Urteilsdetails des Bundesstrafgerichts
Instanz: | Bundesstrafgericht |
Abteilung: | Strafkammer |
Fallnummer: | SK.2013.6 |
Datum: | 24.04.2013 |
Leitsatz/Stichwort: | Requêtes en réparation du tort moral (art. 431 CPP) |
Schlagwörter | Apos;; Apos;a; étention; Apos;un; érant; édé; érants; Apos;il; édéral; Tribunal; été; énal; Maître; édure; Apos;une; être; Apos;ils; Apos;art; Apos;office; éans; Apos;au; éfense; énale; éparation; écision; Apos;indemnité; éfenseur; Apos;est; Apos;en; êtes |
Kommentar: | Stefan Wehrenberg, Schweizer, Basler Kommentar Schweizerische Strafprozessordnung, Art. 431 StPO, 2011 |
Entscheid des Bundesstrafgerichts
Bundesstrafgericht Tribunal pénal fédéral Tribunale penale federale Tribunal penal federal | |
Numéros des dossiers: SK.2013.3 /5/6 |
| | Décision du 24 avril 2013 Cour des affaires pénales |
| | Les juges pénaux fédéraux Jean-Luc Bacher, juge président, Walter Wüthrich et David Glassey, le greffier Stéphane Zenger |
| | A_3, actuellement détenu à l'Etablissement de détention La Promenade, 2300 La Chaux-de-Fonds, défendu d'office par Maître Christophe Piguet, et A_4, actuellement détenu à la Prison de Champ-Dollon, 1241 Puplinge, défendu d'office par Maître Sophie Rodieux, et A_2, actuellement détenu à la Prison de La Croisée, 1350 Orbe, défendu d'office par Maître Aude Bichovsky , et MinistÈre public de la ConfÉdÉration , représenté par Félix Reinmann, Procureur fédéral. |
| | Requêtes en réparation du tort moral (art. 431 CPP ) |
Faits:
A. Le 7 avril 2009, le Ministère public de la Confédération (ci-après: MPC) a ouvert une enquête de police judiciaire pour soupçon de participation à une organisation criminelle (art. 260 ter CP ) à l'encontre de plusieurs personnes. Cette enquête a ensuite été étendue à d'autres individus suspectés d'entretenir des liens avec l'organisation en question, en particulier à A_3, A_4 et A_2. Dans le cadre de cette enquête, A_3 et A_2 ont tous deux été arrêtés le 15 mars 2010. Ils se trouvent depuis lors en détention provisoire et pour des motifs de sûreté. Quant à A_4, il a été maintenu en détention provisoire du 15 septembre 2009 au 11 novembre 2009, du 16 février 2010 au 13 juillet 2010, puis dès le 5 avril 2011. Il se trouve actuellement en exécution de peine.
B. A_3, A_4 et A_2 ont été renvoyés en jugement devant la Cour de céans le 26 janvier 2012. Par jugement du 28 juin 2012 (cause SK.2012.2 ), la Cour de céans les a reconnus coupables de plusieurs infractions, dont la participation à une organisation criminelle ( art. 260 ter ch. 1 al. 1 CP). A_3 a notamment été condamné à une peine privative de liberté de 78 mois, sous déduction de 837 jours de détention provisoire et pour des motifs de sûreté. A_4 a été condamné à une peine privative de liberté de 51 mois, sous déduction de 657 jours de détention provisoire et pour des motifs de sûreté. En ce qui concerne A_2, il a été condamné à une peine privative de liberté de 90 mois, sous déduction de 837 jours de détention provisoire et pour des motifs de sûreté. La motivation écrite du jugement a été communiquée aux parties le 20 décembre 2012. A_3 et A_2 ont recouru à l'encontre de ce jugement auprès du Tribunal fédéral et les recours en matière pénale qu'ils ont adressés à cette autorité sont pendants. Quant à A_4, il n'a pas recouru à l'encontre de ce jugement, de sorte qu'il est entré en force en ce qui le concerne.
C. Par décision du 28 juin 2012 ( SN.2012.22 ), la Cour de céans a maintenu A_3, A_4 et A_2 en détention pour des motifs de sûreté afin de garantir l'exécution des peines (art. 231 al. 1 let. a CPP). Entre les 22 et 26 octobre 2012, ils se sont plaints du fait que leur détention serait devenue illicite dès le 29 septembre 2012, soit à l'échéance d'un délai de trois mois courant dès le 28 juin 2012. Considérant qu'ils demandaient leur mise en liberté immédiate, la Cour de céans a, par décision du 30 octobre 2012 ( SN.2012.26 ), rejeté ces requêtes et a maintenu les prénommés en détention pour des motifs de sûreté, en application de l'art. 231 al. 1 let. a CPP.
A_3, A_4 et A_2 ont contesté cette décision auprès de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, laquelle a déclaré leurs recours irrecevables par décision du 11 décembre 2012 ( BH.2012.7 /8/9). Par arrêt du 17 janvier 2013 (cause 1B_755/2012 ), respectivement du 28 janvier 2013 (causes 1B_766/2012 et 1B_10/2013 ), le Tribunal fédéral a partiellement admis les recours en matière pénale formés par les prénommés à l'encontre de la décision de la Cour des plaintes et a constaté que la détention qu'ils ont subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 ne reposait pas sur un titre valable. Par décision du 29 janvier 2013 ( SN.2013.2 ), la Cour de céans a contrôlé d'office la détention pour des motifs de sûreté des prénommés et les a maintenus en détention pour une durée de six mois, soit jusqu'au 29 juillet 2013, en application de l'art. 231 al. 1 let. a CPP . Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours auprès de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral.
D. Le 28 janvier 2013, A_3 a adressé à la Cour de céans une requête tendant à l'octroi d'un montant de CHF 8'000.-- pour la détention subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012. Il a chiffré cette détention à 32 jours au total et a requis, sur la base de l'art. 431 al. 2 CPP, l'allocation d'une indemnité journalière de CHF 250.--. Les 4 et 5 février 2013, A_4 et A_2 ont chacun adressé à la Cour de céans une requête identique contenant la même motivation et ils ont aussi conclu à l'octroi d'un montant de CHF 8'000.-- chacun. Ces requêtes ont été enregistrées respectivement sous les causes SK.2013.3 (A_3), SK.2013.5 (A_4) et SK.2013.6 (A_2).
E. Le 7 février 2013, la Cour de céans a invité les prénommés à préciser si le montant de CHF 8'000.-- auquel ils ont conclu correspondait à une indemnisation ou à une réparation du tort moral pour la détention subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012. La Cour de céans les a invités à indiquer leurs moyens de preuve et les a avisés qu'elle statuerait sur la base du dossier, après un échange d'écritures avec le MPC, à moins que les intéressés ne sollicitent la tenue de débats.
Le 12 février 2013, A_3 a précisé requérir le versement d'un montant de CHF 8'000.-- en réparation du tort moral, tout en indiquant ne pas avoir de moyen de preuve à faire valoir et renoncer à la tenue de débats. Il a également sollicité la désignation de Maître Christophe Piguet en qualité de défenseur d'office.
Le 15 février 2013, A_4 a aussi précisé requérir le versement d'un montant de CHF 8'000.-- au titre de tort moral. Il a sollicité que ses frais de défense soient mis à la charge de la Confédération, en particulier ceux relatifs à la procédure en constatation de l'illicéité de la détention subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012, et que Maître Sophie Rodieux soit désignée en qualité de défenseur d'office. Il n'a pas requis la tenue de débats et n'a pas soumis de moyen de preuve à la Cour de céans.
A son tour, A_2 a, le 18 février 2013, allégué requérir le versement d'un montant de CHF 8'000.-- en réparation du tort moral. Il a également sollicité que ses frais de défense soient pris en charge par la Confédération et que Maître Aude Bichovsky soit désignée en qualité de défenseur d'office, tout en renonçant à la tenue de débats. Il n'a pas allégué de moyen de preuve.
F. Le 6 mars 2013, le MPC a déposé des observations écrites au sujet des requêtes précitées. A titre liminaire, il a sollicité la suspension de la procédure s'agissant des requêtes de A_3 et A_2 jusqu'à droit connu sur les recours en matière pénale qu'ils ont déposés à l'encontre du jugement du 28 juin 2012. Sur le fond, le MPC a d'abord conclu au rejet des requêtes en indiquant que les conditions de l'art. 431 al. 2 CPP invoqué par les prévenus n'étaient pas réalisées. En supposant ensuite que l'art. 431 al. 1 CPP soit applicable, le MPC a estimé que l'octroi d'une somme d'argent pour tort moral sur la base de cette disposition devait être refusée. D'une part, il a considéré que la violation des règles de procédure relatives à la détention des prévenus entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 avait été réparée de façon suffisante par la constatation de cette irrégularité par le Tribunal fédéral. D'autre part, il a considéré que la détention des prévenus était justifiée au regard des peines prononcées. Enfin, en cas d'octroi d'une indemnité pour tort moral, le MPC a conclu au séquestre de celle-ci pour garantir le paiement des frais de procédure.
G. Par réplique écrite du 12 mars 2013, A_3 s'est opposé à la suspension de la procédure au motif que les faits relatifs à l'irrégularité de la détention subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 étaient suffisamment établis. Il a estimé que l'art. 431 CPP était applicable à sa requête sans qu'une distinction entre l'alinéa premier et second de cette disposition ne soit nécessaire. Il a considéré que le constat de l'irrégularité de la détention par le Tribunal fédéral n'était pas suffisant à réparer la gravité de cette irrégularité et a maintenu ses conclusions quant à l'octroi d'une somme d'argent en réparation du tort moral, tout en s'opposant au séquestre de celle-ci.
A_4 a répliqué à son tour le 22 mars 2013. Il a estimé que seul l'art. 431 al. 1 CPP était applicable à sa requête. Il a conclu à l'admission de celle-ci et s'est opposé au séquestre de l'indemnité pour tort moral, respectivement à sa compensation avec les frais de procédure.
A_2 a répliqué le 3 avril 2013. Il s'est lui-aussi opposé à la suspension de la procédure et a estimé que seul l'art. 431 al. 1 CPP était applicable à sa requête. A l'instar de A_3, il a considéré que le constat de l'irrégularité de la détention par le Tribunal fédéral ne suffisait pas à réparer cette irrégularité. Il a maintenu ses conclusions et s'est opposé pour le surplus au séquestre de l'indemnité pour tort moral et à sa compensation avec les frais de procédure.
H. Le 9 avril 2013, le MPC a renoncé à dupliquer. Le lendemain, la Cour de céans a avisé les parties de la clôture de l'échange d'écritures et qu'elle allait statuer par écrit sur la base du dossier, la tenue de débats n'ayant pas été requise.
Dans la mesure où d'autres précisions de faits sont nécessaires, elles seront apportées dans les considérants qui suivent.
La Cour considère en droit:
1. Les requêtes en réparation du tort moral déposées par A_3, A_4 et A_2 (ci-après: les requérants) relèvent des mêmes faits et les questions soulevées sont semblables. Les requérants n'ayant pas d'intérêts contradictoires qui commanderaient des prononcés distincts, il se justifie de joindre les causes SK.2013.3 , SK.2013.5 et SK.2013.6 pour statuer dans une seule et même décision sur les prétentions formulées.
2. Compétence matérielle
2.1 A teneur de l'art. 431 al. 1 CPP , si le prévenu a, de manière illicite, fait l'objet d'une mesure de contrainte, l'autorité pénale lui alloue une juste indemnité et réparation du tort moral. L'autorité pénale compétente est en principe celle se prononçant sur l'illicéité de la mesure de contrainte, soit l'autorité de recours. Le prévenu peut aussi adresser sa demande à l'autorité de jugement, en qualité de première instance, après que l'autorité de recours ait constaté l'illicéité d'une mesure de contrainte ordonnée par la première autorité ( Cédric Mizel/Valentin Rétornaz , in Commentaire romand Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011 [ci-après: CR-CPP], n° 13 ad art. 431 CPP).
En l'occurrence, les requêtes en réparation du tort moral déposées se fondent, comme cela sera relevé au considérant 3 ci-dessous, sur l'art. 431 al. 1 CPP et reposent sur les décisions rendues les 28 juin 2012 et 30 octobre 2012 par la Cour de céans, en qualité de tribunal de première instance ( art. 231 al. 1 let. a CPP ). L'irrégularité de la détention qu'ils ont effectuée entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 ayant été constatée par le Tribunal fédéral, la compétence matérielle pour statuer sur les requêtes formulées est dévolue à la Cour de céans, en tant que première instance.
2.2 A titre préalable, le MPC a requis la suspension de la procédure en ce qui concernait les requêtes déposées par A_3 et A_2 jusqu'à droit connu sur les recours en matière pénale qu'ils ont adressés au Tribunal fédéral à l'encontre du jugement rendu le 28 juin 2012 par la Cour de céans. Le MPC a justifié cette demande de suspension en exposant qu'il n'est pas possible de se prononcer en connaissance de cause sur leurs requêtes tant que le jugement en question n'est pas entré en force. Cette argumentation tombe à faux. Les faits à la base des demandes déposées sont suffisamment établis et l'irrégularité de la détention subie par les requérants entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 a été constatée par le Tribunal fédéral. A cela s'ajoute que, comme le relève plus loin la Cour de céans, la personne qui a fait l'objet d'une mesure illicite au sens de l'art. 431 CPP doit être indemnisée indépendamment de l'issue de la procédure pénale. Le sort des recours adressés au Tribunal fédéral à l'encontre du jugement du 28 juin 2012 n'est dès lors pas déterminant pour les présentes causes. La suspension de la procédure ne se justifie donc pas et la conclusion formulée par le MPC doit être rejetée. Par conséquent, il convient d'entrer en matière sur les requêtes en réparation du tort moral qui sont en cause.
3. Mesures de contrainte illicites (art. 431 CPP )
3.1 Selon l'art. 431 al. 1 CPP , si le prévenu a, de manière illicite, fait l'objet de mesures de contrainte, l'autorité pénale lui alloue une juste indemnité et réparation du tort moral. Les mesures de contrainte visent tous les actes de procédure au sens de l'art. 196 CPP ( Yvona Griesser , in Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, Zürich 2010 [ci-après: Kommentar-StPO], n° 1 ad art. 431 CPP ). L'ensemble des mesures prévues par les art. 201 à 298 CPP , parmi lesquelles la détention provisoire et pour des motifs de sûreté au sens des art. 220 ss CPP, sont ainsi concernées ( Stefan Wehrenberg/Irene Bernhard , in Basler Kommentar Schweizerische Strafprozessordnung, Bâle 2011 [ci-après: BK-StPO], n° 4 ad art. 431 CPP ). En matière de privation de liberté, les mesures illicites sont celles prises en violation des règles légales relatives à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté ( Niklaus Schmid , Schweizerische Strafprozessordnung, Praxiskommentar, Zürich/St.Gallen 2009, n° 1 ad art. 431 CPP ; Yvona Griesser , in Kommentar-StPO, n° 3 ad art. 431 CPP ; Gérard Piquerez/Alain Macaluso , Procédure pénale suisse, 3 e éd., Zürich 2011, n° 2293). Cela comprend aussi l'absence d'une décision prise selon les formes prescrites par la loi au sens des art. 31 al. 1 Cst. et 5 par. 1 CEDH (arrêts du Tribunal fédéral 1B_6/2012 du 27 janvier 2012, consid. 3.2, et 1B_683/2011 du 5 janvier 2012, consid. 2.2.1).
La personne qui a fait l'objet d'une mesure de contrainte illicite doit être indemnisée indépendamment de l'issue de la procédure pénale (arrêt du Tribunal fédéral 6B_365/2011 du 22 septembre 2011, consid. 3.2 et les auteurs cités). Le droit à l'indemnisation découle non seulement de l'art. 431 al. 1 CPP , mais aussi directement de l'art. 5 par. 5 CEDH ( Andreas Donatsch/Christian Schwarzenegger/Wolfgang Wohlers , Strafprozessrecht, Zürich 2010, p. 176 s.; Yvona Griesser , in Kommentar-StPO, n° 3 ad art. 431 CPP; Gérard Piquerez/Alain Macaluso, op. cit., n os 2295 ss; arrêt du Tribunal fédéral 1B_351/2012 du 20 septembre 2012, consid. 2.3.2). En effet, l'imputation de la détention avant jugement sur la peine prononcée ne suffit pas, à elle seule, pour réparer cette illicéité. Dans un tel cas de figure, la jurisprudence découlant de l'art. 5 par. 5 CEDH impose qu'une indemnité soit versée en plus de l'imputation de la détention avant jugement (arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme Ringeisen c. Autriche [article 50] du 22 juin 1972, requête n° 2614/65, par. 21; Stefan Wehrenberg/Irene Bernhard , in BK-StPO, n os 17 et 26 ad art. 431 CPP ; Peter Popp/Andreas Seitz , Ausgleich von Untersuchungshaft, in Anwalts Revue 4/2010, p. 163 ss, spéc. p. 170; Jochen Frowein/Wolfgang Peukert , EMRK-Kommentar, 3 e éd., Kehl am Rhein 2009, n os 147 ss ad art. 5 CEDH).
3.2 En l'occurrence, par décision du 28 juin 2012, la Cour de céans a maintenu les requérants en détention pour des motifs de sûreté sans limiter la durée de cette détention dans le temps, afin de garantir l'exécution des peines prononcées par jugement du même jour (art. 231 al. 1 let. a CPP). Le 30 octobre 2012, elle a fait de même en décidant une nouvelle fois du maintien en détention des requérants. Dans le cadre des arrêts prononcés les 17 et 28 janvier 2013 (causes 1B_755/2012 , 1B_766/2012 et 1B_10/2013 ), le Tribunal fédéral a considéré que la décision du 28 juin 2012 devait s'interpréter comme limitant à trois mois la durée de la détention pour des motifs de sûreté prononcée le même jour, en appliquant par analogie les art. 227 et 229 CPP , et qu'il appartenait à la Cour de céans, à l'échéance de ce délai de trois mois, soit dès le 29 septembre 2012, de réexaminer d'office la détention des requérants et de la prolonger le cas échéant. Cette prolongation n'ayant été prononcée que le 30 octobre 2012, le Tribunal fédéral a constaté que la détention subie par les requérants entre ces deux dates ne reposait pas sur un titre valable et qu'elle constituait dès lors une mesure de contrainte illicite, au sens de ce qui a été exposé précédemment.
Dans leurs demandes en réparation du tort moral, les requérants se sont tantôt référés à l'art. 431 al. 1 CPP , tantôt à l'art. 431 al. 2 CPP , pour justifier leurs prétentions. Comme cela a été relevé auparavant, l'art. 431 al. 1 CPP pose le principe du droit à une indemnisation en cas de mesures de contrainte illicites. Quant à l'art. 431 al. 2 CPP , il règle le cas de figure de la détention d'une durée excessive, c'est-à-dire lorsque la durée de la détention provisoire ou de la détention pour des motifs de sûreté excède celle de la peine à laquelle le prévenu est condamné. Dans un tel cas, la durée excessive doit d'abord être imputée sur les sanctions prononcées à raison d'autres infractions; ce n'est que si cette imputation ne peut pas être opérée que la durée excessive doit être indemnisée ( Stefan Wehrenberg/Irene Bernhard , in BK-StPO, n os 21 s. ad art. 431 CPP; arrêt du Tribunal fédéral 1B_179/2011 du 17 juin 2011, consid. 4.2 ). Cette hypothèse n'est pas réalisée dans le cas d'espèce. En effet, A_3 et A_2 ont été condamnés le 28 juin 2012 à des peines privatives de liberté de 78 mois et 90 mois et ce jugement n'est, pour l'heure, pas entré en force en ce qui les concerne. Après imputation de la détention provisoire et pour des motifs de sûreté qu'ils ont effectuée jusqu'à présent (art. 220 al. 1 et 2 CPP ), laquelle comprend le laps de temps écoulé entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012, la Cour ne peut que constater que la durée de cette détention n'excède, de loin pas, celle des peines privatives de liberté prononcées à leur encontre. Cette situation ne se présenterait pour eux, d'un point de vue purement théorique, que dans le courant de l'année 2016, respectivement de l'année 2017, soit à l'échéance des peines précitées. S'agissant de A_4, il se trouve en exécution de la peine depuis le 28 juin 2012 dans la mesure où il n'a pas recouru contre le jugement prononcé le même jour (art. 220 al. 2 et art. 437 al. 2 CPP). La peine privative de liberté de 51 mois à laquelle il a été condamné ce jour-là excède largement la détention avant jugement de 657 jours qu'il a effectuée. Ce résultat ne serait pas différent si la Cour devait également tenir compte, en ce qui le concerne, de la période qui s'est écoulée entre le prononcé du jugement et l'expiration du délai de recours au Tribunal fédéral (art. 437 al. 1 let. a CPP ).
Partant, il résulte de ce qui précède que les conditions de l'art. 431 al. 2 CPP ne sont pas réalisées et que c'est à tort que les requérants se sont référés à cette disposition. Leurs requêtes doivent en revanche s'apprécier sous l'angle de l'art. 431 al. 1 CPP , le caractère illicite de la détention qu'ils ont subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 ayant été constaté par le Tribunal fédéral.
3.3 L'art. 431 al. 1 CPP dispose qu'en cas de mesure de contrainte illicite, l'autorité pénale alloue au prévenu une juste indemnité et réparation du tort moral. L'indemnité pour tort moral est destinée à réparer un dommage qui ne peut que difficilement être réduit à une simple somme d'argent. L'ampleur de la réparation morale dépend avant tout de la gravité des souffrances physiques ou psychiques consécutives à l'atteinte subie et de la possibilité d'adoucir sensiblement, par le versement d'une somme d'argent, la douleur morale qui en résulte. L'indemnité allouée doit être équitable. En d'autres termes, elle doit être proportionnée à l'intensité des souffrances morales causées à la victime (ATF 130 III 699 consid. 5.1 p. 704 s. et les arrêts cités). La fixation du tort moral procède d'une appréciation des circonstances et l'autorité compétente bénéficie d'un pouvoir d'appréciation en la matière (ATF 129 IV 22 consid. 7.2 p. 36 s.; Stefan Wehrenberg/Irene Bernhard , in BK-StPO, n° 11 ad art. 431 CPP; Yvona Griesser , in Kommentar-StPO, n os 12 s. ad art. 431 CPP et les réf. citées).
L'évaluation du tort moral subi à la suite d'une privation de liberté s'opère en deux temps. Le tort moral doit d'abord être calculé sur la base d'une indemnité journalière, ce qui permet d'obtenir une estimation de l'indemnisation à verser. Ensuite, il convient de déterminer s'il existe des circonstances particulières justifiant le versement d'un montant inférieur ou supérieur (arrêt du Tribunal fédéral 6B_574/2010 du 31 janvier 2011, consid. 2.3). Constituent notamment de telles circonstances les motifs ayant conduit à la privation de liberté du prévenu et la durée de la détention, la gravité des actes qui ont été reprochés au prévenu, la sensibilité de ce dernier à la détention subie, ainsi que les effets de celle-ci sur son environnement, ses liens sociaux et sa réputation ( Klaus Hütte/Petra Ducksch/Kayum Guerrero , Die Genugtuung, 3 e éd., Zürich 2005, n os 10.5 ss, p. I/105 s.; Cédric Mizel/Valentin Rétornaz , in CR-CPP, n° 48 ad art. 429 CPP ; Stefan Wehrenberg/Irene Bernhard , in BK-StPO, n° 11 ad art. 431 CPP). Toute comparaison avec d'autres affaires ne peut se faire qu'avec prudence puisque le tort moral touche aux sentiments d'une personne déterminée dans une situation donnée et que chacun réagit différemment face au malheur qui le frappe; cela étant, une comparaison n'est pas dépourvue d'intérêt et peut être, suivant les circonstances, un élément utile d'orientation (ATF 130 III 699 consid. 5.1 p. 705). En matière de privation de liberté de courte durée, c'est-à-dire d'une durée inférieure à quelques mois, certaines juridictions cantonales ont considéré qu'une indemnité de CHF 100.-- par jour de détention était appropriée pour réparer le tort moral subi (Repertorio di giurisprudenza patria 1998 n° 126 consid. 5.1 p. 381; BJP 2002 n° 212 et l'arrêt du 16 février 1999 du Tribunal pénal du canton de Bâle-Ville cité; arrêt du 24 mars 2003 de la Chambre pénale de la Cour de justice de Genève, cité dans l'arrêt du Tribunal fédéral 1P.264/2003 du 14 juillet 2003, consid. 3.3; arrêt AARP/262/2012 du 31 août 2012 de la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de Genève, consid. 1.3.1 et la jurisprudence cantonale citée). D'autres ont estimé que cette indemnité journalière devait être fixée à CHF 200.--, voire plus en fonction des circonstances ( Klaus Hütte/Petra Ducksch/Kayum Guerrero , op. cit., tabelle n° XI, n os 1 ss et les arrêts cantonaux cités; Robert Hauser/Erhard Schweri/Karl Hartmann , Schweizerisches Straprozessrecht, 6 e éd., Bâle 2005, § 109, n° 8a et les arrêts cantonaux cités; Ruth Wallimann Baur , Entschädigung und Genugtuung durch den Staat an unschuldig Verfolgte im ordentlichen zürcherischen Untersuchungsverfahren, Diss. Zürich 1998, p. 193 ss et les arrêts cités). Pour sa part, le Tribunal fédéral a estimé qu'une indemnité journalière de CHF 200.-- en cas de détention de courte durée constituait une indemnité appropriée en réparation du tort moral, à condition qu'il n'existe pas de circonstances particulières qui pourraient fonder le versement d'un montant inférieur ou supérieur (arrêt 6B_745/2009 du 12 novembre 2009, consid. 7.1). Le Tribunal fédéral a confirmé cette jurisprudence à plusieurs reprises (arrêts 6B_574/2010 du 31 janvier 2011, consid. 2.3; 6B_547/2011 du 3 février 2012, consid. 2; 6B_111/2012 du 15 mai 2012, consid. 4.2).
Dans le cas présent, l'indemnité journalière de CHF 200.-- ressortant de la jurisprudence du Tribunal fédéral peut servir d'élément d'orientation pour la réparation du tort moral, la détention illicite subie par les requérants entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 étant de courte durée. Il conviendra toutefois d'examiner si des circonstances particulières au cas d'espèce justifient le versement d'une indemnité journalière inférieure ou supérieure. En effet, il résulte de la jurisprudence précitée que la fixation de l'indemnisation relève du pouvoir d'appréciation de l'autorité compétente et que le droit fédéral n'impose pas de montant plancher.
3.4 Les requérants ont chiffré la détention illicite qu'ils ont subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 à 32 jours au total. Sur ce point, il convient de relever que le Tribunal fédéral a retenu que la détention ordonnée le 28 juin 2012 était limitée à une période de trois mois et que cette période était arrivée à échéance le 29 septembre 2012. L'illicéité de la détention subie par les requérants a donc commencé à cette date. Elle a en revanche cessé le 30 octobre 2012. En effet, ce jour-là, la Cour de céans a prolongé la détention des requérants au moyen de la décision prononcée le même jour. Le 30 octobre 2012 vaut dès lors premier jour de détention de la prolongation ainsi ordonnée et il ne peut pas être pris en compte dans le calcul de la durée de la détention illicite ( Christoph Mettler , in Basler Kommentar Strafrecht I, 2 e éd., Bâle 2007, n° 33 ad art. 51 CP et les réf.). En conséquence, la détention illicite des requérants entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 se chiffre à 31 jours au total, et non à 32 jours.
3.5 Il est établi que la détention de 31 jours effectuée par les requérants constitue une mesure de contrainte illicite au sens de l'art. 431 al. 1 CPP . Cette détention représente une atteinte à leur personnalité dans la mesure où ils ont été privés de leur liberté sans titre valable. Une indemnité pour tort moral doit leur être allouée à ce titre, le droit à l'indemnisation découlant tant de la disposition précitée que de l'art. 5 par. 5 CEDH (cf. consid. 3.1 ci-dessus). Le simple constat de l'irrégularité de la détention subie ne suffit dès lors pas à réparer la violation des règles procédurales en la matière.
3.5.1 Dans le cadre de leurs demandes, les requérants ont conclu à l'octroi d'une indemnité journalière de CHF 250.-- pour la détention illicite subie. A l'appui de leurs écritures, ils se sont référés à la jurisprudence du Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud (TACC) rendue sous l'empire du Code de procédure pénale cantonal vaudois, qui n'aurait pas été critiquée par le Tribunal fédéral (cf. l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_595/2007 du 11 mars 2008 mentionné par l'un des requérants). La jurisprudence cantonale évoquée par les requérants fixe effectivement à CHF 250.-- l'indemnité journalière en cas de détention injustifiée. Selon cette jurisprudence (TACC du 15 mars 2010/126 et les trois arrêts cantonaux cités), cette indemnité comprend toutefois la réparation du dommage matériel et du tort moral consécutif à une détention injustifiée. Il en découle que ce montant forfaitaire englobe non seulement la réparation du tort moral à proprement parler, mais également celle du dommage matériel résultant de la détention effectuée. Dans la mesure où, comme cela sera exposé au considérant 3.5.2 ci-après, les requérants n'ont subi aucun dommage matériel du fait des 31 jours de détention illicite, il ne se justifie pas de s'écarter, lors de la fixation de l'indemnité pour tort moral leur revenant, des critères mentionnés au considérant 3.3, étant rappelé que le droit fédéral n'impose pas de seuil minimal en la matière.
3.5.2 Il ressort des considérants du jugement du 28 juin 2012 relatifs à la situation personnelle des requérants qu'ils étaient sans emploi et qu'aucun d'entre eux n'exerçait d'activité lucrative légale avant qu'ils ne soient arrêtés et placés en détention. Le 29 septembre 2012, ils se trouvaient déjà, de manière conforme à la loi, en détention provisoire et pour des motifs de sûreté depuis 30 mois s'agissant de A_3 et A_2, respectivement depuis 18 mois s'agissant de A_4 pour la période courant dès le 5 avril 2011. De même, la Cour a constaté à plusieurs reprises, à savoir non seulement lors du jugement prononcé le 28 juin 2012, mais également dans le cadre des décisions des 28 juin 2012, 30 octobre 2012 et 29 janvier 2013 prolongeant leur détention, que les requérants se trouvaient en situation irrégulière en Suisse, en l'absence d'un titre de séjour valable, et qu'ils ne possédaient pas d'attaches particulières ou de perspectives d'avenir concrètes dans ce pays. Dans ces conditions, ils n'ont pas pu subir de préjudice matériel du fait des 31 jours de détention illicite et ils n'ont avancé aucun argument qui permettrait de le retenir. Un tel préjudice est d'autant moins envisageable que les 31 jours de détention illicite seront imputés sur leurs peines en application de l'art. 51 CP .
3.5.3 Bien que, d'un point de vue formel, la détention subie par les requérants entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 n'a pas reposé sur un titre valable, il convient de souligner que les conditions matérielles de leur détention durant ce laps de temps étaient réunies. D'une part, les arrêts des 17 et 28 janvier 2013 du Tribunal fédéral n'ont porté que sur l'irrégularité formelle découlant de l'absence d'un titre de détention et rien ne permet de supposer, à la lecture de ces arrêts, que les conditions matérielles de la détention n'étaient pas réalisées, ce que les requérants ne soutiennent même pas. D'autre part, la Cour de céans a inlassablement constaté, dans le cadre des décisions prolongeant la détention des requérants, que ces derniers présentaient un risque de fuite concret et que leur détention était justifiée pour garantir l'exécution des peines prononcées, en l'absence de toute mesure de substitution possible. Ces constatations factuelles n'ont jamais été infirmées, de sorte qu'elles peuvent être considérées comme établies. A cela s'ajoute que, même si les requérants avaient été relâchés entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012, ils n'auraient pas recouvré la liberté pour autant. En effet, compte tenu de leurs situations personnelles, ils auraient été placés immédiatement en détention en vue de leur expulsion du territoire suisse, un accord de réadmission étant en vigueur depuis le 1 er septembre 2005 entre la Suisse et la Géorgie, pays dont ils sont les ressortissants. D'ailleurs, l'un d'entre eux, à savoir A_4, a déjà fait l'objet d'une pareille mesure d'éloignement vers son pays d'origine le 13 juillet 2010.
D'autres circonstances méritent également d'être relevées. Comparés aux peines privatives de liberté auxquelles les requérants ont été condamnés le 28 juin 2012 et à la durée de la détention qu'ils ont légalement effectuée jusqu'à ce jour, les 31 jours de détention illicite effectués entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 représentent un très court laps de temps. Au chapitre des motifs ayant conduit à la privation de liberté des requérants, il se justifie de rappeler que ces derniers ont été soupçonnés puis accusés, conjointement avec un quatrième comparse, d'entretenir des liens avec une organisation criminelle, ce qui constitue une accusation grave. Après avoir procédé à un examen complet en faits et en droit, la Cour de céans a estimé que les actes reprochés aux requérants étaient fondés et elle les a reconnus coupables de plusieurs infractions, dont la participation à une organisation criminelle au sens de l'art. 260 ter ch. 1 al. 1 CP . Le jugement prononcé le 28 juin 2012 est par ailleurs devenu exécutoire pour A_4. Les circonstances du cas d'espèce diffèrent dès lors notablement de la jurisprudence cantonale évoquée par les requérants, laquelle ne concerne que l'octroi d'une indemnité au prévenu libéré des fins de la poursuite pénale ensuite d'un acquittement ou d'un non-lieu.
Il est également douteux que la détention subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 ait pu affecter l'environnement et les liens sociaux des requérants. En effet, ils ne possèdent pas d'attaches particulières en Suisse et ils n'ont pas évoqué l'existence de liens sociaux ou professionnels importants dans ce pays. Il serait d'ailleurs peu vraisemblable qu'ils aient pu nouer de tels liens depuis leurs lieux de détention respectifs. Par conséquent, la détention illicite n'a pas eu pour effet de les priver d'un quelconque réseau social ou de les arracher à un environnement professionnel stable.
Quant à la réputation des requérants, celle-ci est mauvaise étant donné qu'ils possèdent tous de nombreux antécédents pénaux et que la Cour de céans est parvenue à la conclusion, dans son jugement du 28 juin 2012, que leur présence en Suisse a été principalement commandée par la nature délictuelle de leurs agissements. La détention illicite subie n'a donc pas pu entacher leur réputation, loin s'en faut.
Les 31 jours de détention effectués entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 n'ont pas non plus représenté une expérience nouvelle pour les requérants, vu qu'ils étaient déjà incarcérés depuis de longs mois avant le 29 septembre 2012. De même, leurs antécédents pénaux - tels qu'exposés dans le jugement du 28 juin 2012 - indiquent qu'ils ont déjà purgé des peines privatives de liberté dans le cadre d'autres procédures pénales que celle engagée par le MPC devant la Cour de céans. Dans ces circonstances, la détention qu'ils ont effectuée entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 ne peut certainement pas être qualifiée d'expérience singulière ou particulièrement marquante en ce qui les concerne.
Il résulte de ce qui précède qu'il n'existe pas de circonstances particulières au cas d'espèce qui pourraient fonder une augmentation de l'indemnité journalière de base découlant de la jurisprudence fédérale mentionnée au considérant 3.3. Au contraire, les constatations objectives qui viennent d'être faites commandent une réduction significative de cette indemnité, faute de tout effet négatif concret sur la situation personnelle des requérants de la détention qu'ils ont subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012.
3.5.4 Il a été relevé au considérant 3.3 que l'indemnité allouée doit être proportionnée à l'intensité des souffrances morales. Dès lors, le montant alloué doit tenir compte de la souffrance effectivement ressentie par le prévenu ( Cédric Genton/Camille Perrier , Les prétentions du prévenu en indemnités et en réparation du tort moral, in Jusletter 13 février 2012, n° 38, p. 7 et les arrêts cités). En l'espèce, il ne ressort pas des faits de la cause que la détention subie par les requérants entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 ait eu des effets négatifs sur leur intégrité physique ou psychique, ou encore qu'ils aient ressenti une souffrance morale du fait de cette détention. En effet, ils n'ont pas avancé le moindre élément factuel dont la Cour pourrait déduire qu'ils ont ressenti la détention illicite comme étant subjectivement grave. En particulier, ils n'ont pas allégué avoir ressenti de douleur morale ou d'autres souffrances consécutives à cette détention. Le tort moral évoqué par les requérants suppose pourtant qu'ils aient eu conscience d'être détenus sans titre valable dès le 29 septembre 2012 et qu'ils en aient été affectés d'un point de vue subjectif. Or, ce sentiment d'injustice, si tant est qu'il ait existé, ne pouvait être que fort ténu puisque que les requérants se sont vus infliger, peu de temps auparavant, des peines privatives de liberté relativement longues. Ils pouvaient dès lors comprendre qu'une simple irrégularité formelle concernant le titre de leur détention n'allait en aucun cas leur valoir d'être remis en liberté, leur maintien en détention au moment du jugement ayant précisément été décidé pour garantir l'exécution des peines prononcées. Le fait qu'ils ne se soient plaints qu'à partir du 22 octobre 2012 de l'illicéité de la détention subie dès le 29 septembre 2012, soit plus de 23 jours après son commencement, constitue un indice supplémentaire qu'ils n'ont pas ressenti de souffrance morale particulière du fait de cette détention. Leur attitude donne plutôt à comprendre que, si souffrance morale il y a eu du fait de cette illicéité, elle n'avait rien d'aigüe. Autrement, on aurait pu attendre d'eux qu'ils soulèvent la question de l'illicéité de leur détention très peu de temps après l'échéance du délai de trois mois courant dès le 28 juin 2012. Dans ces conditions, il n'apparaît pas que les requérants aient été sensibles à la détention illicite subie, ni qu'ils aient ressenti une souffrance morale effective du fait de cette détention. Rien ne permet non plus de supposer que cela a été le cas, en l'absence de preuve concrète en ce sens. Ces circonstances conduisent aussi à une réduction substantielle de l'indemnité journalière susmentionnée.
3.5.5 Le seul préjudice dont les requérants peuvent se prévaloir est celui d'avoir dû saisir la Cour de céans pour qu'elle se prononce sur les conditions de leur détention après l'échéance d'un délai de trois mois courant dès le 28 juin 2012, alors qu'elle aurait dû procéder d'office à ce contrôle. Ce préjudice se confond cependant avec un grief de nature purement formelle et ses conséquences sont des plus relatives. En effet, les conditions matérielles de la détention des requérants entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 étant réunies, un contrôle d'office de ces conditions par la Cour de céans à l'échéance du délai précité n'aurait pu aboutir qu'à la prolongation de leur détention, comme cela a d'ailleurs été le cas par la suite. De surcroît, si les requérants avaient vraiment souffert de l'absence d'un contrôle régulier tous les trois mois des conditions de leur détention, ils auraient logiquement dû contester la prolongation de leur détention pour une durée de six mois décidée le 29 janvier 2013, ce qu'ils n'ont pas fait.
En définitive, les constatations objectives formulées auparavant et l'absence d'une souffrance morale effective du fait de la détention illicite font que l'indemnité pour tort moral revenant aux requérants ne peut être que de très faible ampleur. Si le préjudice susdit justifie l'allocation d'une indemnité journalière, celle-ci ne peut être que symbolique, faute de tout effet négatif concret sur la situation personnelle des requérants. Dans ces circonstances, il se justifie d'arrêter l'indemnité journalière aux alentours de CHF 10.--, ce qui paraît suffisant et équitable pour réparer tout tort moral.
3.6 Fondé sur ce qui précède, il convient d'allouer à chacun des requérants un montant de CHF 300.-- au titre de tort moral pour la détention subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012. Les requérants n'ayant pas requis l'octroi d'un intérêt compensatoire, cette indemnité leur est allouée sans intérêts.
4. A teneur de l'art. 442 al. 4 CPP , les autorités pénales peuvent compenser les créances portant sur des frais de procédure avec les indemnités accordées à la partie débitrice dans la même procédure pénale et avec des valeurs séquestrées. Cette disposition ne permet toutefois pas de procéder à la compensation entre les frais de procédure et les indemnités allouées en réparation du tort moral (Message, p. 1318; Benjamin F. Brägger , in BK-StPO, n° 2 ad art. 442 CPP ; Michel Perrin , in CR-CPP, n° 10 ad art. 442 CPP ; Niklaus Schmid , op. cit., n° 7 ad art. 442 CPP ). Par conséquent, il n'y a pas lieu de compenser l'indemnité en réparation du tort moral allouée aux requérants avec les frais de procédure mis à leur charge dans le cadre du jugement du 28 juin 2012.
5. Dans le cadre de ses conclusions, A_4 a requis que ses frais de défense relatifs à la procédure en constatation de l'illicéité soient mis à la charge de l'Etat. Il convient de relever que son conseil a déjà été indemnisé à concurrence de CHF 3'000.-- par le Tribunal fédéral dans l'arrêt rendu le 28 janvier 2013 pour la procédure en constatation de l'illicéité engagée d'abord devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, puis devant le Tribunal fédéral. Dans ces circonstances, il n'y a pas lieu de lui octroyer une indemnité supplémentaire pour cette procédure, de sorte que cette conclusion doit être rejetée.
6. Les requérants ont sollicité la désignation d'un défenseur d'office pour la présente procédure. Etant donné leurs situations personnelles respectives, il est constant que les requérants ne disposent pas des moyens nécessaires pour assurer convenablement leur défense. L'assistance d'un défenseur apparaît également nécessaire pour sauvegarder leurs intérêts.
Partant, il convient de désigner Maître Christophe Piguet en qualité de défenseur d'office de A_3, Maître Sophie Rodieux en qualité de défenseur d'office de A_4, et Maître Aude Bichovsky en qualité de défenseur d'office de A_2, pour la présente procédure.
7. Sur la base des décomptes des prestations remis à la Cour et dans les limites admises par le Règlement du Tribunal pénal fédéral du 31 août 2010 sur les frais, émoluments, dépens et indemnités de la procédure pénale fédérale (RFPPF; RS 173.713.162), les indemnités allouées aux défenseurs d'office des requérants sont arrêtées comme suit, étant rappelé que le tarif pour l'activité exercée par un défenseur d'office est fixé à CHF 230.-- pour les heures de travail, conformément à la pratique constante de la Cour de céans (cf. arrêts du Tribunal pénal fédéral SK.2012.11 du 14 juin 2012, consid. 12.2; SK.2011.10 du 26 août 2011, consid. 8.1; SK.2010.27 du 12 mai 2011, consid. 6.1; SK.2010.9 du 24 novembre 2010, consid. 5.1; SK.2010.5 du 13 avril 2010, consid. 2.1).
7.1 Selon le décompte de ses prestations du 13 mars 2013, Maître Christophe Piguet a estimé à 3h10 son temps de travail. Il se justifie toutefois de retrancher de ces heures celles consacrées, selon ce décompte, à la transmission les 28 janvier et 12 février 2013 d'une copie aux autres parties des écritures adressées à la Cour de céans. En effet, ce travail de chancellerie que Maître Piguet a estimé à environ 15 minutes ne relève pas de l'activité à proprement parler du défenseur d'office et ne peut pas être inclus dans le temps qu'il a consacré à la cause. Le temps de travail de Maître Piguet est dès lors arrêté, globalement, à 3 heures. Ses honoraires se chiffrent ainsi à CHF 690.-- hors TVA. Quant aux débours, Maître Piguet a chiffré ceux-ci à CHF 33.--, TVA non comprise. Après déduction des frais d'envoi postaux des copies susmentionnées (CHF 6.--), ces débours sont ramenés à CHF 27.-- hors TVA. Partant, l'indemnité revenant à Maître Piguet est arrêtée à CHF 717.-- hors TVA (art. 14 RFPPF ).
7.2 Maître Sophie Rodieux n'a pas adressé de décompte de ses prestations à la Cour. Le montant de l'indemnité lui revenant doit ainsi être fixé selon l'appréciation de la Cour (art. 12 al. 2 et 13 al. 4 RFPPF ). Dans le présent cas, Maître Rodieux a adressé trois écritures - dont deux courriers recommandés - à la Cour les 4 février, 15 février et 22 mars 2013, totalisant quatre pages. Ces écritures ont été transmises peu après celles de Maître Piguet et les motifs énoncés par Maître Rodieux sont presque identiques à ceux de Maître Piguet. Dans ces circonstances, l'activité utilement déployée par Maître Rodieux n'apparaît pas particulièrement significative et il se justifie d'arrêter à 1h45 son temps de travail effectif. Ses honoraires se chiffrent dès lors à CHF 402.50, TVA non comprise. Quant à ses débours, ils sont arrêtés forfaitairement à CHF 12.50 hors TVA. Partant, l'indemnité revenant à Maître Rodieux est arrêtée à CHF 415.-- hors TVA (art. 14 RFPPF ).
7.3 Selon le décompte de ses prestations du 3 avril 2013, Maître Aude Bichovsky a estimé à 3h24 son temps de travail et à CHF 756.-- les honoraires lui revenant à ce titre, TVA non comprise. Il se justifie également de retrancher de ces heures celles consacrées, selon ce décompte, à la transmission les 7, 8 et 18 février, 5, 12, 22 et 27 mars, ainsi que le 3 avril 2013, d'une copie aux autres parties des écritures adressées à la Cour de céans. Ce travail de chancellerie que Maître Bichovsky a estimé à environ 1h30 ne relève pas de l'activité proprement dite du défenseur d'office et ne peut pas être inclus dans le temps qu'elle a consacré à la cause. Le temps de travail de Maître Bichovsky est dès lors arrêté, globalement, à 2 heures. Ses honoraires se chiffrent ainsi à CHF 460.-- hors TVA. Quant aux débours, Maître Bichovsky a chiffré ceux-ci à CHF 8.65 hors TVA. Ce montant paraît justifié. Partant, l'indemnité revenant à Maître Bichovsky est arrêtée à CHF 468.65, TVA non comprise (art. 14 RFPPF ).
7.4 Les demandes déposées par les requérants ayant été partiellement admises, les indemnités versées aux défenseurs d'office sont mises à la charge de la Confédération (art. 135 al. 4 let. a CPP a contrario).
8. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
La Cour décide:
1. Les causes SK.2013.3 , SK.2013.5 et SK.2013.6 sont jointes.
2. La requête du Ministère public de la Confédération tendant à la suspension de la procédure s'agissant des requêtes en réparation du tort moral déposées par A_3 et A_2 est rejetée.
3. Les requêtes en réparation du tort moral déposées par A_3, A_4 et A_2 sont partiellement admises.
4. La Confédération octroie à A_3, A_4 et A_2 un montant de CHF 300.-- chacun au titre de tort moral pour la détention subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 (art. 431 al. 1 CPP ).
5. La requête de A_4 tendant à ce que ses frais de défense relatifs à la procédure en constatation de l'illicéité de la détention subie entre le 29 septembre 2012 et le 30 octobre 2012 soient mis à la charge de la Confédération est rejetée.
6. Maître Christophe Piguet est désigné en qualité de défenseur d'office de A_3 pour la présente procédure.
7. Maître Sophie Rodieux est désignée en qualité de défenseur d'office de A_4 pour la présente procédure.
8. Maître Aude Bichovsky est désignée en qualité de défenseur d'office de A_2 pour la présente procédure.
9. L'indemnité à la charge de la Confédération allouée aux défenseurs d'office est arrêtée comme suit:
9 .1 Maître Christophe Piguet pour la défense d'office de A_3: CHF 717.-- (TVA non comprise);
9.2 Maître Sophie Rodieux pour la défense d'office de A_4: CHF 415.-- (TVA non comprise);
9.3 Maître Aude Bichovsky pour la défense d'office de A_2: CHF 468.65 (TVA non comprise).
10. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
Au nom de la Cour des affaires pénales
du Tribunal pénal fédéral
Le président Le greffier
Cette décision est communiquée à (acte judiciaire):
- Ministère public de la Confédération, Monsieur Félix Reinmann, Procureur fédéral
- Maître Christophe Piguet
- Maître Aude Bichovsky
- Maître Sophie Rodieux
- A_2
- A_3
- A_4
Indication des voies de droit
Recours à la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral
Les ordonnances, les décisions et les actes de procédure de la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral, comme autorité de première instance, à l'exception de ceux concernant la direction de la procédure, peuvent faire l'objet d'un recours motivé et adressé par écrit dans le délai de 10 jours à la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (art. 393 al. 1 let. b et art. 396 al. 1 CPP ; art. 37 al. 1 LOAP ).
Le recours peut être formé pour les motifs suivants: a. violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié; b. constatation incomplète ou erronée de faits; c. inopportunité (art. 393 al. 2 CPP ).
Le défenseur d'office peut recourir devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral dans les 10 jours contre la décision fixant l'indemnité (art. 135 al. 3 let. a CPP et art. 396 al. 1 CPP ; art. 37 al. 1 LOAP ).
Le recours peut être formé pour les motifs suivants: a. violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié; b. constatation incomplète ou erronée de faits; c. inopportunité (art. 393 al. 2 CPP ).
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