Urteilsdetails des Bundesstrafgerichts
Instanz: | Bundesstrafgericht |
Abteilung: | Beschwerdekammer: Strafverfahren |
Fallnummer: | BB.2020.68 |
Datum: | 27.07.2020 |
Leitsatz/Stichwort: | Récusation du Ministère public de la Confédération (art. 59 al. 1 let. b en lien avec l'art. 56 CPP). |
Schlagwörter | Apos;; Apos;a; Procureur; écusation; édure; édéral; énéral; Apos;un; énal; érant; Malaisie; Tribunal; énale; Apos;une; être; Confédération; Apos;entraide; Apos;est; Apos;instruction; écision; ésent; Apos;art; élégation; ément; été; Apos;il; élai; éter; ésente; évention |
Rechtskraft: | Kein Rechtsmittel gegeben |
Kommentar: | - |
Entscheid des Bundesstrafgerichts
Bundesstrafgericht Tribunal pénal fédéral Tribunale penale federale Tribunal penal federal | |
Numéro de dossier: BB.2020.68 |
Décision du 27 juillet 2020 Cour des plaintes | ||
Composition | Les juges pénaux fédéraux Roy Garré, président, Patrick Robert-Nicoud et Stephan Blättler, la greffière Daphné Roulin | |
Parties | A. , représenté par Me Paolo Bernasconi, Me Jean-François Ducrest, Me Myriam Fehr-Alaoui ainsi que par Me Daniel Zappelli, avocats, requérant | |
contre | ||
1. B. , Procureur général, Ministère public de la Confédération, 2. C. , Procureur fédéral, Ministère public de la Confédération, intimés | ||
Objet | Récusation du Ministère public de la Confédération (art. 59 al. 1 let. b en lien avec l'art. 56 CPP ) |
Faits:
A. Le Ministère public de la Confédération (ci-après: MPC) mène depuis 2017 (procédure SV.17.1802) une instruction pénale contre, notamment, A. pour soupçons de gestion déloyale (art. 158 al. 2 CP ), escroquerie par métier (art. 146 al. 1 et 2 CP ), corruption active d'agents publics à l'étranger (art. 322 septies al. 1 CP), faux dans les titres (art. 251 CP ), blanchiment d'argent aggravé (art. 305 bis al. 1 et 2 CP ), gestion déloyale des intérêts publics (art. 314 CP ).
B. Il ressort du rapport de gestion 2018 du MPC que « suite au changement de gouvernement [malaisien] en mai 2018, une délégation suisse dirigée par le Procureur général de la Confédération s'est rendue en Malaisie en juillet 2018 afin d'assurer une coordination internationale efficace » (Rapport établi par le MPC sur ses activités au cours de l'année 2018 à l'intention de l'autorité de surveillance publié le 29 avril 2019, point 4.6, p. 19; communiqué de presse du MPC du 29 avril 2019).
Ayant pris connaissance de ce rapport, A. a interpellé le MPC et a requis, notamment, toute information utile en lien avec ce voyage de juillet 2018 ainsi que tout autre voyage qui aurait été entrepris dans le cadre du même complexe de faits (voir notamment lettre du 14 mai 2019, dossier MPC n o 16.101-0478 à 0479; lettre du 5 juin 2019, dossier MPC n o 16.101-0489 à 0490; lettre du 17 juin 2019, dossier MPC n o 16.101-0497 à 0498).
Les Procureurs fédéraux C. et D. ont refusé de donner suite à la requête de A. (lettre du 31 mai 2019, dossier MPC n o 16.101-0487; lettre du 13 juin 2019, dossier MPC n o 16.101-0496; lettre du 24 juin 2019, dossier MPC n o 16.101-0504; lettre du 5 juillet 2019, dossier MPC n o 16.101-0617).
C. Le 27 février 2020, A. a reçu un accès restreint au dossier de la procédure SV.17.18.02. Le MPC a indiqué que l'accès aux requêtes d'entraide à la Malaisie n'était en revanche pas accordé, dès lors qu'elles n'étaient à ce jour pas encore exécutées (cf. lettre du MPC du 26 février 2020, act. 1.10).
Dans ce contexte, A. a pris connaissance d'une note au dossier établi par le Procureur fédéral C. dont la teneur est la suivante: « Lors d'une visite de courtoisie du Procureur général en Malaisie le 7 mars 2019, celui-ci a reçu des autorités malaisiennes un DVD contenant des moyens de preuves susceptibles d'intéresser les autorités suisses » (dossier MPC n o 18.102-0220; cf. lettre du MPC du 26 février 2020 act. 1.10; cf. act. 1.11 ).
L'intéressé a également eu accès à la lettre du 7 mars 2019 des autorités malaisiennes adressée au MPC, à l'attention du Procureur fédéral C. (dossier MPC n o 18.102-0218). Il ressort de cette lettre que, conformément à la demande d'entraide de la Suisse (procédure SV.15.0969), les autorités malaisiennes remettent un DVD contenant des documents considérés comme pertinents dans la procédure pénale suisse.
D. Considérant que cet évènement ne constituait pas une visite de courtoisie, mais l'exécution d'un acte d'instruction, A. s'est adressé, par lettre du 3 mars 2020, au Procureur général B. pour qu'il lui soit communiqué les informations relatives à ce voyage en Malaisie en mars 2019 (dossier MPC n o 18.102-0220).
E. Le 13 mai 2020, le Procureur général B. a confirmé l'exactitude du contenu de la note établie le 12 mars 2019 par le Procureur fédéral C. et, pour le surplus, a renvoyé à la direction de la procédure (act. 1.3).
F. Le 13 mai 2020 également, le Procureur fédéral C., en charge du dossier, s'est déterminé spontanément sur la lettre de A. du 3 mars 2020. Il a expliqué que les documents, objets de la demande du requérant du 3 mars 2020, constituent des preuves récoltées par les autorités malaisiennes en exécution de la demande d'entraide suisse; ces documents ont ensuite été transmis brevi manu aux autorités suisses. Il a précisé que les informations relatives à l'origine et à la transmission des moyens de preuve figurent par conséquent au dossier et n'avait rien à ajouter (act. 1.2).
G. Le 17 mars 2020, A. s'est adressé au Procureur fédéral C. en réitérant sa requête du 3 mars 2020 (act. 1.13).
H. Le 26 mars 2020, A., par l'entremise de ses mandataires, forme auprès du MPC une demande de récusation à l'encontre du Procureur général B. et du Procureur fédéral C. ainsi que de tous les membres du MPC ayant fait partie des délégations qui se sont rendus en Malaisie et/ou ont reçus des instructions dans cette procédure suite aux rencontres avec les autorités malaisiennes (act. 1). Le MPC a transmis ladite demande de récusation à la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral le 7 avril 2020 en y joignant les prises de positions des deux Procureurs concernés (act. 2).
I. Par prise de position du 7 avril 2020, le Procureur général B. conclut à l'irrecevabilité de la demande (act. 2.1) tandis que le Procureur fédéral C. conclut à l'irrecevabilité de la demande, respectivement à son rejet (act. 2.2).
J. Par réplique du 4 mai 2020, A. prend les conclusions suivantes (act. 5):
« I. Préliminairement
1. Octroyer un délai raisonnable au Demandeur pour une prise de position dès la notification des actes qui seront mis à disposition par le MPC en exécution des ordonnances mentionnées ci-dessous.
2. Ordonner au MPC de communiquer la liste complète des magistrats et/ou fonctionnaires suisses et malaisiens ayant participé aux deux rencontres de travail en Malaisie de juillet 2018 ainsi que du 7 mars 2019.
3. Ordonner [à ces] magistrats/ou fonctionnaires [...] de mettre à la disposition du Tribunal pénal fédéral une déclaration dans laquelle ils décrivent les sujets traités, les décisions prises ainsi que les documents échangés entre les deux délégations.
4. Ordonner au MPC de communiquer toutes autres informations relatives au voyage et à la rencontre de travail de mars 2019 en Malaisie, tel que proposé dans les déterminations du Procureur fédéral C. du 7 avril 2020.
Une fois cela fait
5. Octroyer un délai raisonnable [...] pour étayer et/ou compléter la demande de récusation faisant l'objet de la présente procédure.
II. Sur le fond
1. Ordonner la récusation du Procureur général de la Confédération B. dans la procédure diligentée contre A. (soit la procédure SV.17.1802) et les procédures connexes (en particulier les procédures SV.15.0969; SV.18.0005 et SV.18.0492); ainsi que les procédures d'entraide qui se rapportent directement ou indirectement au complexe de fait dit 1MDB, y compris avec les autorités malaisiennes (en particulier la procédure RH.18.0229).
2. Ordonner la récusation du Procureur fédéral C. [ ...].
3. Ordonner la récusation de tout(s) autre(s) magistrat(s) et/ou fonctionnaire(s) du MPC responsable(s) des comportements décrits dans la demande de récusation du 26 mars 2020 [ ...].
4. Réserver le droit [...] de demander l'annulation et la répétition des actes de procédure auxquels ont participé les magistrat(s) et/ou fonctionnaire(s) du MPC concernés.
III. En tout état
1. Condamner le MPC aux frais et dépens de la présente procédure.
2. Débouter tout opposant de toute autre conclusion. »
K. Le Procureur général B. et le Procureur fédéral C. ont maintenu leurs conclusions respectives (dupliques des 13 et 15 mai 2020, act. 7 et 8).
Les arguments et moyens de preuve invoqués par les parties seront repris, si nécessaire, dans les considérants en droit.
La Cour considère en droit:
1.
1.1 Dès lors que la demande de récusation est dirigée contre une personne exerçant une fonction au sein du MPC, la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral est compétente pour trancher cette question, sans administration supplémentaire de preuve et définitivement (art. 59 al. 1 let. b CPP et art. 37 al. 1 de la loi fédérale du 19 mars 2010 sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération [LOAP; RS 173.71]). En vertu de l'art. 58 CPP , lorsqu'une partie entend demander une telle récusation, elle doit la présenter à la direction de la procédure, laquelle prendra position et transmettra l'ensemble à la Cour de céans (v. let. H).
1.2 Seules les parties à une procédure ont qualité pour agir en récusation d'un membre de l'autorité pénale (art. 58 al. 1 et 104 CPP ). Le requérant est prévenu dans la procédure SV.17.1802 (v. let. A), de sorte que sa qualité pour agir est admise dans ce cadre-là.
1.3
1.3.1 Selon l'art. 58 al. 1 CPP , lorsqu'une partie entend demander la récusation d'une personne qui exerce une fonction au sein d'une autorité pénale, elle doit présenter « sans délai » à la direction de la procédure une demande en ce sens, dès qu'elle a connaissance du motif de récusation; les faits sur lesquels elle fonde sa demande de récusation doivent pour le surplus être rendus plausibles. Cette exigence découle d'une pratique constante, selon laquelle celui qui omet de se plaindre immédiatement de la prévention d'un magistrat et laisse le procès se dérouler sans intervenir, agit contrairement à la bonne foi et voit son droit se périmer (ATF 140 I 271 consid. 8.4.3; 138 I 1 consid. 2.2; 119 Ia 221 consid. 5a). Dès lors, même si la loi ne prévoit aucun délai particulier, il y a lieu d'admettre que la récusation doit être formée aussitôt, c'est-à-dire dans les jours qui suivent la connaissance de la cause de récusation. En matière pénale, est irrecevable pour cause de tardiveté la demande de récusation déposée trois mois, deux mois ou même vingt jours après avoir pris connaissance du motif de récusation. En revanche, n'est pas tardive la requête formée après une période de six ou sept jours, soit dans les jours qui suivent la connaissance du motif de récusation (arrêt du Tribunal fédéral 1B_305/2019 du 26 novembre 2019 consid. 3.2.1 et les arrêts cités).
1.3.2 En l'espèce, le requérant a eu connaissance en 2019 déjà qu'une délégation suisse dirigée par le Procureur général de la Confédération s'est rendue en Malaisie en juillet 2018 afin d'assurer une coordination internationale efficace (cf. let. B). Une demande de récusation à ce titre serait tardive et doit être déclarée irrecevable.
1.3.3 En ce qui concerne la « visite de courtoisie » du 7 mars 2019, le requérant a pu en prendre connaissance le 27 février 2020, ayant reçu à cette date un accès partiel aux pièces issues de la procédure d'entraide en cours avec la Malaisie (lettre du MPC du 26 février 2020, act. 1.10). Cinq jours plus tard, soit le 3 mars 2020, l'intéressé a interpellé le Procureur général afin d'obtenir des informations supplémentaires. Le Procureur général et le Procureur fédéral C. en charge du dossier ont répondu le 13 mars 2020. Avant d'interjeter recours le 26 mars 2020 le requérant s'est à nouveau adressé au Procureur fédéral C. par lettre du 17 mars 2020, qui est restée sans réponse (cf. let. C à H).
En l'occurrence, il est pertinent de la part du requérant d'interpeller dans un premier temps sans délai le MPC - avant de déposer une demande de récusation - au vu des seules informations dont il avait connaissance. En effet, la procédure de récusation ne doit pas permettre de pallier un défaut de motifs et d'instruire la cause permettant d'étayer le bien-fondé de la demande (cf. infra consid. 2). Il ne peut donc être reproché au requérant d'avoir attendu les réponses du Procureur général et du Procureur fédéral C. (v. par exemple arrêt du Tribunal pénal fédéral BB.2018.195 consid. 1.4). Quant au respect du délai à réception de ces réponses, la question peut être laissée ouverte vu l'issue du litige.
1.4 Au vu de ce qui précède, il y a lieu d'entrer en matière sur la demande de récusation, sous réserve du respect du délai.
2.
2.1 Le requérant conclut, préalablement, à des actes d'instructions tendant à la production par le MPC d'informations relatives aux deux rencontres de travail intervenues en Malaisie en juillet 2018 et le 7 mars 2019. Il s'agit de la liste des personnes ayant participé aux rencontres en Malaisie ainsi que le contenu de ces rencontres. A réception de ces renseignements, il sollicite un délai raisonnable afin de pouvoir se déterminer et compléter sa demande de récusation (cf. let. J).
2.2
2.2.1 Sous réserve du respect de l'obligation de célérité (art. 5 CPP ), l'art. 59 al. 1 CPP n'exclut pas une administration des preuves par la Cour des plaintes, en sus de la détermination de la personne concernée par la demande de récusation, lorsque, comme en l'espèce, l'art. 56 let. f CPP est invoqué par le requérant (arrêt du Tribunal fédéral 1B_227/2013 du 15 octobre 2013 consid. 4.1 et les références citées; v. ég. arrêt du Tribunal fédéral 1B_1861/2019 du 24 juin 2019 consid. 4.1 et les références citées).
2.2.2 D'éventuels actes d'instruction, autres que la détermination de la personne visée par la demande de récusation, ne sauraient servir à admettre la recevabilité ou le bien-fondé d'une requête de récusation ou à permettre une nouvelle demande de récusation contre une des personnes déjà visée par la demande de récusation ou contre un autre membre de I'autorité pénale, notamment en révélant l'existence de circonstances établissant concrètement une apparence de prévention (v. décision du Tribunal pénal fédéral BB.2020.61 du 8 juillet 2020 consid. 1.4.2).
2.3 En l'occurrence, les actes d'instruction demandés par le requérant visent, notamment, à découvrir l'identité des personnes présentes lors des rencontres litigieuses en Malaisie et de déposer conséquemment des nouvelles demandes de récusation envers celles-ci. Vu l'issue de la procédure de récusation à l'encontre de ces personnes (v. infra consid. 5.3) il convient de rejeter de tels actes d'instruction.
Quant à la conclusion préalable tendant à être informé du contenu des rencontres, celle-ci peut être également rejetée. En effet, le requérant formule sa récusation au motif justement que les Procureurs concernés n'ont pas formalisé au dossier ces rencontres. De surcroît, les actes d'instruction ne doivent pas permettre d'admettre le bien-fondé d'une requête de récusation. Enfin, il sied de souligner que le présent litige ne porte pas sur la contestation des pièces versées au dossier de la procédure, qui relèverait d'une décision en matière d'administration des preuves (arrêt du Tribunal fédéral 1B_428/2017 du 16 octobre 2017 consid. 2.2). Dans le cadre d'une demande de récusation, la Cour de céans ne saurait donc se déterminer sur la nécessité de verser des éléments à la procédure pénale. Il appartient au requérant d'user des moyens de droit potentiellement ouverts à ce titre.
2.4 Partant, les demandes du requérant sont rejetées.
3.
3.1 La garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art. 30 al. 1 Cst . et 6 par. 1 CEDH permet d'exiger la récusation d'un juge dont la situation ou le comportement est de nature à faire naître un doute sur son impartialité (ATF 126 I 68 consid. 3a ). Une garantie similaire à celle de l'art. 30 al. 1 Cst . est déduite de l'art. 29 al. 1 Cst ., s'agissant de magistrats qui, comme en l'espèce, n'exercent pas de fonctions juridictionnelles au sens étroit (ATF 141 IV 178 consid. 3.2.2; 127 I 196 consid. 2b; 125 I 119 consid. 3b et les arrêts cités).
3.2 L'art. 56 CPP concrétise ces garanties en énumérant divers motifs de récusation aux lettres a à e. La let. f impose la récusation de toute personne exerçant une fonction au sein d'une autorité pénale lorsque d'autres motifs, notamment un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil juridique, sont de nature à la rendre suspecte de prévention. À l'instar de l'art. 34 al. 1 let. e LTF , cette disposition a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus aux lettres précédentes de l'art. 56 CPP (arrêt du Tribunal fédéral 1B_131/2011 du 2 mai 2011 consid. 3.1). Elle permet d'exiger la récusation d'un magistrat dont la situation ou le comportement est de nature à faire naître un doute sur son impartialité (ATF 126 I 68 consid. 3a). Elle tend notamment à éviter que des circonstances extérieures à la cause ne puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du juge est établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Seules les circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération; les impressions purement individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 143 IV 69 consid. 3.2; 141 IV 178 consid. 3.2.1; 138 IV 142 consid. 2.1; 138 I 1 consid. 2.2; 137 I 227 consid. 2.1; 136 III 605 consid. 3.2.1; 134 I 20 consid. 4.2; 131 I 24 consid. 1.1; 127 I 196 consid. 2b).
3.3 Des décisions ou des actes de procédure qui se révèlent par la suite erronés ne fondent pas en soi une apparence objective de prévention; seules des erreurs particulièrement lourdes ou répétées, constitutives de violations graves des devoirs du magistrat, peuvent fonder une suspicion de partialité, pour autant que les circonstances dénotent que le juge est prévenu ou justifient à tout le moins objectivement l'apparence de prévention (ATF 143 IV 69 consid. 3.2; 141 IV 178 consid. 3.2.1; 138 IV 142 consid. 2.3; 116 Ia 14 consid. 5a p. 19; 116 Ia 135 consid. 3a p. 138; 114 Ia 153 consid. 3b/bb p. 158; 113 Ia 407 consid. 2b p. 409/410; 111 Ia 259 consid. 3b/aa in fine p. 264).
3.4
3.4.1 Selon la doctrine, la récusation touche les personnes ayant l'influence la plus directe sur le dossier. En ce sens, une demande de récusation ne peut être formulée que contre les acteurs participant à la procédure pénale, tels que le directeur de la procédure et les personnes sous sa responsabilité. Néanmoins, il y a lieu d'admettre des exceptions lorsque la participation à l'affaire est marginale (cf. Verniory , Commentaire romand, 2 ème éd. 2019, n o 10 ad art. 56 CPP ). Dans sa jurisprudence, le Tribunal pénal fédéral a considéré que la seule participation d'un membre du MPC à un déplacement dans un état étranger pour y rencontre les autorités judiciaires compétentes dans le but « de clarifier, dans le respect des normes imposées par le droit suisse, la situation, notamment sous l'angle de l'entraide judiciaire et des droits de la défense » ne peut être considérée comme un motif suffisant justifiant une participation active à l'affaire (cf. décision du Tribunal pénal fédéral BB.2018.195 du 3 avril 2019 consid. 1.5).
3.4.2 Ces considérations s'appliquent par analogie aux supérieurs hiérarchiques des directeurs de procédure, en l'espèce au procureur général, au procureur général adjoint et au procureur en chef. Ceux-ci ne peuvent donc être visés par la demande de récusation d'une partie que lorsqu'ils ont participé concrètement à la procédure pénale qui concerne cette partie ou lorsqu'ils ont exercé une influence sur dite procédure, que ce soit en donnant des instructions concrètes aux directeurs de procédure ou en accomplissant eux-mêmes des actes de procédure. La seule possibilité de donner des instructions, lorsqu'elle n'est pas exercée dans un cas d'espèce à l'adresse d'un directeur de procédure, ne permet donc pas d'admettre la recevabilité de conclusions prises à l'encontre du procureur général ou d'un procureur en chef (décision du Tribunal pénal fédéral BB.2020.61 du 8 juillet 2020 consid. 2.6).
4.
4.1 Le requérant fonde sa demande de récusation sur une rencontre intervenue le 7 mars 2019 entre le MPC (Procureur général et les fonctionnaires l'accompagnant) et les autorités malaisiennes. Au cours de cette rencontre, celles-ci ont remis à celui-là des pièces ayant manifestement un lien avec la procédure pénale suisse. Le requérant défend que tant cette rencontre que celle de juillet 2018 constituent des « actes d'entraide déguisés en visite de courtoisie ». D'après lui, il est hautement vraisemblable qu'il ait été évoqué la procédure diligentée par les autorités malaisiennes ou encore la coordination des mesures et l'échange de renseignements. Il conteste que le Procureur général ait une seule vocation de postier. L es discussions lors de cette rencontre, comme celle de 2018, n'ont pas été consignées au dossier de la cause, alors que l'obligation de formaliser moyennant un rapport écrit des rencontres de la part du Procureur général est impérative lorsqu'il s'agit de rencontres avec les autorités judiciaires pénales d'un autre pays. De plus, interpellés sur le sujet, les Procureurs concernés ne lui ont fourni aucune réponse transparente. De surcroît, selon lui, de telles rencontres ne reposent sur aucune base légale ou aucun accord d'entraide qui autorise des équipes d'enquête communes entre la Suisse et la Malaisie. Dans ce contexte, le requérant fait grief d'une attitude constante en faveur de l'Etat de Malaisie et de certaines personnalités politiques malaisiennes, d'un côté, et en sa défaveur, de l'autre côté. Cette apparence de partialité ressort également du rapport rendu le 30 décembre 2019 intitulé « Rapport I [...] » (act. 1).
4.2 Le Procureur général indique que dans la pratique il n'est pas rare que le Procureur général et ses homologues d'autres Etats se rencontrent comme dans le cas d'espèce. De telles rencontres se situent au niveau institutionnel et non au niveau procédural. Concernant la remise des documents, le Procureur général observe les avoir uniquement reçus; ce rôle aurait pu également être endossé par l'Office fédéral de la justice ou le Département fédéral des affaires étrangères. D'après lui, cela ne peut pas être considéré comme une intervention concrète. A défaut d'avoir assumé un rôle incombant à la direction de la procédure ou accompli un acte de procédure concret, il conclut à l'irrecevabilité de la demande de récusation (act. 2.1).
4.3 Le Procureur fédéral C. fait valoir que les documents litigieux ont été remis au Procureur général, sous un courrier de couverture officiel, en exécution des demandes d'entraide du MPC des 15 janvier et 28 septembre 2016. L'accomplissement de cet acte administratif ne constitue pas un acte d'instruction ou de récolte de preuves, ni une démarche susceptible d'influencer les preuves à récolter. Dès lors, d'après le Procureur fédéral, aucune autre indication que celle nécessaire à assurer la traçabilité de la preuve n'appartient au dossier. Il retient que ni la loi ni la jurisprudence n'érige en obligation absolue et autonome l'exigence de consigner toute activité du Parquet; au contraire cette exigence s'étend uniquement aux actes d'instruction ou de récolte de preuve ainsi qu'aux actes des autorités suisses susceptibles d'influencer l'administration de nouvelles preuves par l'Etat requis (act. 2.2).
5. Dans le cadre de la procédure pénale dirigée contre lui, A. demande la récusation du Procureur général B., du Procureur fédéral C. et contre tout autre magistrat et/ou fonctionnaire du MPC ayant participé aux deux rencontres en Malaisie avec les autorités de ce pays en juillet 2018 et mars 2019. Il convient d'examiner ci-après les motifs de récusation pour chaque personne individuellement.
5.1 Concernant le Procureur fédéral C., il ressort des pièces en mains de la Cour de céans qu'il dirige l'enquête (act. 5). Par conséquent, il convient d'entrer en matière sur la demande de récusation à son encontre.
Le seul acte concret reproché au Procureur fédéral C. est son refus de verser au dossier les informations relatives à la délégation suisse menée par le Procureur général et sa rencontre avec les autorités malaisiennes le 7 mars 2019. Un tel refus peut être assimilé à une décision incidente en matière d'administration des preuves (arrêt du Tribunal fédéral 1B_428/2017 du 16 octobre 2017 consid. 2.2). Il ne relève pas de la présente procédure de statuer sur la tenue du dossier par l'autorité pénale ni sur la potentielle nécessité de consigner la rencontre de mars 2019 entre le Procureur général et les autorités malaisiennes (à ce sujet v. notamment arrêt du Tribunal pénal fédéral BB.2019.187 du 3 mars 2020 consid. 6.3 et 6.8). In casu, il n'apparaît pas que le requérant serait empêché de remettre en cause les actes de procédure de l'autorité pénale dans le cadre des voies de droit ordinairement prévues par la loi. Il n'appert pas non plus que le refus de verser ces informations au dossier constituerait des erreurs particulièrement lourdes ou répétées, constitutives de violations graves des devoirs du magistrat, pouvant fonder une suspicion de partialité. Enfin, il sied de rappeler que la procédure de récusation n'a pas pour objet de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l'instruction et de remettre en cause les différentes décisions incidentes prises notamment par la direction de la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 1B_46/2016 du 29 avril 2016 consid. 3.1), tel que le refus de verser des éléments au dossier.
Dans ces conditions, il convient de rejeter la demande de récusation à l'encontre du Procureur fédéral C.
5.2 Quant au Procureur général B., le requérant lui reproche de s'être rendu en Malaisie en mars 2019 sans que sa rencontre avec les autorités de ce pays ne soit consignée au dossier. Il ne ressort pas des pièces produites qu'il incombe au Procureur général B., dans l'instruction pénale contre A., un rôle de direction de la procédure. Il n'apparaît pas plus qu'il ait donné des instructions concrètes au directeur de procédure. Le seul déplacement du Procureur général en Malaisie - pays auprès duquel a été formée une demande d'entraide par les autorités suisses dans le cadre de l'instruction pénale contre A. - ne peut être considérée comme un motif suffisant justifiant une participation active à l'affaire en question. De plus, le seul rapport hiérarchique du Procureur général est au demeurant insuffisant pour fonder l'existence d'un rôle dans la direction de la procédure. A défaut d'influence directe sur le dossier, le Procureur général ne peut pas faire l'objet d'une demande de récusation pour son déplacement en Malaisie (décision du Tribunal pénal fédéral BB.2019.226 du 11 mars 2020 consid. 2.3). Il sied de relever que toutes les allégations contraires du requérant sur l'influence effective du Procureur général dans la procédure pénale contre A. sont purement spéculatives et ne peuvent être retenues. Par conséquent, la demande de récusation est à ce titre irrecevable. La prétendue absence de base légale ou d'accord pour la rencontre entre les autorités malaisiennes et une délégation suisse menée par le Procureur général ne permet pas d'aboutir à un autre résultat.
Le requérant fait encore grief au Procureur général d'avoir reçu des documents sur support DVD de la part de la Malaisie. Il ressort de la lettre du 7 mars 2019 des autorités malaisiennes que, en raison de l'entraide formée par la Suisse, les documents demandés sont remis au MPC à l'attention du Procureur C. (cf. let. C). Il sied de rappeler que le Procureur général représente le MPC en qualité d'autorité de poursuite pénale de la Confédération (art. 2 al. 1 in fine du Règlement sur l'organisation et l'administration du Ministère public de la Confédération [ RS 173.712.22]). Par conséquent, il n'est pas exclu que le Procureur général, en tant que représentant du MPC, opère un service de livraison suite à la remise d'éléments d'un pays étranger dans le cadre d'une demande d'entraide formulée par le MPC. Dans cette constellation, il n'apparaît également pas que le Procureur général ait une influence directe sur le dossier. Partant, la demande de récusation à l'encontre du Procureur général est irrecevable.
Il n'y a ainsi pas lieu d'examiner les éléments spéculatifs sur lesquels se fonde le requérant pour démontrer l'apparence de prévention du Procureur général ou le caractère de partialité en faveur de l'Etat de Malaisie et des autorités politiques impliquées (en lien notamment avec le rapport du 30 décembre 2019 intitulé « Rapport I [...] »).
5.3 Enfin, la demande de récusation est formulée à l'encontre des autres membres du MPC ayant fait partie de la délégation suisse en Malaisie en juillet 2018 et mars 2019. Le requérant déplore ne pas pouvoir donner leurs identités, dès lors que le MPC a refusé de les communiquer (act. 1 n os 62 à 63; act. 5 n os 35 à 36).
Il sied de rappeler que la récusation dirigée contre les membres du MPC s'étant rendus en Malaisie en juillet 2018 est irrecevable en raison de son caractère tardif (cf. supra consid. 1.3.2).
Concernant la délégation suisse de mars 2019, il est difficile à appréhender pour quels motifs les membres de celle-ci auraient de par la participation au voyage une influence directe dans la procédure pénale. Le requérant ne le démontre d'ailleurs pas. La seule participation de ces membres ne peut être considérée comme un motif suffisant justifiant une participation active à l'affaire. Partant, les autres membres du MPC ayant fait partie de la délégation en Malaisie en mars 2019 ne peuvent pas faire l'objet d'une demande de récusation. Il convient de déclarer irrecevable la demande de récusation du requérant à l'encontre de ces personnes.
6. Il s'ensuit que la demande de récusation doit être rejetée dans la mesure de sa recevabilité.
7. Vu le sort de la cause, il incombe au requérant de supporter les frais (art. 59 al. 4 CPP ), lesquels prendront en l'espèce la forme d'un émolument qui, en application des art. 5 et 8 du règlement du Tribunal pénal fédéral du 31 août 2010 sur les frais, émoluments, dépens et indemnités de la procédure pénale fédérale (RFPPF; RS 173.713.162), sera fixé à CHF 2'000.--.
Par ces motifs, la Cour des plaintes prononce:
1. La demande de récusation est rejetée, dans la mesure de sa recevabilité.
2. Un émolument de CHF 2'000.-- est mis à la charge du requérant.
Bellinzone, le 27 juillet 2020
Au nom de la Cour des plaintes
du Tribunal pénal fédéral
Le président: La greffière :
Distribution
- Mes Paolo Bernasconi, Jean-François Ducrest, Myriam Fehr-Alaoui et Daniel Zappelli, avocats
- B., Procureur général, Ministère public de la Confédération
- C., Procureur fédéral, Ministère public de la Confédération
Indication des voies de recours
Il n'existe pas de voie de droit ordinaire contre la présente décision.
Bitte beachten Sie, dass keinen Anspruch auf Aktualität/Richtigkeit/Formatierung und/oder Vollständigkeit besteht und somit jegliche Gewährleistung entfällt. Die Original-Entscheide können Sie unter dem jeweiligen Gericht bestellen oder entnehmen.
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