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Bundesverwaltungsgericht Urteil E-7889/2016

Urteilsdetails des Bundesverwaltungsgerichts E-7889/2016

Instanz:Bundesverwaltungsgericht
Abteilung:Abteilung V
Dossiernummer:E-7889/2016
Datum:26.03.2018
Leitsatz/Stichwort:Asile (sans exécution du renvoi)
Schlagwörter : Rsquo;; Rsquo;a; écution; Tribunal; écision; être; été; ;asile; Rsquo;un; écutions; Rsquo;il; éfugié; ément; Suisse; érant; égué; Rsquo;est; érieur; épart; élément; ésent; éguées; égal; Rsquo;en; Rsquo;hôpital; également; Rsquo;une; éressés; èvement; érieurs
Rechtsnorm: Art. 54 arg;
Referenz BGE:-
Kommentar:
-

Entscheid des Bundesverwaltungsgerichts

B u n d e s v e r w a l t u n g s g e r i c h t

T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i f f é d é r a l

T r i b u n a l e a m m i n i s t r a t i v o f e d e r a l e T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i v f e d e r a l

Cour V

E-7889/2016

A r r ê t d u 2 6 m a r s 2 0 1 8

Composition Emilia Antonioni Luftensteiner (présidente du collège), Yanick Felley, Barbara Balmelli, juges,

Sophie Berset, greffière.

Parties A. , alias B. , né le ( ), son épouse

C. , née le ( ), et leurs enfants D. , née le ( ),

  1. , né le ( ),

  2. , né le ( ),

alias G. , née le ( ), et H. , né le ( ),

Irak,

représentés par François Miéville, Centre Social Protestant (CSP), recourants,

contre

Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM), Quellenweg 6, 3003 Berne,

autorité inférieure.

Objet Asile (sans exécution du renvoi) ;

décision du SEM du 17 novembre 2016 / N ( ).

Faits :

A.

A. et son épouse, C. , accompagnés de leurs enfants, ont déposé une demande d’asile au Centre d’enregistrement et de procédure de I. , le 17 novembre 2015.

B.

Entendus le 20 novembre 2015 puis le 20 avril 2016, ils ont déclaré être mariés depuis 2005, d’ethnie arabe et originaires de J. (dans la province de Diyala), où ils ont vécu jusqu’à leur départ. A. aurait travaillé comme infirmier à l’hôpital de J. depuis 2004. Il se serait converti au christianisme, à l’instar de plusieurs membres de sa famille, en 2013 ou 2014, et son épouse l’aurait suivi dans sa démarche.

L’oncle de la belle-sœur du recourant (K. ) aurait découvert que celle-ci et son époux (L._ , le frère du recourant) s’étaient convertis au christianisme. Il aurait rapidement informé le directeur de l’hôpital de J. , également membre du parti M. , que le recourant s’était probablement aussi converti. C. aurait été enlevée par un de ses frères, qui aurait appris sa conversion religieuse et l’aurait emmenée avec ses enfants au domicile familial, où il l’aurait frappée et séquestrée durant quatre ou cinq jours. Grâce à l’aide de sa mère et d’un autre de ses frères, la recourante aurait réussi à s’échapper et à regagner sa demeure. Le ( ) 2015, le directeur de l’hôpital aurait menacé de mort le recourant et deux individus l’auraient frappé et coupé avec un objet tranchant (une lame de rasoir ou un scalpel) au niveau de la poitrine à la sortie de l’hôpital. Craignant pour leur sécurité, les recourants auraient fui J. , avec l’intention de quitter le pays par l’aéroport de N. , mais auraient été contraints, pour des raisons médicales, de séjourner provisoirement à O. , où la recourante a accouché, le ( ). Dans l’intervalle, leur maison aurait été réquisitionnée et servirait de siège au parti M. . Après quelques semaines de repos, la famille aurait été en mesure de quitter le pays, le 29 octobre 2015, par avion à destination de la Turquie, et aurait transité par plusieurs pays avant d’entrer en Suisse, le 8 novembre 2015. A. a déclaré avoir été recherché après son départ du pays, jugé par contumace et condamné à une peine de huit ans d’emprisonnement pour incitation à l’émeute et appel ou participation à un rassemblement.

Outre leurs documents d’identité et la carte professionnelle du recourant, ils ont produit des photographies, des copies de deux mandats d’amener

ainsi qu’un jugement pénal concernant A. , des documents concernant le baptême de son père, la confiscation de sa voiture et la demande de changement de prénom de son fils E. .

C.

Par décision du 17 novembre 2016, le SEM a rejeté les demandes d’asile des recourants et refusé de leur reconnaître la qualité de réfugié en raison de l’invraisemblance de leurs propos. Il a prononcé leur renvoi de Suisse (sur le principe) et les a mis au bénéfice d’une admission provisoire pour cause d’inexigibilité de l’exécution de cette mesure.

D.

Interjetant recours contre la décision précitée, le 21 décembre 2016, les intéressés ont reproché au SEM d’avoir statué sans tenir compte des procédures des autres membres de leur famille, alors que leurs motifs étaient étroitement liés. A. a fait part d’un élément nouveau, déclarant ne pas avoir pu en parler lors de ses auditions en raison de la présence de femmes. Ainsi, en raison de propos à connotation politique tenus devant des collègues en mars 2015, il aurait été drogué et anesthésié, et aurait subi l’ablation d’un testicule contre son gré par le Dr P. , dont il a produit deux photographies tirées de Facebook. Il a déposé une attestation médicale datée du 1er novembre 2016 accompagnée de deux photographies attestant ce fait.

Les recourants ont attesté, pièces à l’appui, que A. s’était fait baptiser en Suisse, le ( ) 2016, et qu’ils fréquentaient régulièrement leur paroisse, tout en vivant leur foi chrétienne de manière discrète. Ils ont produit un témoignage de Monsieur Q. du ( ) 2016, qui confirme que le père et le frère du recourant sont menacés en Irak. Ils ont déposé des photographies de leur maison en Irak, dont certaines sur lesquelles posent leurs fils, ainsi qu’une attestation du ( ) 2016, dans laquelle le directeur du ( ) exprime les risques qui pèsent sur les recourants en Irak à cause de leur conversion au christianisme.

E.

A la demande du Tribunal administratif fédéral (ci-après : le Tribunal ; cf. ordonnance du 11 janvier 2017), C. a régularisé son recours, dans son courrier du 19 janvier 2017 et les recourants ont produit une attestation d’assistance financière datée de la veille.

F.

Par décision incidente du 24 janvier 2017, le Tribunal a admis la demande d’assistance judiciaire totale et nommé Monsieur François Miéville en qualité de défenseur d’office des recourants dans la présente procédure.

G.

Dans sa réponse du 8 février 2017, le SEM a conclu au rejet du recours, estimant que la seule conversion des recourants au christianisme ne fondait pas une crainte de persécutions futures en cas de retour, puisqu’une pratique discrète et privée de la religion était possible en Irak. Il a considéré que les circonstances de l’opération subie par le recourant n’étaient pas établies, tout comme le lien de causalité entre sa conversion et les persécutions alléguées à l’égard de son père et de son frère.

H.

Les recourants ont contesté cette appréciation dans leur réplique du 3 avril 2017 et ont produit un écrit du pasteur du 29 mars 2017 attestant de leurs activités au sein de la paroisse de R. .

I.

Par décision incidente du 12 septembre 2017, le Tribunal a joint la présente cause à celles des frères et de la mère du recourant et, estimant après un examen prima facie des dossiers que les persécutions alléguées étaient invraisemblables, a imparti un délai aux intéressés pour se déterminer sur les éléments relevés.

J.

Exerçant leur droit d’être entendu, le 6 octobre 2017, les recourants se sont opposés à la jonction de la présente cause aux autres, tout en demandant une prise en considération de l’ensemble de la situation ainsi que des dossiers connexes. Ils ont admis que leurs déclarations comportaient des divergences et des contradictions et ont apporté certaines précisions. Ils ont affirmé que leur conversion était connue de leurs oncles à S. , des ressortissants irakiens musulmans de Suisse et fort probablement de leurs proches en Irak. Ils ont déposé un écrit du pasteur de la paroisse de R. du 19 septembre 2017 attestant de leur engagement au sein de la communauté religieuse. A. a produit un document du ( ) 2015 (en copie accompagnée d’une traduction) attestant que ses rapports de travail à l’hôpital avaient pris fin, le ( ) 2015.

K.

Par décision incidente du 7 novembre 2017, la disjonction de la présente cause de celles des autres membres de la famille de A. a été prononcée.

L.

Les autres éléments contenus dans les écritures précitées seront examinés, si nécessaire, dans les considérants en droit qui suivent.

Droit :

1.

    1. Le Tribunal, en vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 PA prises par les autorités mentionnées à l'art. 33 LTAF.

      En particulier, les décisions rendues par le SEM concernant l'asile peuvent être contestées, par renvoi de l'art. 105 LAsi, devant le Tribunal, lequel statue alors définitivement, sauf demande d'extradition déposée par l'Etat dont le requérant cherche à se protéger (cf. art. 83 let. d ch. 1 LTF), exception non réalisée en l’espèce.

    2. Les recourants ont qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1 PA). Présenté dans la forme (cf. art. 52 al. 1 PA) et dans le délai (cf. art. 108 al. 1 LAsi) prescrits par la loi, le recours est recevable.

2.

    1. Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur Etat d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. Sont notamment considérées comme de sérieux préjudices la mise en danger de la vie, de l'intégrité corporelle ou de la liberté, de même que les mesures qui entraînent une pression psychique insupportable. Il y a lieu de tenir compte des motifs de fuite spécifiques aux femmes (art. 3 al. 1 et 2 LAsi; cf. également ATAF 2007/31 consid. 5.2 à 5.6).

    2. La crainte face à des persécutions à venir, telle que comprise à l'art. 3 LAsi, contient un élément objectif, au regard d'une situation ancrée dans les faits, et intègre également dans sa définition un élément subjectif. Sera reconnu comme réfugié, celui qui a de bonnes raisons, c'est-à-dire des raisons objectivement reconnaissables pour un tiers (élément objectif), de craindre (élément subjectif) d'avoir à subir selon toute vraisemblance et dans un avenir prochain une persécution (cf. ATAF 2010/44 consid. 3.4, ATAF 2008/34 consid. 7.1, ATAF 2008/12 consid. 5.1).

    3. Quiconque demande l'asile (requérant) doit prouver ou du moins rendre vraisemblable qu'il est un réfugié (art. 7 al. 1 LAsi). La qualité de réfugié est vraisemblable lorsque l'autorité estime que celle-ci est hautement probable (art. 7 al. 2 LAsi). Conformément à l'art. 7 al. 3 LAsi, des allégations sont vraisemblables, lorsque, sur les points essentiels, elles sont suffisamment fondées, concluantes et plausibles et que le requérant est personnellement crédible. Les allégations sont fondées, lorsqu'elles reposent sur des descriptions détaillées, précises et concrètes, la vraisemblance de propos généraux, voire stéréotypés étant généralement écartée. Elles sont concluantes, lorsqu'elles sont exemptes de contradictions entre elles, d'une audition à l'autre ou avec les déclarations d'un tiers (par exemple, proche parent) sur les mêmes faits. Elles sont plausibles, lorsqu'elles correspondent à des faits démontrés (en particulier aux circonstances générales régnant dans le pays d'origine) et sont conformes à la réalité et à l'expérience générale de la vie.

Quand bien même la vraisemblance autorise l'objection et le doute, ceuxci doivent toutefois paraître d'un point de vue objectif moins importants que les éléments parlant en faveur de la probabilité des allégations. Lors de l'examen de la vraisemblance des allégations de fait d'un requérant d'asile, il s'agit pour l'autorité de pondérer les signes d'invraisemblance en dégageant une impression d'ensemble et en déterminant, parmi les éléments militant en faveur ou en défaveur de cette vraisemblance, ceux qui l'emportent (cf. ATAF 2012/5 consid. 2.2, ATAF 2010/57 consid. 2.3 et réf. cit.).

3.

D’entrée de cause, le Tribunal constate que les événements allégués par les différents membres de la famille des recourants comme étant à l’origine de leur fuite d’Irak sont étroitement liés, raison pour laquelle il convient d’examiner les faits dans leur ensemble, à la lumière des différents dossiers.

4.

    1. En l’occurrence, le SEM considère qu’il est invraisemblable que les recourants se soient convertis à la religion chrétienne en Irak, compte tenu principalement de leur manque de connaissance sur le sujet. Il relève encore des divergences de propos concernant l’objet coupant utilisé par les agresseurs du recourant, le nombre de témoins présents lorsque le directeur de l’hôpital l’a menacé, la date de l’enlèvement de C. ainsi que l’inconsistance de son récit sur les circonstances de sa captivité. Le SEM écarte les moyens de preuve produits, au motif qu’ils n’établissent pas la conversion des recourants ni les persécutions alléguées. Les intéressés contestent cette appréciation et maintiennent avoir été exposés à de sérieux préjudices en Irak en raison de leur conversion et risquer de l’être à nouveau en cas de retour.

    2. Le Tribunal estime que les persécutions alléguées comme étant à l’origine de la fuite des recourants d’Irak sont invraisemblables.

      1. D’abord, il est rappelé que les circonstances dans lesquelles la famille de K. aurait découvert qu’elle et son époux s’étaient convertis au christianisme sont jugées invraisemblables, par arrêt rendu ce jour par le Tribunal en la procédure E-2682/2017. Par voie de conséquence, le Tribunal retient également l’invraisemblance des persécutions par ricochet alléguées par les recourants, en particulier le fait que le directeur de l’hô- pital ait appris la conversion de A. par l’intermédiaire de l’oncle de K. . En particulier, l’agression du recourant sur son lieu de travail en date du ( ) 2015 n’est pas crédible, puisque ni ses frères ni sa bellesœur T. ne mentionnent, même brièvement, cet incident. En outre, la mère du recourant se contredit quant à savoir si cette agression s’est déroulée avant ou après les visites de l’oncle de K. et de ses hommes au domicile familial.

        Les photographies des deux agresseurs de A. et du chef de l’hôpital n’établissent pas la vraisemblance des représailles alléguées. L’attestation de la fin de ses rapports de travail n’atteste pas non plus des raisons de cette interruption en date du ( ) 2015 ni, par conséquent, les persécutions alléguées. Les moyens de preuve produits en lien avec l’ablation d’un testicule du recourant contre son gré n’établissent ni les causes ni les circonstances de cette opération ; en particulier, l’attestation médicale du

        1er novembre 2016, établie par le Dr U.

        (médecin généraliste

        FMH), ne fait que constater l’orchidectomie, sur la base de faits tels qu’évoqués par le recourant lui-même et n’est donc pas déterminante. Les mandats d’amener et le jugement concernant A. sont dépourvus de valeur probante, puisqu’ils sont produits en copie. A cela s’ajoute qu’ils sont sans lien avec les persécutions de tiers fondées sur la conversion religieuse, puisqu’ils sanctionnent des insultes publiques à l’égard du président irakien ou de ses représentants, l’incitation à l’émeute ainsi que l’appel ou la participation à un rassemblement. L’allégué du recourant, selon lequel il s’agirait d’une manipulation des autorités pour masquer les persécutions à l’égard des chrétiens, n’est, dans le cas particulier, qu’une hypothèse sans fondement concret. Ainsi, ce moyen de preuve ne suffit pas, en tant que tel, pour établir la véracité des événements invoqués. Les autres documents produits (cf. let. B i. f. et D 2ème par. ci-dessus) ne sont pas en lien avec les motifs d’asile invoqués ou n’établissent pas la vraisemblance des persécutions alléguées.

      2. C. est incapable de dater, même approximativement, son enlèvement par son frère en raison de sa conversion religieuse, se contentant d’expliquer que cela s’est produit « peu de temps avant leur départ » (cf. pv de son audition sur les motifs Q21ss). Ses déclarations sont changeantes concernant les propos que son frère aurait tenus lors de son enlèvement, puisqu’elle soutient qu’il ne lui a pas adressé la parole, avant d’ajouter qu’il avait prétendu que leur mère était malade pour la faire venir (cf. pv de l’audition sur les motifs Q15-18 et Q20). De plus, elle ne donne aucun détail au sujet des quatre ou cinq jours passés séquestrée avec ses enfants chez sa famille contre son gré, évoquant succinctement avoir été frappée (cf. pv de son audition sur les motifs Q28). Quoi qu’il en soit, à part le couple, aucun autre membre de la famille ne mentionne l’enlèvement de C. , alors que cet incident aurait eu lieu à une date proche de celui de K. , dont ils ont pourtant tous parlé. Dès lors, pour toutes ces raisons, l’enlèvement allégué par C. est invraisemblable.

      3. Enfin, les modalités de départ de A. et de sa famille sont également confuses. En effet, celui-ci déclare s’être réfugié chez un ami, le ( ) 2015, après être brièvement rentré chez lui chercher sa femme et ses enfants, ce que contredit la recourante, qui dit avoir rejoint son mari chez une tierce personne. En outre, il n’est pas crédible que C. ait été chez elle le ( ) 2015, puisqu’elle aurait été enlevée par son frère le ( ) ou le ( ) juin précédent et détenue pendant quatre ou cinq jours.

    1. Partant, la découverte de la conversion religieuse des recourants ainsi que les représailles de ce fait s’avérant invraisemblables, le Tribunal considère l’absence de motifs de persécutions antérieurs à leur départ du pays.

    2. Il s'ensuit que le recours, en tant qu'il conteste le refus d’octroi de l'asile, doit être rejeté.

5.

    1. Il reste à examiner si, en raison de la conversion de A. au christianisme, intervenue en Suisse, la crainte des intéressés d’être exposés à de sérieux préjudices en cas de renvoi en Irak pour des motifs subjectifs postérieurs à leur départ est fondée.

    2. Celui qui se prévaut d'un risque de persécution dans son pays d'origine ou de provenance, engendré uniquement par son départ de ce pays ou par son comportement postérieur audit départ, fait valoir des motifs subjectifs survenus après la fuite, au sens de l'art. 54 LAsi. Sont en particulier considérés comme des motifs subjectifs survenus après la fuite au sens de cette disposition les activités politiques indésirables en exil, le départ illégal du pays ("Republikflucht"), le dépôt d'une demande d'asile à l'étranger, lorsqu'ils fondent un risque de persécution future (cf. ATAF 2009/29 consid. 5.1 et réf. cit.). Ils doivent être distingués des motifs objectifs postérieurs à la fuite qui ne relèvent pas du comportement du requérant. Les motifs subjectifs postérieurs à la fuite sont déterminants pour la reconnaissance de la qualité de réfugié au sens de l'art. 3 LAsi. Le législateur a en revanche clairement exclu qu'ils puissent conduire à l'octroi de l'asile indépendamment de la question de savoir si le comportement du requérant peut ou non être qualifié d'abusif. L'exécution du renvoi d'un requérant qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié sur la base de motifs subjectifs postérieurs à la fuite s'avère illicite au sens de l'art. 83 al. 3 LEtr (RS 142.20). Enfin, la conséquence que le législateur a voulu attribuer aux motifs subjectifs intervenus après la fuite, à savoir l'exclusion de l'asile, interdit de les combiner avec des motifs antérieurs à la fuite, respectivement des motifs objectifs postérieurs à celle-ci, lorsque ceux-ci ne sont pas suffisants pour fonder la reconnaissance de la qualité de réfugié et conduire à l'octroi de l'asile (cf. ATAF 2009/28 consid. 7.1).

    3. En l’espèce, le SEM estime que la seule conversion du recourant au christianisme, en Suisse, ne suffit pas pour fonder une crainte de sérieux

      préjudices en cas de retour (cf. art. 54 LAsi). Il argue qu’une pratique discrète et privée de la religion est possible en Irak. Les recourants s’opposent à cette appréciation ; ils soutiennent que leur réseau social et familial au pays a très probablement connaissance de la conversion religieuse de l’intéressé, notamment par l’intermédiaire de leurs oncles en Suisse, ce que confirment d’ailleurs, selon eux, les représailles infligées au père et au frère du recourant.

    4. Le Tribunal considère qu’il est crédible que les deux oncles du recourant, qui résident à S. , ( ) où séjournent également les intéressés, soient informés de leur conversion en Suisse. De plus, le recourant s’est fait baptiser depuis plus d’un an et demi et les intéressés sont engagés dans leur communauté religieuse, ainsi qu’en attestent les écrits du pasteur de la paroisse de R. des 29 mars et 19 septembre 2017. Partant, il ne peut être exclu, en l’état, que leur conversion, officialisée par le baptême de A. , le ( ) 2016, n’ait pas été communiquée par les oncles en Suisse aux membres de leurs familles en Irak, voire aussi à leur réseau social. Dès lors, le Tribunal estime que le SEM considère, à tort, que les recourants pourront pratiquer leur religion de manière privée et discrète à leur retour en Irak sans être inquiétés. A cela s’ajoute que, compte tenu notamment de la lettre de Monsieur Q. du ( ) 2016, il n’est pas exclu que le père et le frère du recourant fassent l’objet, en Irak, de représailles de la part de tiers, informés de la conversion de cette famille par les oncles en Suisse. Dès lors, un risque de persécutions futures en cas de retour ne peut, à ce stade, être écarté sans autre investigation.

    5. Par conséquent, le recours, en tant qu’il conteste la décision de refus de reconnaissance de la qualité de réfugié, doit être admis.

6.

    1. En raison de l’ampleur des mesures d’instruction à entreprendre, il y a lieu de casser la décision du SEM du 17 novembre 2016 sous l’angle de la qualité de réfugié, pour établissement incomplet de l’état de fait pertinent au sens de l’art. 106 al. 1 let. b LAsi, et de lui renvoyer la cause pour complément d’instruction et nouvelle décision (art. 61 al. 1 PA).

    2. Le SEM devra notamment vérifier si les intéressés doivent légitimement craindre d’être exposés, sur le plan objectif, à une persécution au

sens de l’art. 3 LAsi en cas de retour en Irak. Pour ce faire, il devra procéder à des mesures d’instruction visant à compléter et clarifier l’état de fait et à statuer en connaissance de cause.

7.

    1. Lorsqu'il rejette la demande d'asile ou qu'il refuse d'entrer en matière à ce sujet, le SEM prononce, en règle générale, le renvoi de Suisse et en ordonne l'exécution ; il tient compte du principe de l'unité de la famille (art. 44 LAsi). Le renvoi ne peut être prononcé, selon l'art. 32 OA 1 (RS 142.311), lorsque le requérant d'asile dispose d'une autorisation de séjour ou d'établissement valable, ou qu'il fait l'objet d'une décision d'extradition ou d'une décision de renvoi conformément à l'art. 121 al. 2 Cst.

    2. Aucune exception à la règle générale du renvoi n'étant en l'occurrence réalisée, le Tribunal est tenu, de par la loi, de confirmer cette mesure.

    3. Les recourants étant au bénéfice d'une admission provisoire, il n'y a pas lieu d'examiner les questions liées à l'exécution du renvoi.

8.

    1. Compte tenu de l’octroi aux recourants de l’assistance judiciaire totale, il n’est pas perçu de frais de procédure (cf. art. 65 al. 1 et 2 PA).

    2. Le Tribunal fixe le montant de l'indemnité, sur la base des décomptes de prestations des 21 décembre 2016 et 3 avril 2017, ainsi que des démarches ultérieures, compte tenu également d'un tarif horaire de 150 francs (cf. décision incidente du 24 janvier 2017, p. 3), à 2’500 francs.

    3. Dans la mesure où les recourants obtiennent partiellement gain de cause, ils peuvent prétendre à une indemnité réduite, se montant à la moitié des frais indispensables et relativement élevés qui lui ont été occasionnés (cf. art. 64 al. 1 PA et art. 7 al. 2 du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]). Partant, le SEM versera aux recourants des dépens à hauteur de 1’250 francs.

    4. Compte tenu de l’indemnité allouée à la partie qui obtient partiellement gain de cause, au sens du considérant qui précède, le montant des honoraires s'élève à 1’250 francs, à charge du Tribunal (cf. art. 8 à 11 FITAF, applicables par renvoi de l'art. 12 FITAF).

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1.

Le recours est rejeté en tant qu’il porte sur l’asile et le prononcé du renvoi.

2.

Le recours est admis en tant qu’il porte sur la qualité de réfugié. Le chiffre 1 du dispositif de la décision attaquée est annulé et la cause renvoyée au SEM pour nouvelle décision.

3.

Il n’est pas perçu de frais de procédure.

4.

Le SEM versera aux recourants la somme de 1’250 francs à titre de dépens.

5.

L'indemnité à verser par le Tribunal au mandataire d'office est fixée à 1’250 francs.

6.

Le présent arrêt est adressé aux recourants, au SEM et à l'autorité cantonale.

La présidente du collège : La greffière :

Emilia Antonioni Luftensteiner Sophie Berset

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