Instanz: | Bundesverwaltungsgericht |
Abteilung: | Abteilung I |
Dossiernummer: | A-5592/2019 |
Datum: | 23.11.2021 |
Leitsatz/Stichwort: | Routes nationales |
Schlagwörter : | ’un; être; éral; édéral; ’art; ’au; été; érieur; érêt; ’une; écis; égale; érieure; ’il; ’alignement; édure; ’autorité; OFROU; ’OFROU; érale; ’en; écision; Tribunal; édérale; écessaire; écité; érêts; ègle; écurité; étent |
Rechtsnorm: | Art. 13 OR ; Art. 22 OR ; |
Referenz BGE: | - |
Kommentar: | - |
Cour I
A-5592/2019
Composition Claudia Pasqualetto Péquignot (présidente du collège), Jérôme Candrian, Jürg Marcel Tiefenthal, juges,
Julien Delaye, greffier.
Parties A. ,
recourant,
contre
intimé,
autorité inférieure.
Objet Mise en point des alignements.
A. est propriétaire des parcelles contigües no [1] et [2] de la commune de Vernier (ci-après : les parcelles no [1] et [2]). Ces parcelles sont situées en zone à bâtir 5.
La parcelle no [1], sise […], présente une surface de […] m2, sur laquelle se trouve un dépôt d’une surface de […] m2 (bâtiment […]). Sous la surface de cette parcelle passe le tube nord du Tunnel de Vernier (trafic en direction de la France).
La parcelle no [2], sise […], présente une surface de […] m2, sur laquelle se trouvent une habitation de deux logements, d’un étage et d’une surface de […] m2 (bâtiment […]), ainsi qu’un garage privé, d’un étage et d’une surface de […] m2 (bâtiment […]). Sous la surface de cette parcelle passe le tube sud du Tunnel de Vernier (trafic en direction de Lausanne).
Le 18 avril 2018, l’Office fédéral des routes OFROU (ci-après : l’OFROU) a soumis pour approbation au Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication DETEC (ci-après : le DETEC) les plans portant sur le projet « N01a et N01 Genève Mise au point des alignements » (ci-après : le projet).
Le projet prévoit la vérification, la mise au point et la numérisation des alignements sur le trajet des routes nationales N01a et N01 sur les communes de Bardonnex, Perly-Certoux, Plan-les-Ouates, Lancy, Carouge (GE), Confignon, Bernex, Vernier, Meyrin, Le Grand-Saconnex, Pregny-Chambésy, Bellevue, Collex-Bossy, Versoix et Céligny.
En date du 26 avril 2018, le DETEC a ouvert la procédure ordinaire d’approbation des plans et transmis la demande de l’OFROU avec le dossier des plans pour la procédure de consultation cantonale et la mise à l’enquête publique.
Du 13 juin 2018 au 13 juillet 2018, le projet a été mis à l’enquête. Vingt-sept oppositions ont été interjetées, dont celle de A. (ci-après : l’opposant) le 13 juillet 2018.
Le 2 octobre 2018, l’OFROU a pris position sur toutes les oppositions et l’opposant a déposé ses remarques finales le 8 janvier 2019.
Par décision du 20 septembre 2019, le DETEC a approuvé les plans concernant le projet et rejeté notamment l’opposition du 13 juillet 2018 de l’opposant. L’approbation des plans couvrait toutes les autorisations requises par le droit fédéral.
Le 23 octobre 2019, l’opposant (ci-après également : le recourant) a formé recours, contre cette décision, devant le Tribunal administratif fédéral. Il conclut, sous suite de frais et dépens, à ce que la décision attaquée soit annulée en tant qu’elle porte sur des plans prévoyant des alignements sur les parcelles no [1] et [2] et à ce que la demande d’approbation des plans soit refusée en tant qu’elle porte sur des plans prévoyant des alignements sur ces deux parcelles. Il a rappelé qu’il avait conclu, dans le cadre de son opposition, à ce qu’une indemnité de […] francs lui soit octroyée et a sollicité que le dossier soit communiqué à la commission fédérale d’estimation compétente.
Le 13 décembre 2019, le DETEC (ci-après également : l’autorité inférieure) a conclu au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité.
Dans sa prise de position du 10 janvier 2020, l’OFROU (ci-après également : l’intimé) a conclu au rejet du recours, à ce que la décision attaquée soit confirmée et à ce que toute demande d’indemnité soit rejetée.
Dans ses observations finales du 30 septembre 2021, le recourant a maintenu l’ensemble de ses conclusions et requis, à titre subsidiaire, que l’inscription des alignements soit limitée à une altitude de 400 m, tout en précisant que l’altitude de la voûte des tunnels se situait à 390 m et que celle de la surface des parcelles considérées se situait à 430 m.
Les arguments avancés de part et d’autre au cours de la présente procédure seront repris plus loin dans la mesure où cela s’avère nécessaire.
Le Tribunal administratif fédéral est compétent pour statuer sur le présent recours (art. 31, 32, 33 let. d de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral [LTAF, RS 173.32], art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative [PA, RS 172.021], en lien avec l’art. 26 al. 1 de la loi fédérale du 8 mars 1960 sur les routes nationales [LRN, RS 725.11]).
La qualité pour recourir doit être reconnue au recourant (art. 48 al. 1 PA en lien avec l’art. 27d al. 1 LRN). Au surplus, les dispositions relatives au délai de recours, à la forme du mémoire, ainsi qu’à l’avance de frais (art. 50 al. 1, 52 al. 1 et 63 al. 4 PA) sont respectées.
Si l'alignement devait être confirmé, le recourant exige le versement d'une indemnité pour atteinte à son droit de propriété et requiert que la cause soit transmise à la commission fédérale d’estimation compétente.
A cet effet, il y a lieu de préciser que l'art. 25 al. 3 2e phrase LRN a été modifié par le chiffre 9 de l'annexe de la loi fédérale du 19 juin 2020, modifiant la loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx, RS 711). Cette modification est entrée en vigueur le 1er janvier 2021 (RO 2020 4085 ; FF 2018 4817). Il n'y a pas de disposition transitoire relative à cette modification. Faute de règlement transitoire explicite, le droit matériel applicable dans le temps est en principe celui qui était en vigueur au moment de la décision de première instance. Exceptionnellement, le nouveau droit doit être appliqué par l'instance de recours lorsqu'il existe des raisons impératives pour le faire (cf. ATF 139 II 470 consid. 4.2 et 135 II 384 consid. 2.3 ; arrêt du TF 2C_736/2010 du 23 février 2012 consid. 5.2 ; arrêts du TAF A-699/2017 du 26 août 2019 consid. 4.2 et A-5411/2016 du 26 février 2018 consid. 3.2). A défaut de raisons impératives pour appliquer le nouveau droit, le droit matériel en vigueur lors de la décision de première instance est applicable au cas d'espèce (cf. ég. arrêt du TAF A-4973/2019 du 30 juillet 2021 consid. 5.4.1).
Ceci étant, l'art. 25 LRN prévoit que la restriction de la propriété foncière par des alignements ne donne droit à une indemnité que si elle a les mêmes effets qu'une expropriation (al. 1) ; le droit à l'indemnité et le montant de cette dernière sont déterminés d'après les conditions existant au moment où la restriction de la propriété prend effet, soit lors de la publication des alignements (al. 2 ; cf. message du 23 juillet 1959 à l'appui d'un projet de loi sur les routes nationales, FF 1959 II 97, p. 110 ;
ég. ATF 110 Ib 359 consid. 2a) ; l'intéressé doit annoncer ses prétentions par écrit à l'autorité compétente dans les cinq ans qui suivent le jour où la restriction de la propriété a pris effet (al. 3 1re phrase). Si les prétentions sont entièrement ou partiellement contestées, la procédure prévue aux art. 57 ss de la LEx sera ouverte (ancien al. 3 2e phrase).
En cas d'expropriation matérielle, l'indemnité due est une conséquence d'une atteinte n'ayant pas pour but une expropriation. En cas d'expropriation formelle, l'indemnité due est une condition de l'expropriation (cf. RUDOLPH KAPPELER, Formelle und materielle Enteignung gemäss den Fluglärmentscheiden des Bundesgerichts, 2010,
p. 13). Comme la mesure constitutive d'expropriation matérielle est valable indépendamment de l'indemnisation du propriétaire, le principe et le montant de l'indemnité sont déterminés dans une procédure séparée de celle conduisant à la restriction du droit de propriété (cf. arrêt A-4973/2019 précité consid. 5.4.3).
En particulier, le droit de demander une indemnité naît, de par la loi, au moment de l'entrée en vigueur de la restriction du droit de propriété du particulier (cf. ATF 101 Ib 277 consid. 3b ; arrêt du TF 1E.4/2005 du 11 juillet 2005 consid. 2.1 ; arrêt du TAF A-6928/2015 du 20 décembre 2017 consid. 3.7.2). Si l'autorité compétente et le propriétaire concerné ne parviennent pas à s'entendre sur le principe ou le montant de l'indemnité, les parties pourront réclamer l'ouverture de la procédure d'estimation prévue aux art. 57 ss LEx (cf. ATF 132 II 475 consid. 2.2). La commission fédérale d’estimation est ainsi compétente pour octroyer une indemnité d'expropriation matérielle si les prétentions sont entièrement ou partiellement contestées (cf. ATF 132 II 475 consid. 2.2, 114 Ib 142 consid. 3a, 112 Ib 124 consid. 2 et 110 Ib 359 consid. 2a ; arrêt du TAF A-6928/2015 précité consid. 3.7.3). La commission fédérale d’estimation peut être saisie directement par les ayants droit, sans qu'il soit nécessaire que l'expropriant dépose une demande d'ouverture de la procédure (cf. ATF 121 II 436 consid. 3).
En l'espèce, la décision litigieuse n'est pas encore entrée en force, le recours ayant effet suspensif (art. 55 al. 1 PA). Le plan d'alignements n'a pas été publié et il n'a pas encore force obligatoire. La restriction de la propriété n'a donc pas encore pris effet. Ainsi, la conclusion subsidiaire du recourant tendant au versement d’une indemnité et à ce que la cause soit transmise à la commission fédérale d’estimation est prématurée. En outre, à l'instar du Tribunal, l'autorité inférieure n'est pas compétente pour statuer
en première instance ni sur le principe d'une telle indemnité, ni sur son montant. Partant, la conclusion subsidiaire du recourant est irrecevable.
Le recours peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation, pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents, ainsi que pour inopportunité, sauf si une autorité cantonale a statué comme autorité de recours (art. 49 PA).
29 octobre 2020 consid. 2.3.3 et A-1524/2015 du 19 novembre 2015 consid. 2). Le Tribunal ne s’écartera alors pas sans nécessité de l’appréciation de l’autorité inférieure. En revanche, il vérifiera librement si l’autorité inférieure a établi complètement et exactement les faits pertinents et, sur cette base, si elle a correctement appliqué le droit, sans se laisser guider par des motifs étrangers aux normes appliquées et en tenant compte de manière adéquate de tous les intérêts en présence (cf. ATF 142 II 451 consid. 4.5.1 et 138 II 77 consid. 6.4 ; ATAF 2008/23
consid. 3.3, 2008/18 consid. 4 et 2007/37 consid. 2.2 ; arrêt A-4973/2019 précité consid. 2.3 ; ANDRÉ MOSER/MICHAEL BEUSCH/LORENZ KNEUBÜHLER,
Prozessieren vor dem Bundesverwaltungsgericht, 2e éd. 2013,
no 2.154 ss).
La procédure fédérale est essentiellement régie par la maxime inquisitoire, ce qui signifie que l’autorité administrative constate les faits d’office et procède, s’il y a lieu, à l’administration de preuves par les moyens idoines (art. 12 PA). La maxime inquisitoire doit cependant être relativisée par son corollaire : le devoir de collaborer des parties (art. 13 PA ; cf. CLÉMENCE GRISEL, L’obligation de collaborer des parties en procédure administrative, 2008, no 142). La procédure de recours devant
le Tribunal administratif fédéral est également régie par la maxime inquisitoire en vertu de l’art. 37 LTAF. Celle-ci est cependant quelque peu tempérée, notamment en raison du fait qu’il ne s’agit, dans ce cas, pas d’un établissement des faits ab ovo. Il convient de tenir compte de l’état de fait déjà établi par l’autorité inférieure. En ce sens, le principe inquisitoire est une obligation de vérifier d’office les faits constatés par l’autorité inférieure plus que de les établir (cf. arrêts du TAF A-5584/2008 du 11 juin 2010 consid. 1.2.1 et A-6120/2008 du 18 mai 2010 consid. 1.3.2).
Le Tribunal administratif fédéral applique le droit d’office, sans être lié par les motifs invoqués (art. 62 al. 4 PA), ni par l’argumentation juridique développée dans la décision attaquée (cf. MOSER/BEUSCH/KNEUBÜHLER, op. cit., no 2.165). Il se limite, en principe, aux griefs soulevés et n’examine les questions de droit non invoquées que dans la mesure où les arguments des parties ou le dossier l’y incitent (cf. ATF 135 I 91 consid. 2.1 ; ATAF 2014/24 consid. 2.2.).
La loi fédérale sur les routes nationales règle notamment la procédure d’approbation des plans relatifs à la construction de nouvelles routes nationales ou l’aménagement de routes nationales existantes (art. 21 al. 2 let. b LRN).
Il est interdit d’élever, sans autorisation, de nouvelles constructions entre les alignements et d’y transformer des immeubles existants, même s’ils ne débordent que partiellement sur les alignements. Les travaux nécessités par l’entretien d’un immeuble ne sont pas considérés comme des transformations au sens de la présente disposition (art. 23 al. 1 LRN).
Sous réserve de dispositions cantonales plus rigoureuses, des travaux de construction doivent être autorisés à l’intérieur des alignements lorsqu’ils
ne portent pas atteinte à des intérêts publics au sens de l’art. 22 (art. 24 al. 1 LRN). Les autorités désignées par les cantons statuent sur les demandes d’autorisation de construire. L’autorité cantonale entend l’office avant de délivrer l’autorisation. Ce dernier est habilité à user de toutes les voies de recours prévues par le droit fédéral et le droit cantonal contre les décisions rendues par les autorités cantonales en application de la présente loi ou de ses dispositions d’exécution (art. 24 al. 2 LRN).
La restriction de la propriété foncière par des alignements ne donne droit à une indemnité que si elle a les mêmes effets qu’une expropriation (art. 25 al. 1 LRN).
Font partie des routes nationales, compte tenu de la forme de leur aménagement et des exigences découlant d’impératifs techniques : les ouvrages d’art, y compris les passages supérieurs et inférieurs nécessités par la construction, exception faite des conduites et autres installations similaires appartenant à des tiers (art. 2 let. b ORN).
Les distances entre l’alignement et l’axe de la route sont de 25 m pour les routes nationales de première classe (art. 13 al. 1 let. a ORN). Lorsque les circonstances l’exigent, des distances peuvent être fixées en dérogation à cette disposition, et les alignements peuvent être limités verticalement (art. 13 al. 3 ORN). Lorsque des tronçons existants sont intégrés dans le réseau des routes nationales, les alignements et les distances par rapport à la chaussée fixés selon le droit cantonal s’appliquent jusqu’à la définition légale des alignements des routes nationales (art. 13 al. 4 ORN).
L’objet du litige porte sur la décision du 20 septembre 2019, par laquelle l’autorité inférieure a rejeté l’opposition du recourant et approuvé les plans du projet relatif à la mise au point des alignements des routes nationales N01a et N01 dans le canton de Genève.
En procédure fédérale d'approbation des plans, toutes les objections pouvant être formulées pendant la mise à l'enquête doivent être soulevées dans la procédure d'opposition, en l'espèce conformément à l’art. 27d LRN, sous peine d’être exclu de la suite de la procédure (cf. arrêt A-7192/2018 précité consid. 2.3.1). L'objet du litige est ainsi limité aux griefs soulevés en procédure d'opposition et il ne peut plus être étendu dans la procédure contentieuse subséquente (cf. ATF 133 II 30 consid. 2.2 ; ATAF 2012/23 consid. 2.1 ; arrêt du TAF A-592/2014 du 9 mars 2015 consid. 2.1.2).
En l’occurrence, le recourant reprend, en substance et à l’appui de son recours, les différents griefs avancés dans le cadre de son opposition du 13 juillet 2018, de sorte que ceux-ci sont recevables.
Le recourant se plaint d’une atteinte à la garantie de la propriété. Il fait valoir que cette atteinte ne reposerait pas sur une base légale suffisante, ne serait pas justifiée par un intérêt public et ne respecterait pas le principe de la proportionnalité. Dans ce cadre-là , le recourant souhaite que l’étendue verticale des alignements à l’endroit des deux tunnels autoroutiers qui passent sous ses parcelles soit limitée à l’altitude, en sous-sol, des tunnels. Subsidiairement, il estime qu’une limite maximale de 10 mètres se justifierait, le sous-sol et le terrain au-dessus de cette limite, ne devant pas être inclus dans le plan d’alignements.
La garantie de la propriété ancrée à l’art. 26 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst., RS 101) n’est pas absolue. Comme tout droit fondamental, elle peut être restreinte aux conditions fixées à l’art. 36 Cst. La restriction doit ainsi reposer sur une base légale, voire une loi au sens formel si la restriction est grave, être justifiée par un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (cf. ATF 145 II 229 consid. 9 et 140 I 168 consid. 4 ; arrêt du TF 2C_1088/2018 du 13 mai 2019 consid. 3.2 ; arrêts du TAF A-4973/2019 précité consid. 4.4.1 et A-6277/2019 du 26 novembre 2020 consid. 9.1). Lorsque l’atteinte est grave, outre que la base légale doit être une loi au sens formel, celle-ci doit être claire et précise (cf. ATF 119 Ia 362 consid. 3a, 115 Ia 333 consid. 2a et 108 Ia 33 consid. 3a). L'atteinte au droit de propriété est tenue pour particulièrement grave lorsque la propriété foncière est enlevée de force ou lorsque des interdictions ou des prescriptions positives rendent impossible ou beaucoup plus difficile une utilisation du sol actuelle ou future conforme à sa destination (cf. ATF 135 III 633 consid. 4.3 et 131 I 333 consid. 4.2).
Il convient ainsi d’examiner, dans un premier temps, si la mise au point des alignements sur les parcelles litigieuses repose sur une base légale suffisante.
Le recourant estime que l’autorité inférieure ne disposait pas d’une base légale suffisante pour pouvoir fixer des alignements relatifs au passage d’une route nationale en sous-sol sous les parcelles litigieuses, de surcroît lorsque la route nationale a été construite il y a 25 ans. Il fait valoir que l’art. 22 LRN poserait uniquement le principe de la fixation des
alignements horizontaux. Aucun contenu explicite dans la loi ne permettrait la fixation d’alignements en surface relatifs au passage d’une route nationale en tunnel. De même, cette disposition prévoirait uniquement la possibilité de définir des alignements en cas de construction d’une nouvelle route ou de modification d’une route existante, mais pas de les mettre au point de manière indépendante sans modification aucune de la route. Ainsi, il considère que l’art. 22 LRN ne serait pas suffisamment clair et précis pour constituer une base légale suffisante qui justifierait l’atteinte à son droit de propriété. Quant à l’art. 13 ORN, il estime que la mise au point des alignements constitue une restriction grave à son droit de propriété en tant qu’elle équivaudrait à une interdiction absolue de construire. Il ne s’agirait donc pas d’une base légale suffisante. Nonobstant, il soutient que les quelques mots indiquant que les alignements verticaux peuvent être limités ne suffit pas non plus.
En tant que le recourant prétend que l’art. 22 LRN ne permettrait pas de fixer des alignements relatifs au passage d’une route nationale en tunnel sous les parcelles litigieuses, de surcroît lorsque la route nationale a été construite il y a 25 ans et ne fait pas l’objet d’une modification, il y a lieu d’interpréter cette disposition.
D’un point de vue littéral, l’art. 22 LRN précise que les projets définitifs doivent fixer les alignements des deux côtés de la route projetée. La version allemande de la loi indique, quant à elle, que « [i]n den Ausführungsprojekten sind beidseits der projektierten Strasse Baulinien festzulegen ». La version italienne a un contenu similaire. Elle indique que
« [n]ei progetti esecutivi, devono essere determinati, su entrambi i lati della
strada disegnata, gli allineamenti ». Force est ainsi d’admettre que si les alignements doivent s’étendre des deux côtés de la route, le texte de la loi n’apporte aucune précision quant à l’étendue en hauteur et en profondeur des alignements.
D’un point de vue historique et téléologique, le message du 3 juillet 1959 du Conseil fédéral à l’appui d’un projet de loi sur les routes nationales précise que, pour accroître la sécurité du trafic, protéger les riverains contre le bruit et d’autres effets de la circulation des véhicules à moteur et pour permettre un élargissement futur des routes nationales, les services cantonaux compétents – dorénavant l’autorité fédérale compétente – devront fixer, des deux côtés des routes projetées, des alignements répondant aux directives fédérales (FF 1959 II 97, p. 109). L’objectif des alignements est donc d’assurer un éventuel élargissement des routes nationales, de laisser la libre disposition des terrains nécessaires à la construction des routes nationales, d’assurer la sécurité du trafic, des utilisateurs et des infrastructures et de protéger le voisinage contre le bruit et les effets de la circulation. Au surplus, le message n’apporte, lui non plus, aucune précision quant à l’étendue en hauteur et en profondeur des alignements. Cela étant, la fixation des alignements vise notamment à assurer la sécurité du trafic (cf. ég. arrêt du TAF A-645/2020 du 19 août 2020 consid. 6.2). Celle-ci passe aussi par la sécurité des infrastructures et des ouvrages d’art. Il suit de là que la fixation des alignements vise aussi la sécurité des installations souterraines comme les tunnels.
D’un point de vue systématique, aux termes de l’art. 667 al. 1 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC, RS 210), la propriété du sol emporte celle du dessus et du dessous, dans toute la hauteur et la profondeur utiles à son exercice. Il résulte de cette disposition que, à l'instar d'une chose mobilière, un immeuble constitue nécessairement un corps tridimensionnel, et non pas une simple surface (cf. ATF 132 III 353 consid. 2.1 ; JUSTIN THORENS, L'étendue en profondeur de la propriété foncière, in : RDS 89/1970 I, p. 257). Il en va de même des routes nationales, qu’il s’agisse de simples voies de circulation ou d’ouvrages d’art de plus grande importance à l’instar des ponts ou des tunnels. Une telle conclusion conforte l’idée selon laquelle la portée en hauteur et en profondeur des alignements de part et d’autre des routes nationales ne peut se comprendre et s’appréhender que dans un espace en trois dimensions et que le régime des art. 22 ss LRN s’applique à toute construction située à l’intérieur des alignements, quelles que soient sa hauteur ou sa profondeur.
Une telle interprétation est confortée par le principe d’accession de l’affectation prévu par la loi fédérale du 22 juin 1979 sur l'aménagement du territoire (loi sur l'aménagement du territoire, LAT, RS 700), selon lequel les ouvrages souterrains soumis à autorisation doivent être conformes à l’affectation de la zone, même si cette dernière n’a été décidée qu’au regard de la surface (cf. MATTHIEU CARREL, Le régime du sous-sol en droit suisse, Fribourg 2015, no 548 ss). La notion de construction au sens de l’art. 22 LAT englobe, en effet, tous les aménagements durables, créés de la main de l’homme, qui sont fixés au sol et qui ont une incidence sur son affectation, soit qu’ils modifient sensiblement l’espace extérieur, qu’ils aient un effet sur l’équipement ou qu’ils soient susceptibles de porter atteinte à l’environnement (cf. ATF 113 Ib 314 consid. 2b). La notion de sol se comprend dans un sens large et intègre aussi bien la terre que les eaux publiques (cf. ATF 114 Ib 81 consid. 3). Elle n’implique pas un lien physique avec la surface, mais un caractère non-mobilier de l’installation en question (cf. ATF 113 Ib 314 consid. 2c). Selon l’art. 23 LRN, il est interdit d’élever, sans autorisation, de telles constructions entre les alignements et d’y transformer des immeubles existants, même s’ils ne débordent que partiellement sur les alignements.
Il ressort ainsi d’une interprétation historique, téléologique et surtout systématique de la loi que, conformément à l’art. 23 LRN, il est interdit de réaliser, sans autorisation, de nouvelles constructions, en surface et en sous-sol, entre les alignements délimités des deux côtés de la route conformément à l’art. 22 LRN, ainsi que d’y transformer des immeubles existants, même s’ils ne débordent que partiellement sur les alignements. Dans la mesure où toute construction constitue nécessairement un corps tridimensionnel, et non pas une simple surface, l’interprétation du recourant selon laquelle les alignements devraient être compris comme un plan bidimensionnel n’ayant aucune portée en dessous et au-dessus de la surface de la route ne peut être suivie.
Il suit de là que les art. 22 ss LRN constituent bien une base légale propre à justifier la fixation des alignements, dans toute leur hauteur et leur profondeur, de part et d’autre de la route nationale qui passe sous la surface des parcelles du recourant. Il importe à cet égard peut que dite route se trouve en surface ou, comme en l’espèce, en sous-sol. Ces dispositions sont, à cet égard, suffisamment claires et précises (cf. arrêt A-4973/2019 précité consid. 4.5.2)
Il n’en va d’ailleurs pas autrement de la possibilité donnée à l’autorité inférieure de mettre à jour les alignements à la suite du transfert de propriété des routes nationales à la Confédération.
L’art. 21 al. 2 let. b LRN octroie, en effet, la compétence à l’OFROU d’établir des projets définitifs – lesquels renseignent notamment sur les alignements
portant autant sur la construction de nouvelles routes nationales que l’aménagement de routes nationales existantes. Au surplus, il ressort de l’art. 14 ORN que, lorsque des tronçons existants sont intégrés dans le réseau des routes nationales, les alignements et les distances par rapport à la chaussée fixés selon le droit cantonal s’appliquent jusqu’à la définition légale des alignements des routes nationales. L’autorité fédérale compétente a ainsi la possibilité de mettre à jour les alignements lorsqu’une route existante rejoint le réseau national et que sa propriété est transférée à la Confédération. Par analogie, on ne voit pas pourquoi il en irait autrement à la suite du transfert global de la propriété des routes nationales à la Confédération en 2008, en tant que la responsabilité en matière de construction, d’aménagement, d’entretien et d’exploitation des routes nationales l’a également été (cf. message du 7 septembre 2005 sur la législation d’exécution concernant la réforme de la péréquation financière et de la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons, FF 2005 5641, p. 5757).
Ainsi, contrairement à ce que soutient le recourant, la fixation des alignements ne concerne pas uniquement la construction de nouvelles routes nationales, mais également la mise au point d’alignements, en tant qu’elle relève de l’aménagement de routes nationales existantes au sens de l’art. 21 al. 2 let. b LRN. Partant, l’OFROU était bien habilité à mettre à l’enquête le projet litigieux, et ce même s’il ne s’agit pas de la construction d’une nouvelle route nationale.
Il suit de là que la restriction au droit de propriété imposée sur les parcelles du recourant par la mise au point des alignements repose sur une base légale suffisante conformément à l’art. 36 Cst., même si les distances entre les alignements sont fixées par une ordonnance (art. 13 ORN). Elle repose, au surplus, sur une loi au sens formel, de sorte que la question de savoir si la mise au point des alignements constitue une atteinte grave au droit de propriété peut souffrir de demeurer ouverte, bien que le Tribunal peine à voir en quoi tel serait le cas, en tant qu’il n’en découle aucune interdiction absolue de construire. Il y a ici lieu de préciser que le projet litigieux porte uniquement sur la mise au point des alignements et non sur
l'établissement de zones réservées. Les bases légales applicables et les intérêts publics à protéger par ces deux institutions ne sont pas les mêmes.
La première condition de l’art. 36 al. 1 Cst. est dès lors remplie et les griefs du recourant doivent, sur ce point, être rejetés.
Le recourant estime que le seul intérêt poursuivi est celui d’informer automatiquement l’OFROU des projets de construction se trouvant à proximité des routes nationales et de « dispenser les fonctionnaires de cet Office de lire la publication dans la Feuille d’Avis officielle des requêtes en autorisation de construire ». Il estime qu’il existe d’autres moyens d’être informé que la mise au point d’alignements comme certains services d’abonnements ou l’instauration d’un préavis obligatoire pour les périmètres des alignements. Il relève ensuite que les fonctionnaires cantonaux analysent déjà les dossiers en prenant en compte les distances d’alignements fixés par le droit fédéral ou cantonal. Il considère donc qu’instaurer une inconstructibilité en surface « simplement pour dispenser les fonctionnaires fédéraux de se tenir informés des projets de construction prévus, simplement pour pallier au risque infime que le propriétaire, son architecte, puis les fonctionnaires cantonaux soient collectivement assez stupides pour bêtement autoriser une sonde géothermique profonde au-dessus d’un tunnel » ne constituerait pas un intérêt public suffisant. Il relève qu’il n’existe aucun intérêt à l’agrandissement d’un tunnel, dans la mesure où l’OFROU ne rendrait pas vraisemblable « qu’il a trouvé le truc pour élargir un tunnel ». Il considère que l’intérêt public à instaurer des restrictions de droit public en matière d’alignements comporte une consistance sensiblement plus faible pour des parcelles sous lesquelles une route nationale passe en tunnel que pour des parcelles en surface contiguës et que les exigences de sécurité du trafic ou d’hygiène des habitations ne jouent pas de rôle dans le cas d’espèce, compte tenu de la profondeur du tunnel.
Au stade de la fixation des alignements, l'examen de l'existence d’un intérêt public est plus abstrait que lors d'une demande d'autorisation de construire portant sur un projet concret (art. 24 LRN ; cf. arrêt A-4973/0219 précité consid. 4.5.3). Cependant, c'est là -même le but de la fixation d'alignements, soit de permettre à l'autorité compétente d'examiner la compatibilité d'un projet concret de construction, jouxtant l'autoroute, à l'aune des intérêts publics prévus par l'art. 22 LRN notamment. Or, les
intérêts publics à protéger par la fixation d'alignements ne se limitent pas à la préservation d'un espace suffisant, mais sont plus larges. Comme considéré (cf. supra consid. 3.1), l'art. 22 LRN prévoit que les projets définitifs doivent fixer les alignements des deux côtés de la route projetée et que, lors de cette fixation, il sera notamment tenu compte des exigences de la sécurité du trafic et de l'hygiène des habitations, ainsi que de la nécessité d'un élargissement éventuel de la route dans l'avenir (cf. ég. arrêt du TAF A-645/2020 précité consid. 6.2).
En l’occurrence, l’intérêt à la nécessité d’un élargissement éventuel de la route dans l’avenir est faible, vu les difficultés liées au fait que celle-ci se trouve sous terre. Il en va de même de l’intérêt à l’hygiène des habitations, compte tenu de la profondeur à laquelle passe le tunnel de Vernier. Cependant, des alignements doivent être fixés des deux côtés de la route également pour tenir compte des exigences de la sécurité du trafic (cf. arrêts A-645/2020 précité consid. 6.2 et A-4973/0219 précité consid. 4.5.3). Celle-ci passe aussi nécessairement, comme considéré (cf. supra consid. 5.2.2.1), par la sécurité des installations et des ouvrages d’art, dont font partie les tunnels et il existe un intérêt public à ce que les constructions en surface ou en sous-sol situées au-dessus ou proche des tunnels ne mettent pas à mal sa structure. En outre, l’alignement projeté comble une lacune existant dans l’alignement actuel et est plus cohérent. Enfin, l’office n’a pas trouvé de trace de publication des alignements actuels sur le tronçon du Tunnel de Vernier (cf. Rapport technique, pièce no 32 du projet définitif, p. 8). Ainsi, la mise au point des alignements dans le cas d’espèce renforce également la sécurité juridique.
Par conséquent, la restriction au droit de propriété du recourant est motivée par des intérêts publics et les griefs soulevés par le recourant ne parviennent pas à convaincre. Partant, la deuxième condition de l’art. 36 al. 1 Cst. est, elle aussi, remplie.
A présent, il convient d’examiner si la restriction est proportionnée au but visé.
Le recourant estime, d’une part, que la restriction à son droit de propriété ne respecterait pas le principe de proportionnalité en tant qu’elle ne serait pas nécessaire. Il rappelle que les routes nationales, aussi bien en surface qu’en tunnel, figurent sur les plans cadastraux cantonaux et qu’en tant que propriétaire foncier, il ne peut les ignorer. Il en irait de même des autorités cantonales, qui seraient suffisamment diligentes pour ne pas délivrer une autorisation pour une construction qui empièterait sur des
tunnels autoroutiers, à supposer – selon les propres dires du recourant – que « tant le propriétaire que l’architecte soient assez crétins pour prévoir un tel projet ». Il considère que le fait d’interdire toute construction dans l’idée d’y déroger ensuite systématiquement serait une aberration et ne serait pas nécessaire. Il relève, en tout état de cause, qu’une fixation d’alignements limités verticalement permettrait d’atteindre les buts poursuivis par l’OFROU et qu’il n’était pas nécessaire de fixer des alignements sans limite verticale. Il considère, dans ce cadre, que l’autorité inférieure a constaté les faits de manière inexacte et incomplète en retenant que l’épaisseur du terrain au-dessus des tunnels était faible. Dans ses observations finales, il estime qu’une limite verticale de 10 mètres au-dessus de la voûte des tunnels serait justifiée.
Le recourant considère, d’autre part, que la restriction à son droit de propriété ne respecterait pas le principe de la proportionnalité au sens étroit en tant qu’elle porterait gravement préjudice à ses intérêts privés. Il estime que la fixation d’alignements entraînerait un surcoût de plusieurs dizaines de milliers de francs afin de faire reconnaître le caractère constructible de son terrain. En cas de besoin d’un financement hypothécaire, il souligne que la valeur de gage sera réduite et qu’il existe un risque qu’un renouvellement de crédit soit refusé. Enfin, il considère qu’en cas de mise en vente des parcelles, aucun acheteur ne serait prêt à payer le prix d’un terrain constructible.
Pour satisfaire au principe de la proportionnalité qui détermine la mise en œuvre de l’action de l’Etat (art. 5 al. 2 Cst.), il faut que la décision prononcée soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l’aptitude), que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité) et qu’il existe un rapport raisonnable entre le but d’intérêt public recherché par cette mesure et les intérêts privés en cause, en particulier la restriction à la garantie de la propriété qui en résulte pour la personne concernée (principe de la proportionnalité au sens étroit ; cf. ATF 136 IV 97 consid. 5.2.2).
Concernant d’abord la règle de l’aptitude, il est indéniable que la restriction imposée par la mise au point des alignements sur les parcelles litigieuses est apte à atteindre les buts visés, à savoir notamment assurer la sécurité du trafic, des installations et des ouvrages d’art appartenant au réseau des routes nationales dans la mesure où la présence d’alignements permettra à l’OFROU de contrôler, dans le cadre d’une éventuelle procédure cantonale d’autorisation, si un projet concret de construction ou de transformation ne portera pas atteinte à ces intérêts (cf. supra
consid. 5.3 ; ég. arrêt A-4979/2019 précité consid. 4.5.4.1). Le recourant ne le conteste d’ailleurs pas.
Il sied de vérifier ensuite si la règle de la nécessité est respectée.
Il y a lieu de rappeler que les alignements doivent être fixés d’office (cf. arrêt A-4979/2019 précité consid. 4.4.2). Au surplus, ils ont pour effets qu'il est interdit d'élever, sans autorisation, de nouvelles constructions entre eux et d'y transformer des immeubles existants, même s'ils ne débordent que partiellement dessus. Il ne s’agit pas d’une interdiction de construire absolue et, sous réserve de dispositions cantonales plus rigoureuses, des travaux de construction – conformes à la destination de la zone – doivent être autorisés à l’intérieur des alignements s’ils ne portent pas atteinte à des intérêts publics au sens de l’art. 22 LRN. La fixation des alignements n’entraîne ainsi aucune modification foncière des parcelles touchées, mais instaure justement – et comme le suggère le recourant – l’instauration d’un préavis obligatoire de l’OFROU dans le cadre de l’autorisation de construire cantonale. L’instauration d’un tel préavis implique nécessairement la fixation d’un périmètre ; c’est bien là l’objet de la fixation des alignements.
Quant à la possibilité pour l’OFROU de se tenir informé des procédures de mise à l’enquête en cours, elle n’offre aucune sécurité juridique et l’OFROU devrait nécessairement fixer des limites aux abords des routes nationales au sein desquelles il serait nécessaire d’intervenir. L’inscription des alignements dans le cadastre des restrictions de droit public à la propriété foncière n’y change rien. Il en va de même de la fixation de nouveaux alignements, laquelle n’a aucune influence sur les éléments déjà construits ou ayant déjà reçu une autorisation de construire.
Comme le relève le recourant sur un ton quelque peu inadéquat et qu’il ne sert à rien d’emprunter dans un prétoire, il doit nécessairement se plier aux exigences de sécurité liées à la présence d’une route nationale et l’OFROU ne peut préaviser négativement le projet que s’il porte atteinte à des intérêts publics au sens de l’art. 22 LRN. D’ailleurs, même si l’autorité de première instance avait limité verticalement les alignements, un projet de construction en sous-sol, même au-dessus de cette limite, devrait tout de même tenir compte de la présence d’un tunnel sous les parcelles. Il s’ensuit que la fixation des alignements ne modifie en rien la constructibilité de la parcelle et n’implique a priori aucuns coûts supplémentaires, les autorités cantonales se chargeant elle-même de requérir le préavis de l’OFROU conformément à l’art. 24 al. 2 2e phrase LRN.
Le recourant estime ensuite que l’autorité inférieure aurait dû limiter les alignements verticalement à 10 mètres au-dessus de la voûte du tunnel. Il considère que cette mesure serait moins incisive et aurait permis d’atteindre le résultat escompté.
Cela étant, les distances entre les alignements et l'axe de la route sont réglées à l'art. 13 ORN et sont normalement fixées entre 10 m et 25 m selon la classe de route nationale. Lorsque les circonstances l'exigent, des distances peuvent être fixées en dérogation à ces dispositions, et les alignements limités verticalement (art. 13 al. 3 ORN). L'art. 13 al. 3 ORN revêt ainsi le caractère d'une norme potestative (Kann-Vorschrift). Cette norme réglementaire accorde à l'autorité à la fois une liberté de décision, c’est-à -dire qu'elle peut fixer des distances supérieures ou inférieures aux distances prévues, mais également une latitude de jugement, lorsqu’elle délimite les circonstances dans lesquelles il convient de déroger aux distances prévues (cf. arrêt A-4973/2019 précité consid. 4.4.6). L’autorité dispose ainsi d’un large pouvoir d’appréciation que le Tribunal administratif fédéral respecte, en ne s'écartant pas de la solution retenue par l'autorité administrative de première instance sans nécessité (cf. supra consid. 2.1). En d’autres termes, le Tribunal doit laisser cette dernière choisir entre plusieurs solutions opportunes et ne pas substituer, sans motif pertinent, à une solution convenable une autre solution également convenable (cf. ATF 135 II 296 consid. 4.4.3 ; arrêt du TF 2C_1030/2017 du 5 juillet 2018 consid. 3.1 ; arrêt du TAF A-645/2020 précité consid. 6.4).
Sur ces bases, l’OFROU a notamment adopté le standard M042-1540, le 22 février 2013, pour l’alignement le long des routes nationales (cf. pièce 2 de l’autorité inférieure, disponible également sur www.astra.admin.ch > Public professionnel > Documents pour les routes nationales / projets d’agglomération > Documents pour les routes nationales > Soutien technique > Alignements, ci-après : le standard pour l’alignement). Il y a fixé plusieurs règles afin de mettre en œuvre les principes fixés par l’art. 13 ORN.
Premièrement, les alignements doivent être conçus de manière à ne pas nuire à la fonctionnalité principale actuelle et future de la route nationale, y compris lorsque celle-ci passe sous la terre. Dans ce contexte, l’effet porteur et de soutien du terrain surplombant le tunnel revêt une importance toute particulière, afin d’activer l’effet de la voûte au-dessus de la cavité du tunnel (règle no 1, p. 9 s. du standard pour l’alignement).
Deuxièmement, il convient de respecter une distance minimale entre les alignements et le bord extérieur de la chaussée stabilisée pour tous les cas où la route nationale ne présente pas de profil type ou dans les cas où les distances normales définies selon l’art. 13 al. 1 ORN menaceraient le fonctionnement de la route nationale (règle no 2, p. 10 du standard pour l’alignement).
Troisièmement, les alignements en situation doivent en principe former un tracé polygonal continu des deux côtés de la route nationale. Ils ne doivent être interrompus nulle part et doivent être fermés au niveau des jonctions. Cela signifie que les alignements doivent être définis en continu en parallèle aux rivières, aux autres voies de circulation ou en cas de traversée de forêts. Il s’agit de garantir l’absence de doute pour déterminer si un projet de construction se trouve à l’intérieur ou à l’extérieur des alignements lors de l’examen (règle no 3, p. 10 du standard pour l’alignement).
Quatrièmement, l’effet juridique des alignements n’est pas délimité vers le haut ou vers le bas. Il convient toutefois d’examiner la possibilité de définir une délimitation verticale des alignements vers le haut ou/et vers le bas. Cette possibilité doit cependant être utilisée avec retenue. Les aspects suivants peuvent avoir des conséquences pour déterminer s’il faut définir ou non une délimitation verticale des alignements :
Les lotissements/zones à bâtir, installations du trafic, installations d’approvisionnement, installations et bâtiments publics, ainsi que le possible préjudice causé par les installations correspondantes,
La géologie, ainsi que la possible influence de tiers (p. ex. pour les roches gonflantes),
La protection de la structure porteuse, ainsi que les possibles dangers représentés par les ouvrages de tiers (p. ex. par les sondes terrestres, courants vagabonds pour les installations ferroviaires),
L’hygiène des habitations, ainsi que les possibles immissions de l’ouvrage du tunnel (p. ex. le bruit de structure causé par le bruit du trafic),
L’espace nécessaire pour l’entretien, la maintenance, les travaux de rénovation ou un éventuel futur aménagement (règle no 4, p. 10 s. du standard pour l’alignement).
Enfin, cinquièmement, dans la mesure du possible, les alignements doivent être déterminés par rapport à l’axe de la route ou par rapport à l’axe de chaque tube pour les tunnels. Les délimitations verticales doivent toujours
être déterminées par rapport au bord supérieur de la chaussée. Les distances en mètres doivent être arrondies à des nombres entiers et il faut viser des paliers de 5 mètres (règle no 5, p 11 du standard pour l’alignement).
En l’occurrence, compte tenu du large pouvoir d’appréciation dont dispose l’autorité, rien au dossier ne permet de remettre en doute les conclusions de l’autorité inférieure selon lesquelles la faible épaisseur du terrain ne permet pas de s’éloigner de la règle no 4 selon laquelle l’effet juridique des alignements n’est pas limité vers le haut ou vers le bas. A cet effet, il y a lieu de préciser que la notion de faible épaisseur du terrain ne relève pas de la constatation des faits, mais bien plus de leur appréciation. Rien n’indique que l’autorité inférieure ait méconnu l’emplacement effectif du tunnel et sa profondeur.
Il suit de là que les résultats escomptés ne peuvent être atteints par une mesure moins incisive. La mise au point des alignements effectuée par l’autorité inférieure était donc nécessaire.
S’agissant de la proportionnalité au sens étroit et de la pesée entre les intérêts publics à protéger et ceux affectés du recourant, la partie des parcelles du recourant située entre les alignements se trouve en zone à bâtir 5, destinée à des constructions de type villa, dont la constructibilité en sous-sol ne peut, en principe, pas dépasser un étage selon les propres déclarations du recourant. L'autorité inférieure, suivant le projet soumis par l'intimé, a fixé l'alignement à 25 mètres de chaque côté des axes des tunnels et a renoncé à limiter verticalement les alignements. Ce faisant, elle a respecté le standard pour l’alignement. Le recourant ne doit donc pas obtenir le préavis de l’OFROU s’il souhaite transformer, agrandir ou construire un bâtiment, pour autant qu’un éventuel projet ne déborde pas sur l’alignement. Dans le cas contraire, il devra obtenir au préalable le préavis positif de l’OFROU dans le cadre de la procédure cantonale d’autorisation de construire, la présence d’un alignement n’équivalant pas à une interdiction de construire. L’impact de l’alignement sur les parcelles du recourant est donc moindre. Il importe, à cet effet, peu que les constructions sur ces parcelles aient été autorisées après ou avant la construction de l'autoroute et débordent sur l'alignement existant. En effet, ce tronçon d'autoroute n'appartenait à l'époque pas à la Confédération et les art. 22 ss LRN n'étaient pas applicables. D'autres règles régissaient alors la compétence et les conditions d'octroi d'une autorisation de construire à l'intérieur d'alignements. En outre, l'autorisation d'un projet spécifique débordant sur un alignement ne signifie pas que n'importe quel
projet est compatible avec les intérêts publics visés par la fixation d'alignements. Finalement, il est rappelé que les travaux nécessaires pour l'entretien de ces constructions ne requièrent pas de préavis de l'OFROU (art. 23 al. 1 2e phrase, LRN ; cf. ég. arrêt A-4973/2019 précité consid. 4.5.4.3). A cet effet, on peut encore préciser que l’art. 22 LRN ne laisse pas le choix à l'intimé et à l'autorité inférieure quant au principe de la fixation des alignements des deux côtés de la route (cf. arrêt A-4973/2019 précité consid. 4.5.4.4). Ceux-ci doivent donc être fixés également lorsque l’autoroute passe en sous-sol. L’art. 13 al. 3 ORN offre, certes, une certaine marge de manœuvre à l’autorité inférieure et à l’intimé. Toutefois, vu la configuration du terrain, l’alignement n’est, en l’espèce, pas tant fixé en prévision d'un élargissement éventuel de l'autoroute, mais bien pour des raisons de sécurité. Le recourant devra, en tout état de cause, tenir compte de la présence du tunnel dans des projets de construction – indépendamment de la présence ou non d’alignements. Il n’a donc pas à craindre une perte de constructibilité de ses parcelles. La fixation des alignements permet, en effet, uniquement de circonscrire les projets de construction dans lesquels l’OFROU est habilité à faire valoir, dans le cadre de la procédure cantonale d’approbation, l’existence d’intérêts publics dus à la présence d’une route nationale. Partant, en l'absence de motifs objectifs qui justifieraient une dérogation à l’absence de limitation verticale des alignements, il y a, là aussi, lieu de respecter le pouvoir d'appréciation de l'autorité inférieure.
Sur le vu des circonstances du cas d'espèce, le Tribunal retient qu'il existe un rapport raisonnable entre les effets de l'alignement sur le droit de propriété du recourant et la protection des intérêts publics susmentionnés. Il considère que l'autorité inférieure a tenu compte des circonstances locales, de la situation actuelle concrète et de l'intérêt privé du recourant. Elle a correctement pesé les intérêts en présence et n'a pas violé le principe de la proportionnalité dans la fixation de la distance des alignements. La troisième condition de l’art. 36 al. 1 Cst. est remplie.
Sur le vu de l’ensemble de ce qui précède, les griefs formulés par le recourant sont mal fondés et le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
Vu l’issue de la cause, les frais de procédure, comprenant l'émolument judiciaire et les débours, doivent être fixés à 2'000 francs et mis à la charge du recourant qui succombe (art. 63 al. 1 PA et art. 1 al. 1 du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]). Ils sont compensés par l’avance de frais du même montant versée par le recourant le 1er novembre 2019.
Compte tenu de l’issue de la procédure, le recourant – de surcroît titulaire du brevet d’avocat et se représentant lui-même – n’a pas droit à des dépens (art. 64 al. 1 PA a contrario et art. 7 al. 1 FITAF a contrario).
Le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
Les frais de procédure de 2'000 francs sont mis à la charge du recourant. Ils sont compensés par l’avance de frais du même montant déjà versée.
Il n’est pas alloué de dépens.
Le présent arrêt est adressé :
au recourant (acte judiciaire)
à l'intimé (acte judiciaire)
à l'autorité inférieure (n° de réf. […] ; acte judiciaire)
L'indication des voies de droit se trouve à la page suivante.
La présidente du collège : Le greffier :
Claudia Pasqualetto Péquignot Julien Delaye
La présente décision peut être attaquée devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par la voie du recours en matière de droit public, dans les trente jours qui suivent la notification (art. 82 ss, 90 ss et 100 LTF). Ce délai ne court notamment pas du 18 décembre au 2 janvier inclus (art. 46 al. 1 let. c LTF). Il est réputé observé si les mémoires sont remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF). Le mémoire doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. La décision attaquée et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour autant qu'ils soient en mains de la partie recourante (art. 42 LTF).
Expédition :
Bitte beachten Sie, dass keinen Anspruch auf Aktualität/Richtigkeit/Formatierung und/oder Vollständigkeit besteht und somit jegliche Gewährleistung entfällt. Die Original-Entscheide können Sie unter dem jeweiligen Gericht bestellen oder entnehmen.
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