Urteilsdetails des Bundesstrafgerichts
Instanz: | Bundesstrafgericht |
Abteilung: | Strafkammer |
Fallnummer: | SK.2013.9 |
Datum: | 02.05.2013 |
Leitsatz/Stichwort: | Tentative d'escroquerie (art. 22 et art. 146 CP), subsidiairement faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP); Renvoi au MPC |
Schlagwörter | Apos;; Apos;a; énal; Apos;accusation; énale; Apos;un; été; édure; être; Apos;ordonnance; Apos;il; Apos;une; édéral; Apos;escroquerie; Apos;art; Apos;acte; ément; Tribunal; économique; Apos;en; Apos;au; Apos;infraction; Apos;instruction; Apos;opposition; ésomption; Apos;objet; évrier; état; Apos;état; ésent |
Rechtskraft: | Kein Weiterzug, rechtskräftig |
Rechtsgrundlagen des Urteils: | Art. 310 or; |
Kommentar: | - |
Entscheid des Bundesstrafgerichts
Bundesstrafgericht Tribunal pénal fédéral Tribunale penale federale Tribunal penal federal | |
Numéro de dossier: SK.2013.9 |
Ordonnance du 2 mai 2013 Cour des affaires pénales | ||
Composition | Le juge pénal fédéral Giuseppe Muschietti, président, Le greffier Stéphane Zenger | |
Parties | MinistÈre public de la ConfÉdÉration , représenté par Félix Reinmann, Procureur fédéral, | |
contre | ||
A. , défendu par Maître Giorgio Campa, avocat. | ||
Objet | Tentative d'escroquerie (art. 22 et art. 146 CP ), subsidiairement faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP). Suspension de la procédure et renvoi de l'accusation (art. 329 al. 2 CPP). |
Faits:
A. Le 12 juillet 2007, le Ministère public de la Confédération (ci-après: MPC) a ouvert une enquête de police judiciaire à l'encontre de A. pour présomption d'infraction à la loi fédérale sur le matériel de guerre (art. 33 LFMG ) (dossier MPC, cl. 1, p. 01-00-0001).
Le 27 septembre 2011, le MPC a ordonné la jonction en mains des autorités fédérales de la poursuite de la tentative d'escroquerie (art. 22 et art. 146 CP) que A. aurait commise au préjudice de l'Etat de Genève dans le courant du mois de décembre 2008 (dossier MPC, cl. 1, p. 02-00-0001 ss). L'ordonnance de jonction a été notifiée à Maître Giorgio Campa, défenseur de A., lequel n'a pas recouru contre celle-ci.
B. Le 8 novembre 2012, le MPC a rendu une ordonnance pénale (art. 352 CPP) à l'encontre de A. pour tentative d'escroquerie (art. 22 et art. 146 CP ) (dossier MPC, cl. 16, p. 22-00-0001 ss). Selon les faits qui lui sont imputés, A. a adressé le 17 décembre 2008 une demande d'aide sociale pour lui-même et pour son épouse au Service des prestations complémentaires du canton de Genève. Sur le formulaire annexé à cette demande, il a mentionné ne posséder qu'un seul compte bancaire ouvert au nom de son épouse et dont le solde au 31 décembre 2007 était de CHF 19.60. Il aurait toutefois intentionnellement omis d'indiquer qu'il était l'unique ayant droit économique d'une relation bancaire ouverte au nom de la société B. auprès de la banque C. à Genève et dont le solde au 15 décembre 2008 se chiffrait à USD 153'403.--. Cette omission aurait constitué une tentative d'escroquerie au préjudice de l'Etat de Genève et le MPC l'a condamné pour cette infraction à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à CHF 50.--, avec sursis à l'exécution de la peine durant un délai d'épreuve de deux ans, ainsi qu'à une amende de CHF 300.--. En cas de non-paiement de l'amende, la peine privative de liberté de substitution a été fixée à six jours. Cette ordonnance a été notifiée le lendemain à Maître Campa, lequel y a fait opposition au nom de A. le 19 novembre 2012, soit le dernier jour utile du délai légal (dossier MPC, cl. 16, p. 22-00-0004).
C. Le 25 janvier 2013, le MPC a rendu une ordonnance de classement (art. 319 ss CPP ) concernant la procédure d'instruction pour infraction à la LFMG (dossier MPC, cl. 16, p. 22-00-0005). Cette ordonnance a été notifiée le 29 janvier 2013 à Maître Campa et elle n'a fait l'objet d'aucun recours à la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral.
D. Le 7 février 2013, le MPC a dressé à l'encontre de A. un acte d'accusation pour les infractions de tentative d'escroquerie (art. 22 et art. 146 CP ) et, alternativement et subsidiairement, de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP ). Le MPC a maintenu à l'encontre de A. les faits figurant dans l'ordonnance pénale du 8 novembre 2012 s'agissant de la première accusation. Quant à la deuxième accusation, le MPC a reproché à A., de manière alternative et subsidiaire à la première accusation, d'avoir faussement indiqué ou fait constater dans la documentation relative à la relation bancaire ouverte auprès de la banque C. qu'il serait l'unique ayant droit économique de cette relation, alors qu'en réalité cet ayant droit économique serait tantôt son neveu D., tantôt son beau-frère E. Le MPC a conclu à ce que A. soit reconnu coupable de ces deux infractions et condamné à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à CHF 50.--, avec sursis à l'exécution de la peine durant un délai d'épreuve de deux ans, ainsi qu'à une amende de CHF 300.--. En cas de non-paiement de l'amende, la peine privative de liberté de substitution a été fixée à six jours. L'acte d'accusation a été communiqué à la Cour de céans le 26 février 2013 avec le dossier de la cause et reçu le 5 mars suivant. A la demande de la Cour de céans, le MPC a expliqué avoir décidé de porter l'accusation devant le tribunal en rédigeant un acte d'accusation en lieu et place du maintien de l'ordonnance pénale frappée d'opposition (art. 355 al. 3 let. d CPP ) en raison, d'une part, de cette opposition et, d'autre part, de la position de la défense.
Dans la mesure où d'autres précisions de faits sont nécessaires, elles seront apportées dans les considérants qui suivent.
La Cour considère en droit:
1.
1.1 La réception de l'acte d'accusation par le tribunal crée la litispendance. Avec la naissance de la litispendance, les compétences passent au tribunal (art. 328 al. 1 et 2 CPP). A la réception de l'acte d'accusation, le direction de la procédure examine notamment si les conditions à l'ouverture de l'action publique sont réalisées (art. 329 al. 1 let. b CPP ) et s'il existe des empêchements de procéder (art. 329 al. 1 let. c CPP ). S'il apparaît lors de cet examen ou au plus tard durant la procédure qu'un jugement au fond ne peut pas encore être rendu, le tribunal suspend la procédure. Au besoin, il renvoie l'accusation au ministère public pour qu'il la complète ou la corrige (art. 329 al. 2 CPP). Dans ce cas, le tribunal décide si l'affaire suspendue reste pendante devant lui (art. 329 al. 3 CPP). Conformément à la règle de l'art. 329 CPP, la direction de la procédure examine d'office la régularité de la mise en accusation avant de fixer les débats. Pour ce faire, elle procède à un examen sommaire de l'accusation (Message du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, FF 2006 1057 p. 1261; Jeremy Stephenson/Roberto Zalunardo-Walser , in Basler Kommentar Schweizerische Strafprozessordnung, Bâle 2011 [ci-après: BK-StPO], n° 1 ad art. 329 CPP ). Le but de cet examen est d'éviter qu'une accusation clairement insuffisante ne conduise à des débats inutiles, ce qui serait contraire tant à l'économie de procédure qu'au principe de célérité (arrêts du Tribunal fédéral 1B_302/2011 du 26 juillet 2011, consid. 2.2.2, et 1B_304/2011 du 26 juillet 2011, consid. 3.2.2; TPF 2012 42 consid. 7.2 p. 44 ss).
Parmi les conditions à l'ouverture de l'action publique au sens de l'art. 329 al. 1 let. b CPP figure le respect du principe de l'accusation ( Jeremy Stephenson/Roberto Zalunardo-Walser , in BK-StPO, n° 3 ad art. 329 CPP ). Ce principe est une composante du droit d'être entendu consacré par l'art. 29 al. 2 Cst . Il peut aussi être déduit des art. 32 al. 2 Cst . et 6 § 3 CEDH, qui n'ont à cet égard pas de portée distincte. Il implique que le prévenu sache exactement les faits qui lui sont imputés et quelles sont les peines et mesures auxquelles il est exposé, afin qu'il puisse s'expliquer et préparer efficacement sa défense (ATF 126 I 19 consid. 2 p. 21 ss; également ATF 133 IV 235 consid. 6.2 et 6.3 p. 245). Le principe de l'accusation comprend un aspect factuel et un aspect juridique. D'une part, le prévenu doit être informé avec précision des faits retenus à sa charge; d'autre part, il doit être avisé de la qualification pénale de ces faits. Ainsi, à mesure que l'instruction avance et qu'elle permet de préciser l'état de fait et la qualification juridique qui en découle, l'autorité pénale se doit de le notifier au prévenu ( Gérard Piquerez/Alain Macaluso , Procédure pénale suisse, 3 e éd., Zurich 2011, n os 799 ss, p. 277). Ce principe vise à empêcher que le prévenu ne doive faire face, aux débats seulement, à des accusations auxquelles il n'avait jamais été confronté durant l'instruction ( Niklaus Oberholzer , Grundzüge des Strafprozessrechts, 3 e éd., Berne 2012, n° 621, p. 226).
Quant aux empêchements de procéder (art. 329 al. 1 let. c CPP), ils comprennent notamment la renonciation à toute poursuite pénale au sens de l'art. 8 CPP ( Jeremy Stephenson/Roberto Zalunardo-Walser , in BK-StPO, n° 5 ad art. 329 CPP). Font partie de cette catégorie les ordonnances de non-entrée en matière (art. 310 CPP ) et les ordonnances de classement (art. 319 ss CPP ) rendues par le ministère public (art. 8 al. 4 CPP ; Robert Roth , in Commentaire romand Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011 [ci-après: CR-CPP], n° 39 ad art. 8 CPP ).
1.2 En l'occurrence, l'instruction menée par le MPC à l'encontre de A. a principalement porté sur la présomption d'infraction à la LFMG. Cette procédure a d'abord été ouverte pour cette infraction puis étendue à celle de la tentative d'escroquerie que le prénommé aurait commise au préjudice de l'Etat de Genève. Par la suite, la présomption d'infraction à la LFMG a fait l'objet d'un classement et seule celle relative à la tentative d'escroquerie a été maintenue. En revanche et contrairement à cette dernière, le MPC n'a pas ouvert d'instruction pour la présomption d'infraction de faux dans les titres figurant dans l'acte d'accusation du 7 février 2013. En effet, tant l'ordonnance d'ouverture d'enquête du 12 février 2007 que celle de jonction du 27 septembre 2011 ne mentionnent pas cette infraction. De même, les faits la concernant ne figurent pas dans l'ordonnance pénale du 8 novembre 2012. Ainsi, cette dernière ne fait nullement référence à l'accusation selon laquelle A. aurait faussement indiqué ou fait constater dans la documentation relative à la relation bancaire (compte n° 1) ouverte auprès de la banque C. qu'il serait l'unique ayant droit économique de cette relation, alors qu'en réalité cet ayant droit économique serait tantôt son neveu, tantôt son beau-frère. La seule référence à l'infraction de faux dans les titres que comporte le dossier de la cause est une question que le MPC a posé à A. le 29 octobre 2009. Lors de cette audition, le MPC l'a interpellé en ces termes au sujet de cette infraction: " Je vous informe que si vous avez faussement déclaré que vous êtes l'ayant droit économique des fonds déposés sur le compte ouvert au nom de la société B., alors qu'ils appartiennent à votre beau-frère E., vous avez commis un faux dans les titres au sens de l'art. 251 CP. Comment vous déterminez-vous?", ce à quoi A. a répondu qu'il n'était pas le propriétaire des fonds déposés sur ce compte (dossier MPC, cl. 13, p. 13-00-0187). Cette infraction n'a plus été évoquée par la suite - à l'exception d'un courrier du 31 octobre 2012 du MPC dont il est fait mention au considérant 1.4 ci-après - jusqu'à la mise en accusation devant la Cour de céans. Il convient de relever que durant l'instruction, A. a été entendu à douze reprises par la PJF et le MPC. Lors de ces nombreux interrogatoires, il a toujours été informé que l'objet de la procédure portait sur la présomption d'infraction à la LFMG (art. 143 al. 1 let. a CPP). A une seule occasion, le 14 novembre 2011, il a été informé que la procédure portait en sus sur la présomption de tentative d'escroquerie. A l'inverse, A. n'a jamais été avisé que l'objet de la procédure concernait également la présomption d'infraction de faux dans les titres et aucun des interrogatoires auxquels il a été soumis n'a porté sur cette accusation. Il en résulte que le MPC ne lui a pas donné l'occasion de s'exprimer de manière complète sur la présomption d'infraction de faux dans les titres (art. 157 al. 2 CPP) et cette infraction ne lui a pas été présentée comme le résultat de l'instruction menée à son endroit (art. 317 CPP ). A cet égard, la seule question qui lui a été posée au sujet de cette infraction lors de son audition du 29 octobre 2009 apparaît insuffisante à respecter les exigences découlant du principe de l'accusation. On doit ainsi constater que A. n'a pas pu prendre formellement position sur cette infraction, ni proposer l'administration de moyens de preuve, contrairement aux garanties de l'art. 107 al. 1 CPP . En outre, rien n'indique que A. devait s'attendre à une nouvelle qualification juridique des faits retenus à son encontre dans l'ordonnance pénale du 8 novembre 2012. Il ressort du dossier de la cause que le MPC n'a administré aucune preuve complémentaire entre l'opposition à cette ordonnance pénale le 19 novembre 2012 et l'acte d'accusation du 7 février 2013. D'autres mesures d'instruction n'ont pas non plus été ordonnées entre ces deux dates, à l'exception de l'ordonnance de classement rendue le 25 janvier 2013. Dans ces circonstances, les faits retenus dans l'ordonnance pénale du 8 novembre 2012 et leur qualification juridique n'ont pas pu se modifier au préjudice de A. depuis le prononcé de cette ordonnance, en particulier en l'absence de toute nouvelle infraction découverte depuis lors. A la lecture de l'acte d'accusation du 7 février 2013, on constate pourtant que le MPC a imputé d'autres faits à A. que ceux figurant dans l'ordonnance pénale précitée pour soutenir la thèse de l'infraction de faux dans les titres. Il ne s'agit dès lors pas d'une qualification juridique nouvelle des faits figurant dans cette ordonnance pénale, mais d'actes reprochés en plus de ceux de la tentative d'escroquerie retenue dans ladite ordonnance. Il apparaît donc, au terme de l'examen de l'acte d'accusation, que A. doit faire face, s'agissant de la présomption d'infraction de faux dans les titres, à des accusations auxquelles il n'a jamais été confronté durant l'instruction et pour lesquelles l'occasion de s'exprimer et de présenter des moyens de preuve ne lui a jamais été donnée. Ceci constitue une violation du principe de l'accusation. En conséquence, les conditions de l'ouverture de l'action publique ne paraissent pas réalisées en ce qui concerne l'accusation de faux dans les titres (art. 329 al. 1 let. b CPP ).
1.3 Comme indiqué précédemment, le principe de l'accusation est une composante du droit d'être entendu. Selon la jurisprudence, une violation du droit d'être entendu peut être réparée lorsque le prévenu a la faculté de se faire entendre par une autorité disposant d'un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (ATF 134 I 331 consid. 3.1 p. 335). Une telle réparation dépend de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 124 V 180 consid. 4 p. 183 et les arrêts cités). Elle peut également se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 133 I 201 consid. 2.2 p. 204).
Dans le présent cas, la violation du principe de l'accusation par le MPC constitue une grave atteinte au droit d'être entendu de A., celui-ci n'ayant jamais eu l'occasion de s'exprimer sur l'accusation de faux dans les titres, ni de présenter les preuves nécessaires à ce propos. Sur ce point, il convient de rappeler que les preuves doivent être administrées en priorité par le ministère public et que ce n'est qu'à titre exceptionnel que cette tâche incombe au tribunal, notamment aux conditions des art. 343 et 349 CPP. En outre, c'est avant tout au ministère public qu'il appartient de fournir les éléments essentiels pour juger la cause, conformément à l'art. 308 al. 3 CPP. S'il s'avère que l'accusation présentée au tribunal est insuffisante, il est dès lors conforme à la systématique du code de procédure pénale de renvoyer la cause au ministère public pour qu'il la complète ou la corrige (arrêts du Tribunal fédéral 1B_302/2011 du 26 juillet 2011, consid. 2.2.2, et 1B_304/2011 du 26 juillet 2011, consid. 3.2.2; TPF 2012 42 consid. 7.2 p. 44 ss). En l'espèce, un renvoi de l'accusation ne constituerait pas une vaine formalité pour les raisons qui viennent d'être exposées. De même, l'allongement qui en résulterait ne peut pas être qualifié d'inutile, le respect du principe de l'accusation étant d'une portée fondamentale en procédure pénale.
1.4 Un empêchement de procéder, au sens de l'art. 329 al. 1 let. c CPP , semble également exister s'agissant de l'accusation de faux dans les titres. Le 7 septembre 2012, le MPC a avisé le défenseur de A. qu'il allait rendre une ordonnance pénale pour la tentative d'escroquerie que le prénommé aurait commise au préjudice de l'Etat de Genève, ainsi qu'une ordonnance de classement pour la présomption d'infraction à la LFMG, et l'a invité à formuler des réquisitions de preuve éventuelles (dossier MPC, cl. 14, p. 16-00-0031 s.). Le 15 octobre 2012, Maître Campa a requis l'audition de D., c'est-à-dire du neveu de A., en indiquant que le premier serait l'ayant droit économique des avoirs de la société B. (dossier MPC, cl. 14, p. 16-00-0036 ss). Le 31 octobre suivant, le MPC a avisé par écrit le défenseur de A. qu'il refusait l'audition de l'intéressé pour les raisons suivantes: " [...] Monsieur D. n'a jamais été l'ayant droit économique des avoirs déposés sur le ou les comptes [ouverts] au nom de la société B. comme cela ressort de la documentation produite par les banques F. et C. Si tel avait été le cas comme vous le prétendez, un faux dans les titres aurait été commis par l'indication d'un faux ayant droit économique sur le formulaire A. Cet état de fait a été présenté tel quel à votre client durant l'une de ses auditions et il a clairement reconnu être l'ayant droit économique des fonds déposés au nom de la société B. [...] Partant, je rendrai dans les prochains jours l'ordonnance pénale annoncée sur la base des éléments renseignant sur la situation personnelle et financière de votre client figurant au dossier" (dossier MPC, cl. 14, p. 16-00-0048 s.). Rapprochée de cette annonce, l'ordonnance pénale du 8 novembre 2012 équivaut à un classement implicite de toutes les autres infractions évoquées, même très brièvement, par le MPC durant les auditions de A. (ATF 138 IV 241 consid. 2.3 et 2.4 p. 243 ss). En effet, au moyen de cette ordonnance, le MPC a condamné A. pour une tentative d'escroquerie commise au préjudice de l'Etat de Genève. Il a constaté que le prénommé était l'ayant droit économique de la relation bancaire (compte n° 1) ouverte au nom de la société B. auprès de la banque C. et qu'il avait intentionnellement omis de signaler l'existence de cette relation bancaire dans le cadre de sa demande d'aide sociale. En constatant formellement que A. était l'ayant droit économique de cette relation bancaire, le MPC a renoncé à considérer que cette qualité pouvait également incomber au neveu ou au beau-frère du prénommé. Ce faisant, il a renoncé à poursuivre A. pour cette éventualité (art. 8 CPP ). Le MPC a dès lors inclus dans son ordonnance pénale un classement implicite d'une partie des faits, à savoir ceux relevant de l'hypothèse où A. ne serait pas l'ayant droit économique de la relation bancaire en question. En abandonnant de la sorte une partie des faits, le MPC ne pouvait pas, à la suite de l'opposition à l'ordonnance pénale du 8 novembre 2012, retenir les faits ayant fait l'objet de ce classement implicite pour soutenir ensuite l'accusation de faux dans les titres figurant au chiffre 1.1.2 de l'acte d'accusation du 7 février 2013. Une telle façon de procéder apparaît, de surcroît, contraire à l'interdiction de la double poursuite (art. 11 CPP ; cf. Brigitte Tag , in BK-StPO, n° 13 ad art. 11 CPP ). Par conséquent, l'ordonnance pénale du 8 novembre 2012 doit être considérée comme un empêchement de procéder, au sens de l'art. 329 al. 1 let. c CPP , pour l'accusation de faux dans les titres.
1.5 En définitive, il apparaît, compte tenu des motifs exposés ci-dessus, que les conditions à l'ouverture de l'action publique ne sont pas réalisées pour l'accusation de faux dans les titres figurant au chiffre 1.1.2 de l'acte d'accusation du 7 février 2013 (art. 329 al. 1 let. b CPP) et qu'il existe aussi des empêchements de procéder pour cette accusation (art. 329 al. 1 let. c CPP). En l'état de la cause, un jugement au fond ne peut pas être rendu sur cette accusation, de sorte que la procédure doit être suspendue (art. 329 al. 2 CPP ).
Comme on va le voir au considérant 2 ci-après, il apparaît que les conditions à l'ouverture de l'action publique ne sont pas non plus réalisées pour l'accusation de tentative d'escroquerie figurant au chiffre 1.1.1 de l'acte d'accusation.
2.
2.1 A teneur de l'art. 324 al. 1 CPP, le ministère public engage l'accusation devant le tribunal compétent lorsqu'il considère que les soupçons établis sur la base de l'instruction sont suffisants et qu'une ordonnance pénale ne peut être rendue. Conformément à cette disposition, le prononcé d'une ordonnance pénale à la fin de l'enquête constitue la règle et la mise en accusation par un acte d'accusation l'exception. Lorsque les conditions des art. 352 ss CPP sont remplies, le ministère public est ainsi tenu de clôturer la procédure en rendant une ordonnance pénale ( Niklaus Schmid , Schweizerische Strafprozessordnung, Praxiskommentar, Zurich/St-Gall 2009, n° 1 ad art. 324 CPP ; Stefan Heimgartner/Marcel Alexander Niggli , in BK-StPO, n° 16 ad art. 324 CPP ).
Aux termes de l'art. 352 al. 1 CPP , le ministère public rend une ordonnance pénale visant une amende et une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus (al. 1 let. b et al. 3) si, durant la procédure préliminaire, le prévenu a admis les faits ou s'ils sont établis. Conformément à l'art. 354 al. 1 let. a CPP , le prévenu peut former opposition contre l'ordonnance pénale par écrit et dans les dix jours. Dans ce cas, le ministère public administre les autres preuves nécessaires au jugement de l'opposition (art. 355 al. 1 CPP). Après l'administration des preuves, il peut décider de maintenir l'ordonnance pénale, de classer la procédure, de rendre une nouvelle ordonnance pénale ou de porter l'accusation devant le tribunal de première instance (art. 355 al. 3 let. a à d CPP ). Il résulte de ces dispositions que lorsqu'une opposition a été formée à une ordonnance pénale, le ministère public reprend la procédure préliminaire et administre les preuves supplémentaires nécessaires. Après l'administration de celles-là, il peut décider de l'une des quatre options énumérées à l'art. 355 al. 3 CPP . Selon l'avis exprimé par un auteur ( Franz Riklin , in BK-StPO, n° 4 ad art. 355 CPP ), seuls trois cas de figure ne justifient pas le maintien de l'ordonnance pénale à ce stade de la procédure (art. 355 al. 3 let. a CPP ): (1) le ministère public constate, en raison d'un changement de l'état de fait et/ou de droit, que les infractions et/ou les sanctions retenues dans l'ordonnance pénale doivent être modifiées; (2) le ministère public qualifie différemment l'état de fait retenu dans celle-ci; (3) de nouvelles infractions sont découvertes. Dans les deux premiers cas de figure, le ministère public peut choisir de rendre une nouvelle ordonnance pénale susceptible à son tour d'opposition (art. 355 al. 3 let. c CPP ) ou de porter l'accusation devant le tribunal de première instance au moyen d'un acte d'accusation (art. 355 al. 3 let. d CPP ). Dans le troisième cas de figure, les nouvelles infractions découvertes devront faire l'objet d'une ouverture d'instruction (art. 309 CPP ) et elles pourront à leur tour faire l'objet d'une ordonnance pénale ou d'un acte d'accusation ( Franz Riklin , in BK-StPO, n° 5 ad art. 355 CPP). Un autre auteur soutient à son tour qu'une nouvelle ordonnance pénale ne peut être rendue, respectivement que l'accusation ne peut être portée devant le tribunal de première instance au moyen d'un acte d'accusation, qu'à la suite d'un changement de l'état de fait et/ou de droit entraînant une modification des infractions et/ou des sanctions à prononcer ( Niklaus Schmid , op. cit., n os 11 et 12 ad art. 355 CPP ). Cet avis est également partagé par d'autres auteurs ( Christian Schwarzenegger , in Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, Zurich 2010, n° 6 ad art. 355 CPP ; Gwladys Gilliéron/Martin Killias , in CR-CPP, n os 6 et 7 ad art. 355 CPP ; Michael Daphinoff , Das Strafbefehlsverfahren in der Schweizerischen Straprozessordnung, thèse, Zürich 2012, p. 572 et 673 s.).
Les avis de doctrine exposés ci-dessus semblent convaincants, de sorte que la Cour de céans se rallie à la position exprimée par ces auteurs. Il se justifie donc de retenir que lors d'une opposition à une ordonnance pénale, le ministère public ne peut, après avoir administré les autres preuves nécessaires au jugement de l'opposition, rendre une nouvelle ordonnance pénale (art. 355 al. 3 let. c CPP ) ou engager l'accusation devant le tribunal de première instance par un acte d'accusation (art. 355 al. 3 let. d CPP) qu'en cas d'un changement de l'état de fait et/ou de droit impliquant une modification des infractions et/ou des sanctions à prononcer. En l'absence de telles circonstances, l'ordonnance pénale prononcée initialement doit être maintenue (art. 355 al. 3 let. a CPP ), sous réserve d'un classement de la procédure (art. 355 al. 3 let. b CPP ).
2.2 En l'espèce, le MPC a rendu le 8 novembre 2012 une ordonnance pénale à l'encontre de A. pour tentative d'escroquerie et l'a condamné à une peine pécuniaire de 30 jours-amende avec sursis à l'exécution de la peine durant un délai d'épreuve de deux ans, ainsi qu'à une amende de CHF 300.--. A la suite de l'opposition formée le 19 novembre 2012, le MPC a engagé l'accusation devant la Cour de céans au moyen d'un acte d'accusation daté du 7 février 2013. Il a maintenu l'accusation de tentative d'escroquerie et les sanctions prononcées dans l'ordonnance pénale du 8 novembre 2012.
Comme cela a été relevé précédemment, le MPC n'a administré aucune preuve supplémentaire entre l'opposition à l'ordonnance pénale et la mise en accusation devant la Cour de céans. En l'absence de l'administration d'autres preuves, un changement de l'état de fait et/ou de droit n'a pas pu survenir entre l'opposition à l'ordonnance pénale et la mise en accusation s'agissant de l'accusation de tentative d'escroquerie. On constate d'ailleurs que l'état de fait relatif à cette tentative figurant au chiffre 1.1.1 de l'acte d'accusation est identique à celui retenu dans l'ordonnance pénale du 8 novembre 2012. La qualification juridique de ces faits n'a pas non plus été modifiée, l'accusation retenue à l'encontre de A. dans l'acte d'accusation étant la même que celle de l'ordonnance pénale. Quant au cas de figure de la découverte d'une nouvelle infraction depuis l'opposition à cette ordonnance pénale, il doit aussi être écarté, en l'absence de toute preuve supplémentaire administrée depuis lors.
2.3 Il résulte de ces éléments que les conditions à l'ouverture de l'action publique pour l'accusation de tentative d'escroquerie ne paraissent pas réalisées (art. 329 al. 1 let. b CPP ). Contrairement à ce que le MPC a soutenu, aucune circonstance objective ne semble justifier la mise en accusation pour cette infraction au moyen d'un acte d'accusation (art. 355 al. 3 let. d CPP ) en lieu et place du maintien de l'ordonnance pénale frappée d'opposition (art. 355 al. 3 let. a CPP ). L'entrée en matière sur l'acte d'accusation du 7 février 2013 priverait en outre A. de la possibilité de retirer son opposition jusqu'à l'issue des plaidoiries (art. 356 al. 3 CPP ), voire de demander l'exécution d'une procédure simplifiée (art. 358 al. 1 CPP ).
En l'état de la cause, un jugement au fond ne peut pas être rendu sur l'accusation de tentative d'escroquerie. Ce faisant, il convient de suspendre la procédure pour ce motif également (art. 329 al. 2 CPP ).
3. Au vu de ce qui précède, il se justifie de suspendre la procédure et de renvoyer l'accusation au MPC pour qu'il la corrige (art. 329 al. 2 CPP ), les exigences de l'art. 329 al. 1 let. b CPP , respectivement celles de l'art. 329 al. 1 let. c CPP , ne paraissant pas remplies. Partant, il ne se justifie pas de maintenir la cause devant la Cour de céans (art. 329 al. 3 CPP).
4. La présente décision est rendue sans frais (art. 421 al. 2 let. a CPP ).
5. Il n'est pas alloué de dépens.
Par ces motifs, la Cour prononce:
1. La procédure SK.2013.9 est suspendue.
2. L'accusation est renvoyée au Ministère public de la Confédération pour correction dans le sens des considérants.
3. L'affaire suspendue ne reste pas pendante devant la Cour de céans.
4. La présente décision est rendue sans frais.
5. Il n'est pas alloué de dépens.
Au nom de la Cour des affaires pénales
du Tribunal pénal fédéral
Le président Le greffier
Distribution (acte judiciaire):
- Ministère public de la Confédération, Monsieur Félix Reinmann, Procureur fédéral,
- Maître Giorgio Campa,
Voies de droit
Recours à la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral
Les ordonnances, les décisions et les actes de procédure de la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral, comme autorité de première instance (à l'exception de ceux concernant la direction de la procédure), peuvent faire l'objet d'un recours motivé et adressé par écrit dans le délai de 10 jours à la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (art. 393 al. 1 let. b et art. 394 ss CPP ; art. 37 al. 1 LOAP ).
Le recours peut être formé pour les motifs suivants: a. violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié; b. constatation incomplète ou erronée de faits; c. inopportunité (art. 393 al. 2 CPP ).
Recours au Tribunal fédéral
Les décisions préjudicielles et incidentes de la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral notifiées séparément peuvent faire peuvent faire l'objet d'un recours écrit auprès du Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète (art. 78 , art. 80 al. 1 , art. 93 ss . et art. 100 al. 1 LTF ).
Les décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 93 al. 1 LTF ).
Le recours peut être formé pour violation du droit fédéral ou du droit international (art. 95 let. a et b LTF). Le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 , et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF ).
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