), institué une curatelle de conseil légal au sens de l’art. 395 al. 2 CC en sa faveur (II), nommé Me Q.__, avocat-stagiaire en l'Etude de Me [...], à Lausanne, en qualité de conseil légal gérant du pupille (III), renoncé, en l’état, à prononcer la privation de liberté à des fins d’assistance du pupille (IV) et mis les frais de la cause, par 6'600 fr., à sa charge (V). A l’appui de sa décision, la Justice de paix a considéré que l’intéressé n’avait pas besoin d’une mesure de protection pour tous les actes de la vie quotidienne et qu'une tutelle le privant de l’ensemble de ses droits serait disproportionnée, voire injustifiée. En revanche, elle a retenu que, lors de son audition du 8 décembre 2009, le pupille lui avait déclaré disposer d'un montant d'environ 70'000 fr. sur un compte bancaire et qu'il devait recevoir la somme de 362'000 fr. provenant de la vente de la maison familiale, ce qui ne correspondait pas au rapport d'expertise du 13 juillet 2011, lequel faisait mention d'une part du prix de vente de 250'000 fr. et d'une fortune totale de 270'000 francs. En outre, lors de la dernière audience, le pupille avait refusé de dévoiler le montant de ses biens, contestant le montant de 270'000 francs. Ainsi, si en date du 8 décembre 2008, N.__ avait une fortune de 70'000 fr. et avait reçu les 250'000 fr. précités, sa fortune actuelle aurait dû s'établir à environ 320'000 francs; or, selon ses propres déclarations, elle était inférieure à 250'000 francs. Cette diminution de 70'000 fr., en l'espace de deux ans, était préoccupante, vu l'âge (55 ans) et les revenus limités du pupille. Elle justifiait de prendre la mesure de protection tutélaire qui avait été prononcée à son endroit pour préserver ses biens.
B. Par acte d’emblée motivé du 16 décembre 2011, N.__ a fait appel de cette décision et conclu, avec dépens, principalement à sa réforme en ce sens que l’enquête en interdiction civile et en privation de liberté est close, qu'implicitement, aucune mesure tutélaire n'est ordonnée, que les frais de la cause sont mis à la charge de l’Etat et, subsidiairement, que la décision est annulée.
Le 16 janvier 2012, le curateur Q.__ a écrit à la Justice de paix pour signaler que la décision attaquée et son intervention comme conseil légal avaient provoqué un nouvel épisode de décompensation et l'hospitalisation en hôpital psychiatrique de N.__, qu’une prise de contact progressive avec lui avait été décidée d'entente avec ses médecins pour favoriser l’établissement d’un lien de confiance et que, dans ce contexte, l’inventaire de ses biens, qui nécessitait sa collaboration, n’avait pas encore pu être établi.
Le 13 février 2012, le recourant a renoncé à déposer un mémoire de recours et s'est référé à son écriture antérieure, qui comportait déjà l'ensemble de ses moyens. En revanche, il a produit la lettre que le Professeur J.__ avait adressée à ses avocats, dans laquelle il exprimait son scepticisme au sujet de l’instauration de mesures tutélaires en faveur du patient, exposant notamment ce qui suit :
"(…)
b) je ne sais pas jusqu’où M. N.__ gère correctement ses affaires financières. Je n’ai jamais entendu dire qu’il les mette en péril ; c’est aussi l’avis de mes confrères qui ont procédé à l’expertise psychiatrique. Et je sais qu’il vous sollicite pour des conseils à ce propos ;
c) les mesures de « protection de la personne » ont été sollicitées par la parenté proche de M. N.__, avec qui mon patient n’a actuellement plus aucun contact et à vrai dire est en conflit aigu. Donner suite à ces sollicitations, s’il n’existe pas pour instituer de telles mesures d’arguments clairs constatés par des tiers, ne peut que renforcer chez M. N.__ ce sentiment de trahison par sa famille, de solitude, et contribuer à l’enfermer encore plus dans un « isolement grandiose ». Dans ce sens de telles mesures sont, à mon sens, plutôt préjudiciables à sa santé, en l’état actuel. Bien entendu, mon opinion pourrait être modifiée s’il était démontré que M. N.__ se met en péril financier par sa façon de gérer ses affaires.
(…)"
Par lettre du 23 février 2012, les dénonciatrices L.__ et X.__ se sont déterminées. Elles ont en particulier rappelé que le pupille avait fait une vingtaine de séjours en hôpital psychiatrique à la suite principalement de décompensations constitutives de mise en péril, lesquelles avaient nécessité l’intervention de la police, et qu'elles n'avaient pas eu accès à des informations sur le revenu et la fortune du pupille, mais qu'elles avaient eu connaissance de frais importants causés par l’achat d'une voiture et d’un bus (pour un prix d’environ 50'000 fr. selon une lettre de X.__ du 7 août 2010 et un rapport de gendarmerie du 30 novembre 2010), des frais de rapatriement de véhicules abandonnés en Suisse ou à l’étranger, des amendes et des détériorations du logement. Elles avaient ajouté que leur démarche se limitait à avertir les autorités des problèmes importants que risquait de produire le comportement du pupille.
En droit :
1. L'appel est dirigé contre une décision de la justice de paix instituant une curatelle de conseil légal gérant au sens de l'art. 395 al. 2 CC en faveur de N.__.
La procédure d'institution d'une telle curatelle, qui relève de la compétence cantonale (art. 373 CC), est semblable à celle de l'interdiction (art. 395 CPC-VD [Code de procédure civile vaudois du 14 décembre 1966], qui reste applicable conformément à l'art. 174 CDPJ [Code de droit privé judiciaire vaudois du 12 janvier 2010 ; RSV 211.02]). Dès lors, la décision de l'autorité tutélaire est susceptible d'appel, lequel est ouvert notamment au dénoncé et doit s'exercer dans les dix jours suivant la notification de la décision attaquée (art. 393 CPC-VD).
Déposé en temps utile, le présent appel est recevable.
2. a) L'appel reporte la cause en son entier – c'est-à-dire en fait et en droit – devant la Chambre des tutelles du Tribunal cantonal, qui n'est pas liée par l'appréciation des témoignages et peut procéder ou faire procéder à toutes mesures d'instruction qu'elle juge utiles (art. 393 al. 3 CPC-VD ; art. 76 al. 2 LOJV [loi d'organisation judiciaire du 12 décembre 1979 ; RSV 173.01] ; Poudret/Haldy/Tappy, Procédure civile vaudoise, 3e éd., Lausanne 2002, note ad art. 393 CPC-VD, p. 599).
S'agissant d'une matière non contentieuse, la Chambre des tutelles, qui n'est pas tenue par les moyens et conclusions des parties, examine d'office si les règles essentielles de la procédure d'interdiction, dont la violation pourrait entraîner l'annulation du jugement attaqué, ont été respectées. Elle ne doit annuler une décision que s'il ne lui est pas possible de faire autrement, soit parce qu'elle est en présence d'une procédure informe, soit parce qu'elle constate la violation d'une règle essentielle de la procédure à laquelle elle ne peut elle-même remédier et qui est de nature à exercer une influence sur la solution de l'affaire (Poudret/Haldy/Tappy, op. cit., nn. 3 et 4 ad art. 492 CPC-VD, p. 763).
b) En l'espèce, N.__ était domicilié à Cheseaux-sur-Lausanne au moment de l'ouverture de l'enquête. La Justice de paix du district de Lausanne était donc compétente pour décider de l'éventuelle institution d'une curatelle de conseil légal (art. 379 al. 1 CPC-VD, qui correspond à l'art. 376 al. 1 CC régissant le for tutélaire) en sa faveur.
Le juge de paix a procédé à une enquête et ordonné une expertise. Le Professeur Z.__ et C.__, respectivement médecin-chef et psychologue expert auprès du Département de psychiatrie [...], ont déposé leur rapport le 13 juillet 2011. Le Médecin cantonal, agissant par délégation du Conseil de santé, n’a pas émis d’observation sur ce rapport. La Municipalité de Lausanne a indiqué ne pas être en mesure de formuler un préavis pertinent au sujet de la mesure tutélaire envisagée en faveur de N.__ qui était connu de ses services de police (art. 374 al. 2 CC et 380 CPC-VD). L'enquête a ensuite été transmise à la Justice de paix, qui a entendu le dénoncé, assisté de son conseil, lors de l'audience du 22 septembre 2011.
La procédure suivie est donc correcte et il y a lieu d'examiner si la décision est justifiée au fond.
3. a) L'appelant prétend être apte à gérer ses affaires et ä payer ses factures. Il affirme qu'il n'aurait pas de dette et qu'il serait capable de mandater un avocat pour défendre ses droits. Il fait aussi valoir que les experts ne préconisent pas l'instauration d'une mesure tutélaire en sa faveur et qu’il n’existerait aucun élément concret permettant de se convaincre qu’il dilapiderait sa fortune et compromettrait ses conditions d'existence.
Au sens de l'art. 395 CC, la mise sous conseil légal est une mesure analogue à l'interdiction, dont elle se rapproche sur plus d'un point. La curatelle de conseil légal vise une personne majeure et supprime sa capacité civile active pour un certain nombre d'actes. Dans une première approche, on peut ainsi dire que le conseil légal est une tutelle atténuée dont la portée est limitée à certains actes (Deschenaux/ Steinauer, Personnes physiques et tutelle, 4e éd., Berne 2001, n. 173, p. 55 et les références jurisprudentielles citées). La mise sous conseil légal peut être prononcée à deux conditions. Il faut d'abord qu'existe une cause retenue en matière d'interdiction (maladie mentale, prodigalité, etc.), mais que cette cause ne présente pas le degré de gravité retenu pour l'interdiction (Deschenaux/Steinauer, op. cit., n. 181, p. 57, et n. 197, pp. 60-61). Celui qui est assisté d'un conseil légal gérant perd l'administration de ses biens, tout en conservant la libre disposition de ses revenus (art. 395 al. 2 CC), de sorte que pour les actes concernant les revenus, la capacité de la personne protégée est inconditionnelle, alors que pour les actes qui concernent ses biens, cette capacité est subordonnée au consentement du conseil légal (Deschenaux/Steinauer, op. cit., n. 194, p. 59). L'institution d'un conseil légal, coopérant, gérant ou combiné suppose en outre l'existence d'un besoin de protection correspondant à l'une des conditions d'interdiction prévues aux art. 369 et 370 CC, à savoir l'incapacité durable de s'occuper convenablement de ses affaires, le besoin de soins et de secours permanents, le risque de tomber dans le besoin ou la menace pour la sécurité d'autrui.
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, lorsqu'une personne possède la possibilité effective de gérer elle-même ses biens ou de choisir un mandataire mais qu'elle n'est pas en état de le faire d'une façon convenable par suite de troubles psychiques, de défauts de caractère ou d'autres causes semblables, c'est un conseil légal qui doit lui être désigné (ATF 80 II 197, JT 1955 I 194). Cette mesure ne doit être instituée que si elle est commandée par l'intérêt de la personne à protéger, les intérêts éventuels de tiers n'ayant pas à être pris en considération (ATF 89 II 177, JT 1964 I 76). En outre, rejoignant la doctrine, le Tribunal fédéral a insisté sur le fait qu'admettre l'institution d'un conseil légal chaque fois que cette mesure serait commandée par l'intérêt de la personne en cause ouvrirait la porte à une application beaucoup trop large de la privation partielle des droits civils et conduirait à priver partiellement de sa capacité civile celui qui, bien qu'en état de le faire, ne veut pas adopter dans son genre de vie et dans la gestion de ses biens un comportement déterminé. Or, la loi réglemente de façon exhaustive de tels comportements aux art. 370 et 395 CC, en exigeant à tout le moins une mauvaise gestion, pour que la privation partielle ou totale des droits civils se justifie (ATF 100 II 88 c. 4). La mesure de conseil légal doit en outre respecter le principe de la proportionnalité : il faut pouvoir garantir qu'elle apporte à tous égards une protection suffisante à la personne concernée. Une mesure d'ordre tutélaire est donc disproportionnée non seulement lorsqu'elle est trop radicale, mais aussi lorsqu'elle est trop faible et que le but visé ne peut être atteint que par une intervention plus forte (ATF 108 II 92 c. 4, JT 1985 I 187).
b) En l’espèce, il ressort de l’expertise du 13 juillet 2011 que l’appelant souffre d’une schizophrénie paranoïde continue qui se manifeste notamment par la présence persistante d’idées délirantes de persécution et actuellement de filiation. La symptomatologie comporte une part d’hétéro-agressivité qui semble croître en fonction de l’intensité des délires et du biais interprétatif que l'intéressé fait d’une menace potentielle. Il s’agit, en l'occurrence, d’une atteinte durable qui a déjà nécessité vingt-trois hospitalisations en milieu psychiatrique, à la suite de décompensations. En revanche, toujours selon l’expertise, les troubles dont souffre le pupille ne semblent pas l'affecter dans la gestion de ses affaires. Actuellement, il réside dans un appartement protégé dépendant de l’EMS [...] à [...]. Il manifeste une certaine autonomie, effectuant ses tâches quotidiennes. Comme on l'a vu, malgré un discours digressif et souvent incohérent, il tient des propos sensés concernant la gestion de ses affaires et les experts lui ont reconnu une certaine autonomie.
Il résulte de cette expertise que la cause d’une mesure tutélaire au vu des troubles psychiques dont souffre l'appelant est en l'espèce réalisée. En revanche, les experts sont d’avis que la condition d’une telle mesure, soit le besoin de protection induit par une incapacité du pupille à gérer ses affaires sans les compromettre, n'est pas présent.
Alors que la question litigieuse à résoudre n’est pas celle de savoir si le pupille a la capacité de gérer ses revenus, mais celle de savoir s'il est en mesure de gérer son patrimoine, les experts ont investigué principalement la question de la gestion des revenus et dépenses courantes par le pupille. Ils ont considéré que cette gestion était satisfaisante et en ont déduit que l'intéressé avait la capacité d’administrer ses biens. Ils ne se sont cependant pas interrogés sur l’évolution, le cas échéant, anormalement négative, de sa fortune. En outre, pour se déterminer, ils se sont fondés sur les déclarations de l’appelant et sur les constatations faites par ses thérapeutes et n'ont pas tenté d'obtenir des éléments comptables ou des pièces justificatives pouvant leur permettre d’apprécier objectivement si les biens de l’appelant étaient ou non soumis à une érosion inquiétante.
Pour leur part, les premiers juges ont constaté, en s’appuyant sur l'ensemble des déclarations de l’appelant, que sa fortune avait diminué de plus de 70'000 fr. en deux ans, ce qui représentait environ le cinquième de ses avoirs. Par ailleurs, lors de l’audience du 22 septembre 2011, le pupille avait refusé d’être plus précis sur le montant actuel de sa fortune et ses explications sur la diminution de son patrimoine, prétendument due au paiement d’importants frais médicaux, étaient à l’évidence dépourvues de vraisemblance puisque la baisse de fortune constatée ne pouvait se justifier uniquement par le paiement de franchises d’assurance et celui de participations au coût de soins et de médicaments. En outre, il était significatif que, dans son écriture, l’appelant ne fournisse aucune explication claire sur cette question, alors qu’elle conditionnait de façon décisive la mesure qu’il contestait.
A l’inverse, les explications avancées par les parentes du pupille, qui ne pouvaient être d'emblée suspectées d'agir pour préserver leurs propres intérêts, comme quoi le pupille avait engagé des frais importants lors de crises de décompensation ou avait procédé à des achats inconsidérés, paraissaient crédibles.
Il est ainsi manifeste que le pupille présente une importante vulnérabilité en raison de la détérioration de sa santé et que les liquidités dont il dispose se sont fortement amenuisées. Or la protection de son patrimoine est d’autant plus nécessaire que son espérance de vie est longue, que sa maladie est chronique et qu’il bénéficie uniquement de sa fortune de l’ordre de 250'000 fr. pour compléter ses revenus de rentier AI et améliorer ainsi son train de vie. Dans ces conditions, une curatelle de conseil légal gérant au sens de l’art. 395 al. 2 CC s’impose comme une mesure proportionnée, dans la mesure où elle laisse à l’appelant la libre disposition de ses revenus, tout en évitant le risque de dilapidation de son patrimoine.
4. En conclusion, l'appel doit être rejeté et la décision confirmée.
Les frais de deuxième instance de l'appelant sont arrêtés à 500 fr. (art. 236 al. 1 aTFJC [tarif du 4 décembre 1984 des frais judiciaires en matière civile], qui continue à s'appliquer pour toutes les procédures visées à l'art. 174 CDJP (art. 100 TFJC [tarif du 28 septembre 2010 des frais judiciaires civils, RSV 270.11.5]).
Par ces motifs,
la Chambre des tutelles du Tribunal cantonal,
statuant à huis clos,
prononce :
I. L'appel est rejeté.
II. La décision est confirmée.
III. Les frais de deuxième instance de l'appelant N.__ sont arrêtés à 500 fr. (cinq cents francs).
IV. L'arrêt est exécutoire.
Le président : La greffière :
Du
L'arrêt qui précède, dont la rédaction a été approuvée à huis clos, est notifié à :
Me Elie Elkaim (pour M. N.__),
- M. Q.__,
Mme L.__,
- Mme X.__,
et communiqué à :
Justice de paix du district de Lausanne
par l'envoi de photocopies. Il prend date de ce jour.
Le présent arrêt peut faire l'objet d'un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral au sens des art. 72 ss LTF (loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral – RS 173.110), cas échéant d'un recours constitutionnel subsidiaire au sens des art. 113 ss LTF. Ces recours doivent être déposés devant le Tribunal fédéral dans les trente jours qui suivent la présente notification (art. 100 al. 1 LTF).
La greffière :
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